Le plus souvent, la petite-bourgeoisie domine amplement ces mouvements spontanés. Tandis que parfois la classe ouvrière tente de matérialiser sa présence, avec plus ou moins de succès. Outre les divergences en matière revendicative, ces deux tendances se distinguent par le choix de l’espace de lutte. Les mouvements démocratiques bourgeois expriment ordinairement leurs revendications par des manifestations-processions directement opérées dans la rue, souvent de manière pacifique, parfois au moyen d’affrontements violents avec les appareils répressifs de l’État, comme avec l’exemple des Gilets jaunes en France. Par contre, les mouvements ouvriers se mobilisent sur leurs lieux de travail, notamment par des débrayages spontanés, des grèves, des occupations, mais aussi, depuis un certain temps, par le blocage des axes routiers et des moyens de transport des marchandises (ports, gares, aéroports), et des entreprises névralgiques assurant l’approvisionnement en énergie, source vitale pour le bon fonctionnement de l’économie.


 
Analysons les divergences de lutte entre ces deux mouvements de révolte portés par deux classes sociales distinctes, aux intérêts diamétralement opposés et aux perspectives politiques, économiques et sociales antinomiques.
De manière générale, les mouvements démocratiques bourgeois se singularisent par leur apparition spontanée, leur inorganisation politique, leur absence de structure de médiation, leur refus de promotion de quelque leader, à l’exemple des soulèvements de Hongkong,  de l’Algérie. Œuvres d’une accumulation de récriminations larvées et de colère contenue, fermentées par la paupérisation accélérée de la majorité de leurs membres, ces mouvements explosent souvent de manière aussi soudaine qu’inattendue. Parfois sur des prétextes futiles. Dès leur éruption, ces soulèvements affichent une méfiance instinctive à l’égard des partis politiques classiques, un rejet viscéral de la délégation de pouvoir et corrélativement une opposition farouche à toute structuration organisationnelle. De surcroît, ils font reposer leur lutte sur une armature spécifiquement politique sur laquelle ils échafaudent, dans l’improvisation, des programmes minimalistes incohérents et décousus déclinés sous forme d’un catalogue citoyen dans lequel chaque membre formule ses doléances correspondant à ses intérêts personnels immédiats ( expression d’une classe petite-bourgeoise atomisée mue uniquement par la défense des intérêts individuels égoïstes de chacun  de ses membres, avide de promotion sociale et d’enrichissement personnel au sein de la société capitaliste qu’il idéalise). Néanmoins, en dépit de leur expression spontanée, chaotique et anarchique, ces revendications correspondent concrètement aux besoins sociaux objectivés par cette classe sociale fragmentée de plus  en plus précarisée.
 
Les soulèvements ouvriers, quant à eux, fondent leurs activités combatives sur un substrat social homogène affirmé, sur la cohésion de leurs revendications sociales et économiques longuement élaborées et politiquement formulées moyennant un programme collectivement adopté et unanimement validé. Du moins, cette réalité politique ouvrière a prévalu  jusqu’à récemment, résultante de la longue expérience d’organisation militante prolétarienne sous divers appareils politiques et syndicaux historiques (XIXe et XXe siècles).  
Contrairement aux mouvements démocratiques bourgeois, dépourvus de structuration cohérente  et pérenne. De là s’explique l’hétérogénéité de leurs mouvements, composés de différentes catégories sociales, aujourd’hui en butte à la précarisation et à la paupérisation générale. Autrement dit, ces soulèvements constituent des mouvements interclassistes aux revendications hétéroclites, parfois insolites. De manière générale, ces mouvements versent dans la fustigation hystérique irrationnelle mais jamais dans l’élaboration politique constructive. Frustrés par leur déclassement social, ils se contentent de fustiger le système politique rendu responsable de leur dégradation sociale ou de la corruption de la démocratie. Cependant, ces mouvements réformistes se posent en alternative à la révolution, seule voie  apte à renverser le mode de production capitaliste. Ce mode  de production véritable responsable de leur déclassement, de leur déchéance sociale, de la déliquescence du système politique. Le plus souvent, ces mouvements de protestation bourgeois s’érigent comme une structure nébuleuse prétendument située au-dessus des classes, défendant l’intérêt général citoyen (un remake des révolutions démocratiques bourgeoises antiaristocratiques féodales, au cours desquelles la bourgeoisie prétendait luttait dans l’intérêt des ouvriers, des artisans et des paysans, pour les transformer en « hommes libres » au sein de la nouvelle dictature capitaliste).
