Les États Unis perdent l’Asie-Pacifique et leur plan de domination continue d’échouer
Par Matthew Ehret − Le 2 septembre 2019 − Source Fort-Russ. Traduction
On nous accuse d’être complotistes, pessimistes, militaristes et d’appeler à la guerre sur terre à force de l’invoquer. Voici un texte d’un journaliste américain qui cite le secrétaire d’État à la défense des États-Unis et qui exprime sans entourloupette que nos hypothèses sont conformes – je ne dirais pas à nos prédictions – je dirais plutôt à notre lecture matérialiste dialectique de l’évolution incontournable de ce mode de production capitaliste moribond. Oui, l’impérialisme ne parvient plus à assurer la valorisation du capital et en conséquence le suzerain capitaliste étatsunien s’en prend à ses vassaux occidentaux qu’il voudrait liguer dans une sainte alliance contre le dauphin « émergent » asiatique afin de lui reprendre des parts de marché. Et cet affrontement nous mènera tous à la guerre mondiale inévitable. Ce n’est pas un voeu, c’est un aveu. Vous comprendrez par cette lecture la raison pour laquelle la Moyen-Orient n’est plus le centre focal du grand échiquier mondial comme nous l’affirmons depuis deux ans. Robert Bibeau. http://www.les7duquebec.com
Travaillant toujours un peu plus fort que la plupart des gens pour rester un peu en deçà de la réalité, le secrétaire américain à la Défense, Mark Esper, a fait des remarques particulièrement franches cette semaine sur le fait que le retrait étasunien du traité INF était fait pour assembler une force militaire contre la Chine.
S’adressant à Fox le 21 août, Esper a dit : « Nous voulons nous assurer que nous avons la capacité, comme il se doit, de décourager les mauvais comportements chinois… La Chine est la priorité numéro un de ce département. C’est décrit dans la stratégie de défense nationale, pourquoi nous pensons qu’il s’agit d’un concurrent stratégique à long terme et qui mène une campagne de maximisation, si vous voulez, dans tout le théâtre Indo-Pacifique, que ce soit sur le plan politique, économique ou militaire… »
Faisant écho au Dr Folamour de Kubrick, Esper a déclaré qu’il y a « un basculement prévu » d’un « conflit de faible intensité qui dure depuis 18 ans à des conflits de forte intensité contre des concurrents comme la Russie et la Chine ».
Pendant que des exercices militaires américains dans le Pacifique se déroulaient aux portes de la Chine à un rythme accéléré depuis l’annonce du pivot vers l’Asie en 2011, avec pour le dernier semestre, Talisman Sabre, des manœuvres militaires entre les États-Unis et l’Australie et Ulchi Freedom, des jeux de guerre entre les États-Unis et la Corée du Sud, la Chine n’est pas restée à ne rien faire.
En réponse à la vaste gamme d’infrastructures militaires américaines construites à la frontière chinoise, la Chine a réagi en dévoilant des technologies de pointe en matière de missiles antimissiles balistiques, y compris des armes hypersoniques pour contrer la menace américaine. Une grande partie de la réponse défensive de la Chine comprend le système antimissile russe S400, également adopté par l’Inde, la Turquie, la Syrie et les Émirats arabes unis comme système unifié qui rend les systèmes américains THAAD et ABM impotents et obsolètes. Bien que cela ne soit pas confirmé, les généraux américains auraient paniqué à l’idée que la Chine soit en train de construire une base navale conjointe Chine-Cambodge dans la province de Preah Sihanouk, base qui donnerait à la Chine un accès facile aux eaux côtières du golfe de Thaïlande et à la Mer de Chine méridionale.
L’impuissance militaire des États-Unis face aux nouvelles technologies de pointe dévoilées par la Russie et la Chine a été soulignée dans un récent rapport publié par le US Studies Center de l’Université de Sydney qui déclarait que « l’Amérique ne jouit plus de la primauté militaire dans la région Indo-Pacifique et sa capacité à maintenir un rapport de force favorable est de plus en plus aléatoire ». Faisant référence aux armes antiaériennes avancées de la Chine, le rapport indique que « les systèmes de contre-intervention chinois ont sapé la capacité de l’Amérique à projeter son pouvoir dans la région Indo-Pacifique « , ce qui, selon les auteurs, pourrait rendre les forces étasuniennes impuissantes dès les huit premières heures de conflit.
