La bourgeoisie des derniers jours
Par Nuevo Curso. Le 31.03.2019. Traduction Les7duQuébec.com
Si on lit la presse espagnole, française ou allemande, le Brexit sans accord, de plus en plus probable, se résume en « chaos ». Étoile de la mobilisation de l’année, « les jeunes pour le climat » parle d' »urgence climatique » dans la perspective d’une apocalypse écologique qui serait inévitable, et qui dévasterait la planète en moins d’une génération.
Le Brexit
Commençons par le Brexit. Tous prévoient de longues files d’attente à la frontière en cas de rétablissement des douanes et bien que le gouvernement de May permette dans ce cas toutes les marchandises de passer sans formalité, la crainte d’une pénurie est en réalité encouragée par le gouvernement lui-même dans ses plans pour déclarer un état de siège. En fait, toutes les entreprises exportatrices sont visées et les médias couvrent cet événement depuis un certain temps alors elles se préparent en augmentant leurs stocks en Grande-Bretagne. Les compagnies de navigation ont augmenté les tarifs de fret en conséquence et se préparent à le faire encore plus dans les ports alternatifs si la frontière est saturée. L’UE elle-même prend son temps et met en place des « plans d’urgence ». Et si on y regarde de près, les mêmes articles qui parlent de « chaos », semblent définir le « chaos », comme « passer quelques jours sans acheter ». De plus, la presse allemande insiste de plus en plus sur le fait qu’un Brexit anarchique ne serait pas aussi destructeur pour l’industrie allemande qu’on le disait, et des études économiques semblent indiquer que les hommes d’affaires le pensent aussi.
Et donc ? Est-ce que tout était du théâtre pour provoquer de la peur ? Ou juste un moyen de faire pression au cours des négociations particulièrement difficiles ? Pour la bourgeoisie, le capitalisme est la circulation de l’argent qui reproduit-valorise un capital croissant à chaque cycle du flux monétaire. La croissance des flux de marchandises et la prévisibilité de la plus-value accumulée est ce qui mesure la « santé » de leurs mécanismes d’exploitation du travail salarié. Pour cette raison le fait que les navires partent sans savoir quel tarif de fret et de douane leur sera facturé en arrivant au port de débarquement, leurs paraissent beaucoup plus chaotiques et effrayant que ce qui fait que la valeur du dollar fluctue sauvagement et engendre que pour des millions de pauvres le pain devient inaccessible en Argentine; la guerre s’intensifie au Yémen; la mortalité infantile s’accroit au Pakistan; la décomposition sociale s’étale en Haïti; sans parler de la guerre et des bombardements quotidiens à la frontière entre la Russie et l’Ukraine. En bref: le « chaos » pour la bourgeoisie signifie ne pas savoir comment quantifier les risques dans leurs résultats d’exploitation globaux à la poursuite de l’accumulation de profits. La catastrophe humanitaire, la décomposition sociale extrême et la mort de milliers de personnes chaque jour, si elles n’affectent pas la reproduction du capital, continuent comme si de rien n’était et ne constituent nullement le « chaos » selon eux.
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Mais ne sommes-nous pas accablés par « l’urgence climatique »? La même bourgeoisie ne s’abonne-t-elle pas au « Greta Show » dans les principales capitales européennes ? Alors que Poutine montre fièrement ses petits « activistes du climat » (lui aussi)!!
La vérité est que, d’une part, la bourgeoisie voit le discours de l’apocalypse climatique comme une forme utile et puissante d’encadrement de l’énergie contestataire et d’autre part sa conception du monde lui permet d’exposer un danger catastrophique sans que rien ne remette en question les résultats du système d’exploitation sociale, mais de le renforcer plutôt.
La vieille utopie bourgeoise de croissance exponentielle ininterrompue, entraînée par une machine pneumatique et hydraulique capable d’imprimer une accélération constante aux profits, s’est transformée il y a un siècle, lorsque le système est entré en déclin, quand le développement des forces productives a commencé à ralentir de façon chronique. La transition vers le capitalisme d’État a laissé place à un jeu constant de métaphores sur les « leviers » et les « tables de commande » des gouvernements et des monopoles, qui permettrait une simple « croissance stable », « soutenue et durable », garantie par une nouvelle utopie: la planification.
Le résultat est la légitimation de tous ces sociologues, politologues et climatologues qui construisent des discours politiques en blouse blanche. Un article récent du quotidien « Die Welt » du leader d’un groupe de réflexion danois montre très clairement comment la bourgeoisie calcule les risques et classifie les catastrophes. En passant, il montre bien « l’utilité » du célèbre GIEC des Nations Unies sur les données et études sur lequel il est basé.
La performance limitée de l’Accord de Paris restera dans l’histoire avec des pertes de croissance mondiale de un à deux milliards de dollars par an à partir de 2030, la stratégie politique la plus chère de tous les temps. […] Si nous ne faisons rien pour arrêter le changement climatique, selon des scientifiques de l’ONU, la production économique mondiale dans les années 2070 diminuera de 0,2 à 2%. Cependant, il convient de rappeler que les revenus augmenteront de 300 à 500% d’ici là. Ce à quoi nous devrions nous attendre est loin de la « fin du monde ». Cela équivaut à l’impact d’une seule récession économique au cours des cinquante prochaines années.
