Lotus – Poésie érotique passionnelle – Appréciation critique (Alain Gravel)
Lotus – Poésie érotique passionnelle de Claude Bolduc et Paul Laurendeau est un livre d’art dont les textes, et les dessins qui les illustrent, sont complémentaires et indissociables. L’écriture narrative et poétique des cinquante textes érotiques a donné le coup d’envoi pour une collaboration fructueuse avec la mise en forme de cinquante dessins, le tout précédé d’une préface et de deux prologues. 119 pages de bonheur aux vices assumés.
En premier lieu, les lecteurs verront à droite le poème sur la page et à gauche le dessin. La disposition dessin-poème est suivie, jusqu’à la fin du cinquantième poème. À première vue, les dessins chatouillent l’esprit en voyant ces organes génitaux féminin et masculin étalés sur la feuille et filtrés par l’imagination de l’illustrateur et la réalité troublante du personnage féminin créée qui va porter le nom de Lotus – arrière-petite-fille de Pauline Réage (voir l’exergue précédant la préface), auteure d’Histoire d’O. Lotus, un titre au bas d’un dessin, seulement, mais toutes ces femmes des dessins sont Lotus dont les regards passent la rampe pour atteindre les lecteurs.
Si les préoccupations créatrices et philosophiques de Claude Bolduc sont de faire converger la lecture vers Éros et Thanatos dans son œuvre picturale, cette lecture des dessins donne à imaginer et à comprendre ce que la femme protagoniste spiritualise en assoyant simultanément l’expression de sa réalité d’objet sexuel au psychisme assumé mais aussi vulnérable compte tenu de son éducation que s’approprie l’illustrateur pour protéger la femme: «J’ai pour ce faire, déposé en l’antichambre de ce précipice sans fond ma chape de culpabilité » (Bolduc, p. 119). L’antichambre serait le fond invisible de la pensée de Lotus, la trame symbolique des dessins alors que Lotus serait l’objet incarné d’un vivant érotisme créatif où les lecteurs seraient présent dans la chambre. «»
Le poète n’écrit-il pas dans son poème titré «Quand Lotus lit cette poésie» : «C’est là la plus belle chose qu’un homme puisse faire à une femme / La transformer en muse» (99). Du dessin, Éros sexué ou non c’est la pénétration créative, la jouissance ténébreuse en volutes et en pointes du vivant se consumant comme les aiguilles et les gamètes mâles échappées dans l’air pour faire corps avec la vie dans l’abandon. Au monde follement symbolique dans l’univers érotique du dessin et du personnage féminin central, les phantasmes sexuels et culturels à surmonter se veulent la réalité qui pèse sur elle.
Lotus dessinée est une histoire de sexe goulûment racontée par un poète. Si l’apport des dessins nous transporte dans la représentation de la femme qu’on nomme Lotus, Paul Laurendeau, l’écrivain, prend bien soin de ménager les lecteurs pour mettre en confiance. Il fait intervenir en premier lieu une amie et confidente de Lotus, Virginie Lavertue qui signe la préface. Puis suit le poète créateur du récit érotique, à ne pas confondre avec l’écrivain, qui signe le texte narratif de deux prologues en sensibilisant les lecteurs d’abord aux bons sentiments envers ce qui sera une authentique expérience amoureuse respectueuse entre lui et Lotus, et l’autre, la justification d’un protocole d’amour entendu entre les deux protagonistes et la lettre clairement sexuée pour une invitation à célébrer leur union dans chaque poème érotiquement pornographique qui vont suivre. La mise en contexte est pédagogique et annonce la matière d’un apprentissage libérateur. Le poète est sans pudeur et se livre aux ébats sexuels explicites, le mouvement est là. Les lecteurs voyeurs assistent au couronnement de leur union lubrique avec le sentiment que tout est bon à goûter, à jouir de la relation sexuelle exploratoire sans dédain pour tout ce qui se fera du corps.
