7 au Front

Notre cerveau est neurosocial !

 

CAROLLE ANNE DESSUREAULT :
Voici le trosième article sur les richesses incommensurables de notre cerveau!
L’article s’inspire du livre Votre cerveau n’a pas fini de vous étonner, une œuvre présentée par Patrice Van Eersel, rédacteur en chef du magazine Clés. M. Van Eersel interviewe dans son livre cinq chercheurs. L’article présent fait suite à l’entretien avec Boris Cyrulnik, éthologue, et Pierre Bustany, neuropharmacologue qui travaille avec les nouvelles techniques d’imagerie cérébrale.
Un cerveau seul, même sain, ne fonctionne pas. Il lui faut un autre cerveau pour se développer
Les spécialistes du cerveau nous disent aujourd’hui que le cerveau est «neurosocial». Depuis la découverte des neurones miroirs et des neurones en fuseau, les journalistes scientifiques américains disent que notre cerveau fonctionne en «wifi» : exemple : si je discute et que je m’entends bien avec quelqu’un, les mêmes zones s’allumeront dans nos deux cerveaux. De même, si nous nous disputons et nous haïssons.
Les neurones miroirs
La découverte des neurones miroirs a été faite par le neurophysiologue Pr Giacomo Rizzolatti.
Une découverte tout à fait par hasard. Voici en quoi consistait l’expérience. Rizzolatti mit des casques à résonance magnétique à ses singes, des macaques. À un moment donné, il fait une pause et va manger avec les techniciens du labo. Le macaque est là, qui les regarde, avec son casque sur la tête. Les humains ont devant eux un plateau de sandwichs. Rizzolatti tend la main vers un sandwich, quand il entend le cerveau du singe, qui le lorgne attentivement, se mettre à crépiter dans l’amplificateur. Le chercheur arrête son geste. Tend à nouveau la main vers le sandwich. De nouveau, le cerveau du singe crépite. Comme si le geste de l’humain faisait fonctionner le cerveau du macaque.
Rizzolatti va consulter ce que dit l’IRM (image résonance magnétique). Sur l’image que lui envoie la machine à résonance magnétique, c’est la zone F5 du cerveau du singe qui s’allume, le pied de la frontale ascendante, celle qui correspond au geste de LEVER LA MAIN DROITE.
Conclusion : bien que le singe était immobile, il envoyait de l’énergie à son cerveau COMME SI C’ÉTAIT LUI-MÊME qui levait la main droite pour se saisir du sandwich. À noter que ce n’était pas la zone correspondant à la faim qui s’était allumée, mais celle de la main. POURQUOI? Parce que prendre un sandwich pour le singe est un geste signifiant dans son monde. Rizzolatti en avait conclu que s’il avait pris un stylo ou un cigare, la zone F5 du macaque n’aurait pas crépité.
Une autre situation où les zones cérébrales se mettent à résonner au signal d’identification (notamment dans le système limbique) :
avoir un geste dédaigneux ou méprisant (le singe et même le chien le sentent – aussitôt cette zone s’allume et l’animal se soumet à son maître)
si une personne prend un stylo, la zone F5 du singe ne crépite pas, mais si la personne tend la main vers une banane, il crépitera.
Ce serait pour cette raison que les humains peuvent parler.
Un enfant seul ne parle pas. Même s’il dispose de tout ce qu’il faut pour parler, s’il n’y a personne d’autre qui parle autour de lui, il ne parlera pas. Les cerveaux humains produisent des mots autour de l’enfant qui, petit à petit, est stimulé par ces mots, jusqu’au jour où vers l’âge de dix ou douze mois, l’enfant pointera le doigt vers un objet signifiant – comme le singe de Rizzolatti.
L’enfant tente l’aventure de la parole pour que l’autre agisse sur l’objet signifiant. Ce phénomène est appelé la tiercéisation.
L’enfant, trop petit pour attraper un objet, interpelle quelqu’un pour qu’il agisse sur cet objet. Tous les bébés «pointent», contents de partager leur cerveau avec celui de la personne référente (le père ou la mère prend le bébé dans les bras, aussitôt le bébé désigne quelque chose).
Le parent reformule «Ah, oui, tu veux la poupée … un bonbon …. Le hochet … La préparation linguistique se met en place (le geste désignatif est essentiel.)
*UN ENFANT QUI NE DÉSIGNE PAS PAR L’INDEX À PARTIR DE QUATORZE MOIS RISQUE D’AVOIR DES PROBLÈMES DE LANGAGE ….Il n’a pas intégré le «coup linguistique» de la désignation, et ceci est un dépistage précoce d’un trouble de langage.
Grâce probablement aux neurones miroirs, et comme il faut deux cerveaux pour interagir, l’enfant est mis dans une situation où il lui est impossible de ne pas imiter.
En fait, les spécialistes le disent : l’enfant NE PEUT PAS ne pas imiter. Si la mère sourit, il sourit. Pour apprendre à parler, il faut deux cerveaux qui fonctionnent ensemble en système de résonance, afin que l’enfant puisse se préparer au langage
La visualisation provoque des modifications précises de fuseaux neuronaux qui envoient des informations dans le corps. Une représentation mentale peut modifier notre corps
Les mots ont une résonance
Exemple : des skieurs sont à l’entraînement – avant de partir, ils visualisent la descente et se la décrivent dans leur tête. «Là, ça tourne … après il y a une bosse … ensuite je fonce …».
N’est-ce pas ce que nous faisons quand nous mémorisons un trajet pour se rendre à un endroit, en conduisant par exemple?
Quand on branche des capteurs sur la tête des skieurs ci-dessus mentionnés pendant qu’ils font leur exercice de visualisation, celle-ci peut être repérée par la caméra magnétique, qui montrera des réponses de la part des réseaux neuronaux appelés «préparations biologiques à l’action».
Nos pensées, croyances, attitudes et comportements qui constituent notre maillage neuronal peut être modifié par la psychothérapie. Pourquoi? Parce que, selon les spécialistes, quand les gens sont seuls, ils ont tendance à ruminer «J’ai fait ceci, j’ai dit cela, je n’aurais pas dû, etc. …» Seuls, nous pouvons aggraver les processus négatifs tandis que communiquer avec des mots nous force à nous décentrer de nous-mêmes, pour agir sur le monde d’une autre personne.
L’impact du cyber-monde et de son hyper-communication à distance sur nous
Un enfant qui baigne dans le monde intime et plein d’images et de sons de la télé est dans un état SÉCURISÉ, mais de SIDÉRATION. Dans cet état, il n’y a pas de rituel d’interaction. Les rituels d’interaction sont faits de milliers de petites mimiques infraverbales (hochements de tête, de regards, d’intonations de la voix, qui nous font réagir AU CENTIÈME DE SECONDE (grâce à nos neurones miroirs et à nos neurones fuseaux). En un éclair, on sait face à une personne si elle est fâchée, ou si on lui plaît, si nous devons arrêter de parler, ou au contraire, poursuivre …. Les mimiques faciales sont très codantes – la moindre mimique signifie quelque chose.
Les rituels d’interaction sont nombreux – par exemple : on ne dit pas bonjour de la même manière à la gardienne, au patron ou au conducteur d’autobus. C’est CODÉ. Les rôles sociaux sont codés jusqu’au moindre petit signe (bien entendu, c’est la plupart du temps inconscient).
Communiquer avec nos semblables nous fait traiter des milliers de micro-signaux infraverbaux, que le CYBER-HUMAIN NE TRAITE PLUS. Les cyber-machines ont des performances de communication stupéfiantes, mais empêchent les rituels d’interaction émotionnelle, ce qui inhibe l’empathie, cette aptitude à se décentrer de soi-même pour se représenter le monde de l’autre.
Notre communication s’est améliorée, mais la coexistence s’est altérée – une possible explication de la violence des tout-petits
Boris Cyrulnik explique que la communication dans notre cyber-monde s’est considérablement améliorée (en solo), mais que la coexistence s’est altérée.
Il croit possible que la violence des tout-petits provienne de ce fait. Le nouvel univers façonné par nos machines induit une autre manière de faire fonctionner notre cerveau. Les enfants élevés près des aéroports s’endorment bien parce que le bruit des avions, pour eux, est familier. Quand ils se retrouvent dans un endroit silencieux, ils angoissent. Dans leur cerveau, la sécurité liée au bruit constitue une trace cognitive.
Sans doute, allons-nous vers un remodelage complet de nos structures corticales, donc psychiques.
À suivre.

