Le télétravail à l’heure du covid19

Le télétravail à l’heure du covid19

Dans plusieurs articles nous avons montré le lien qu’il y a entre le télétravail et l’ auto-entrepreneur notamment notre article COMMENT ON GLISSE DU SALARIAT AU CONTRACTANT : L’ EXEMPLE DES CORRECTRICES
Nous avons montré le lien entre la loi travail et la naissance du statut de contractant comme concurrent du salariat dit auto-entrepreneur de soi .Salariat et contractants de « la nouvelle économie ».
Maintenant il s’ agit de démontrer comment la pandémie est devenue une aubaine pour les gouvernements de tester à grande échelle l’introduction du télétravail. Grâce à la pandémie le gouvernement français a immédiatement imposé partout où cela était possible le télétravail.

Le télétravail à domicile.
Ce fut un choc pour l’ organisation et la réglementation de l’ exploitation des travailleurs et travailleuses qui allaient devoir partager leur domaine privé d’ habitation avec l’ entreprise. Si au départ le télétravail devait séduire, il n’ en reste pas moins que celui-ci est un coin enfoncé dans le collectif du travail, coin qui tend à isoler les travailleurs les uns des autres. Les syndicats ont immédiatement perçu le danger que le télétravail faisait planer sur eux et la légitimation de leur statut historique de contre pouvoir négociateur. Ceci d’ autant plus vivement que le droit syndical du Conseil national de la résistance (CNR) fut à plusieurs reprises rogné pour être finalement désossé en faveur d’un droit à la personne Loi El Komri ou loi travail. Les instances représentatives du personnel (IRP) allaient recevoir leur coup de grâce avec les réformes Macron1 et la mise en place du comité social économique (CSE) qui va concentrer à lui seul ce qui était du ressort de trois organismes distincts : délégués du personnel (DP), comités d’ entreprises (CE) et comités d’ hygiène et de sécurité ( CHSCT) soit une liquidation de prés de 50% des représentants du personnel en fait du syndicalisme de base.

Selon une enquete de Malakoff Médéric Humanis, l’ augmentation de la pratique du travail à distance « s’explique surtout par une hausse du télétravail contractuel » consécutif à l’ application des ordonnances Macron. Selon une étude de l’ IFOP auprès de 1604 travailleurs (dont 581 managers), 29 % des salariés le pratiquent aujourd’hui, contre 25 % fin 2017. Sur l’ensemble des salariés du secteur privé en France, ils représentent environ 5,5 millions d’individus. La moitié d’entre eux découvre cette forme de travail pour la 1ère fois.

Après nous avoir dit que 73% de salariés étaient satisfait du télétravail, l’ étude de Malakof Médéric indique les risques pour la santé individuelle :

31 % des salariés interrogés dénoncent un impact négatif du télétravail sur leur santé psychologique durant le confinement.

48 % des télétravailleurs avouent avoir eu des difficultés à se déconnecter du travail. Et, 36 % d’entre eux constatent une augmentation de leur niveau de stress et de leur charge mentale.

Les liens qu’ils entretiennent avec leurs relations de travail se sont dégradés par suite de leur isolement, et 32 % souffrent d’un manque d’accompagnement.

Le climat familial est également perturbé : 34 % des télétravailleurs disent ne pas disposer d’un espace dédié à cet usage, ou du mobilier de travail indispensable et adapté à leur domicile.

Ce constat servira de base à la négociation Syndicats /patronat qui aboutira à un accord signé qui visera à pérenniser le télétravail dans le temps.

Pérenniser le télétravail dans le temps une affaire de santé publique !

Comme le patronat lui même le reconnaît, le Covid 19 a favorisé la mise en place du télétravail en le rendant obligatoire pour lutter contre l’ épidémie de coronavirus. Le travail à distance risque, demain, de perdurer, selon les experts de l’ONU, la Covid-19 est en effet la première épidémie d’une série qui peut être longue : « Sans stratégie préventive, les pandémies vont émerger plus souvent, se propager plus rapidement, tuer plus de gens et affecter l’économie mondiale avec des effets dévastateurs sans précédent », conclut le rapport publié par l’Organisation des Nations unies en octobre dernier. Il n’ est pas étonnant que le Medef revendique de poursuivre dés les premiers mois de 2021 le télétravail. Le premier ministre Jean Castex voulant temporiser a préconisé que la deuxième phase de télétravail pour le début de l’année qui ne soit pas le 100 % comme aujourd’hui mais ne soit pas non plus le retour au stade précédent. La solution envisagée pourrait être du type « quelques jours par semaine obligatoires, mais pas 100 % », a ajouté Geoffroy Roux de Bézieux président du Medef, précisant qu’un tel dispositif serait appliqué pendant « quelques mois » le temps que la pandémie soit passée.

Seulement le Mardi 17 novembre, Jean Castex formait même le vœu que « le télétravail survive à la crise. Bien sûr, on ne pourra pas télétravailler tout le temps, mais nous avons soulevé un chantier qui doit progresser ». Si le patronat reste encore divisé sur l’ utilisation à 100% du télétravail l’ état d’ esprit du patronat de certaines multinationales est pour une généralisation du télétravail . Voir les extraits de l’ article (La pandémie de coronavirus et le télétravail font vaciller l’avenir des grandes tours de bureaux ) . Nous constatons déjà que le taux d’occupation des grandes tours est en diminution constante du fait du « nomadisme ».2 Le travail nomade correspond à tout travail accompli, ailleurs qu’au poste de travail habituel dans l’entreprise. Il est en pleine expansion, en effet celui-ci ne se limite pas au télétravail à domicile. Tout salarié, peut être concerné par le travail nomade.

Quelques chiffres :

Le travail nomade concernerait entre 7 % et 10 % des salariés français.

