Le complotisme, alibi des mollahs pour écraser le prolétariat iranien

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Dopés aux séries policières très en vogue ces dernières décennies, les pouvoirs dominants et les médias stipendiés cèdent à la propension de dégainer, à la moindre irruption d’un événement d’actualité inexpliqué ou d’un soulèvement populaire spontané, leur fumeuse théorie du complot pour appréhender l’information et pour accuser la main invisible de l’étranger.
 
Les médias de service, à la pauvreté analytique abyssale, mus par une paresse intellectuelle constamment en activité, exhibent avec promptitude leur arme favorite conspirationniste. Embusqués derrière leur écran d’ordinateur comme des espions en service commandé, les journalistes affidés scrutent l’actualité avec leurs lunettes aux verres déformants, formant une vision tronquée et truquée du monde. Chaussés de leurs lunettes journalistiques à courtes vues, ces médias affublés de leurs affabulations narratives habituelles, nous livrent régulièrement leurs fictions en guise d’informations. Rien n’échappe à leur imagination débordante de réalisme politique. La réalité, grâce à leurs chatoyantes analyses, prend souvent des couleurs éclairantes de vérité. Éclatantes de sincérité.
 

Á l’instar des classes dirigeantes, pour les médias, le peuple, perçu comme une masse moutonnière, ne s’éveille à la conscience politique que sous l’instigation de quelque gourou meneur de foules. Ou de quelques professionnels spécialistes de la manipulation politique œuvrant au service d’occultes puissances «étrangères». Ainsi, dès lors que les prolétaires investissent la Rue pour revendiquer leurs droits à la vie, réclament l’amélioration de leurs conditions sociales, œuvrent à l’instauration d’une société humaniste et égalitaire, elles sont aussitôt taxées d’être à la solde de pays étrangers. D’être manipulées par des forces nébuleuses. Étrangement on n’accuse jamais la main invisible étrangère d’être responsable de l’habituelle résignation de ces mêmes prolétaires.  De leur longue soumission, leur apathie. De leur effacement de l’histoire. On applaudit même leur résignation, leur passivité, leur asservissement. Signes de leur ferveur nationaliste. Preuves de leur fidélité au pouvoir dominant. Tant que le prolétariat demeure silencieux, oublieux de ses droits, il est acclamé pour son état d’accalmie. Dès lors qu’il se réveille de sa léthargie pour se lancer dans une synergie de luttes collectives, le prolétariat devient aussitôt objet de calomnies. Il est couvert d’ignominies, d’infamie.
 
L’Iran vient de nous offrir le dernier exemple sur le traitement différentiel de l’actualité saisie de manière policière par certains médias, et par le régime moyenâgeux des Mollahs. La théorie du complot a été de nouveau brandie en guise d’explication du soulèvement populaire. En Iran, à la suite de l’annonce de la hausse du prix de l’essence, le moteur de la révolte sociale s’est embrasé. Dès la mi-novembre 2019, la rue iranienne a été le théâtre de manifestations violentes. Par milliers, les prolétaires iraniens ont envahi la rue pour dénoncer la chute de leur niveau de vie, protester contre la corruption, la dégradation des services publics, les fréquentes coupures d’eau et d’électricité.
 
Deux semaines durant, une centaine de villes ont été en proie aux émeutes. Les soulèvements ont été accompagnés d’incendies et d’attaques de stations-service, de commissariats, de centres commerciaux. Au cri de « mort à Khamenei », ou «dehors les mollahs», des mosquées et des écoles théologiques ont été incendiées, ainsi que de nombreux édifices publics notamment des sièges de municipalités. Les manifestants iraniens ont également scandé «Ni Gaza, ni Liban», pour dénoncer la dilapidation de l’argent dans les entreprises impérialistes opérées par le régime des mollahs.
 
Ainsi, les prolétaires iraniens sont descendus spontanément dans la Rue pour dénoncer la cherté de la vie. Aussitôt ils ont dû affronter la répression policière et les milices paramilitaires islamiques. Ces dernières ont fait usage de balles réelles contre les manifestants. Selon certaines sources, les mollahs auraient réussi à mater la rébellion, mais au prix d’au moins 400morts et 10 000 arrestations.

