« Je suis un leader… une question d'attitude »(4)
CAROLLE ANNE DESSUREAULT :
Dans ce quatrième article sur les principes de leadership du livre Je suis un leader de Yvan Gingras, c’est principalement la vision qui est touchée. Vision et objectif sont différents, autant dans le domaine professionnel que personnel. Dans cet article, on comprend que la vision maintenue dans la conscience transcende la personnalité et les limites des conditions de vie.
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« LA VISION »
«Un homme visitait un chantier de construction où travaillaient des briseurs de grosses pierres. Son attention s’arrêta sur un individu qui maugréait et semblait de mauvaise humeur. Il s’approcha et lui demanda : « Que faites-vous ? » « Je brise des pierres, répondit l’homme, c’est laborieux et épuisant. » L’homme continua son chemin et rencontra un deuxième briseur de pierres qui semblait de meilleure humeur, il lui posa la même question : « Que faites-vous ? » La personne répondit : « Je gagne ma vie à briser des pierres. J’aurais aimé faire autre chose, mais c’est tout ce que j’ai trouvé. Ça me permet tout de même de faire vivre ma famille. » Alors que l’homme poursuivait sa marche sur le sentier, il aperçut un autre un briseur de pierres mais alerte et déployant de l’ardeur au travail. Surpris, il s’empressa de lui demander : « Que faites-vous donc pour être aussi énergique ? » L’homme répondit : « Je bâtis une cathédrale. »
L’homme avait un rêve, une vision élargie de son emploi, sa vie prenait un sens ; son attitude et ses comportements étaient conséquents à sa façon de percevoir son métier.
Objectifs de la vision
Bien souvent, la vision commence par un rêve ou une idée surgie de nulle part (intuition). Plusieurs découvertes scientifiques eurent leur origine durant le rêve, durant le sommeil, dont celle de l’ampoule électrique de Thomas Edison pour n’en citer qu’une.
Dans toute entreprise, la vision joue un rôle majeur parce qu’elle canalise et coordonne l’effort de tous les niveaux d’intervention. Il est important d’avoir la même perspective et la même direction. Autrement dit, il faut « tirer la couverte » dans le même sens ; c’est ce qu’apporte la vision.
De plus, la vision stimule le progrès et l’excellence. Lorsque nous avons un objectif de réalisation, c’est à ce moment que le désir et l’intention de bien faire s’éveillent en nous. C’est une ambition saine et légitime qui surgit et nous pousse à s’appliquer dans chacun de nos efforts.
Finalement, la vision assure la survie de l’entreprise. Une étude chez les dirigeants d’entreprises révèle ceci : 50 % d’entre eux développent une vison, alors que 25 % seulement d’entre eux la communiquent efficacement à leurs employés ; 10 % seulement des dirigeants demeurent concentrés sur la vision. À ce dernier point, il faut dire que ces personnes qui font preuve de persévérance – c’est reconnu – se rapprochent du succès.
Curieusement, selon les statistiques canadiennes émises année après année, on constate que 90 % des nouvelles entreprises ne sont plus en affaires après 5 ans. Il est en effet assez bizarre de constater la relation des deux études, complètement indépendantes et réalisées pour des objectifs purement statistiques ou d’information. Cela confirme le principe universel d’expansion selon lequel: « ce sur quoi nous mettons notre attention, prend de l’ampleur ».
Pour donner des exemples concrets de ce principe citons d’abord, Armand Bombardier, qui entreprit, avec un appareil motorisé très rustique en bois, de tenter de rescaper et sauver les gens en détresse dans les endroits inaccessibles en hiver à cause de la neige. Bombardier est maintenant reconnu internationalement et fabrique des locomotives et des wagons de métro. Quoi dire maintenant de Guy Laliberté et Daniel Gauthier qui étaient de simples « cracheurs de feu » performant dans les rues parmi les passants d’un petit village ! Pendant longtemps, Guy Laliberté est le dirigeant du Cirque du soleil.
