Asie/Afrique

Crainte d’une nouvelle agression israélienne contre le Liban

Par Adnan Abu Amer (revue de presse: Chronique de Palestine – 26/7/22)*

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Source secondaire: France-Irak Actualité.

L’armée d’occupation israélienne et le Hezbollah libanais ont soutenu une guerre féroce en juillet-août 2006, qui a duré 34 jours et tué 165 soldats et colons israéliens. Le souvenir de cette guerre donne encore des cauchemars aux Israéliens et a laissé même après toutes ces années de graves cicatrices mentales, sans doute aussi graves que la guerre d’octobre 1973 contre l’Égypte.

Le Hezbollah s’est depuis abstenu de harceler Israël, et n’a pas répliquer à ses agressions afin de ne pas provoquer au Liban plus de destruction alors que le pays traverse une crise économique et sociale. Le parti a également vu ses appuis diminuer lors des récentes élections législatives.

Le seizième anniversaire de la Seconde Guerre du Liban survient à un moment où la tension libano-israélienne s’intensifie à nouveau, en particulier après que le Hezbollah a fait voler des drones au-dessus du champ gazier méditerranéen.

Israël estime que le Hezbollah a la capacité d’utiliser beaucoup plus de puissance de feu qu’il ne l’a fait jusqu’à présent s’il prend vraiment la décision d’attaquer, faisant de cette organisation une véritable menace pour les actifs économiques de l’État occupant, bien plus qu’en 2006.

Les Israéliens ont intercepté les drones au-dessus de la plate-forme gazière de Karish à 100 kilomètres au large des côtes israéliennes, mettant en alerte les forces d’occupation et les médias israéliens, leur donnant une occasion de parler des menaces, d’une réponse possible et du calendrier des opérations contre le Hezbollah.

Israël est bien conscient de l’ampleur de la menace posée par le mouvement libanais, mais les drones ont accru les inquiétudes israéliennes.

Cela démontre que le Hezbollah renforce ses capacités, même s’il ne les utilise pas toutes. Israël n’est pas surpris, étant donné que le Hezbollah possède des missiles à courte et longue portée, des missiles sol-sol et un certain nombre d’autres armements de précision.

À cela, il faut ajouter ses véhicules aériens sans pilote, l’utilisation de drones près de la clôture frontalière, la menace de missiles de croisière sur la côte et son attaque contre un navire de guerre pendant la guerre de 2006, après quoi le Hezbollah a reconstitué et renforcé ses capacités militaires.

Le récent incident de drone suggère qu’il y a une course aux armements entre le mouvement et Israël, le Hezbollah obtenant un soutien financier et technologique de l’Iran, ce qui le rend prêt à faire face à tous les défis de l’État d’occupation.

L’incident a également révélé le fait qu’Israël n’était pas en mesure de protéger ses eaux territoriales et pourrait faire face à d’autres menaces maritimes.

De plus, les capacités de défense navale d’Israël pourraient ne pas faire suffire à face à la menace du Hezbollah. Le mouvement peut détecter des cibles volant à basse altitude et les intercepter et Israël pourrait donc devoir préparer ses forces à des situations plus difficiles, basées non seulement sur les capacités du Hezbollah, mais aussi sur celles de l’Iran.

Divers forums en Israël ont récemment mis en garde contre la possibilité d’une confrontation imminente en raison du différend avec le Liban sur le champ gazier en Méditerranée et la démarcation de la frontière maritime.

Des menaces ont été échangées entre les deux parties, ce qui pourrait inciter les forces d’occupation israéliennes à se montrer plus disposées à franchir le pas d’une attaque aérienne et maritime globale, en mettant davantage l’accent sur les opérations terrestres.

Pendant ce temps, il y a un sentiment croissant parmi les Israéliens qu’une guerre peut éclater à tout moment, et ceci sans une préparation suffisante de la part de leur gouvernement et de leur armée.

Toute attaque israélienne contre le Hezbollah visera en premier les infrastructures libanaises. Israël avait mené la guerre de 2006 selon les règles du Hezbollah et a été entraîné dans une bataille dans laquelle le mouvement de résistance avait l’avantage relatif.

Il était clair dès le départ que l’armée israélienne n’allait pas gagner dans ce qui allait devenir le Vietnam israélien. L’État d’occupation a tenté de vaincre une armée de guérilla en utilisant l’artillerie et les bombardements aériens, déployant ses forces progressivement, tandis que la volonté publique devait être brisée par le nombre de morts et de blessés.