En réalité, ces mouvements démocratiques bourgeois vilipendent le despotisme politique de l’État du capital mais jamais ne remettent en cause la dictature économique du capital sur l’ensemble de la société, ni ne questionnent l’incapacité de ce mode de production à résoudre ses contradictions fondamentales, ni ne s’offusquent de l’inaptitude organique de ce mode de production capitaliste à satisfaire les besoins sociaux vitaux de l’humanité, ni ne manifestent leur hostilité contre les multiples récurrentes guerres impérialistes livrées par leurs pays respectifs dans différentes régions du monde. Ce sont les idiots heureux du village planétaire capitaliste.
Au reste, avec les mouvements  démocratiques bourgeois, bien qu’ils peuvent adopter une certaine radicalité en matière de lutte, à l’exemple du Mouvement des Gilets jaunes en France(1)  leur objectif principal demeure constamment identique : devenir des interlocuteurs reconnus par l’État, parvenir à ménager leur intégration au sein du système afin de remplir leur rôle de médiation en matière de réformes, de restructurations économiques, de refonte politique,  mais dans le cadre du  système économique capitaliste moribond, du maintien des structures étatiques, de la pérennisation du capital, et au sein d’instances représentatives bourgeoises « rénovées » grâce à l’intégration d’une nouvelle élite politique issue évidemment de ces mouvements dirigés par des petits-bourgeois aspirant aux plus hautes fonctions. Nouvelle élite censément être plus intègre et plus compétente que les apparatchiks précédents. Au vrai, ces politiciens vénaux sont dévorés d’ambition. Leur seule aspiration est de briguer les sinécures parlementaires et gouvernementales, de convoiter les multiples fructueuses prébendes étatiques.
Au reste, leur ambition politique primordiale est de suppléer à la défaillance des corps intermédiaires corrompus et disqualifiés, sans transformation aucune de l’organisation sociétale, du système économique (de production et d’échange) sur lequel repose l’organisation sociale. Ils se présentent comme les meilleurs gardiens du temple du capital, à savoir l’État ; les sauveurs suprêmes de l’ordre public travaillé violemment par la recrudescence de la lutte des classes ; les protecteurs patentés des institutions étatiques et politiques menacées d’éclatement. Convaincus d’être pourvus d’exceptionnelles compétences, impatients d’offrir leur servile coopération , ils déploient toute leur énergie managériale collaboratrice et leur vénale ferveur libérale pour s’imposer comme les nouveaux partenaires rajeunis et « modernisés » du capital en voie de bouleversement ; les novateurs agents sociaux actifs habilités pour accompagner « efficacement » le capital national (algérien) dans son adaptation aux exigences du capitalisme international secoué par de multiples crises. 
De toute évidence, avec les mouvements démocratiques bourgeois, le système n’est pas attaqué dans ses fondements économiques. Les rapports sociaux capitalistes ne sont pas remis en cause. Au contraire. Seuls les rouages superficiels de l’État sont incriminés, les symboles du pouvoir, contestés. Au reste, leur principale occupation politique est de mobiliser la « société civile » ( lambeaux d’individualités atomisées, tétanisées par la crise, crétinisés par l’idéologie dominante) pour contraindre l’État à restaurer le lien social et politique rompu par la crise systémique, par le biais de la constitution de nouvelles instances dirigeantes supposément plus démocratiques et  incorruptibles, pour assurer, selon leurs prétentions, la gouvernance de manière plus transparente et efficiente, de garantir une meilleure redistribution des richesses (dans une période par ailleurs où le capitalisme, en pleine crise systémique, est réduit à distribuer uniquement la misère, le chômage, les guerres et, en guise  de nourriture, les psychotropes). (Ces lilliputiens de la politique ne parviennent pas à comprendre que l’arbre est en pleine putréfaction et qu’il est inutile d’épandre des pesticides sur ses fruits purifiés).
