Le film de STAR TREK que je recommande à l’intégralité du genre humain

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YSENGRIMUS — Il y a cinquante-cinq ans et quelques jours, le 8 septembre 1966 exactement, débutait ce qui allait devenir la monstrueuse saga télévisuelle et cinématographique STAR TREK. Et alors un beau jour se pose la question de savoir ceci: si je voulais introduire à l’émotion utopique et à la joie futuriste de la susdite culture Star Trek une personne n’y connaissant rien et ayant un intérêt tout minimal pour la science-fiction, je ferais comment? J’ai discuté le coup avec Reinardus-le-goupil, entre un plat de cochon grillé, des nouilles et notre petit écran diffusant Star Trek IV, The Voyage Home, le quatrième long métrage de la saga cinéma des increvables personnages de la Fédération Unie des Planètes. Pourquoi privilégier cet opus cinématographique pour suggérer un contact initial avec le monde de Star Trek? Pour trois raisons. D’abord la dynamique de ce film spécifique met fortement en relief les acteurs et leurs personnages et ce, au dessus des effets spéciaux et des tics zap-boom galactiques usuels de la space opera. Cela permet une approche plus intimiste de Kirk, Spock, McCoy et de toute leur bande. Cette valorisation de l’acteur et de sa façon de travailler son personnage est un des charmes constants de la saga Star Trek. Elle est justement particulièrement bien installée dans ce film-ci. Ensuite, le thème traité, écologique, baleinier, environnementaliste est touchant, poignant, embrassé à la fois avec une tendresse et une ironie critique qui synthétise merveilleusement l’utopie Star Trek. Finalement, atout majeur, le film est dirigé par Leonard Nimoy (l’acteur brillant jouant Spock). Nimoy est un metteur en scène sensible, qui dirige finement ses acteurs et ses actrices et qui a une touche imparable pour les personnages et les thèmes féminins (on lui doit notamment The Good Mother, et le superbe Three men and a baby, version USA particulièrement réussie de Trois hommes et un couffin). La combinaison est ici parfaitement gagnante et fait de Star Trek IV un film irrésistible que je recommande chaleureusement à tous les non-trekkies de notre vaste monde.

Les quinze premières minutes sont un peu turlupinées car elles se raccordent directement en suite sur l’opus précédent, sans que cela revête une importance particulière aux fins de l’exercice présent. Ce qu’il faut savoir est que James T. Kirk, qui est maintenant amiral, et ses principaux officiers, se sont comportés comme des factieux de première tenue en désobéissant aux ordres, en chapardant leur vieux navire en cale sèche (la toute mythique Enterprise) et en courant à la rescousse de Spock, dont ils ont sauvé la vie. Les circonstances épiques de cette succession de coups tordus a impliqué le sabotage vandale d’un autre navire de la Fédération (l’Excelsior), une escarmouche désastreuse avec un croiseur de combat Klingon, le sabordage meurtrier de l’Enterprise, la destruction d’une planète, la mort du fils de Kirk et un incident diplomatique catastrophique avec l’Empire Klingon. Quand notre film commence, nos factieux affligés, pas fiers pour deux sous, sont réfugiés sur Vulcain, planète natale de Spock, avec une frégate klingonne volée qu’ils ont rebaptisée The Bounty. Sur Terre, l’ambassadeur Klingon exprime la colère de l’Empire et exige que Kirk et ses factieux soient mis en accusation, devant le plus haut tribunal de la Fédération Unie des Planètes. L’ambassadeur fait même de cette mise en accusation une condition sine qua non de la continuation des négociations de paix entre l’Empire Klingon et la Fédération. C’est aussi gros que ça… Intègres jusqu’au petit linge, l’amiral James Tiberius Kirk (William Shatner), le médecin de bord Leonard McCoy (DeForest Kelley – 1920-1999), l’ingénieur de bord en chef Montgomery Scott (joué par l’acteur canadien James Doohan – 1920-2005), l’officière aux communications Nyota Uhura (Nichelle Nichols), le pilote Hikaru Sulu (George Takei) et l’artilleur et attaché scientifique en second Pavel Chekov (Walter Koenig) décident de se rendre et de faire face à leur procès. L’officier en second et attaché scientifique Spock (Leonard Nimoy – 1931-2015), en rémission de sa douloureuse mésaventure du film précédent, se joint à eux, tout en cherchant à renouer avec sa facette humaine, incarnée en lui par sa mère terrienne. On se rend donc vers la Terre, à bord de cette frégate klingonne qui crachote de partout, vu qu’elle n’est pas dans les meilleures conditions mécaniques.