Partout, on nous dit que le changement climatique provoque de plus en plus de conditions climatiques extrêmes, comme les ouragans. Mais les climatologues de l’ONU ne trouvent pas « de tendances notables » dans la fréquence des ouragans au cours du siècle dernier. Aux États-Unis, la tendance de tous les ouragans sur le continent a diminué depuis 1900 . Il en va de même pour les ouragans ayant les effets les plus dévastateurs.
Une étude publiée dans la revue Nature montre que les dégâts mondiaux causés par les ouragans représentent environ 0,04% du PIB mondial. Même si le pouvoir destructeur des ouragans augmente considérablement d’ici à 2100 en raison du changement climatique, la prospérité croissante et une adaptabilité accrue signifient que les coûts ne seront que la moitié, soit 0,02% de la valeur de la production mondiale. Depuis 1990, les coûts globaux de toutes les catastrophes liées au climat ont déjà diminué par rapport au PIB.
C’est-à-dire que le coût du changement climatique entraîne de petites pertes dans le cycle d’accumulation si on le compare, par exemple, au sauvetage des banques des dix dernières années, donc il n’y a pas à l’horizon d’apocalypse climatique pour le capitalisme. Si cela se révèle être un désastre pour des millions de personnes qui manquent d’eau ou de ressources essentielles, qui souffrent de famine ou dont la pauvreté – produit d’un capitalisme qui dure trop. Ce sont les dommages dans le capital accumulé et ses flux qui sont évalués. Greta et ses partenaires belges, français, allemands, espagnols et même russes n’alertent pas la bourgeoisie de tout ce qui la met en danger. S’ils lui donnent la parole et l’oreille de la presse avec la même intensité avec laquelle ils nient le danger, c’est parce qu’ils proposent le « syndicat du climat sacré » à une époque où le Mexique et l’Iran inquiètent l’Europe. La lutte des classes se retrouve sur la scène historique.
La bourgeoisie des derniers jours
Les discours de plus en plus apocalyptiques de la bourgeoisie et de l’État, l’alarmisme constant, le « choc » permanent … n’expriment que l’angoisse d’une classe qui jouit d’une longévité anti-historique et anti-humaine. Pour le capital, l’agonie permanente provoquée par l’absence de marchés suffisants, inévitablement accompagnée de rendements décroissants et du manque de placements rentables, est devenue chronique. Et avec eux, la tendance aux crises de plus en plus destructrices, aux tensions commerciales et à la guerre, à la précarisation et à l’appauvrissement est devenue chronique. C’est le capitalisme qui, aujourd’hui, représente un désastre permanent pour l’espèce humaine, c’est pourquoi telle ou telle apocalypse est si tentante pour un masochiste. Mais ne nous leurrons pas, le capitalisme ne quittera pas la scène historique sans réagir, il n’a d’autre but que son dépassement. Il doit être décomposé et seule la classe ouvrière peut le faire.
« …/… Le capitalisme … doit être décomposé et seule la classe ouvrière peut le faire. »
N’est ce pas présomptueux d’aller si vite en besogne ? …
– Que le capitalisme doive subir une restauration de fond en comble est un fait indiscutable.
– Que la classe ouvrière ait les compétences pour ce faire m’apparaît illusoire même si elle oeuvre incontestablement pour un grand nettoyage.
Certes il faut réinventer la société mais encore faut-il avoir quelque chose à substituer au « régime » actuel à bout de souffle. Les images de synthèse Thunberg et Cie sont un leurre articulé par les mêmes acteurs et autres intermittents du spectacle en scène depuis 70 ans.
Si, une fois encore, on place la charrue avant les boeufs, c’est clair qu’on court au chaos. L’effet inverse de celui escompté …
@ Nadine
Ce n’est pas mon avis
1) Le capitalisme ne doit pas être réformer – rénover – réparer de fond en comble = il doit être abolit détruit dans ses rapports de production les plus fondamentaux. Voyez les pays dits socialistes ils ont tenté de rénover le capitalisme de fond en comble et aujourd’hui où en sont-ils avec la propriété privé et Étatique bourgeoise des moyens de production etc… ??
2) La question du remplacement du capitalisme par le communisme prolétarien n’a rien à voir avec la compétence de la classe ouvrière mais tout à voir avec sa détermination – sa mission historique et la nécessité dans laquelle cette classe est enfermée si elle ne veut pas disparaitre corps et bien avec l’ensemble de l’humanité. (bien entendu nous savons que par l’édification du mode de production communiste prolétarien – la classe va disparaitre en terme de rapport de production mais pas en tant que force physique de production)
Merci pour votre post
Robert Bibeau http://www.les7duquebec.com
« … décomposition sociale s’étale en Haïti… » Normal. C’est comme en Colombie. Même en temps de paix et de prospérité, ces pays minables et corrompus seront toujours en décomposition sociale!