Surpris par l’ampleur de la révolte sociale, le régime sanguinaire des mollahs a instauré promptement un couvre-feu numérique, en procédant, dès le 16 novembre, au verrouillage d’accès à Internet dans l’ensemble du territoire iranien. Le président iranien Hassan Rohani s’est même fendu d’un communiqué pour dénoncer «un complot» de l’étranger, désignant nommément la CIA. Le régime a déclaré avoir déjoué un complot ourdi depuis l’étranger. Il a dénoncé un complot américain, sioniste ou saoudien. Quant à l’ayatollah Ali Khamenei, il s’est félicité d’avoir «repoussé l’ennemi». Voilà, le mot est lâché : le peuple iranien révolté est l’ennemi à abattre.

 
Comme la révolte sociale a été cette fois vraiment politique, des femmes iraniennes se sont engouffrées dans la brèche pour revendiquer également la liberté d’ôter le voile religieux imposé par le régime moyenâgeux des mollahs. Ce voile qui mutile leur personnalité. Ce voile qu’elles doivent porter comme l’étoile jaune de David imposée aux Juifs, pour leur signifier leur singularité sexuelle, leur incongruité identitaire, leur infériorité sociale.
 
À l’évidence, ces derniers soulèvements populaires diffèrent des mouvements précédents, cantonnés aux protestations contre la tricherie électorale organisée par les deux factions bourgeoises iraniennes : la faction des dictateurs religieux islamiques et la faction des politiciens bourgeois libéraux. Cette fois-ci, les causes sont plus «prolétariennes». Cri de révolte du prolétariat le plus misérable du pays, celui qui survit dans les quartiers périphériques de Téhéran et surtout dans les petites villes, le soulèvement est parti surtout des villes de province, comme en Russie en 1917. On oublie que les révolutions commencent loin de la centralisation étatique ; les capitales sont en général très embourgeoisées.
 
En outre, il est un autre signe frappant, inquiétant pour l’ordre mollah-rchique, que toute la presse occidentale n’a pas manqué de relayer : tout le monde déplore l’absence de «dirigeants» ou même de «leaders» dans cette masse prolétarienne qui s’attaque violemment aux institutions de l’Etat. Cette révolte, aussi soudaine qu’inattendue, spontanée, inorganisée, incendiaire, inquiète toutes les chancelleries du monde capitaliste, tous les oligarques et despotes de la planète. Voilà que la misère sociale prolétarienne se pointe en fanfare et sans crier gare, sans craindre les balles – des centaines de tués déjà – ni les emprisonnements par centaines. Ce ne sont plus les simples étudiants petits-bourgeois mais bien les prolétaires iraniens qui entrent dans le combat.
 
Une chose est sûre : une nouvelle manipulation de la CIA comme lors des « printemps arabes » est franchement à exclure, à moins qu’on ne considère la misère comme fruit vénal d’un complot. Aujourd’hui les enjeux de généralisation de la lutte sont autrement plus prégnants, avec des prolétaires en première ligne déterminés à en découdre avec les mollahs. Ils ne veulent surtout plus vivre à genoux, prosternés, soumis à la dictature islamique.
 
Au reste, contrairement aux informations diffusées par de nombreux médias, on ne peut pas soutenir que la cause du soulèvement est due à la seule «corruption» du régime, laquelle est réelle (40.000 soudards dits « gardiens de la révolution » – bigote et spoliatrice des travailleurs – s’engraissent sur 80 millions d’habitants). La cause en est l’état de crise économique systémique aggravée par l’embargo américain, le contexte de guerre permanent auquel est soumis le pays, sans oublier les aventures extérieures du régime des mollahs, impulsées dans le cadre de sa stratégie d’hégémonie régionale.
 
De toute évidence, les jours de la Mollahrchie chiite iranienne sont comptés.  Rien n’est impossible. Avec l’oppression islamique qui vole en éclats, l’étiolement de Daesch, les populations laborieuses iraniennes réclament la fin de la misère, la cessation de l’aliénation religieuse, l’instauration de la séparation de la religion et de l’État. Tout est possible. En octobre 1917 en Russie, des prolétaires moins nombreux, suivis par des millions de paysans analphabètes, ont bien réussi à déboulonner l’aristocratie féodale tsariste.
 

Quoi qu’il en soit, le peuple iranien relève la tête. Et sa frange la plus opprimée, la Femme, ne va pas tarder à ôter l’obscur et infâme voile de sa tête, symbole de sa double oppression. Bientôt, après avoir éliminé du pouvoir les têtes enturbannées du régime théocratique, ces nouveaux hommes et femmes prolétaires iraniens trôneront fièrement à la tête d’un pays moderne débarrassé de la dictature des mollahs, de l’oppression, de l’exploitation, de l’aliénation.

