CICE: Quand on aime les patrons, on ne compte pas

Recherche menée par Robert Gil

 travailleurs« Un scandale d’État ? » titre le quotidien économique en ligne la Tribune à propos du CICE. C’est dire qu’il y a matière à vraiment s’interroger sur une politique qui a fait pleuvoir les milliards sur les entreprises.

Par Claudio Buttinelli cet article est disponible  en anglais, en italien et en espagnole ici: Articles du 27 Aout 2023

 Le crédit d’impôt pour la compétitivité et l’emploi (CICE) a été mis en place en janvier 2013 après le rapport sur la compétitivité produit par Louis Gallois. Depuis, ça a été le silence radio du côté gouvernemental sur son impact. Pourtant les milliards pleuvent : de 11,3 milliards d’euros à près de 20 milliards d’euros en 2015. Le montant des sommes récupérables par les entreprises pour 2013, 2014 et 2015 s’élève à 48 milliards d’euros qui viennent s’ajouter aux dizaines de milliards d’aides déjà accordées aux entreprises : compensation aux 35 heures, crédit impôt recherche, allégements multiples…

 Open bar pour les patrons

 Le crédit d’impôt auquel a droit chaque entreprise est fondé sur la masse des salaires inférieurs à 2,5 SMIC. D’après la loi, les entreprises doivent utiliser le CICE pour investir, embaucher ou conquérir de nouveaux marchés. Néanmoins, les instructions transmises du ministère de l’Économie à l’administration fiscale en juillet 2013 stipulent que l’utilisation du CICE ne sera pas contrôlée par l’administration fiscale. Les entreprises ont donc en fait les mains libres pour faire ce qu’elles veulent.

 En mars 2016, l’émission Spécial Investigation sur Canal plus portait notamment sur le CICE et analyse l’exemple de Radiall, l’entreprise du patron du Medef, Pierre Gattaz. Celle-ci a empoché plusieurs millions d’euros du CICE mais sans créer aucun emploi. Sur le commerce extérieur, non plus, les effets ne sont pas probants, d’autant plus que le dispositif concerne en fait surtout des emplois non directement soumis à la concurrence étrangère : ainsi La Poste a largement bénéficié du CICE… ce qui ne l’empêche pas de supprimer des emplois.

 Plusieurs années après la mise en œuvre de la mesure, il n’existe toujours aucune évaluation officielle en dehors de déclarations triomphalistes du gouvernement. Un rapport d’une commission du Sénat rédigé par Marie-France Beaufils, sénatrice communiste, et publié mardi 20 juillet, revient sur le dossier.

Un cadeau sans contrepartie

Il rappelle d’abord que le CICE, qui devait permettre de favoriser le redressement de la compétitivité de l’industrie française a largement raté sa cible : le secteur manufacturier capte seulement 19,4 % du crédit en 2014 contre 19,2 % pour le commerce. Reprenant des estimations produites par un organisme d’étude, le rapport du Sénat estime que le crédit d’impôt a permis de maintenir 125 000 emplois. C’est cher de l’emploi maintenu : 160 000 euros par emploi pour 20 milliards par an. Un calcul simple montre que, pour un coût équivalent, des embauches directes auraient permis de créer environ 3 fois plus d’emplois.

 Par ailleurs, d’après le rapport, le CICE a permis la survie d’entreprises ayant des difficultés de trésorerie, notamment de PME pressurées par leurs gros clients et ne pouvant obtenir de crédit des banques.

 Au total, les dirigeants des entreprises ont fait ce qu’ils voulaient de cette rentrée financière supplémentaire. Quant aux dispositions selon lesquelles « L’entreprise a une obligation de transparence par rapport à l’utilisation du CICE, vis-à-vis des partenaires sociaux », inutile de dire que ça a été du vent. En un mot, le CICE a seulement contribué à la restauration des profits, dont en système capitaliste, patrons et actionnaires disposent librement…

 Henri Wilno

« Des millions de gens ont vu tomber une pomme, Newton est le seul qui se soit demandé pourquoi »…Bernard Baruch

