La crise agite la petite bourgeoisie algérienne
Par Mesloub Khider. Le 21.02.2018. Pour www.les7duquebec.com
L’imminence d’une catastrophe économique se précise chaque jour avec plus d’acuité. Et nos plumitifs apeurés n’épargnent pas leur énergie pour se dépenser dans un sursaut plus qu’hypothétique. Chacun y va de sa plume magique pour se livrer à des prestidigitations analytiques et propositions économiques fantasmagoriques.
Déboussolée par l’intensité de la crise aussi soudaine qu’imprévisible, à ses yeux aveuglés par son opulence acquise à la force de ses louches affaires, la petite bourgeoisie affairiste et intellectuelle algérienne se démène aujourd’hui dans une angoissante agitation pour éviter le chavirement de la barque Algérie. En vrai, pour sauver sa rentière parasitaire existence sociale.
Cyniquement, à l’époque de l’enrichissement inespéré de l’Algérie, où les milliards de dollars coulaient à flots par la grâce de l’enchérissement de cette or noire tirée des entrailles du désert, cette classe oisive flottait dans la mer de l’insouciance à bord de ses richesses achetées clés en main à l’étranger, sans se soucier du développement économique du pays. Sans se préoccuper de la dilapidation des milliards de dollars opérée par le pouvoir.
Aujourd’hui, au moment où la conjoncture économique algérienne subit les tempêtes de la crise mondiale, elle se réveille de sa léthargique pour incriminer et fustiger les dirigeants pour leur gabegie, leur incurie. Dirigeants qu’elle avait pourtant aidés à se hisser au pouvoir.
Affolée par la dégradation de la situation économique algérienne, qui risque assurément de l’emporter, de la prolétariser, de la paupériser, elle s’emploie à se muer en experte pour nous livrer ses recettes économiques en vue de sauver l’Algérie de la banqueroute. De tous temps, la petite bourgeoisie a été animée par une double attitude. D’une part, par sa dévorante ambition d’offrir ses services à la bourgeoisie pour gérer et partager le pouvoir; d’autre part, par la peur que lui inspire les masses populaires en raison de leur propension à se révolter, à se soulever (et surtout par sa crainte de sombrer à la faveur de la crise économique dans la déchéance sociale).
À la première, elle envie son opulence, elle a toujours su lui prodiguer avec obséquiosité tous les conseils pour la préservation de l’ordre établi. Même si elle feint parfois la dissidence dans les périodes de fragilité du pouvoir comme le vit l’Algérie.
Aux secondes, qu’elle méprise souverainement, elle distille constamment le poison de l’obéissance et de la soumission avec des arguments religieux et patriotiques. Qu’elle est par ailleurs la première à piétiner en pataugeant dans la débauche et le cosmopolitisme. Aujourd’hui, installée confortablement dans ses demeures cossues algéroises londoniennes ou parisiennes, elle attend passivement que les soubresauts de l’histoire (qui se déroule sans elle) lui offrent enfin l’occasion de se glisser dans les palais du pouvoir. Une telle classe sans avenir comme celle qu’elle entend remplacer, n’a en vérité, dans cette période de crise mortelle du capitalisme, rien à proposer, sinon la misère généralisée pour tous les Algériens.
C’est la raison pour laquelle il faut se méfier et se défier des discours propagés par les membres de cette classe.
À entendre ces thuriféraires du libéralisme, de simples solutions politiques suffiraient pour venir à bout de la crise. À les lire, un simple changement du personnel politique à la tête de l’État algérien parviendrait à freiner l’enlisement économique. Et ainsi rétablir une situation économique malmenée par l’effritement des cours du pétrole, unique source de revenus. Leur naïveté est criante, leur ignorance navrante. Aucun pouvoir placé à la tête de l’État algérien, même constitué d’un personnel politique compétent et démocratique, élu librement au suffrage universel, n’inverserait la tendance actuelle de l’effondrement économique, même avec la meilleure volonté du monde. Il suffit d’observer la situation catastrophique du Venezuela. Et de nombreux autres pays, comme la Grèce.
En effet, qu’il s’agisse de l’option industrielle ou agricole proposée dans l’affolement et l’urgence comme solution pour développer enfin l’économie algérienne, aucune mesure politique ne peut modifier le cours de la crise. L’industrialisation ne se décrète pas (on connaît le résultat avec l’ère Boumediene). Pareillement pour l’agriculture. De toute manière, la Chine et quelques autres pays émergents, devenus les ateliers du monde, pourvoient amplement à la consommation effrénée de la planète. Et notamment aux besoins de l’Algérie.
