7 au Front

La bataille des retraites…victoire ou défaite pour les salariés français?

Par Robert Bibeau.

Cet article est disponible en anglais, en italien et en espagnole ici:
Articles du 19 avril[27108]

Il est temps de nous pencher sur la guerre de classe que le prolétariat français a courageusement menée, pendant trois mois, contre le Grand capital et son État de laquais.

La première question qu’il faut trancher : Pourquoi le gouvernement des riches s’intéresse-t-il aux régimes de retraite des travailleurs, « des petites gens d’en bas », de 27 millions de salariés français ?

La réponse est évidente, parce que l’État bourgeois est le plus gros employeur de France et donc le plus gros contributeur aux régimes de retraite et parce que l’État bourgeois a pour devoir d’assurer les conditions économiques et sociales (éducation, formation, soin de santé, EHPAD, etc.) de reproduction des esclaves salariés. L’État bourgeois a aussi pour mission d’assurer les conditions de la valorisation et de l’accumulation du capital.

Afin de remplir ses différentes fonctions, l’État des riches doit s’assurer qu’il y a disponibilité d’une abondante main-d’œuvre qualifiée, docile, exploitable et corvéable à volonté, productrice de plus-value, dispensatrice de surtravail non payé, de laquelle le capitaliste extraira le profit source de l’accumulation.

Dans les sociétés industrielles avancées, comme la France, le niveau de productivité du travail salarié mécanisé robotisé numérisé est si élevé qu’il a été possible au capital, à son État et aux syndicats (ces appendices de l’État bourgeois) de mettre de côté une partie du salaire des employé(e)s afin d’assurer leur consommation une fois leur phase active terminée.

Le capital et son État ont ainsi constitué d’énormes réserves monétaires appelées fonds de pension que les cartels fiduciaires comme BlackRock administrent et investissent à la bourse et en obligations gouvernementales.  Combien BlackRock pourrait gagner avec la réforme des retraites ? Les faits, rien que les faits – Capital.fr

Voici que la bourse va mal, les vents spéculatifs la balaient et la menace d’effondrement, tandis que l’inflation des prix à la consommation s’emporte, ce que la hausse des taux directeurs des banques centrales tente de juguler…mais peine perdue, après vingt années de largesses monétaires désordonnées (Quantitative Easing), d’émissions d’argent gratuit et sans valeur, la dette nationale française est hors contrôle (3000 milliards d’euros soit 150% du PIB). Pire, les emprunts de l’État sont de plus en plus dispendieux et l’endettement gouvernemental va croissant, au point que la cote de crédit de la France est menacée…de nouvelles déconvenues.

Après avoir confisqué toutes les ressources de la nation, l’État bourgeois se tourne en dernier recours vers les fonds de pension (régime de retraite) qui recèlent 150 milliards d’euros d’épargnes populaires selon le professeur Gilles Rabaud  https://twitter.com/Dr_Steph_GAYET/status/1640352805432041472

Le Professeur Rabaud déclare « Il n’y a pas de problème de régimes de retraite en France, le système des retraites est l’une des plus grandes réussites de la République. » Le Président du CADES ajoute «Jamais l’État n’a eu à arbitrer une telle manne – 150 milliards d’euros d’épargnes accumulées.» Le Professeur Rabaud poursuit «Il y a déjà eu une réforme des retraites en France. Les pensions des retraités ont vachement baissé depuis quelques années. Le véritable problème des retraites en France c’est la pauvreté des prestataires qui ne parviennent pas à boucler leur fin de mois…» Le report de l’âge de la retraite à 64 ans n’est qu’un trompe l’oeil. De nombreux retraités, même très âgés, sont obligés de travailler à temps partiel afin de boucler leur budget…voilà le drame des retraités.

En définitive, la réforme des retraites en France, comme elle le fut dans les pays occidentaux, a été une vaste arnaque de l’État des riches pour exproprier les fonds de pension des salariés afin de retarder le moment de la faillite nationale et la dévaluation drastique de l’euro puisque tous les pays de l’Union sont au même diapason. Par sa «réforme-arnaque» Macron remet l’État français sur les rails de l’Union européenne. L’arnaque de la réforme des retraites en France…Macron touche pas à la caisse! – les 7 du quebec

La gauche opportuniste et la droite nationaliste s’écriront «haro sur le baudet de l’Union européenne!» Futilité, comme nous le disions précédemment, tous les pays capitalistes occidentaux et orientaux ont procédé à la confiscation des régimes de retraite de leurs salariés…le dilemme est bien d’estimer si le prolétariat de France avait la capacité, à lui seul, d’enrayer l’attaque mondiale du Grand capital.