7 réflexions sur “Le complotisme, alibi des mollahs pour écraser le prolétariat iranien

  • 9 décembre 2019 à 4 h 37 min
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    Salut,
    C’est au moment où les USA viennent de reconnaître qu’il sont derrière la révolte de Hong Kong que tu nous dis ça.
    Te rends-tu compte que c’est pile au moment où les USA ont perdu la guerre de Syrie qu’éclatent des révoltes simultanément dans trois pays ennemis des Amerloques:
    Le Liban, l’Irak et l’Iran.
    Ces trois pays ont joué un rôle essentiel dans la défaite américaine en Syrie.
    Notamment les Hezbollah du Liban. Où les révoltés ont réclamé le désarmement du Hezbollah : http://mai68.org/spip2/spip.php?article4610
    et où le Poing d’Otpor avait fait son apparition :
    http://mai68.org/spip2/spip.php?article4758
    La CIA utilise et attise des révoltes partiellement justifiées, mais les amplifie à fond avec l’aide d’agents stipendiés et les finance pour arriver à des changements de régime chez ses ennemis :
    http://mai68.org/spip2/spip.php?article4366
    https://www.ned.org/wp-content/themes/ned/search/grant-search.php?organizationName=&region=Asia&projectCountry=China&amount=&fromDate=2014&toDate=&projectFocus%5B%5D=&projectFocus%5B%5D=&projectFocus%5B%5D=&projectFocus%5B%5D=&projectFocus%5B%5D=&projectFocus%5B%5D=&projectFocus%5B%5D=&projectFocus%5B%5D=&projectFocus%5B%5D=&projectFocus%5B%5D=&projectFocus%5B%5D=&projectFocus%5B%5D=&projectFocus%5B%5D=&projectFocus%5B%5D=&search=&maxCount=100&orderBy=Country&start=1&sbmt=1
    Bien à toi,
    do,
    http://mai68.org/spip2

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    • 9 décembre 2019 à 11 h 29 min
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      @ Tous
      La révolte des populations (pour ne pas dire des peuples et du prolétariat) ne sera jamais un long fleuve tranquille – simple d’explication – droite dans ses bottes – unilatérales – voguant sur un large boulevard bien dégagé = jamais.
      La classe prolétarienne n’ayant pratiquement aucun pouvoir dans aucun domaine – économique – politique ou social ou juridique ou militaire – ses mouvements de révolte sont voués à être infiltrés – boycottés – manipulés – pervertis – par les machines d’État bourgeois – leurs agences de « renseignement- d’espionnage – d’infiltration.
      Que doit-on faire alors ???? 1) Dénoncé tout soulèvement populaire – s’en éloigné de peur d’être manipulé (exemple le soulèvement de la rue égyptienne il y a quelques années) abandonnant les masses à la direction des agents provocateurs ???
      2) Déifier – encenser – et suivre aveuglément tout soulèvement populaire – peu importe ce qu’il présente comme mot d’ordre et soi-disant revendication (comme Hong-Kong -où certains manifestants réclament l’aide des États-Unis « démocratique » (sic) ????
      3) Comprendre que TOUT et N’IMPORTE quel soulèvement populaire ne peut surgir – se forger – qu’à partir du mécontentement des masses de différentes originent sociales (différentes classes sociales) où pour des raisons historiques (la disqualifications des différentes forces de la gauche traditionnelle)
      la petite-bourgeoisie prendra le leadership inévitablement et pourrira l’atmosphère MAIS cependant ils nous appartient de mettre en garde le prolétariat (face aux facéties « Démagogique-démocratique de merde des petits-bourgeois) – et de l’aider à garder le cap sur ses propres revendications ÉCONOMIQUES D’ABORD POUR LA SURVIE DE NOTRE CLASSE – car nous en sommes là = la guerre de classe pour la survie de l’espèce humaine est engagée –
      4) Dans le présent texte le camarade a voulu mettre en garde contre la tactique bourgeoise du COMPLOTISME = CETTE THÉORIE QUI VOUDRAIT FAIRE CROIRE QUE la lutte de classe n’existe plus et que le monde est dirigé par un conseil d’administration de forces diabolique funestes invincibles – cohérentes – en dehors de toutes contraintes économiques – sociales – militaires et non soumises aux lois de la concurrence et de la conquête des marchés. FAUX arhci-Faux
      5) Les comploteurs ne contrôlent rien des lois économiques qui nous entrainent tous eux-y-compris vers la catastrophe et la guerre
      Ce que notre camarade aurait du mettre en relief. Vive les soulèvement du prolétariat iranien – irakien et libanais même si la perspective prolétarienne est encore vacillante et sous-jacente = ils apprendront de leurs actions.
      Robert Bibeau

