G.Bad-La libre circulation des personnes et l’ accès aux transports en commun.
O liberté, que de crimes on commet en ton nom !
Auteur : Manon Roland (17 mars 1754 – 8 novembre 1793)
Ces mots viennent en écho à ceux des Montagnards, qui affirmaient « pas de liberté pour les ennemis de la liberté ».
Introduction
Les mesures nationales et internationales prises contre la pandémie ont fait resurgir la question des libertés dites démocratiques. La liberté de circulation est le droit pour tout individu de se déplacer librement dans un pays, de quitter celui-ci et d’y revenir. Ce droit est celui de la démocratie bourgeoise garanti par l’article 13 de la Déclaration universelle des droits de l’homme depuis 1948. Cette liberté est toujours limitée par les capacités financières des « citoyens » , elle est une question de classe sociale. Pour la classe capitaliste les déplacements d’ affaire …. sont constants, pour l’autre classe le prolétariat au sens large les déplacements sont très limités et peuvent se résumer par aller au travail ou en chercher, voir sa famille, manifester et partir en vacances. Pour ce qui est du prolétariat surnuméraire le prolétariat migrant de par le monde suite à la misère et aux guerres la libre circulation correspond à l’exil ou la mort, voir le cas de l’ Afghanistan suite au retrait des troupes américaines, fait échos dans les mêmes conditions au retrait des troupes américaines du Vietnam laissant derrière elles les Boat-people.
Maintenant venons en à la fameuse liberté revendiquée par les manifestants «anti pass » sous le drapeau bleu blanc rouge (celui des Versaillais assassins des communards) celui de la République française et de sa« liberté,égalité,fraternité » 1
Il y a déjà longtemps que Marx dénonçait cette sainte trinité de « Liberté, Égalité, Fraternité », comme équivalent de « Infanterie, Cavalerie, Artillerie »2. En effet dans le paradis de l’idéalisme démocratique, il n’existe pas de classe, mais des citoyens libres et égaux, acheteurs et vendeurs de marchandises, y compris la force de travail une marchandise spéciale. Dans le monde de l’échange marchand, l’égalité règne entre acheteurs et vendeurs, chacun échange équivalent contre équivalent.
Selon le droit bourgeois, nous sommes tous propriétaires,libres, égaux et fraternels, le prolétaire contrairement à l’esclave est propriétaire de sa force de travail qu’il vend librement. Nous savons ce que cette liberté et égalité en droit cachent, quand la précarité, le chômage, les surnuméraires touchent des millions d’individus, c’est la libre exploitation de l’ homme par l’homme, c’ est la liberté du travail et l’envoie des forces de l’ordre contre les piquets de grève…L’égalité en droit se résume à :
« La majestueuse égalité des lois interdit aux riches comme aux pauvres de coucher sous les ponts, de mendier dans la rue et de voler du pain. » Anatole France
« La liberté politique est un simulacre et le pire esclavage possible. Il en va de même de l’égalité politique; c’est pourquoi il faut réduire en pièces la démocratie aussi bien que n’importe quelle forme de gouvernement. » (« Progrès de la réforme sociale sur le continent » – Engels)
Pourquoi la circulation est elle réglementée
Dès que les hommes se sont sédentarisés et se sont mis à cultiver la terre, la nécessité d’augmenter les échanges s’est imposée, ce fut l’époque des caravanes qui livraient des marchandises3, d’un pôle à un autre. Le commerce se développant la circulation sur les fleuves, puis les océans seront l’objet de règles. Sous le règne de la monarchie ou si l’on préfère de l’ ancien Régime en France, la circulation des biens et des personnes était l’objet de contrôle et de taxes diverses, que les marchands devaient acquitter dès qu’ils changeaient de paroisse. Après la révolution française 1789 et 1792, la liberté de circulation va s’étendre sous la pression du capital marchand , mais restera très limitée, le prolétariat étant enserré dans le système du livret ouvrier.4
L’Union européenne et la libre circulation des personnes
Si les déplacements des citoyens sur le territoire national des pays de l’UE est un fait acquis si l’on met de côté le Code de la route. L’espace Schengen5 est une zone de libre circulation des personnes sans contrôle aux frontières. Cette libre circulation est sans cesse l’ objet de remise en cause par la réintroduction temporaire de la vérification des passeports aux frontières nationales, comme ce fut le cas, en Pologne pour l’euro 2012 6, par plusieurs pays (Autriche, Danemark…) pour faire face à la crise migratoire en 2015, par la France après les attentats de novembre 2015, ou encore en 2020 par plusieurs pays pour faire face à la crise sanitaire due au Covid-19. Depuis la fin août 2021, une nouvelle crise migratoire liée à la prise du pouvoir par les talibans en Afghanistan vient secouer l’ union européenne.