Ce qui nous amène à notre deuxième question : Le prolétariat français pouvait-il gagner la bataille des retraites et des fonds de pension ?

Le prolétariat de France, enfermé au sein du capitalisme d’État totalitaire, ne pouvait gagner la guerre des retraites, dont le Grand capital a fait un point d’orgue pour le gouvernement Macron. Encore cette fois, le prolétariat avait le choix entre la retraite en bon ordre et l’insurrection. Nous pensons que son choix a été judicieux.

Il est injuste et futile de prêchi-prêcha la classe prolétarienne par des remontrances de ce genre…

« C’est bien fait pour vos gueules ! Fallait pas faire confiance aux syndicats!
Fallait pas faire une grève par procuration! Fallait pas faire des actions à saute-mouton!  Fallait pas dire du mal du Black Bloc! Fallait immédiatement faire une grève générale sauvage et illimitée!  En une semaine on aurait gagné !  Mais vous avez tout fait pour perdre et vous avez perdu. Maintenant, faut pas vous plaindre : allez bosser comme des cons et dites merci au patron qui a la gentillesse de vous donner du boulot jusqu’à la mort. Ce n’est pas aux patrons que j’en veux, c’est à vous travailleurs! »
http://mai68.org/spip2/spip.php?article14931

Nous devons comprendre pourquoi le prolétariat de France n’a pas fait ce que ce militant aurait souhaité. Pourquoi le prolétariat n’a-t-il pas transformer cette bataille sur le front économique, en un affrontement sur le front politique – insurrectionnelle – de la guerre de classe?  Cette attaque du Grand capital était pourtant gravissime et le mouvement populaire contre cette réforme montre bien que le prolétariat français comprenait la gravité du moment – l’importance de l’assaut…

Voyant plus loin que le bout de son nez, le prolétariat a bien compris que les conditions objectives (l’effondrement de l’économie capitaliste et de son appareil étatique, le chaos politique), que les conditions subjectives (la conscience politique de classe et conséquemment l’organisation politique révolutionnaire), ainsi que les conditions internationales (le soutien de la classe ouvrière mondiale) de la révolution prolétarienne faisaient défaut – n’étaient pas encore à maturité. Dans ces conditions il lui était impossible d’arracher la direction du mouvement populaire des mains de la bureaucratie syndicale et de la petite bourgeoisie paupérisée. Mieux valait laisser ces valets terminer la liquidation du mouvement et se retirer en bon ordre.

Question subsidiaire : La bataille contre la réforme des retraites en valait-elle la chandelle?

Évidemment que oui. Le prolétariat doit toujours mener la lutte de résistance sur le front économique de la lutte de classe. Ainsi il apprend la guerre de classe en la faisant. Par sa résistance farouche, le prolétariat français a pris la mesure de la hargne et du désespoir du capital, il a montré la voie à suivre aux contingents ouvriers des autres pays et comme l’écrit Khider Mesloub

« Cette guerre de classe  dévoile le caractère illusoire de la démocratie bourgeoise. En effet, la démocratie est la feuille de vigne derrière laquelle se dissimule la dictature du capital. Dans l’histoire, Démocratie et Dictature, deux modes de régulation politique siamois au sein du même mode de production capitaliste se succèdent alternativement au sein du même État, au gré des conjonctures économiques et sociales, mais, surtout, au gré de l’assoupissement ou de l’exacerbation de la lutte de classe. » Le Conseil constitutionnel français veille sagement sur les intérêts de la bourgeoisie – les 7 du quebec

La bourgeoisie française  y pensera à deux fois avant d’imposer la dictature fasciste au peuple de France.

Robert Bibeau

Auteur et éditeur

10 réflexions sur “La bataille des retraites…victoire ou défaite pour les salariés français?