4 réflexions sur “CICE: Quand on aime les patrons, on ne compte pas

  • 27 mai 2018 à 5 h 04 min
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    Et avec Macron de Rothschild il est bien évident que c’est la biture express assurée, non ?
    Tenez, déjà du temps d’Hollandouille, le MEDEF avait rejoué « Prends l’oseille et tire-toi » qu’avait immortalisé Guillaume Meurice dans un instant savoureux « On n’a promis des emplois ? » car c’était ça le deal quand même, à l’origine !
    https://jbl1960blog.wordpress.com/2016/06/04/on-a-promis-des-emplois/

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  • 27 mai 2018 à 13 h 37 min
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    Le sous bassement idéologique de votre article consiste a dire que les entreprises sont d’horribles profiteurs qui avec l’aide de l’etat se goinfrent de l’argent public. Rappelons tout d’abord quelques verités :
    seules, les entreprises créent de la richesse et du PIB. Je répète: seules les entreprises industrielles et autres créent de la richesse et du PIB. L’état ne fait que dépenser l’argent collecté par les impots. Et quand il crée de la richesse par l’intermediaire d’entreprises à caractere privée,je veux dire selon la logique privée qui consiste à gagner de l’argent (style EPIC : établissements public industriel et commercial). Soit ceux ci sont endettés (SNCF 50 Milliards… quand même!), soit ils sont privatisés c’est à dire vendus quand ils sont rentables. (france telecom, autoroutes…
    Or, vous vous êtes peut-être aperçu que la pression fiscale en france est très forte voire la plus forte au monde. Et qu’il s’agit là d’une des raisons de la forte délocalisation des entreprises françaises et de leurs moindre compétitivité dans une concurrence mondialisée.Donc les entreprises, avec les citoyens, payent des impôts qui permettent à l’état d’exister. Mais qui permet que les citoyens aient de l’argent … les entreprises!
    Bon, après avoir ainsi rappelé que l’argent ne tombe pas du ciel. Voyons pour ceux qui seraient né d’hier l’histoire du CICE . Sarkozy , entre autre pour financer son grand emprunt de 5OO Milliards dans sa mandature 2007-2012 avait fortement augmenté les prélèvements obligatoires (les impôts quoi!) . Que croyez vous que fit son successeur une fois arrivé au pouvoir. Donc la première partie de la mandature de Hollande fut une augmentation tout azimut des prélèvements obligatoires. Mais quand même dans l’entourage du personnages il dut exister des entrepreneurs, ou des gens raisonnables qui lui signalèrent , chiffres à l’appui que le taux de marges(c.a.d les bénéfices ) des entreprises n’avait jamais été aussi bas et mettaient en péril leur existence même. D’ou le CICE
    (Credit Impôt pour la Compétitivité des Entreprises). Car si vous ne dégagez pas de marges ( de bénéfices) ,vous ne pouvez pas investir(c’est à dire acheter de nouvelles machines,etc..) pour vous maintenir à flot dans la concurrence. Car la concurrence est féroce ; et elle ne vient pas que de l’éxagone. Alors en France on veut tout contrôler !Mais il est bien sur impossible et pas souhaitable de dire aux entreprises ce qu’elles doivent faire de ce surplus de marges qui n’est quand même et il faut le préciser que moins d’impots. Je répète : Le CICE c’est moins d’impots payés par les entreprises.Donc il n’était pas souhaitable et pas possible de dire aux entreprises ce qu’elles devaient faire de ce moins d’impôt payé.
    Le problème dans ce court article de Mr Wilno c’est qu’il n’aborde justement pas le PROBLEME qui peut se résumer en trois sous problemes.
    1) Le taux de prélèvement exorbitant en France et donc la taille de l’etat et la logique perverse de la redistribution.
    2) La « libre concurrence » mondialisée et donc l’assassinat des entreprises a forte dominante de personnel (de salariés)
    3) La logique économique des avantages comparatifs des etats
    4) Le travail indigent des politiques et autres députés qui pondent lois sur lois sans jamais en subir les conséquences.
    Je dirai pour conclure provisoirement avec De Gaulle:
    arrêtez de faire chier les Français. Arrêtez de pondre sans arret de nouvelles reglementations, de nouvelles contraintes.

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