Dans les figures de pierre
ALLAN ERWAN BERGER — Ce visage souriant qui nous regarde du haut des ombres, bien au-dessus de la dernière pointe de nos cheveux terreux, est-il du théâtre ou bien des dieux ? Fou, roi, quelle est sa puissance ? Pourquoi son élégance moqueuse m’inquiète-t-elle ? Il est détendu, il sait ce que nous ne savons pas. Fantôme, esprit, ils est trop au large de ce que nous sommes ; ses intentions ne sont pas saisissables !
Celui-là pointe à ras du sol, et ne sourit plus. On a certainement voulu représenter qu’il voit plus que tout autre personnage puisque son troisième œil est ouvert. Mais voilà : lui me semble faible. Il regarde ce que je ne regarde pas, oui, il sait ce que je ne sais pas, oui encore, et il se prend très au sérieux mais il ne m’inquiète pas, non. Car il partage mon sort : il regarde de bas en haut.
Gredins en cintres, fariboles à pigeons, crottés zozos vous êtes au zoo, et l’on vous prend en photo. Ce n’est pas tout à fait la gloire. En plus, vous êtes inaudibles : votre clameur de hooligans est fauchée par le vent. Mais qui donc insultez-vous ? Je ne me sens pas concerné.
Ces enfants terribles font pleurer les grandes fontaines. Ils parlent d’un monde tellement disparu ; chaque goutte d’eau qui passe est comme une année filant sous leurs yeux si sérieux. Ils sont figés dans une splendeur fossile. Voilà les vrais fantômes. Entendez-vous leur musique ?
FIN