Plutôt que d’utiliser ces informations pour proposer une nouvelle doctrine de sécurité fondée sur la coopération et le dialogue, comme la Chine l’a proposé à maintes reprises, les auteurs du rapport se joignent au monde imaginaire d’Esper pour réclamer une stratégie de « défense collective » semblable à une OTAN du Pacifique, qui permettrait à tous les alliés des États-Unis dans le Pacifique de se joindre à une alliance militaire anti-chinoise et allégerait les États-Unis du fardeau qui lui revient de porter seule la Troisième Guerre mondiale.
Nous savons que cette OTAN du Pacifique fait l’objet de discussions depuis un certain temps et qu’elle a été au cœur des récents exercices navals menés dans le Pacifique entre les États-Unis, l’Australie, le Japon et la Corée du Sud en mai 2019, au cours desquels 3000 soldats, deux destroyers japonais, un destroyer sud-coréen et deux frégates australiennes ont participé à leur premier exercice de guerre commun. Ces perspectives ont également été à l’origine de l’exercice naval du mois d’août organisé par la Malaisie, les États-Unis, la Nouvelle-Zélande et l’Australie à Guam. Les États-Unis ont 54 000 soldats au Japon et 28 000 en Corée du Sud.
Lorsque la Chine et la Russie ont effectué leur première patrouille aérienne conjointe à long rayon d’action dans la région Asie-Pacifique en juillet 2019, la Corée du Sud et le Japon ont lancé leurs avions de chasse pour intercepter les avions chinois et russes, la Corée du Sud ayant tiré des centaines de coups de semonce. Soutenus par les États-Unis, les deux pays asiatiques ont crié haut et fort (et sans preuve) que leur espace aérien avait été violé.
En réponse aux commentaires belliqueux d’Esper et du rapport australien, le ministère chinois des Affaires étrangères a déclaré : « La Chine est fermement sur la voie du développement pacifique et notre politique de défense nationale est de nature défensive ». La Chine est allée plus loin en fournissant un cadre de coopération dans le cadre de l’initiative des Nouvelles Routes de la Soie, qui s’articule autour du brillant programme politique consistant à apporter des solutions diplomatiques aux points de tension géopolitiques grâce à des stratégies de développement économique qui enrichissent tous les participants. Cette approche a permis à la Chine de se venger en désamorçant les tensions avec d’autres nations qui revendiquent des territoires dans la mer de Chine méridionale, en particulier sous l’orientation pro-Route de la Soie du président malais, le Dr Mahathir Mohammed et du président philippin, Duterte.
Ne se sentant pas à l’aise dans le feu croisé d’un échange nucléaire, le Japon et la Corée du Sud sont également allés jusqu’à créer un nouvel accord de coopération trilatéral avec la Chine, le 21 août, sur la base de « projets d’échange de prochaine génération dans trois pays… Nous espérons discuter de partenariats et d’affaires régionales d’avenir, dont la Corée du Nord ». L’accord permet également des investissements internationaux conjoints dans tous les pays opérant dans le cadre de la Nouvelle Route de la Soie. Ensemble, ces trois pays représentent plus d’un quart de la productivité mondiale et ont tout à gagner à travailler ensemble.
Ces responsables militaires américains qui font la promotion de la doctrine obsolète de domination totale dansent sur l’air d’une chanson qui a cessé d’être jouée depuis quelque temps. La Russie et la Chine ont changé les règles du jeu à une multitude de niveaux et peuvent réagir avec une force suffisante à toute attaque contre leur sol, grâce à des armes de dernière génération dont les conséquences iront au-delà de tout ce que les théoriciens occidentaux enfermés dans leur tour d’ivoire peuvent imaginer.