6 réflexions sur “Notre cerveau est neurosocial !

  • Ivernazza

    J’ai assisté il y a quelques années à un brillant exposé sur les neurones mirroirs. Ce volet de l’aspect neurosocial du cerveau est en effet, depuis, une évidence. Les effets d’une absence de confrontation intellectuelle sont assimilables à la déliquescence d’un muscle privé d’exercice. Cela va au demeurant de pair avec la plasticité cérébrale. Cela dit… c’était ce que nos parents et grands parents entendaient lorsqu’ils nous invitaient à nous « frotter » aux autres. Il n’y a rien de bon à attendre d’une mise en retrait durable; seule la confrontation permet d’espérer avancer. C’est là la principale faiblesse du doctrinaire.

    Répondre
    • Carolle Anne Dessureault

      Merci pour votre commentaire. En effet, la confrontation a ses bienfaits, elle nous permet d’élargir nos points de vue, de réfléchir un peu plus.

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      • réfléchir à quoi ? à la connerie obsessionnelle occidentale ambiante ? à la facilité que le pouvoir a sur les peuples pour les rendre plus cons les uns que les autres ? au fait que dans la merde la plus noire et la plus nauséabonde les femmes continuent à pondre histoire de perpétuer les « traditions » les plus abjectes ? à la loi du plus fort qui sera toujours la meilleure ?
        Bonne journée et encore bravo pour votre abnégation à essayer de votre mieux à changer la direction de l’humain vers une paix universelle …..

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  • Carolle Anne Dessureault

    Une paix universelle, ce serait bien, hélas elle n’est pas pour demain.
    Quant à votre scepticisme des bienfaits de la réflexion, c’est votre opinion. Remarquez que votre commentaire est issu de votre manière de pensée, de réfléchir.
    J’en suis arrivée à croire que notre plus grand pouvoir dépend de nos pensées.
    Bonne journée,

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    • « J’en suis arrivée à croire que notre plus grand pouvoir dépend de nos pensées. »
      ….etes vous certaine d’etre « maitre » de vos pensées ?….

      Répondre
      • Carolle Anne Dessureault

        Bonjour Guy,
        Je ne prétends pas être maître de mes pensées, j’affirme que je m’efforce de mettre mon attention sur les pensées que je désire voir se manifester. C’est un travail constant, je le confirme.

        Répondre

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