L’obstacle quant au développement économique de l’Algérie est paradoxalement économique. Dans une économie capitaliste mondialisée fondée sur le profit, la vente des marchandises produites, la saturation des marchés est déjà suffocante. En effet, la surproduction a atteint des proportions inégalées. D’où l’exacerbation de la concurrence entre les pays capitalistes pour écouler leurs produits. Dans cette guerre économique impitoyable, les nations à l’économie développée anciennement disposent de reins plus solides pour s’accaparer les marchés grâce à la vente de leurs produits compétitifs à des prix défiant toute concurrence. Et ainsi rejeter du marché les pays sous-développés, comme l’Algérie. En vérité, dans le cadre de cette économie capitaliste concurrentielle, il revient moins chère à l’Algérie d’acquérir les marchandises à l’étranger que de les fabriquer sur place. C’est la loi du développement inégal du capitalisme.
En outre, à notre époque où des milliers d’usines à travers le monde ferment pour raison de mévente, avec comme corollaire un chômage massif, la perspective pour l’Algérie, comme le suggèrent ces illusionnistes de se lancer dans le développement industriel est illusoire. De même, pour l’agriculture. S’il fallait développer ces deux secteurs, il aurait fallu l’impulser au lendemain de l’indépendance, à cette période de prospérité économique au niveau international, de croissance soutenue. Aujourd’hui, la crise a obéré cette perspective de développement.
La solution n’est donc pas politique. Encore moins économique dans le cadre du système capitaliste englué dans une crise systémique mortelle. En réalité, sans destruction du capitalisme, aucune solution n’est envisageable. Tous ceux qui ergotent sur les solutions à envisager uniquement dans le cadre de ce mode de production en putréfaction sont des menteurs. Les travailleurs et les masses opprimées algériennes doivent se défier de ses plumitifs au service du Capital.
Le salut du Peuple algérien (qu’il faut différencier du gouvernement algérien et des classes opulentes parasitaires rentières), ne viendra pas de ces plumitifs illusionnistes déconnectés des réalités sociales mais, par ailleurs, les yeux toujours rivés vers les cimes du pouvoir.
Le peuple doit prendre son destin en main, s’organiser pour lutter en dehors des structures politiques inféodées au pouvoir et des institutions syndicales établies. Pour instaurer une société débarrassée du profit, de la marchandise, de l’argent, de l’État, pour établir une économie produisant pour la satisfaction des besoins humains. Et non le profit. En Algérie, comme à l’échelle de la planète. Peut-être que le salut de l’Humanité viendrait-il de l’Algérie, par l’exemple d’une nouvelle Révolution qu’elle mènerait, cette fois-ci, jusqu’à son terme. Une Révolution glorieuse, victorieuse, joyeuse. Qui balayerait définitivement toutes les injustices, les oppressions, les exploitations, les guerres, les famines. Qui donnerait naissance à une Communauté Humaine Universelle, débarrassée des classes, des États, des frontières.
« La force du régime réside en notre faiblesse » comme le disait le grand Révolutionnaire français Auguste Blanqui : « Mais pour les prolétaires qui se laissent amuser par des promenades ridicules dans les rues, par des plantations d’arbres de liberté, par des phrases sonores d’avocat, il y aura de l’eau bénite d’abord, des injures ensuite, enfin, de la mitraille, de la misère toujours ! » (…) “Lorsqu’on rêve tout seul, ce n’est qu’un rêve. Alors que lorsqu’on rêve à plusieurs, c’est déjà une réalité. L’utopie partagée, c’est le ressort de l’Histoire.”
Mesloub Khider
@ l’auteur quelques remarques amicales
1) Tu écris » Déboussolée par l’intensité de la crise aussi soudaine qu’imprévisible,
2) Tu écris » sans se soucier du développement économique du pays. Sans se préoccuper de la dilapidation des milliards de dollars opérée par le pouvoir.
3) Tu écris : « sans se soucier du développement économique du pays. Sans se préoccuper de la dilapidation des milliards de dollars opérée par le pouvoir.
4) Tu écris « La solution n’est donc pas politique.
5) Tu écris : « Le peuple doit prendre son destin en main,
6) Tu écris : « La force du régime réside en notre faiblesse » comme le disait le grand Révolutionnaire français Auguste Blanqui :
Merci pour ton texte très militant