LE LONG TERME PAR RAPPORT AU COURT TERME
La principale raison qui provoque cette situation d’abandon, de ne pas persévérer avec la vision, est le fait que nous sommes tellement absorbés par le quotidien que nous oublions la vue d’ensemble. Nous faisons de nos actions immédiates une fin en soi au lieu d’une étape vers la réalisation. Or, la vie ne fonctionne pas en ligne droite, mais plutôt comme une rivière sinueuse. Nous pourrions aussi comparer cette situation à un match de hockey ou de football.
La vision est de compter un but. Pour la réaliser, il faut se diriger vers le but adverse. Alors, on fait un plan de match (plan d’affaires) et on met en en place des tactiques et des systèmes (plans d’actions, stratégies) précis en fonction de l’adversaire (la compétition). Toutefois l’adversaire fait la même chose de son côté. Lorsque commence le match, les deux équipes (les entreprises) veulent bien prendre le contrôle (la plus grande part du marché). L’opposition s’installe et bien souvent on doit revenir en arrière pour mieux attaquer. Des ajustements continuels s’imposent. De plus, il faut poser des actions sur l’inspiration du moment (créativité), sans toutefois oublier l’objectif ultime — compter un but. Tous ceux qui ont joué à un bon niveau de compétition sportive savent les conséquences de ne pas suivre le plan de match.
Le risque calculé
Lorsque les obstacles surgissent, les gens qui réussissent prennent des décisions basées sur de l’information solide et des faits. Ce qui veut dire, faire des recherches, faire nos devoirs et s’appliquer. La chance ou le mérite ne seront pas au rendez-vous à moins que nous nous engagions activement.
Lorsque nous nous faisons confiance, nous savons fort bien qu’une fois impliqués et engagés nous serons en mesure de prendre des décisions intelligentes en fonction de ce que la situation exigera et d’ajuster notre gouvernail en cours de route. Une fois dans l’action, l’expérience nous prouve que nous ne savons jamais quelle porte s’ouvrira pour nous. Donc, lorsque les contraintes se manifestent, occupons-nous-en immédiatement, puis reportons rapidement notre attention sur la vision.
Surtout, apprécions chaque contrainte, vivons la comme une aventure. Ne soyons pas attachés à la manière de nous rendre du point A au point B. Il est rare que les gens fassent passer leur objectif à long terme avant leurs besoins à court terme. C’est la façon de nous démarquer.
La vision personnelle et professionnelle
Si l’entreprise a besoin d’une vision pour être prospère, c’est aussi vrai pour le leader en tant qu’individu. Souvenons-nous de l’histoire des trois briseurs de pierres : la vision personnelle est essentielle pour donner un sens à notre vie tant au plan personnel que professionnel, car les deux sont étroitement liés. Nous exerçons un métier ou une profession dans le but de nous accomplir. Ce n’est qu’un moyen et non une fin en soi. C’est le développement personnel qui influence notre comportement professionnel.
Donc, en tant qu’individu, on doit voir grand, en trois dimensions ! Une vision de responsabilité, de discernement et d’harmonie. Cette vision correspond à trois actions précises connaître, viser et agir et viser pour la réalisation.
Ainsi, connaître sans agir est inutile, tout comme connaître sans viser est limitatif. Agir sans connaître est aventureux et risqué (toutefois, il n’est pas nécessaire de tout connaître pour agir) ; donc, agir avec la meilleure information disponible. Agir sans avoir un but (viser) ne mène nulle part, nous tournons en rond, c’est l’équivalent de simplement passer le temps.
Enfin, viser sans connaître entraîne la confusion, parce que nous sommes soumis à des contraintes qui nous rendent étrangers à nous-mêmes, alors que viser (vision) sans agir est une perte de temps, cela se limitant à un rêve qui ne nous permet pas d’accomplir notre destinée. Il n’en reste pas moins que si nous rêvons de quelque chose, nous pouvons certes l’accomplir.
LA VISION D’AFFAIRES
Cette vision autant de nature personnelle que professionnelle nous anime et nous incite à se surpasser et par le fait même à se réaliser. De plus, cette vision personnelle est en relation étroite avec la vision d’affaires où les tâches et les rôles sont distribués en fonction des postes que nous occupons. Qui ne veut d’une personne responsable, possédant un bon jugement et acceptant de collaborer étroitement avec ses compagnons de travail ? Par conséquent, vision personnelle, professionnelle et vision d’affaires sont inter-reliées, la vision d’affaires constituant un moyen chez l’individu pour se réaliser.