Le navire de l’histoire du monde a changé de cap et s’est éloigné des rapides de la guerre et de l’effondrement économique, alors que l’initiative de la Nouvelle Route de la Soie atteint des proportions inimaginables il y a quelques années, et que les mois à venir seront décisifs car l’Occident est en pleine introspection et doit décider quel avenir il envisage d’avoir. (L’Europe de l’Union NDLR).
Matthew Ehret
Traduit par Wayan, relu par San pour le Saker Francophone
En dépit de ces informations plus ou moins connues du grand public, personnellement je pense plutôt que les états-unis justement font tout pour ne pas perdre le pacifique, et que Chinois et Russes tentent de s’y interposer et se livrent à l’exercice habituel de l’axe Moscou – Pékin qui n’a au fond plus rien d’idéologiquement aligné sur leur passé progressiste et solidaire, mais un axe de coopération stratégique, politique, et de technologie militaire qui comble cette transition et veille encore à barer la route à l’oncle Sam avec les alliances et les moyens encore possibles dans le coin. Mais à y regarder de près, la Chine n’a pratiquement plus besoin de Moscou surtout en ce qui concerne ses visées individuelles sur les marchés de l’Asie, et ses revendications territoriales sur la mer de Chine, ni que Moscou représente un partenaire commercial de premier ordre de Pékin, bref, cette dernière aimerait surtout devenir la leader dans cette nouvelle alliance avec les russes et non pas Moscou comme au temps de la guerre froide ! Des tensions aussi qui n’excluent pas le différend frontalier entre les deux pays, ou la mauvaise posture de Moscou suite aux sanctions américaines depuis la Crimée et l’Ukraine.
Je crois donc que confronter les états-unis militairement ne fait pas partie des plans de la Chine, elle cherche au contraire à bâtir une alliance stratégique avec ses derniers malgré tous les obstacles posés par Trump, comme elle cherche à démontrer aux Américains et russes qu’elle soit devenue un acteur clé indispensable pour la stabilité en Asie à travers son projet de route de la soie ! et de manière surprenante, la militarisation de la Chine est à mon avis menée consciemment par le pouvoir Chinois pour prévenir que Moscou ou ses alliés ne se retournent contre elle tout comme les alliés des états-unis dans le coin pourraient être tentés de faire par rapport à ses revendications territoriales en mer de chine. La Chine assurément à encore beaucoup de chemin à faire pour régler ses problèmes de souveraineté, ou se mettre à niveau sur le plan militaire, ni qu’elle soit en mesure de mener plusieurs guerres sur plusieurs fronts, ou qu’elle a les moyens de jouer à Terminator comme certains exagèrent ses moyens militaires et technologiques ! Alors l’Asie-pacifique et la Chine n’est pas le nid de guêpes trop dangereux et surarmé que certains analystes occidentaux essaient de nous dépeindre encore, la Chine est devenue un modèle capitaliste et une locomotive économique pour les pays de la région et même l’Australie ou la Nouvelle-Zélande ont consentis de bonnes parts de leurs économies à la Chine au lieu du Japon et des états-unis.
La guerre commerciale que déploie l’administration Trump envers la Chine fait partie des éléments qui vont fixer un nouveau paysage commercial entre Chine et États-unis et déterminer une alliance gigantesque qui se dessine et dont on ignore quelle part elle attribuera pour les européens. La seule et véritable menace que je vois possible pour ma part …pour un troisième conflit mondial éventuel serait justement si cette alliance est empêchée par les russes encore sous sanctions, les Coréens du Nord ou l’éclatement d’un conflit majeur entre alliés américains dans le coins et ceux de Moscou ! et si ça devait arriver à cause d’un Poutine toujours pas convaincu de sa véritable place et dimension dans ce nouvel ordre mondial de géants plus grands que lui, ça risque d’être moche comme ça risque d’anéantir le dernier espoir de la fédération de Russie de rester unie, ou de revendiquer l’arctique comme elle le fait maintenant !