L'histoire mémorielle à géométrie variable: les camps de concentration de la faim
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2.12.2019.TheCampsEnglish-Italian-Spanish
L’historiographie occidentale contemporaine concentre, sans jeu de mot, toute son attention mémorielle sur les camps de concentration nazis. Cette focalisation sur ces uniques camps de concentration n’est pas gratuite. Elle se paye chère en termes de pauvreté de la connaissance historique relative à ce chapitre des camps d’internement. Néanmoins, elle permet l’enrichissement de certaines catégories de personnes, grâce à l’exploitation lucrative mémorielle de ce travestissement de l’histoire concentrationnaire.
A l’évidence, cette propagande tortionnaire sur les camps concentrationnaires a fini par enfermer la mémoire historique universelle dans une vision mémorielle partisane, partiale, partielle, réductrice, destructrice. Destructrice, car elle a anéanti la connaissance, pour des raisons mercantiles inavouées et inavouables, tout un champ de l’histoire humaine délibérément occulté. Force est de constater que tout un pan de l’histoire des camps de concentration est escamoté. Seuls sont campés, sur les champs historiques désertés par l’objectivité, les camps nazis.
Aujourd’hui, sur ce chapitre de l’histoire des camps, les historiens campent sur des positions minées d’explosives contrevérités, barbelées de lois restrictives et liberticides. La recherche sur les camps de concentration a été politiquement préemptée, juridiquement domptée, idéologiquement empestée. Cette domestication de l’histoire laisse le champ libre au camp de la falsification de l’histoire. Elle leur permet lucrativement d’enfermer l’histoire dans un champ fertile en manipulation mémorielle, fécond en matière d’enrichissement pécuniaire, fructueux de soumissions réflexives, analytiques, scientifiques. Aussi, internée dans un champ favorable à l’ignorance, l’histoire des camps est-elle prometteuse de rentabilité pour certaines notabilités claniques jamais en peine d’inventivités dénuées historiquement de crédibilité.
Depuis plusieurs décennies, cette doxa historiographique concentrationnaire ne souffre aucun débat scientifique, ne tolère aucune réflexion philosophique sur ce chapitre séquestré de l’histoire, n’autorise la publication d’aucune thèse divergente, n’accrédite aucune autre recherche historique. Sa vérité lucrative s’impose comme une loi divine. Au reste, cette vérité rémunératrice a fini par se graver dans le marbre mémoriel de la République. De fait, chaque citoyen doit l’apprendre dès l’école, comme une prière religieuse. La réciter, telle une litanie républicaine propagandiste et prosélytique, tout au cours de sa vie. Cette vérité politiquement rentable dispose même de ses temples où viennent se recueillir les adeptes de cette nouvelle religion mémorielle idolâtre des lamentations.
Malheureusement, combien de ces adeptes enfermés dans leur dogme mercantile connaissent-ils réellement l’histoire des camps ? Ces zélateurs de l’unique camp de la mort ignorent-ils que leur authentique mémoire dort, mise en sommeil par les adorateurs du veau d’or.
Contrairement à l’opinion communément répandue par la propagande mercantile, l’histoire des camps de concentration ne prend pas naissance en Allemagne nazie. La première apparition de la dénomination « camp de concentration » est due aux Britanniques, employée en Afrique du Sud durant leur guerre contre les Boers (Guerre du Transvaal, 1899-1902). Dans ces pionniers camps de la première puissance économique « civilisée » de l’époque, l’Angleterre, les Britanniques enfermaient femmes, vieillards, enfants des Boers et des membres de tribus indigènes alliées.
En ce qui concerne les Hottentots et les Boers, il s’est agi de véritables camps d’extermination. Et pour les Hottentots, du premier génocide de l’ère moderne. Pourtant, ces faits historiques sont méconnus, délibérément ignorés par l’historiographie mémorielle vénale, banale, bancale.
A la vérité, en matière concentrationnaire, Hitler n’a rien inventé : il s’est contenté de recycler de vieilles inventions des pays démocratiques occidentaux.
Plus tard, les seconds camps de concentration ont été construits en 1904 en Namibie pour éliminer le peuple Herero opposé à la colonisation et aux armées du chancelier Von Bülow. La catastrophe humanitaire a été effroyable : plus de 70 000 hereros morts dans les camps de concentration (pour causes de malnutrition, mauvais traitements, de maladie, d’exécutions sommaires). Ces populations internées ont également été l’objet d’expérimentations anthropologiques, scientifiques ; transformées en cobayes pour des expériences médicales.