Le cycle organisationnel
La vision d’entreprise se réalisera en différentes étapes ; c’est ce qu’on appelle le cycle organisationnel.
Au cours de la première étape du cycle organisationnel, il s’agit d’identifier les principes. Ce travail relève des trois niveaux de l’entreprise soit les exécutifs, les gestionnaires et les employés. Même si la vision est issue des comités de direction, il importe que les employés aient accès à cette étape, si on veut créer le sentiment d’engagement — responsabilité – chez ces derniers. C’est par la compréhension des buts et objectifs de l’entreprise qu’ils peuvent s’imprégner du rôle qu’ils ont à jouer pour les atteindre et du sentiment de contribution personnelle à la progression de l’entreprise, d’où le sentiment d’appartenance.
La deuxième étape consiste à partager les principes et développer les procédures. C’est une étape très importante car une communication efficace conduira à la compréhension de la vision. C’est là que le leader ne se trouve plus seul, qu’il obtient de l’aide et du soutien plutôt que de la négligence et de la résistance. Il encourage les échanges ouverts en discutant régulièrement avec ses collègues ; il accepte les nouvelles idées et les opinions ; ce qui crée une volonté de se séparer du passé.
C’est le moment d’écouter davantage que de parler, surtout en groupe ; le leader s’assure de bien comprendre les intérêts, les besoins et les perspectives des gens. Ce qui semble négatif au début peut s’avérer positif à la fin ; par conséquent, écouter est le meilleur professeur. Il questionne au lieu d’affirmer. Les informations contribueront à la création des plans d’action.
C’est aussi l’opportunité de partager de nouvelles vues et d’utiliser à bon escient la faculté de la critique qui est la lumière de l’intelligence. La critique constructive est l’habileté à faire les bonnes distinctions, à voir les causes et effets clairement, à voir les failles ou la vérité de raisonnements ou d’un plan d’action. C’est saisir les idées importantes dans tout sujet ou événement. Pour en arriver à ce niveau de clairvoyance, il faut écarter la colère. La colère émousse, ternit et aveugle l’intelligence.
La troisième étape est celle de la réalisation où l’accent est mis sur les procédures. Toutefois le danger de négliger les principes est une menace constante. La vigilance s’impose, de la part des gestionnaires en particulier, car ce sont eux qui sont le pont entre les exécutants et les dirigeants qui décident des grandes orientations.
La créativité, l’originalité dans la communication et la répétition du message permettront le progrès et l’excellence dans la phase de la réalisation, plutôt que le déclin. C’est à cette étape où les penseurs de l’entreprise doivent voir à initier un nouveau cycle afin de ne pas atteindre la ligne d’arrivée (finish line).
Cette étape en est donc également une étape de planification (nouveau produit, nouvelle technologie, nouveau concept, nouveau marché…), c’est-à-dire penser en fonction de la vision au lieu de ne considérer que les procédures et les résultats immédiats même s’ils sont satisfaisants.
Il est essentiel de recourir à des méthodes de communication créatives qui feront appel à la cohérence et la consistance des messages répétitifs et des rappels constants. On utilisera, entre autres, des tableaux et des affiches pour visualiser l’information. On fera en sorte de vérifier la compréhension de ceux à qui s’adressent les messages (sondages internes).
La quatrième étape est celle du déclin. On parvient à cette phase lorsque l’attention de tous se relâche. Le résultat en est qu’on rejette les procédures, on oublie les principes. Bien souvent, l’origine du déclin se trouve dans des attitudes et des comportements se manifestant sous forme de stratégies négatives de communication.
Il n’est pas rare de voir pratiquer la manipulation et des stratégies indirectes pour arriver à des fins personnelles, où l’information est contrôlée, voire retenue et biaisée, de façon à en tirer des gains personnels. On cherche des appuis de certains dirigeants en calculant stratégiquement ses relations dans l’entreprise. Puis, on achète l’idée qu’il ne faut révéler la vérité qu’avec beaucoup de précaution et qu’il est toujours préférable de jouer sur les nuances.