État d’urgence sanitaire et liberté de circulation
Quand l’état d’urgence sanitaire est déclaré, le Premier ministre peut prendre des mesures qui limitent la liberté d’aller et venir (couvre-feu qui prive les habitants de leur liberté d’aller et venir à certaines heures, limitation des déplacements dans un rayon de 10 km, attestations nécessaires pour certains déplacements, etc.). Une telle atteinte à la liberté de circulation n’est possible que parce qu’elle est justifiée par une crise exceptionnelle et qu’elle est temporaire. Seulement le temporaire semble s’ éloigner de plus en plus et on nous parle d’une 4éme vague de pandémie. Récemment les habitants de la Martinique et de la Guadeloupe ont l’interdiction de se déplacer au delà de 5 Km pour cause de pandémie. Quand nous nous opposons au pass sanitaire ce n’ est pas pour défendre notre jouissance égoïste, mais parce que ce pass va devenir un moyen de contrôle permanent des populations et de leurs déplacements.
La liberté de circulation une question de classe sociale.
Cela fait maintenant plus de 50 ans que le monde du travail est contraint de loger de plus en plus loin de son lieu de travail, que le temps de transport est devenu pour une majorité un surcroît au temps de travail, même si le télétravail est venu atténuer le « mal des transports». Se loger de plus en plus loin à un coût non négligeable pour les travailleurs et depuis peu de l’écologie. Les pouvoirs publics ont été contraints pour diverses raisons de faire financer une partie des frais de transports par le patronat.
De la carte orange au pass navigo
Le financement d’une partie des frais de transport par le patronat et autres, n’est pas le résultat d’une lutte des classes, mais une nécessité pour le capital qui devait embaucher des salariés venant de la périphérie des grandes villes. Les banlieusards des cités-dortoirs soumis à de longues distances de transport ne pouvant pas en assumer seuls le tarif. Il fut mis en place dans les grandes villes des systèmes d’abonnements. Par exemple en région parisienne.
La carte Orange crée en 1975,fut le nom d’un titre de transport sous forme d’abonnement hebdomadaire ou mensuel, qui permettait de se déplacer de manière illimitée en Île-de-France par les différents moyens de transport en commun gérés par le Syndicat des transports d’Île-de-France (STIF, devenu Île-de-France Mobilités en 2017), à l’intérieur de zones tarifaires. Il se présentait sous la forme d’un coupon avec une piste magnétique et était accompagné d’une carte nominative numérotée sur laquelle le titulaire devait apposer sa photographie et sa signature. À partir de 2005, le support physique passera du ticket magnétique à la carte sans contact dite « carte Navigo »7.
La naissance et le développement « des transports gratuits » dans les villes
Le Luxembourg, dès le 1er mars 2020, fut le premier pays à offrir des transports publics gratuits sur tout son territoire. La même année, Tallinn (Estonie) sera la plus grande ville et la seule capitale au monde ayant instauré la gratuité.
En Belgique, l’expérience des quatre lignes gratuites dans Mons intra-muros est remise en cause depuis juillet 2016. Le parti du travail de Belgique veut la gratuité des transports en commun sur tout le territoire. Sur le site de wikipédia, nous pouvons nous rendre compte de la progression de la gratuité des transports dans le monde.
Nous savons que la gratuité n’est pas gratuite, mais est financée par les autorités nationales, régionales ou locales par le biais de la fiscalité ou par les employeurs par le versement transport en France. Elle fait souvent partie des programmes électoraux, mais tarde à se développer, nous devons donc participer et faire de l’ agitation autour de cette revendication qui est de l’ intérêt de notre classe de son organisation de ses déplacements.