A l’occasion de ce dernier anniversaire de cette guerre, ce qui reste aux Israéliens, c’est le goût amer de l’échec.

Ils ne peuvent même pas prétendre qu’ils l’avaient emporté, et le facteur de dissuasion d’Israël a été brisé, soulevant des questions sur sa présence et son rôle sur la nouvelle carte du Moyen-Orient.

Les déclarations d’anniversaire de personnalités militaires et politiques montrent clairement que 16 ans plus tard, Israël est impuissant, confus et extrêmement inquiet à l’idée d’une troisième guerre avec le Liban.

Une telle guerre devrait voir des troupes terrestres israéliennes engagées sur la ligne de front, ce qui la rendrait très coûteuse pour l’État occupant. Ses récentes offensives militaires contre les Palestiniens à Gaza confirment qu’Israël est incapable de supporter des pertes importantes.

Une troisième guerre au Liban exigerait sans aucun doute un prix très lourd à payer.

Adnan Abu Amer dirige le département des sciences politiques et des médias de l’université Umma Open Education à Gaza, où il donne des cours sur l’histoire de la Cause palestinienne, la sécurité nationale et lsraël.Il est titulaire d’un doctorat en histoire politique de l’université de Damas et a publié plusieurs ouvrages sur l’histoire contemporaine de la Cause palestinienne et du conflit israélo-arabe.

Il travaille également comme chercheur et traducteur pour des centres de recherche arabes et occidentaux et écrit régulièrement pour des journaux et magazines arabes. Son compte Facebook.

Source et  Traduction : Chronique de Palestine

Version originale : 19 juillet 2022 – Middle East Monitor

 


Le Liban entre résistance et capitulation

Publié par Gilles Munier sur 28 Juin 2022, 07:19am

Catégories : #Liban

Par Abdel Bari Atwan (revue de presse : Chronique de Palestine – 18/6/22)*

Beyrouth ne doit pas se laisser intimider et renoncer à ses droits d’exploitation maritime, écrit Abdel Bari Atwan.

Dimanche dernier, le chef d’état-major de l’armée israélienne, Aviv Kochavi, a menacé d’attaquer des milliers d’endroits ciblés au Sud-Liban – au motif qu’ils abritent des missiles, des drones ou du matériel militaire du Hezbollah – et a averti les habitants de la région concernée à évacuer leurs maisons.

Ces menaces ont été proférées la veille de l’arrivée au Liban de l’envoyé américain pour l’énergie, Amos Hochstein.

Elles étaient également une réponse à l’avertissement du Secrétaire général Hassan Nasrallah selon lequel le Hezbollah ne resterait pas les bras croisés pendant qu’Israël pille le pétrole et le gaz offshore du Liban et l’empêcherait d’extraire du gaz du champ de Karish.

Le général Kochavi sait parfaitement qu’il ne peut pas faire peur au Hezbollah. Son objectif était de fournir des munitions politiques à ses opposants libanais qui se sont pliés au stratagème israélo-américain dans le pays.

Cela explique les fuites qui sont sorties des réunions de Hochstein avec divers politiciens libanais au pouvoir ,indiquant qu’ils lui ont offert des concessions « tangibles » qu’il a décrites comme utiles aux négociations indirectes visant à résoudre le différend.

Les autorités libanaises ont montré qu’elles étaient la partie faible dans le différend, en implorant l’envoyé américain de reprendre rapidement sa médiation et en lui proposant de revenir sur les droits maritimes légaux du Liban.

Cela encouragera très certainement Israël à se comporter de manière encore plus autoritaire et, en utilisant ses vastes pouvoirs d’extorsion, à s’en tenir à ses exigences et à ne faire aucune concession. Trente ans de [simulacre de] négociations israélo-palestiniennes en sont un bon exemple.

Les Libanais, quel que soit leur camp politique ou communautaire, ont deux options.

Premièrement : entrer dans une négociation à long terme de style palestinien – dans laquelle ils offrent une concession après l’autre et n’obtiennent rien en retour, sauf plus d’extorsion et des demandes de concessions supplémentaires – et devenir les serviteurs indirects de l’occupation israélienne

Deuxièmement : l’option de l’emploi de la force, qui a vaincu Israël à deux reprises dans le passé : en 2000, alors qu’il ne pouvait plus encaisser les pertes imposées par la résistance et s’est unilatéralement retiré du Liban ; et ensuite la bande de Gaza en 2005.