Les caresses et d’autres parties érogènes, outre le sexe féminin et le sexe masculin en érection souvent localisés dans le texte et le dessin, tiennent le haut du pavé de la jouissance. Pendant que le poète baise sa compagne, il regarde parfois le miroir du dessin pour mieux voir Lotus et se voir lui-même, dans un moment sublime et campé. Le poète parle et écrit ses poèmes de son point de vue. La muse devient aussi poète, prend la parole, l’écrit aussi bien que le poète le fait comme dans «Fellation» (43), «Je suis à toi» (59), «Quand Lotus lit cette poésie» (99) et «Tout ceci est vrai» (111) parce que le poète et la muse ne peuvent s’empêcher d’être vrais, invincibles et vulnérables dans les jeux de l’amour intime parallèle au monde où ils évoluent et s’engagent avec bienveillance.
Dans la littérature érotique, les textes de Paul Laurendeau surprennent par leur justesse d’expression de la passion amoureuse vécue comme un jeu exploratoire des sensations physiques de la jouissance que le poète et sa muse Lotus apportent de la capacité à renouveler les attraits pour le sexe: Faire l’amour ou mourir. Les dessins de Claude Bolduc représentent essentiellement la femme (Lotus) qui laisse voir sa vulnérabilité et son invincibilité de personnage féminin côtoyant des hommes sexués. La représentation écrite de l’homme jouisseur est le poète choisi par qui la rencontre de cette femme est une réussite de couple. Cette femme jeune encore acoquinée à un poète mature d’un même âge, aura été l’homme qu’une femme attend dans sa vie parce que l’attirance mutuelle et l’ouverture d’esprit des protagonistes complémentaires place le désir à la hauteur de l’œuvre d’art.
Un livre d’art troublant de dessins et de textes sur la sexualité explicite des sensations et intelligible de vérité, à lire dans son entièreté. À mettre sur la table à café, pour se rappeler les bonnes sensations d’une sexualité mutuellement consentie entre humains sans perdre de vue le vrai sens de vivre.
.
.
.
Des extraits coquins sont dispo ?…. histoire d’en avoir le coeur net :))))
la culture érotique et même pornographique il me semble sont essentiellement et naturellement politiques…et subversifs…la poésie de même nature forcément aussi… bien que passionnelle et plus sage en général a ce niveau ! mais combien aimerions nous avoir des toiles, des sculptures, des oeuvres d’art érotiques explicites dans notre salon, placardés aux murs ou posés partout…sans jamais oser franchir ce pas…n’est ce pas !…. surtout lorsque je me suis amusé à rechercher cet art sur internet et j’y ai découvert des sites qui proposent à en vendre à prix très abordables en plus…par une ribambelle d’artistes de toutes nationalités… des trucs renversants, souvent »obscènes » et osés… et dignes des plus grands maîtres du genre je dirais…! Les sociétés primitives et ante religieuses en tous cas ne s’en privaient surtout pas comme en témoigne l’archéologie et l’héritage artistique et culturel des vieilles civilisations….mais c’était aussi il faut dire et avouer une question de »status social »… c’est pas n’importe qui…qui pouvait se le permettre….et lorsque le sexe était intégré à la foi et à la religion comme en Asie, seuls les »prêtres », les rois et reines ou notables pouvaient s’en prévaloir…. ! renversant !
Quant a nous, rejetons des siècles post industriels… et des »récentes découvertes » sur le genre, les orientations et les comportement sexuels en tout genre… avec l’aide de la science et de la médecine…on ne sait même plus où on en est ! désormais, un »troisième » sexe est définitivement parmi nous… et pendant que certains prétendent qu’il s’inscrit dans le même mouvement de révolte et de subversion politique… on note tout de même une fâcheuse tendance politique et politicienne du système en même temps qui essaie de nous imposer ce troisième sexe comme ultime tentative pour prétendre justement »qu’au contraire… tout va bien dans le meilleur des mondes et nous y veillons » !:))) au point de ne plus savoir qui est rendu femme, qui est rendu homme, qui est rendu les deux ou entre les deux…
la poésie en tous cas ne peut-être qu’innocente de tout ceci….
Cher Sam, la poésie de cet ouvrage est pour lecteurs et lectrices avertis. Elle ne s’échantillonne pas dans une publication grand public. Merci de tes observations, toujours lumineuses.