C’est bien sur du réformisme, le seul aspect révolutionnaire de la réforme est de faciliter les contacts tout le contraire du confinement sanitaire. Les écologistes sont pour voyant dans le transport gratuit, la limitation de l’usage des voitures, d’autres plus localistes veulent redynamiser les centres-villes chacun dans cette revendication y voyant midi à sa porte. Les chômeurs ne seront plus soumis aux charges de transport pour chercher du travail , les seniors pour faire leur courses de proximité…
La gratuité des transports à ses répercussions sur certains métiers qui peuvent disparaître. Plus besoin de contrôleurs, soulagement pour les conducteurs de bus qui ne vendent plus de ticket et évitent les conflits.
Dans certaines villes, une taxe payée par les entreprises semble convenir à celles-ci car elle n’ont plus à financer les titres de transport. Dans beaucoup de villes, ce sont les entreprises qui payent la facture au moyen du « versement transport » calculé sur la base de leur masse salariale. A Aubagne, le versement transport a triplé avec la mise en place de la gratuité passant de 0,6% à 1,8% de la masse salariale. Mais le versement transport a un plafond qui ne suffit pas à couvrir l’ensemble des coûts. La gratuité va rapidement butter sur son financement, il faudra alors d’augmenter les impôts locaux autrement dit la taxe d’habitation ou encore des différentes taxes foncières…
La gratuité peut aussi permettre de diminuer les dépenses liées au fonctionnement du service : plus besoin de fabriquer des tickets, de machine pour les composter ou encore de payer des contrôleurs. La suppression des billets fait ainsi économiser à Châteauroux plus de 100 000€ par an.
Dans tous les cas, les villes françaises dépensent en moyenne 9 fois plus pour les voitures en travaux de voirie ou de stationnement que pour les transports en commun. Une partie de cet argent pourrait alors être consacrée au développement des transports en commun.
Quelques exemples de villes qui pratiquent la gratuité des transports dans le monde
En France
C’est le cas des villes comme Dunkerque mais aussi Calais, Libourne, Niort, Aubagne, Gap, Porto Vecchio, Puteaux ou encore Aubagne, pour ne citer qu’elles. En tout, ce sont 35 villes françaises qui sont concernées. D’après l’Observatoire des villes du transport gratuit.
Tallinn (440 000 hab.) – Estonie
Quand on parle de gratuité des transports hors de France, le cas de Tallinn est le premier qui fait référence. La capitale Estonienne est la première et seule capitale mondiale à avoir franchi le pas. Depuis 2013, les quelques 440 000 habitants peuvent ainsi profiter de cette mesure grâce à une « green card », facturée tout de même 2 euros, et délivrée après avoir fourni un justificatif de domicile. Les non-résidents n’ont pas accès à cet avantage.
Après trois ans, on constate que la fréquentation a augmenté de 8% et que les profits de sa régie de transport ont aussi augmenté à hauteur de 20 Millions d’euros.
Portland (640 000 hab.) – USA
La ville avait instauré dès 1975 la gratuité dans le centre-ville mais pour finalement en réduire le périmètre au fur et à mesure : en 2010 les bus ont été retirés de l’offre et en 2012 tout a été stoppé. Ceci, à cause du besoin d’économies à faire mais aussi à cause de fraudes, les passagers embarquant dans la zone gratuite en profitant pour aller bien au-delà.
Chengdu (14 millions hab.) – Chine
Les habitants de Chengdu, capitale de la province du Sichuan, dans le sud-ouest de la Chine, pourront désormais emprunter gratuitement 33 lignes de bus et prendre le métro à moindre frais à partir du 10 octobre, grâce à une mesure gouvernementale visant à alléger la congestion de la circulation. Un porte-parole du Groupe des transports municipaux de Chengdu a déclaré que cette mesure serait valable jusqu’en juin 2013 et que la gratuité s’étendrait à 44 lignes de bus d’ici la fin de ce mois.
Les transports collectifs sont gratuits de 5 à 7 heures du matin. L’objectif est de désengorger les lignes durant les heures d’affluence, en incitant les usagers à se rendre plus tôt au travail.