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  • 9 décembre 2019 à 11 h 54 min
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    Est ce que ceux qui reclament dans la rue en iran un gouvernement soumis à l’argent , aux USA, à la consommation genre pays de l’Ouest sont le prolétariat iranien ? Je ne suis plus aller là-bas depuis longtemps. Les iraniens que je côtoie en Turquie aussi nombreux soient ils/ elles sont des bourgeois riches très riches , et se déplacent sans aucun problèmes;sont aussi croyants qu’un jukebox. ….. difficile de se prononcer, mais l’histoire nous montre qu’il est normal de trouver Jusqu’à 50% de traîtres dans un pays. Par traîtres j’entends des gens près à vendre « leurs » pays à des étrangers . Voir Vichy, ou plus actuel les gouvernements arabes , et africains en général. La question est plutôt comment préserver un pays sans se débarrasser de l’ennemi intérieur ?

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    • 9 décembre 2019 à 12 h 19 min
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      @AMMAR
      Vous reprenez les arguments des admirateurs béats des mouvements populistes.
      OUI indéniablement toutes sortes de revendications fleuriront et contamineront un mouvement populaire et dans cette guerre de propagande initiale du mouvement les médias à la solde diffuseront les revendications des agitateurs et des petits-bourgeois MASQUANT LES récriminations des prolétaires qui deviendront inaudibles de l’autre côté de la frontière. Mais nous savons que bien peu de prolétaires iraniens donneront leur vie pour singer les impérialistes américains.
      Vous et moi ne luttons pas du tout pour les mêmes objectifs. Ainsi vous évoquez VICHY et les « traitres » de l’intérieur qui devraient être éliminés (50%) dites-vous MAIS OÙ SE SITUE LA MAJORITÉ DÉMOCRATICO MERDIQUE ?
      vOUS souhaitez préserver LE PAYS – moi je propose de détruire l’État-nation et le pays afin de sauver LE PEUPLE à commencer par le prolétariat sa portion largement majoritaire qui a le mérite de devoir se battre pour assurer la survie NON PAS DU PAYS MAIS DE L’ESPÈCE HUMAINE
      Car la guerre de classe en est rendu là – La question de la survie de l’humanité est posée NON PAS FACE AUX URGENCES CLIMATIQUES (fadaises) mais face aux urgences humanitaires. Ils ont commencé à exterminer des populations entières en Afrique notamment .
      Seul le prolétariat possède la solution pour contrer cette guerre génocidaire
      Robert Bibeau

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  • 9 décembre 2019 à 12 h 08 min
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    Je vais faire très court : le prolétariat iranien n’existe pas … dans tous les pays musulman, il n’y a pas de prolétaires. .. Vous ne comprendrez jamais ça. ….

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  • 14 décembre 2019 à 22 h 39 min
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    À une époque où le capitalisme a atteint son état suprême, l’impérialisme, a tort de considérer que le régime dominant en Iran est féodal ou médiéval.
    En fin de compte, c’est le mode de production capitaliste et le système impérialiste qui dominent en Iran. L’importance stratégique, tactique et politique de clarifier cet aspect est cruciale pour que les prolétaires iraniens ne confondent pas le nuage – les comportements – par Juno – le système – et se concentre sur l’objectif qu’ils doivent abattre – le mode de production capitaliste et impérialiste qui alimente l’esclavage salarial, ainsi que l’aliénation, à laquelle ils sont soumis.

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    • 15 décembre 2019 à 11 h 33 min
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      @ LUIS
      Totalement d’accord avec toi.
      Le reliquat féodal que constitue les mollahs ne s’appuie sur aucune base productive (servage – paysannerie et aristocratie propriétaire de la terre fondement du mode de production)
      Les mollahs et les religieux et la religion sont inféodés aux intérêts financiers liés d’abord aux industries des énergies (pétrole – gaz et nucléaire) et aux autres branches industrielles (armement – alimentation – moyens de transport)
      Les mollahs servent de servant et de paravent aux intérêts économiques milliardaires contre lesquels se lèvent le prolétariat iranien courageux.
      Comme tu l’écris NOTRE INTÉRÊT NE VA QUE VERS LE PROLÉTARIAT et nous devons refuser le fichu rouge – démocratico laiciste – anti-religieux dont notre classe n’a rien à foutre.
      Robert Bibeau

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