Les trois dirigeants du Liban – le président, le Premier ministre et le président du parlement – préfèrent l’option des négociations pour éviter la guerre, dans l’espoir de permettre au Liban d’obtenir une partie de sa part du pétrole et du gaz, comme s’il s’agissait d’une faveur des États-Unis.

C’est une grave erreur qui reflète la myopie et l’incapacité à comprendre les développements politiques dans la région – en particulier la formation imminente d’une alliance israélo-arabe sunnite pour affronter militairement l’Iran sous la direction des États-Unis.

Ces espoirs sont donc complètement vains, car la priorité absolue de cette alliance est de décapiter le Hezbollah.

L’extraction de gaz libanais, syrien ou palestinien (de la bande de Gaza) est conditionnée à la reddition et au désarmement de la résistance, sans garantie d’obtenir quoi que ce soit en retour. L’amère expérience de la Pax Americana/Israelica par l’Autorité Palestinienne (AP) en est une illustration.

L’État d’occupation israélien ne permettra pas au Liban d’extraire son pétrole et son gaz tant qu’un seul missile du Hezbollah restera au Sud-Liban. L’objectif est de mettre le peuple libanais à genoux et de l’affamer pour qu’il se soumette, comme ce fut le cas pour les Irakiens après l’invasion du Koweït par leurs forces.

La famine est en effet plus ruineuse pour un pays que la guerre civile.

Saddam Hussein a cru les médiateurs et a permis aux inspecteurs/espions de fouiller ses palais et de d’éradiquer ses [prétendues] armes biologiques et chimiques. Sa récompense pour ces concessions n’était pas seulement d’être renversé, arrêté et exécuté, mais que l’Irak soit occupé, ses ressources pillées et le pays réduit à l’état misérable dans lequel il se trouve aujourd’hui.

Nasrallah a déclaré dans son dernier discours que le temps ne joue pas en faveur du Liban et que l’objectif immédiat de la résistance est d’empêcher Israël d’exploiter le champ de Karish, et de pouvoir utiliser ses 600 milliards de dollars de pétrole et de gaz pour atténuer la crise économique du Liban et profiter à tous ses citoyens.

L’année dernière, les trois dirigeants du Liban se sont pleinement soumis aux exigences des États du Golfe, renonçant à la souveraineté et au respect de soi du pays, et n’ont obtenu aucun retour.

Aujourd’hui, ils se préparent à commettre le même péché sous prétexte de l’aggravation des crises du pays, sans reconnaître que ces crises ont été en grande partie créées par les États-Unis et Israël.

Ces derniers ont détruit l’économie du Liban, paupérisé son peuple et l’ont soumis à un siège, exploitant les divisions internes libanaises et l’existence d’un camp qui mise sur le mirage du soutien et d’un salut venu des États-Unis et d’Israël.

Hochstein – l’envoyé américain né en Palestine occupée et qui a servi pendant trois ans dans l’armée israélienne – sera-t-il plein de compassion pour les Libanais ? Traitera-t-il équitablement leurs droits et sera-t-il un intermédiaire honnête ?

Nous laisserons la réponse à ceux qui lui déroulent des tapis rouges, comptent sur son intégrité et capitulent devant lui.

Abdel Bari Atwan est le rédacteur en chef du journal numérique Rai al-Yaoum. Il est l’auteur de L’histoire secrète d’al-Qaïda, de ses mémoires, A Country of Words, et d’Al-Qaida : la nouvelle génération. Vous pouvez le suivre sur Twitter : @abdelbariatwan

*Source et Traduction : Chronique de Palestine

Version originale : 17 juin 2022 – Raï al-Yaoum

Robert Bibeau

Auteur et éditeur

3 réflexions sur “Crainte d’une nouvelle agression israélienne contre le Liban

  • Али14

    Sans le Hezbollah le Liban existerait pas, les parasites sionistes l’auraient déjà squattés.

    One Two Three, Viva les Shiis.

    From Algiers🇩🇿, With Love ❤️

    Répondre
  • Berbery Joseph

    Désormais, Israël doit faire attention au Hezbollah au Nord, au Hamas au Sud et à la Syrie à l’Est.
    Jamais les Israéliens ne se sont sentis aussi fragilisés. D’où la grande prudence et l’amorce du début du commencement d’un sentiment qu’ils ne connaissaient pas jusqu’ici : en Français nous appelons ça la MODESTIE. J’ignore s’il existe un mot hébreux exprimant cela.

    Répondre

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