Tout cela, dans le maintien de la démocratie représentative bourgeoise renforcée et surtout la préservation de l’ordre économique dominant. Pour ces mouvements, la contestation se focalise uniquement sur quelques aspects défaillants de la domination politique des classes dirigeantes. De là vient qu’ils cantonnent leurs incriminations sur un dirigeant politique, sur un chef d’État, sur une faction du régime rendue responsable de la crise. Sur un clan du pouvoir accusé de corruption. Sur l’institution militaire, commode bouc émissaire, accablée de toutes les injustices. Parfois, plus radicalement, sur le « système », mais un système abstrait, aux contours jamais définis.
Aussi se bornent-ils à réclamer des ajustements du « système », du régime, sans remettre en cause radicalement l’ensemble de l’ordre dominant ; d’exiger une refondation politique, dans une perspective qui aspire à l’élargissement des libertés (formelles et illusoires) mais conditionnées à la préservation de la paix sociale imposée par l’État, autrement dit à la conservation de l’ordre social inégalitaire, de la misère ; à la perpétuation de l’exploitation et de l’oppression infligées par le capital.
Au vrai, les refondations préconisées par ces mouvements de soulèvements petits-bourgeois n’aboutissent à terme qu’au renforcement de la domination étatique sur la classe prolétarienne, à la perpétuation du système capitaliste dominant, dirigé par une nouvelle élite politique (aussi vénale que la précédente) propulsée aux commandes de l’État à faveur des soulèvements sociaux, avec le soutien naïf des classes populaires pleines d’illusions sur les nouveaux locataires du pouvoir dictatorial et mafieux immuable expurgé opportunément de quelques lampistes jetés en pâture à la populace pour apaiser sa faim scélérate de vengeance mais sûrement pas pour étancher sa soif politique de justice sociale.
Au demeurant, lors des manifestations, en dépit de la participation de nombreux prolétaires, les protestations ne prennent jamais un caractère radicalement insurrectionnel. Avec les mouvements démocratiques bourgeois les confrontations se restreignent aux estocades contre les « incartades » et les « effigies » officiels de l’État. Ces coups d’épée (dans l’eau) ciblent uniquement quelques personnalités du pouvoir ou une clique du régime, victimes expiatoires toute désignées pour être sacrifiées par un émergent clan du pouvoir. Les mouvements démocratiques bourgeois investissent principalement la rue pour protester contre les symboles de l’Exécutif. Jamais pour renverser l’ordre existant. Ils n’entravent pas le processus de valorisation et d’accumulation du capital, ossature de la reproduction du système.  Au mieux, ils versent dans la culture émeutière, celle qui sème la violence urbaine gratuite, pour provoquer et justifier contre l’ensemble de la population la répression étatique réactionnaire. Aussi, par leur stratégie et leurs tactiques de lutte bourgeoises renforcent-ils en vrai les assises de l’État et le pouvoir du capital. Mais jamais ils contribuent à l’émancipation de la classe prolétarienne qu’ils méprisent souverainement.
Quoi qu’il en soit, les luttes réformistes bourgeoises ont correspondu à une période historique aujourd’hui largement révolue, illustrée par l’inefficience du parlementarisme depuis longtemps disqualifié, par l’incapacité du système capitaliste d’accorder de nouvelles concessions économiques et sociales aux revendications, du fait de la crise systémique en cours. La démocratie bourgeoise (ses institutions parlementaires, régionales, communales, syndicales) n’est plus en mesure de négocier quelque aménagement social progressiste, quelque réforme économique salutaire avec le capital qui exerce de fait le pouvoir concret, qui gouverne réellement la société, sans médiateurs politiques et sociaux, devenus superfétatoires dans cette conjoncture de crise systémique et de guerre économique exigeant l’enrégimentement de la population nationale dans la perspective de l’imminente conflagration armée généralisée.


 
Au vrai, le capital a délaissé depuis longtemps le terrain politique. Pas étonnant qu’il soit investi, depuis quelques années, exclusivement par des politiciens sans envergure, des parasites poux-pulistes. Le capital, en butte à une crise profonde, préfère occuper le champ de la guerre commerciale, monétaire, financière, économique, et transformer chaque « citoyen » en soldat pour la future confrontation armée généralisée. Pour le capital, la démocratie est devenue une serpillière tout juste utile à tenter de nettoyer les détritus politiques de la société polluée par la corruption, un paillasson sur lequel il essuie ses bottes belliqueuses bruissant de détonations guerrières.
