7-de-lhexagone

Ni Ferry, ni Boulanger ! (1889)

Nous pouvons dire aujourd’hui  ni Macron, ni Lepen !
 

Un appel aux électeurs cosigné par le P.O.F. et la fraction Vaillant des blanquistes.
Citoyens,
La France traverse en ce moment la plus grave des crises qui, depuis la Révolution du siècle dernier, ait mis en jeu son existence. Après cent ans de règne, la bourgeoisie épuisée et corrompue est arrivée à cet état de décomposition et d’infamie qui, en 1789, a fait la ruine de la noblesse et de l’ancien régime. Incapable de gouverner, elle ne sait plus que se diviser en fractions se disputant le pouvoir et la curée de la fortune publique.
Dix-huit années de gaspillage, de prévarications, de guerres lointaines et d’oppression des travailleurs, maintenus dans la même misère, sous le même servage, que par l’empire et la royauté, ont soulevé, contre un régime qui usurpe traîtreusement le nom de République, le mécontentement universel et ranime les espérances liberticides des monarchistes.
Mais la nation, décidée à se délivrer de gouvernants indignes, cherche à se ressaisir et n’a pas encore trouvé sa voie. Abusée, déroutée comme toujours par la vilenie, les défections, les mensonges des politiciens et des intrigants, elle semble hésiter entre les écueils contre lesquels elle se brise périodiquement, entre le parlementarisme et le pouvoir personnel, entre la réaction opportuniste ou radicale et la dictature, entre Ferry et Boulanger.
Pour une partie du peuple affolée de déceptions et de misère, il semble qu’en haine du présent on veuille se rejeter dans le passé, tandis qu’il faut résolument marcher en avant. Il faut nous débarrasser enfin du seul et unique mal qui nous accable, sous la République bourgeoise comme sous la monarchie : la FÉODALITÉ CAPITALISTE, pour laquelle gouvernent aujourd’hui opportunistes et radicaux, pour laquelle, demain, gouvernerait et sabrerait Boulanger.
La République est la forme politique nécessaire de l’affranchissement prolétarien. A tout prix elle doit être conservée. C’est l’impuissance, ce sont les crimes de nos dirigeants soi-disant républicains qui l’ont compromise et l’exposent à l’assaut des monarchistes conjurés et masqués ; c’est leur détestable politique qui a créé le péril boulangiste. Ils doivent disparaître, ils sont jugés et condamnés.
Mais leur chute ne doit pas être la chute du pays dans l’impérialisme, en pleine boue césarienne. Nous ne devons pas tomber de Ferry en Boulanger, mais les clouer au même pilori : ni Ferry, ni Boulanger ! ni rue de Sèze, ni rue Cadet ! La République égalitaire et sociale !
Cette république sociale, ce régime populaire du bien-être, de la liberté pour tous, nous l’aurons si nous savons vouloir, si, conscients que la libération de leur classe, dépouillée et écrasée, ne peut aboutir que par l’expropriation des détenteurs du pouvoir et du capital, les prolétaires, l’élite du prolétariat, répondent à notre appel et se joignent à nous, au Parti socialiste, pour le combat par tous les moyens, contre tous les partis bourgeois, également conservateurs de l’exploitation ouvrière et paysanne.
Citoyens, laissons les divers partis bourgeois aux prises, sans nous mêler autrement de cette lutte que pour les frapper l’un et l’autre ! Rappelons-nous que si opportunistes, radicaux, et boulangistes se disputent aujourd’hui à qui nous régira et nous pillera, ils ne faisaient qu’un en 1871 pour mitrailler les nôtres, comme ils ne feront qu’un pour nous mitrailler nous –mêmes dès que nous tenterons de briser le joug des capitalistes.
Et rallions-nous, tous ceux qui sont las d’impôts, de misère et de faim, tous ceux qui veulent avoir leur part des immenses richesses qu’ils créent pour quelques privilégiés, tous ceux qui veulent enfin, maîtres de la matière et des instruments de production, vivre indépendants et libres, rallions-nous au drapeau de la révolution pour l’émancipation des travailleurs, la paix internationale et la république sociale.
Pour le PARTI OUVRIER :
Crépin ; – S. Dereure ; G. Deville ; – Jules Guesde ; – Paul Lafargue ; – Laîné.
Pour le COMITÉ RÉVOLUTIONNAIRE CENTRAL :
Ed. Vaillant ; – Em. Chauvière ; – F. Susini ; – Feline ; – Landrin ; – Besset ; – Pernin.
Pour le congrès national socialiste de Troyes, le secrétaire :
G. Batisse
Août 1889.
 

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