Une information qui ne manque pas de sel
OLIVIER CABANEL — Tout a été dit sur le sel ou presque, mais nous avons peut-être oublié l’essentiel.
De Sodome à Gomorrhe, où la femme de Lot fut changée en statue de sel pour avoir osé regarder en arrière, jusqu’à Mandrin, le bandit bien-aimé, qui, à l’instar de Robin des bois, prenait aux riches pour donner aux pauvres (contrairement à ce que fait notre nouveau président), en leur procurant du sel à un prix bien plus attractif.
Pour Mandrin, il faut préciser que, pour se venger d’une injustice que le pouvoir en place avait fait subir à son père, il s’était mis hors la loi et avait levé quasiment une armée pour organiser son petit trafic, jusqu’à sa fin tragique.
Nos bons docteurs nous encouragent à ne pas abuser du sel, lequel est responsable avéré d’hypertension artérielle, ainsi que l’affirme l’OMS dans son rapport de 2006.
En France, affirme Pierre Meneton (chercheur à l’Inserm), le nombre de décès dus à un accident cardiovasculaire est de l’ordre de 100 par jour.
En gros, le sel serait responsable de 75 000 accidents cardiovasculaires en France, chaque année, et 25 000 personnes y trouveraient la mort.
Si l’on compare avec les 65 000 morts annuels dus au tabac, ce n’est pas rien.
Les traitements que suivent les malades souffrant d’insuffisance cardiaque ou rénale coûtent 2,3 millions d’euros à notre Sécurité sociale, et concernent plus de dix millions de personnes.
Le sel serait aussi un agent des cancers de l’estomac.
Il ne faudrait pas dépasser deux grammes par jour, et on en serait aujourd’hui à plus de dix.
Pour l’instant, le sel a donc bien mauvaise presse.
Pourtant, dans l’inconscient populaire, il est plutôt positif :
Quoi de plus revigorant que de « mettre son grain de sel » ou « d’apporter du sel à une discussion qui s’endormait » ?
Ne faut-il pas donner un peu de sel à cette vie fade, et si peu excitante ?
Et puis, le sel est essentiel.
Il permet la conservation des aliments et, sans sel, vous pouvez faire une croix sur la morue et sa brandade nîmoise, les sardines, le hareng (saur, justement), le saumon, le saucisson pur (ou impur, suivant les religions) porc, etc.
Comment iriez-vous skier, si un engin public n’avait dispersé un peu de sel sur la chaussée, pour vous permettre d’accéder sans trop de danger à une station hivernale ?
Et puis, il y a surtout sel et sel :
Aucune comparaison n’est à faire entre un sel de Guérande et un sel Gemme.
L’un est un produit naturel né de la mer et séché au soleil, et le meilleur est bien sûr la fleur de sel, récoltée à la main.
L’autre vient de mines et il doit être raffiné avant d’être utilisé : on y retrouve des anti-agglomérants (phosphates, carbonates de calcium, magnésium), mais aussi du bioxyde de silicium, de l’aluminosilicate de sodium, lesquels soulèvent quelques inquiétudes justifiées pour notre santé.
Ce sel-là n’a bien sur pas les qualités du précédent.
Mais il y a mieux à faire avec le sel :
En Norvège, l’Etat a décidé de construire le premier prototype de centrale électrique osmotique mondiale.
Le pouvoir osmotique est une pure source d’énergie renouvelable et pourrait, d’après l’estimation des scientifiques norvégiens, produire 1 600 Térawatts/heure par an.
Cette centrale utilisera de l’eau de mer et de l’eau douce séparée par une membrane.
L’eau douce crée une pression lorsqu’elle traverse la membrane pour se mélanger avec l’eau de mer, et cette pression est convertie en énergie.
Voilà une information qui ne manque pas de sel, n’en déplaise aux nucléocrates prêts à gommer la commémoration du drame de Tchernobyl.
Car comme disait un vieil ami africain :
« Même le poisson qui vit dans l’eau a toujours soif ».
Versão em Língua Portuguesa:
https://queonossosilencionaomateinocentes.blogspot.com/2022/08/informacao-que-nao-carece-de-sal.html