Au pays la de la civilisation capitaliste raffinée, le Royaume-Uni, l’expérience a été importée sur son sol. En effet, en pleine Première Guerre mondiale, 32 000 étrangers (dont de nombreux Irlandais) ont été internés dans des camps de concentration, notamment dans le champ de course de Newbury transformé en camp. De même, sur le sol du pays des droits de l’Homme, à la même époque, durant la Première Guerre mondiale, la France a utilisé des camps de concentration pour y interner les ressortissants allemands, austro-hongrois et ottomans présents sur son territoire. A cet effet, de nombreuses îles françaises de la Manche, de l’Atlantique et de la Méditerranée ont été utilisées pour implanter des camps de concentration. La France réitère l’expérience à l’issue de la guerre d’Espagne par l’ouverture de nouveaux camps pour interner les réfugiés républicains fuyant le régime franquiste.
Plus près de nous, durant la Guerre de Libération nationale de l’Algérie 1954/1962, la France a renoué avec ses vieux démons en internant des milliers d’Algériens dans des camps de concentration et en se livrant à des massacres de masse (ne pas oublier que la France a exterminé 1,5 millions d’Algériens durant juste cette courte période de Guerre de Libération, sans compter le nombre incalculable de morts au cours de 132 ans de colonisation : certains historiens, notamment Mostafa Lacheraf, avancent le chiffre de 6 millions de morts algériens. La conquête génocidaire entreprise par les colons français a provoqué une véritable hémorragie démographique algérienne. Entre 1830, début de la colonisation de l’Algérie, et 1870, la population algérienne est tombée d’environ 5 millions à 2 millions d’habitants, décimés par les massacres de masse).
Dans la nouvelle République des Soviets, les camps de concentration se sont prolétarisés, à tel enseigne que tout l’immense Empire socialiste s’est métamorphosé en Goulag, autrement dit toute la Russie bolchevisée est devenue un camp de concentration à ciel ouvert. Dans la première démocratie mondiale, les USA, durant la Seconde Guerre mondiale, des milliers de civils japonais, d’asiatiques ou simplement américains d’origine asiatique, ont été enfermés dans des camps de concentration. Le Canada a recouru aux mêmes méthodes d’internement concentrationnaire.
Quant à la politique d’extermination massive de populations, l’Allemagne n’innove pas en la matière. L’histoire est jalonnée de massacres collectifs. Qu’il nous suffise d’évoquer le génocide des amérindiens (en l’espace de quelques décennies, après la conquête de l’Amérique en 1492, on estime que les colons européens ont causé la mort d’environ 56 millions d’autochtones) ; des esclaves africains ( on estime à 14 millions le nombre de déportations d’Africains dont une grande partie à péri au cours de leur transfert) ; des Arméniens, des Aborigènes d’Australie, du génocide des Algériens perpétré durant la colonisation française (6 millions de morts), du bilan sanglant du colonialisme belge au Congo, du génocide des Malgaches massacrés par l’armée française en 1947, des massacres indonésiens au Timor-Oriental, des massacres du peuple palestinien, le génocide perpétré lors de la guerre du démembrement de la Yougoslavie, le génocide du Rwanda, etc.
Sans oublier bien évidemment le Génocide des génocides contemporain, l’Holocauste des holocaustes moderne, perpétré par le capitalisme à notre époque civilisée : à savoir le massacre annuel de millions de personnes victimes des famines provoquées par ce mode de production capitaliste mortifère.
Quelle est la différence entre le génocide des Juifs et le génocide de ces millions de morts annuels, victimes des famines, de malnutrition, de maladies bénignes aisément soignables en Occident (toutes les cinq secondes un enfant meurt de faim, autant d’adultes, au total 25 000 êtres humains meurent de faim chaque jour, au bas mot 10 millions par an, 100 millions en 10 ans, 700 millions en l’espace d’une vie) ? La différence est de degré et non de nature. Dans les deux cas, c’est le capitalisme qui est responsable de leur mort. Excepté que les victimes des famines meurent à petit feu, dans l’indifférence générale, au su et au vu du monde entier numérisé, à l’ère des réseaux sociaux et de l’information instantanée, en pleine époque d’abondance alimentaire, de société de consommation, et en particulier en période de “paix”.
Et pour quel motif ne s’alarme-t-on pas, ne se mobilise-t-on pas contre ce génocide humain contemporain pour y mettre fin ? Qu’attend-on pour traduire devant le Tribunal de l’Humanité les responsables de ce génocide ? Pour anéantir ce mode de production capitaliste coupable de crimes contre l’Humanité ?
Ouen! On peut se préoccuper de toute la misère humaine sans disqualifier la Shoah.
On devrait se préoccuper des esclaves noirs en Algérie, des femmes mutilées dans plusieurs pays d’Afrique, de celles femmes qui subissent des viols collectifs en Inde et ailleurs. Bien des concepts culturels et religieux sont responsables de morts, mais ça, il ne faut pas toucher.