Les gratuités sélectives
Il y a des villes ou le transport gratuit est limité sur certains jours.C’est le cas à Montpellier (34) où les habitants de la métropole peuvent circuler gratuitement sur le réseau de bus et tramways, tous les week-ends. En Seine-Maritime, la ville de Rouen (76) teste, depuis le 5 septembre, la gratuité des transports dans l’agglomération tous les samedis. L’expérimentation a commencé en septembre et durera un an. À Strasbourg, c’est jusqu’au 3 octobre que les bus et tram seront gratuits les samedis. A Quimper, uniquement les samedis matins et dimanches .
Depuis la rentrée 2020, les transports en commun de la capitale sont devenus gratuits pour les Parisiens de moins de 18 ans. Ils peuvent donc voyager gratuitement à bord des bus, métros et RER parisiens, grâce au remboursement de leur pass Imagine’R dont le coût s’élève à 350 euros. La mesure s’étend même jusqu’à 20 ans pour les jeunes en situation de handicap. Dans tous les cas, le remboursement du pass n’est pas automatique et se fait via un formulaire en ligne.
Expansion du transport « gratuit » pour tous. Pas de pass sanitaire.
notes
1 fustigé par Marx ( voir en particulier « La question juive » de K.Marx)
2e Chaque fois que, pendant ces vacances, s’éteignit le bruit confus du Parlement, et que ce dernier se sépara pour se répandre dans la nation, il apparut d’une façon indiscutable qu’il ne manquait plus qu’une seule chose pour compléter la véritable figure de cette République : rendre ses vacances permanentes et remplacer sa devise : Liberté, Egalité, Fraternité ! par les termes non équivoques de : Infanterie, Cavalerie, Artillerie ! » Le 18 brumaire
3A l ‘époque de l’ esclavage l’ étre humain était considéré comme une marchandise comme les autres
4Le livret d’ouvrier fait sa première apparition le 17 août 1781, sous la pression des corporations et de la police. C’est un petit cahier qui identifie l’ouvrier, enregistre ses sorties et ses entrées chez ses maîtres successifs lors de son tour de France. À l’époque, ce livret doit être paraphé selon les villes par un commissaire de police ou par le maire ou l’un de ses adjoints. Le premier feuillet porte le sceau de la municipalité, et contient le nom et le prénom de l’ouvrier, son âge, le lieu de sa naissance, son signalement, la désignation de sa profession et le nom du maître chez lequel il travaille. Les gens du voyage, qui étaient encore soumis à fournir un livret de circulation en raison de leur mode de vie,n’ont plus à se munir de ce livret depuis la loi égalité et citoyenneté du 27 janvier 2017,
5 En 2021, l’espace Schengen regroupe 26 États : 22 des 27 membres de l’Union européenne (UE). La Bulgarie, la Roumanie, Chypre et la Croatie n’y participent pas encore. L’Irlande, quant à elles, bénéficie d’un statut particulier et ne participe qu’à une partie des dispositions Schengen ; quatre États associés, non-membres de l’UE : Norvège, Islande, Suisse et Liechtenstein.
6 Il s’ agit du championnat d’Europe de football 2012, communément abrégé en Euro 2012, compétition organisée par l’UEFA . Il s’est déroulé en Pologne et en Ukraine du 8 juin au 1er juillet 2012. Ce spectacle va engendrer un coût de 25 milliards d’ euros dont une bonne partie concerne les transports, 1000 km d’autoroutes, 2000 km de voies express et plus de 600 km de voies ferrées ont été construites ou modernisées. Les aéroports des quatre grandes villes accueillant la compétition (Varsovie, Gdansk, Poznan et Wroclaw) ont été agrandis. Et les transports en commun ont également été améliorés : 100 nouveaux bus, 193 tramways et 13 trains de banlieue uniquement pour l’Euro.
7Depuis le 31 mars 2010, le nom de carte Orange est abandonné par son gestionnaire, le STIF (devenu Île-de-France Mobilités), qui renomme les abonnements hebdomadaires et mensuels respectivement « Navigo semaine » et « Navigo mois »
PING : https://queonossosilencionaomateinocentes.blogspot.com/2021/09/gbad-livre-circulacao-de-pessoas-e-o.html