Une autre cause est l’indifférence des employés. Elle est souvent causée par le fait qu’ils sont exclus du processus décisionnel. Ils se sentent surtout étrangers, non concernés par tout ce qui survient, alors ils viennent au travail « chercher un chèque. » Ils sont devenus des «disciples du jeudi ».
Surtout, on critique négativement et on cherche continuellement la faute chez les autres. On démontre ainsi un manque de « sens de distinction » en utilisant des jugements absolus plutôt que de relativiser les circonstances.
Les indicateurs du déclin
Les indicateurs du déclin sont des situations telles que l’augmentation des coûts d’opération, la perte de marché, l’augmentation de clients insatisfaits, la baisse de revenus et de profits (ventes), le ralentissement de la production et l’indifférence des employés face aux diminutions de profits.
En fin de compte, il est vrai de dire que les raccourcis ne nous mènent jamais là où on nous l’avait promis. Si le chemin le plus court est la ligne droite, ça ne veut pas nécessairement dire que c’est toujours la meilleure route à emprunter. La vision a besoin de temps pour se réaliser et, parfois, un détour rapporte plus qu’un résultat immédiat. Sachons voir (vision) plus loin que le bout de notre nez.
Développer la vision
Encore une fois, on vous dira qu’il n’est pas donné à tous d’être visionnaires. À cela, je réponds que cette qualité, comme toutes les autres qualités, est déjà dormante en chacun de nous ; il s’agit de faire les efforts requis pour l’éveiller, puis l’entretenir.
Une première chose à faire est de s’intéresser aux idées nouvelles, de ne pas porter de jugements rapides, prendre le temps de s’informer et d’avoir plusieurs points de vue. Il faut également être curieux, avoir le désir d’aller au fond des choses, chercher les causes, ce qui nous permet de mieux évaluer les effets.
Il faut rejeter les préjugés et les idées fixes ; ces attitudes mènent à une vision étroite et immédiate de la vie en général. Il faut demeurer ouvert au changement. L’univers est dynamique et par conséquent en perpétuel changement ; lui résister, c’est de le subir au lieu d’en profiter.
Observons les gens qui réussissent, ceux qui sont réputés pour être des visionnaires, ils vont sûrement nous apprendre quelque chose. Écoutons les autres avec l’intention d’apprendre. Une des meilleures pratiques est de chercher à se développer soi-même, devenir un meilleur individu plus tolérant, détaché et qui accepte que tout ce qu’il vit constitue une leçon à apprendre.
Prendre des décisions est une autre pratique très importante, parce que la décision nous oblige à regarder en avant et à tenter de prévoir les conséquences.
Pratiquer des sports d’équipe est une activité qui nous invite à penser un, deux jeux d’avance ; c’est l’anticipation, qui fait que tous les plus grands joueurs se démarquent dans tous les sports.
Finalement, développons notre intuition par des exercices de visualisation de 10 à 20 minutes par jour. Pour développer la force, il faut travailler en force ; ce n’est pas différent pour la visualisation. Les gens qui connaissent le plus de succès sont-ils rationnels ou intuitifs ? Alors, pourquoi passer des heures et des heures à se perfectionner uniquement sur les connaissances rationnelles comme les logiciels, gestion du temps, gestion, marketing, etc… Où croyez-vous, les grands maîtres, les gourous de la finance et les grands artistes trouvent leur connaissance ? Pensez-vous que leur succès et leur inspiration sont le fruit du hasard ou de la chance ? Pensez-vous qu’ils méditent simplement pour leur image personnelle ? Visualisez pour matérialiser vos rêves… et vous serez capable de mesurer votre réussite. Pratiquez la visualisation et vous verrez…
« En se donnant le DROIT DE VOIR autrement, on se donne le POUVOIR D’AGIR autrement. »
Suivi….
Références « Je suis un leader, une question d’attitude » de Yvan Gingars
Site de l’auteur : www.coachmanagement.ca