Bonne journée
@ Hélène
1) Il est tout à fait exact que nul ne devrait « discréditer » (pour utiliser ton expression) la SHOAH (si Shoah il y a bien eut effectivement)
2) Ce que l’auteur tente d’expliquer c’est qu’aucun fait historique ne doit ni ne peut être sacraliser et retirer du débat public-historique et édifier en une « Vérité révélé » transcendantale.
3) Les religions révélées – les religions des trois livres sacrés (Torah, Bible et Coran) le font en effet mais cette obligation à croire et à professer l’intégralité de cette pensée soi-disant révélée n’est imposée qu’aux adhérents – partisans de cette religion.
4) Quand un État force par la loi bourgeoise et la répression judiciaire et policière TOUS les citoyens habitant ce territoire national à professer la religion unique – décrétée par l’État dictatorial = et bien voilà = on qualifie cet État bourgeois de DICTATURE.
5) à MA connaissance aucun État ne se comporte de la sorte = LA République islamique d’IRAN par exemple n’oblige pas les chrétiens ou les juifs vivant sur son territoire à se convertir à l’ISLAM et à professer la foi musulmane.
6) La seule exception connue nous vient de la nouvelle foi SHOAH – Holocauste – qui édicte ses règles – ses dogmes sacrés qui ne peuvent être contestés (savais-tu que le nombre de 6 millions de victimes juives de l’holocauste est sacralisé et qu’un individu qui nie ce nombre sacré peut être condamné – ou encore que l’existence des chambres à gaz dans les camps nazi ne peut être contestée pas même mis en débat?)
7) C’est exactement comme si un État bourgeois décrétait que tous les individus vivant sur son territoire doivent croire à l’Immaculée conception de la « vierge » Marie qui resta « Vierge » après son accouchement de votre seigneur Jésus-Christ.
J »espère Hélène que tu ne nieras pas notre droit à culbuter ces fadaises religieuses auxquelles chacun à le loisir de croire ou de ne pas croire (comme le mythe de la Terre Promise qui découle de la Shoah-holocauste (!)
8) Je suis d’accord avec toi, il y a des sujets de débat bien plus prioritaires – exaltant – enrageant – que de débattre de la christ de Shoah dont je n’ai rien à foutre. Nous sommes en 2019 et la Révolution prolétarienne nous tend les bras… Voilà un sujet qui m’intéresse.
Robert Bibeau
Salut
J’espère que ca va avec toi.
Je survolais cet article
Il a des sources pour son chiffre de 1,5 millions ?
Mon père a fait l’Algérie. Il ne s’est rien passé dans son coin mais ca n’a pas valeur de preuve. Et s’il y a eu des violences des 2 cotés, son chiffre me parait très très exagéré. Sans parler de cet étrange oubli de faire commencer la colonisation avec la France sans parler des ottomans avant .. ni des barbaresques qui pillaient les côtés de l’Europe du Nord …
Et je n’ai jamais entendu parler en Algérie Française de camps de concentration comme ceux des Boers et des nazis …
Plus près de nous, durant la Guerre de Libération nationale de l’Algérie 1954/1962, la France a renoué avec ses vieux démons en internant des milliers d’Algériens dans des camps de concentration et en se livrant à des massacres de masse (ne pas oublier que la France a exterminé 1,5 millions d’Algériens durant juste cette courte période de Guerre de Libération, sans compter le nombre incalculable de morts au cours de 132 ans de colonisation : certains historiens, notamment Mostafa Lacheraf, avancent le chiffre de 6 millions de morts algériens. La conquête génocidaire entreprise par les colons français a provoqué une véritable hémorragie démographique algérienne. Entre 1830, début de la colonisation de l’Algérie, et 1870, la population algérienne est tombée d’environ 5 millions à 2 millions d’habitants, décimés par les massacres de masse).
Encore une fois, il « oublie » les déportations vers le monde Arabe …
on estime à 14 millions le nombre de déportations d’Africains dont une grande partie à péri au cours de leur transfert)
Ca rend son article très partial. Il pourrait aussi aller jusqu’à expliquer qui a organisé ces massacres, rarement les peuples, beaucoup plus certaines élites marchandes / banquières / politiques que l’on pourrait nommer puisque les descendants de ces familles sont souvent encore au pouvoir.
Et tant qu’à faire, on a exhumé récemment la trace de camps de concentration occidentaux en 45 en allemagne pour faire mourir 1 millions de soldats allemands (plan morgenthau partiellement éxécuté sous les ordres d’Eisenhower).
cdlt
Hervé