La Montagne et la Souris
OLIVIER CABANEL — C’est à ce bon Jean de Lafontaine que nous devons cette fable, mettant en scène une grosse montagne laquelle accoucherait finalement d’une petite souris.
C’est en quelque sorte la parabole qui pourrait illustrer 7 mois de GJ, 3 mois de « grand » débat, et la prestation macronienne.
Cette fable, la voici :
Une montagne en mal d’enfant
Jetait une clameur si haute
Que chacun, au bruit accourant
Crut qu’elle accoucherait sans faute
D’une cité plus grosse que Paris.
Elle accoucha d’une souris.
Quand je songe à cette fable,
Dont le récit est menteur
Et le sens est véritable
Je me figure un auteur
Qui dit : je chanterai la guerre
Que firent les Titans au Maître du tonnerre
C’est promettre beaucoup, mais qu’en sort-il souvent ?
Du vent !
Moralité : parfois, selon l’humeur, on ment, on exagère, pour le simple plaisir de fourber le parterre.
Certains croient que, toujours, en parlant le plus fort, ils auront plus raison, et l’autre plus que tort.
Voilà comment l’on pourrait, en poussant le bouchon un peu loin, résumer la prestation du Président de la République.
Et puis, Macron, une fois de plus, c’est l’homme contradictoire.
D’une part il assure redynamiser les cantons, pour y installer une « maison France-service », avec donc à leur tête des fonctionnaires…il y a plus de 4000 cantons dans notre pays…ce sera donc au moins 8000 fonctionnaires supplémentaires… chaque classe se limiterait à 24 élèves…et donc autant d’enseignants… et en même temps, il avait décidé de supprimer des fonctionnaires…
Et puis, ne faut-il pas relativiser ?
Car cette réforme promise a tout d’une réforme, mais ne faut-il pas lire aussi entre les lignes, et découvrir que ce futur est très conditionnel : « une profonde réforme de l’administration, avec création …d’ici la fin du quinquennat… (donc pas tout de suite), « d’un endroit où l’on puisse trouver une solution aux problèmes… ».
Il veut supprimer l’ENA…mais en même temps, il conserve les locaux, et le personnel enseignant et administratif qui y sévissait…
La transition énergétique est, d’après la majorité des experts, une totale urgence… mais Macron, tout en en reconnaissant l’urgence, décide de relancer la réflexion, avec des citoyens tirés au hasard, qui ; s’ils ouvrent bien les yeux, arriveront fatalement aux mêmes conclusions des experts qui se sont exprimés sur le sujet au fil des ans…et depuis longtemps.
Or en relançant un nouveau débat, il recule d’autant la prise de décisions.
La politique de l’urgence retardée donc…celle des petits pas dénoncés par Hulot, et tant d’autres…
Quant aux décisions portant sur le pouvoir d’achat, urgentes elles aussi, elles sont actées…pour plus tard… 2020… 2021… 2022…
On se souvient que la décision de supprimer l’ISF avait été mise en œuvre quasi immédiatement…et on peut légitimement s’interroger sur le délai qu’il entend imposer pour que les français retrouvent un peu de pouvoir d’achat.
Autre contradiction, il assure vouloir aller de l’avant, mais finalement, c’est plutôt un retour en arrière : quand il souhaite que les français travaillent plus…ne reprend-il pas la vieille formule d’un ex-président : « travailler plus pour gagner plus ».
Sur la retraite, contradiction aussi : Macron assure ne pas vouloir repousser l’âge de départ à la retraite… mais en même temps, les futurs retraités sont invités à travailler plus longtemps, pour avoir une meilleure retraite.
Au sujet du RIC, tant réclamé par les GJ, il ne retient pas cette option, faisant un geste magnanime limitant à 1 million (au lieu de 4,5) le nombre de signatures ouvrant la possibilité d’un référendum.
Le double discours est évident : « après avoir salué les « justes revendications » portées par les GJ, il s’est fixé « d’aller plus loin sur le référendum d’initiative partagée »…mais refuse l’option défendue par ces mêmes GJ.
Macron prétend faire un mea culpa…s’être trompé… mais toutes les décisions prises sont en parfaite continuité avec la politique menée depuis quasi deux ans…. « Le changement dans la continuité », en même temps…toujours ces contradictions.
« Est-ce qu’on a fait fausse route ? » questionne-t-il… « Je crois tout le contraire », répond-il
Et puis on a eu droit à ces expressions cocasses, et un peu désuètes, auxquelles il nous a habitué :
« On a parfois l’impression que tout est cul par-dessus tête »…il a aussi souhaité « reconstruire l’art d’être français »…ce qui mériterait d’être développé…
Tout en affirmant « se ficher de la prochaine élection », mais il ajoute « je veux réussir »…
Et quid de cette « boule au ventre » dont il nous a gratifié ? : affirmant « je ne peux pas être le guichet de toutes les revendications, mais je comprends cette « boule au ventre » qui a engendré cette crise de défiance…je crois que la boule au ventre, dans beaucoup de cas c’est vrai, elle vient du pouvoir d’achat et je pense qu’il faut y répondre, mais elle vient (surtout) de la perte de sens collectif »…
En résumé, il comprend, mais pour autant ne fait pas grand-chose.
Et puis il nous a gratifié de quelques jolis mensonges…qu’aucun des 300 journalistes présents n’ont contesté… « La France travaille moins que ses voisins, on rentre en moyenne plus tard, on part plus tôt à la retraite, et on travaille moins dans l’année ».
Faux, comme on peut le découvrir sur ce tableau. lien
Étonnant aussi qu’aucun journaliste n’ait interrogé Macron sur les violences policières… lesquelles ont été pointées du doigt par l’ONU. lien
Alors bien sûr, on peut toujours voir le verre à moitié plein, plutôt que le verre à moitié vide, mais la potion reste tout de même amère…
Comme dit mon vieil ami africain : « l’homme qui se noie s’accroche à l’eau ».
PING: https://queonossosilencionaomateinocentes.blogspot.com/2021/08/a-montanha-e-o-rato.html