Dans l’orbite de la Terre se manifeste entre temps une sonde inconnue qui s’en approche en émettant des sonorités singulières, détruisant tout sur son passage, en ciblant surtout les océans. Le contrôle de commandement de la Fédération y perd son latin et perd aussi du jus par toutes ses antennes. Cette sonde étrange, qui lui pompe toutes ses ressources énergétiques, semble sur le point de détruire la Terre et, culminement du drame, cela ne semble même pas être un acte offensif ou même volontaire. Dans la frégate klingonne se rapprochant de la Terre, Spock découvre que ce que la sonde émet, ce sont les sons du chant de la baleine à bosses. La sonde cherche visiblement à prendre contact avec une des formes de vie terrestres les plus intelligentes qui soit, soit la… baleine à bosses. Cette espèce qui, au vingt troisième siècle, est en complète extinction, est ce avec quoi la sonde aspire à renouer contact, et elle risque de tout casser si elle ne trouve pas vite fait ce qu’elle cherche. Kirk demande à Spock s’il ne pourrait pas imiter le son des baleines. Spock répond qu’il pourrait imiter leur chant, mais pas leur langage. La réponse serait en galimatias. Rien à faire. Au risque de faire voler la frégate klingonne crachotante en éclats, il va falloir remonter dans le temps, jusqu’en 1986, cueillir deux baleines à bosses, les convaincre, via une communication de télépathie vulcaine, de collaborer, et les ramener au vingt troisième siècle pour qu’elles conversent avec cette sonde inconnue et la convainquent de se calmer le pompon. Un programme sublime.

1986, donc, par un beau soir calme au dessus de la baie de San Francisco, la frégate klingonne, rendue intégralement invisible de par son mécanisme de camouflage défensif, atterrit doucement dans un parc de la ville, écrasant une poubelle et effarouchant des éboueurs dans l’action. C’est que nos héroïques aventuriers cosmologiques ont détecté des baleines à bosse dans le vaste bassin d’un parc d’attraction océanographique de San Francisco. L’Amiral Kirk explique à ses officiers: C’est un monde sauvage, primitif, archaïque, imprévisible. Soyez prêts à tout. C’est ici que le vrai spectacle savoureux démarre. Kirk et Spock vont faire la connaissance de la docteure Gillian Taylor (Catherine Hicks, actrice totalement étrangère à l’univers Star Trek et qui, littéralement, porte une portion significative de ce pur délice sur ses solides épaules), de l’Institut des Cétacés (Cetacean Institute) de San Francisco. La docteure Taylor veille sur George et Gracie, deux baleines à bosses qui, pour raisons de coupures budgétaires, sont sur le point d’être relâchées dans la nature, où elles devront «tenter leur chance» face aux différents chasseurs de baleines de ce vaste monde. Oh oui, c’est ici qui le scénario exulte. Les officiers de Kirk, en uniformes de guignol, vont devoir interagir avec la population ordinaire de Frisco. Chekov va se faire prendre pour un espion soviétique (on sent le ton déjà détendu et plus bouffon des années Gorbatchev), McCoy va se chamailler sur des diagnostics avec des médecins «moyenâgeux», Sulu va piloter un hélico, Scotty va pianoter sur un petit Macintosh blanc des années 1980. Mais surtout, Kirk et Spock vont cuisiner la docteure Taylor pour connaître le détail de la remise à l’eau des baleines à bosses. Celle-ci va bien se méfier de ce garçon roublard de l’Iowa se tenant avec un grand escogriffe fantomatique et omniscient qui l’interpelle amiral. La réflexion et l’émotion vont d’ailleurs vite graviter autour du rapport que la docteure Taylor établit avec ces baleines à bosses qu’elle aspire tant à protéger de l’humanité cruelle de son temps. Elle en viendra alors graduellement à se demander ceci: ce que son époque ne peut donner et arrache même cruellement, ces bouffons utopiques, dans leur frégate invisible, pourraient-ils le fournir? Personnalité sagace et déterminée, Gillian ne perdra pas le nord une seconde et tirera de sa manche tremblante des as qui forceront même un James T. Kirk à replier ses cartes.

Imaginez que vous êtes une femme du siècle dernier, angoissée par ses contraintes protectrices pour deux animaux immenses, doux, innocents et menacés de toutes parts, et que vous rencontrez une bande d’extra-terrestres liants, attachants, ratoureux, qui vous promettent une mer sans chasse et un monde sans harpons pour vos enfants putatifs adorés. Que feriez-vous? Résisteriez-vous? Ce film EST la rencontre du public contemporain non-trekkie (incarné par Gillian Taylor, à laquelle on s’identifie irrésistiblement) avec les personnages savoureux, improbables, formidables et entreprenants de la fantasmagorie Star Trek… Le charme opère entièrement et Reinardus-le-goupil approuve. Il ne faut pas résister à l’utopie qui séduit. Car ce faisant, c’est aussi qu’elle s’annonce.

L’officière trekkie aux communication Nyota Uhura (Nichelle Nichols) et l’océanographe vingtiémiste Gillian Taylor (Catherine Hicks)
L’officière trekkie aux communications Nyota Uhura (Nichelle Nichols) et l’océanographe vingtiémiste Gillian Taylor (Catherine Hicks)

Star Trek IV – The Voyage Home, 1986, Leonard Nimoy, film américain avec William Shatner, Leonard Nimoy, Catherine Hicks, DeForest Kelley, Nichelle Nichols, George Takei, James Doohan, Walter Koenig, 119 minutes.

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