En revanche, historiquement, le mouvement ouvrier transcende d’emblée le régime démocratique parlementaire et vise non seulement le renversement du régime autoritaire ou « démocratique bourgeois » mais la destruction de l’État (de tous les États), afin d’instaurer une société coopérative fédérative sans classes sociales antagonistes, sans argent, sans exploitation, sans oppression, sans aliénation. Autre particularité : le soulèvement populaire ouvrier (qui ne peut être populiste sans se trahir lui-même) prend directement d’assaut les usines, les ateliers, les chantiers, les mines, les bâtiments institutionnels de l’État bourgeois, les prisons, les casernes, les établissements étatiques. Au cours de la lutte, le prolétariat s’impose comme principale tâche de transformer le soulèvement populiste (interclasses) initial en mouvement insurrectionnel ouvrier, sous peine de sclérose, de paralysie, voire de récupération du mouvement par la petite-bourgeoisie toujours en embuscade pour confisquer et phagocyter tout mouvement social de révolte à son profit lucratif.

C’est ce qui est advenue du Mouvement des Gilets jaunes comme nous l’avons diagnostiqué dans notre ouvrage Autopsie du Mouvement des Gilets jaunes (1).
Cette prise en charge prolétarienne du mouvement insurrectionnel  bouleverse non seulement le rapport de force au sein des entreprises par le basculement de la peur déportée du côté du patronat rapidement écarté des instances dirigeantes ou mis sous tutelle des ouvriers, mais  également au sommet du pouvoir gouvernemental par le démantèlement du commandement étatique et la neutralisation de ses forces répressives (police, services secrets et armée), à l’exemple de l’expérience de la Révolution russe de 1917.
Autre différence : le mouvement ouvrier en lutte ne quémande pas la liberté, l’autorisation d’action, l’homologation d’insurrection à l’État capitaliste qu’il ne reconnaît pas comme interlocuteur officiel. Il prend ces libertés d’émancipation et les impose à toute la collectivité,  particulièrement à la classe possédante sommée de se plier à la volonté générale du pouvoir majoritaire prolétarien, contrainte de déposer son pouvoir despotique de classe dominante,   condamnée à disparaître socialement en tant que classe hégémonique  et exploiteuse, astreinte à partager à égalité la nouvelle vie collective de tous les membres égaux de la communauté humaine.
A contrario, les mouvements démocratiques bourgeois occupent la rue pour quémander des réformes à l’État qui, par leur satisfaction partielle et surtout temporaire (car souvent révoquées ultérieurement) désarment les révoltés, divisent leurs rangs et renforcent ainsi le pouvoir tentaculaire de l’État bourgeois, lui permettant corrélativement de préparer sereinement la répression sanglante du mouvement. Autrement dit, les mouvements démocratiques bourgeois,  par leurs revendications réformistes partiellement et momentanément satisfaites, favorisent l’intensification de la rationalisation du capital et le renforcement de la dictature capitaliste contre le peuple laborieux. De fait, par leurs stériles luttes réformistes, ils contribuent surtout à la pérennisation du mode de production capitaliste, prolongé grâce aux rafistolages provisoires sociaux et politiques appliqués avec le soutien actif de la petite-bourgeoisie, avide de sinécures et de prébendes et  donc  intéressée par la perpétuation du système.
A contrario, les soulèvements populaires ouvriers investissent collectivement les lieux de production pour contrôler directement l’économie, donc la société. Le mouvement insurrectionnel prolétarien ne nourrit aucune illusion à propos de l’État des riches et de ses institutions. Par son combat radical émancipateur, il brûle tous les ponts et s’engage dans une guerre de classe jusqu’à l’obtention de la victoire, l’instauration de son pouvoir. Combat mené sans compromis, puisqu’il n’a rien à perdre sinon ses chaînes, pour atteindre son émancipation de classe.
Qui détient le pouvoir économique contrôle l’État, les pouvoirs politique et idéologique (les médias et les appareils culturel et éducatif de reproduction de l’aliénation). Par le contrôle direct de l’économie, le mouvement populaire ouvrier favorise la dislocation puis le dépérissement de l’État bourgeois, laissant place au pouvoir ouvrier (nous ne présumons pas du mode d’organisation que privilégieront les prolétaires révolutionnaires, appelés assurément à expérimenter plusieurs formes de gouvernance avant d’adopter la plus appropriée).