Le nomadisme [lequel ?] représenterait, quant à lui, 20 % de la population active.

73 % des cadres français travaillent en dehors de leur bureau.

On dénombrait 1 milliard de travailleurs nomades dans le monde en 2011

« Jes Staley, le patron de la banque britannique Barclays, dont les imposants et luxueux locaux sont justement situés à Canary Wharf, estime ainsi que « mettre 7000 personnes dans un immeuble pourrait être du passé. Nous trouverons des moyens pour opérer avec davantage de distances pendant longtemps ».

« Il n’y aura jamais de retour à la normale », pronostique Alex Ham, codirecteur général du courtier londonien Numis Securities. Le fait de se rendre au bureau du lundi au vendredi « ne reviendra tout simplement pas », a-t-il dit au quotidien britannique The Telegraph.

Selon une enquête du géant du conseil immobilier Cushman&Wakefield, réalisée en avril auprès de 300 entreprises dans le monde, 89% d’entre elles estiment que le recours au travail à distance se poursuivra au-delà de la pandémie. »

« Certes tous les secteurs ne peuvent pas l’appliquer, mais cette pratique s’est massivement imposée. Le géant britannique de la publicité WPP a placé près de 95% de 107.000 employés en télétravail, en continuant à maintenir les services à ses clients. Le promoteur immobilier britannique Land Securities, très présents dans la City de Londres, a lui estimé récemment que seuls 10% de ses espaces de bureaux étaient utilisés. »

Tous s’ accordent à considérer que la pandémie a prouvé que la technologie permettait le travail à distance,qu’elle était source d’ économie et hausse de productivité,notamment d’importantes économie sur les loyers
« L’immobilier est un des domaines qui coûtent le plus cher » aux entreprises mais les gratte-ciels « ne vont pas disparaître », prévient Mme Roach, ne serait-ce que par la nécessité de conserver des bureaux dans « des lieux denses comme Manhattan ».
Nous voyons ici tout l’ enjeu pour les grands groupes d’utiliser le télétravail et de vider les tours. Précédemment nous avons vu comment les assurances et les banques qui étaient concentrées dans le 8éme et 9éme arrondissement de Paris ont migré vers le site de la Défense, de Marne la vallée et de St Denis. Le coût du maintien de salariés dans les centres urbains à haut rendement locatif n’ étant plus de mise. Aujourd’hui l’ enjeu reste le même et le télétravail va utiliser les habitations privées des salariés comme capital fixe gratuitement, il va gagner aussi sur des coûts annexes comme par exemple le maintient d’une infirmière sur site3, la présence syndicale, la suppression des restaurants d’ entreprises,voir des titres-restaurant4, tous les frais découlant du poste de travail (électricité, chauffage, abonnement à internet, imprimante…Du fait des « ordonnances Macron le code du travail ne prévoit plus d’obligation de prendre en charge tous ces coûts. « L’employeur n’est pas tenu de verser à son salarié une indemnité de télétravail destinée à lui rembourser les frais découlant du télétravail, sauf si l’entreprise est dotée d’un accord ou d’une charte qui la prévoit », voir à ce sujet l’ article de Capital

Mais le plus grand danger pour les salariés est de finir par perdre leur statut de salarié et de devenir des contractants en attendant de se faire remplacer par l’ économie collaborative ( le travail gratuit du consommateur).

G.Bad 1 décembre 2020
Sources et références

https://lecomptoirdelanouvelleentreprise.com/demain-de-nouvelles-vulnerabilites/

https://www.institutmontaigne.org/blog/ce-qui-se-cache-derriere-les-chiffres-du-teletravail-en-france

https://lecomptoirdelanouvelleentreprise.com/covid-19-etudes-flash-teletravail-et-absenteisme/

https://newsroom.malakoffhumanis.com/actualites/malakoff-humanis-decrypte-limpact-de-la-crise-sur-lorganisation-du-travail-et-la-sante-des-salaries-a-travers-les-resultats-de-ses-etudes-teletravail1-et-absenteisme2-realisees-en-mai-2020-40ce-63a59.html
notes
1Les ordonnances Macron, une révolution silencieuse dans les entreprises
2Avant la crise, le taux d’occupation réelle des bâtiments était en chute libre. Alors que jusqu’au début des années 2000, il était d’environ 60%, depuis le développement du nomadisme, ce taux a chuté pour être aujourd’hui, en région parisienne, de 40%. Cela veut dire que dans un bâtiment de 10.000 mètres carrés accueillant 1.000 collaborateurs, en moyenne uniquement 400 personnes étaient présentes en permanence. Et cela va évidemment s’accentuer après cette crise, puisque le télétravail et le nomadisme vont devenir incontournables. L’impact sur la consommation de mètres carrés à l’intérieur des sièges sociaux est considérable. Sources Capital

3 -Le Code du travail rend obligatoire la présence d’un infirmier dans certaines entreprises, quelle que soit la forme du service de santé adoptée par ces entreprises (autonome ou interentreprises), en fonction de leur effectif salarié :

Pour l’industrie : 1 pour 200 à 800 salariés et 1 de plus par tranche de 600 salariés.

Pour le tertiaire : 1 pour 500 à 1 000 salariés et 1 de plus par tranche de 1 000 salariés.

Dans les entreprises de moins de 200 salariés : à la demande du médecin du travail et du comité d’entreprise (CE). Si l’employeur conteste la demande, la décision est prise par l’inspecteur du travail après avis du médecin inspecteur du travail

4-Ceux qui reçoivent des titres-restaurant en temps normal doivent continuer à en profiter en télétravail. En revanche, pour les salariés qui bénéficient en temps normal d’une subvention au restaurant d’entreprise, le code du travail n’oblige pas la prise en charge des frais de repas en télétravail.

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