Une chose est sûre : l’exercice de démocratie ouvrière directe, fédérative et collective constituera un obstacle efficace contre l’autonomisation du Politique, et subséquemment contre la concentration des pouvoirs politique et idéologique.
Désormais, le Politique et l’Idéologique se fonderont sur le pouvoir économique, dans lequel la classe ouvrière en dépérissement prend sa source. Toutes les femmes  et tous les hommes, appartenant à l’espèce humaine égalitaire et solidaire sans hiérarchie sociale, partageront la même gouvernance. La sphère politique et la sphère idéologique dépendante ne seront plus séparées de la production économique des biens et des services essentiels à la survie de l’espèce. Les mêmes agents sociaux égaux dirigeront et contrôleront collectivement ces trois instances unifiées au sein de la nouvelle société humaine réunifiée.
Contrairement au système capitaliste dans lequel la classe dominante économique impose ses orientations au politique et à l’idéologique,en raison des exigences imposées par le mode de production déficient (la nécessité de la valorisation et de l’accumulation du capital subordonnées à la production et à la commercialisation des marchandises le contraint à subsumer toutes les sphères de la société,  depuis le politique et l’idéologique jusqu’au médiatique et l’éducatif,  mobilisés au service de la guerre économique et de la propagande bourgeoise pour mystifier les véritables rapports sociaux de domination et d’exploitation, pour occulter le caractère de classe de l’État, véritable instrument de guerre  monopolisé par les classes possédantes pour imposer leur puissance  et protéger leurs intérêts), avec le pouvoir ouvrier, le Politique et l’Idéologique, grâce à leur organisation horizontale étendue à l’ensemble de la population laborieuse, priment sur l’économique. Les trois instances ( l’économique, le politique et l’idéologique ) se complètent car sous le nouveau mode de production tous les besoins humains sont comblés pour tous, nul besoin d’accumuler pour assurer la survie de la collectivité. L’économie (la production-distribution) est mise au service de la communauté humaine et non la communauté humaine au service de l’économie (prédatrice, par ailleurs accaparée par une minoritaire classe exploiteuse). Le concept même de marchandise à monnayer et à commercialiser n’aura plus aucune signification. Finis le patronat, l’industriel, le commerçant, le banquier et le prédateur financier. De même, finis argent, salariat, rapports marchands. Place à la société humaine universelle coopérative fondée sur la satisfaction des besoins sociaux essentiels sur la base de la distribution gratuite des subsistances collectivement produites, sur le fondement « De chacun selon ses capacités, à chacun selon ses besoins ».
En tout état de cause, à la différence de la révolte démocratique bourgeoise réformiste, le soulèvement populaire ouvrier n’aspire pas seulement à desserrer l’étau dictatorial par  l’assouplissement des politiques totalitaires, dans le cas d’un régime despotique, ou à « moraliser » la démocratie mercantile corrompue, dans le cas d’un système libéral, mais à annihiler totalement le pouvoir du capital pour transformer les conditions sociales, instaurer un nouveau mode  de production social. Plus concrètement, par sa lutte à finalité émancipatrice et non réformiste, le mouvement populaire ouvrier s’organise pour transformer ses revendications en pratiques vivantes et directes appliquées à tous les espaces de vie sociales, depuis le quartier, les écoles, jusqu’aux lieux de travail.
En outre, contrairement au mouvement démocratique-bourgeois érigé en partenaire légaliste en quête de reconnaissance officielle auprès des instances étatiques capitalistes, le mouvement insurrectionnel ouvrier, par sa capacité d’être un protagoniste social et politique indépendant et structuré, s’organise d’emblée dans ses espaces sociaux propres : les usines, les entreprises, les quartiers, les transports  en commun, les écoles, les universités, les espaces publics, les hôpitaux, pour les gérer collectivement. Aussi, par l’instauration de son pouvoir informel, favorise-t-il la dissolution des rapports sociaux aliénants existant et concomitamment élabore-t-il la modélisation de sa nouvelle société sans patrons, sans État, sans capital, sans propriétaires et sans argent. Une société fondée sur la satisfaction des besoins sociaux concrets des êtres humains, prémices de la communauté universelle humaine sans classe.


 

Autopsie du Mouvement des Gilets jaunes

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