  • Ni victoire ni défaite pour les salariés français

    « le prolétariat a bien compris que les conditions objectives (l’effondrement de l’économie capitaliste et de son appareil étatique, le chaos politique), que les conditions subjectives (la conscience politique de classe et conséquemment l’organisation politique révolutionnaire), ainsi que les conditions internationales (le soutien de la classe ouvrière mondiale) de la révolution prolétarienne faisaient défaut – n’étaient pas encore à maturité. Dans ces conditions il lui était impossible d’arracher la direction du mouvement populaire des mains de la bureaucratie syndicale et de la petite bourgeoisie paupérisée. »

    Oui et non, les conditions objectives, crise guerre et inflation ne laissent pas le choix…

    Le mouvement social en voie de liberation, continue et s’auto organise en inventant chaque jour ,construisant par ses actes ; la « nouvelle direction » du mouvement populaire :

    https://www.facebook.com/luttesinvisibles

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    • En effet VLAD2

      La conjoncture mondiale évolue en notre faveur et comme le mouvement des Gilets jaunes l’a démontré, l’auto-organisation et la maturation de la conscience prolétarienne s’affermit

      Merci pour cette référence aux luttes invisibles (:-))

      Robert Bibeau

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  • jérôme blanchard de la brosse

    Même si marxisme et capitalisme sont tout aussi diabolique, le premier étant la réponse au mensonge par un autre mensonge,
    Je ne connais rien qui ne sache mieux démonter, analyser et comprendre le capitalisme que le marxisme. C’est un outil essentiel, même pour un non marxiste.
    Bien sûr que la lutte est toujours utile, avec ou sans victoire. Les défaites du présent feront les victoires de demain.
    Seule l’absence de lutte assure que rien ne change.
    L’homme n’est pas un loup pour l’homme, l’ être humain n’est pas naturellement violent.
    Le capitalisme, la propriété, la domination, le droit. Voilà les erreurs et les vanités qui rendent l’être humain mauvais.
    L’être humain n’a pas plus de droit qu’aucun autre être vivant, et seul les usurpateurs affirment autre chose par mille constructions, cent mille inventions de l’esprit et tous les artifices dont celui-ci est si fertile.
    L’être humain n’a de cesse de s’enorgueillir et de s’enfler de lui-même et de ses inventions, et à proportion, il se réduit à un être grotesque, misérable et malfaisant tant en pensée qu’en acte.
    Voici des millénaires que l’humanité presque toute entière passe à côté de ses talents et de ses dons, parce qu’elle refuse d’occuper humblement la place qui est la sienne et d’apprendre à vivre en communion avec les êtres qui l’entourent.
    Ceux qui ont rompu cette alliance sont les guides adulés, imités et enviés.
    Ceux qui l’ont sincèrement respecté ou l’ont vénéré et enseigné sont honorés pour être mieux mis à l’écart.
    Mais l’ordre des choses va changer, parce que la Terre n’est plus le monde infini d’antan. L’humanité s’est donnée tant d’importance, avec son modèle suprémaciste, qu’elle règne en maître absolu. Elle a pris toute les commandes, il lui faut assumer et se montrer capable.
    Pour l’heure, c’est proche du désastre.
    Ses inventions ou artifices, son modèle suprémaciste, ne la conduisent nulle part ailleurs qu’à faire émerger un enfer.
    Elle va bien devoir tout revoir.
    Les premiers seront les derniers.
    Le modèle du présent sera exécré au lieu d’être adulé.
    Toutes ces batailles dérivées, les luttes sociales, les luttes de pouvoir, les luttes de droits et privilèges seront balayées, sans combat. La victoire viendra d’ailleurs, de beaucoup plus haut dans les esprits et de beaucoup plus bas dans le monde vivant.

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  • Sprilibre

    Les syndicats auraient dû créer un logo commun sans précision de « chapelles »et inviter tous les citoyens à le porter toute la journée hors de chez eux, y compris celles et ceux qui n’avaient pas les moyens de faire grève.

    A défaut il était et reste possible de lancer une pétition « Macron démission » (rien de plus) par région administrative

    Signé : un manifestant indépendant octogénaire

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  • Les signes multiples de la radicalisation de masse en cours, préparent les actes révolutionnaires au présent ,un saut qualitatif :

    Vers où aller ?

    Publié le 21 avril 2023 par imagiter.over-blog.com

    https://www.imagiter.fr/2023/04/vers-ou-aller.html

    Les forces du désordre punis par les 64 ans ?

    La police et la gendarmerie confrontées à des départs massifs

    Un rapport de la Cour des comptes pointe les difficultés rencontrées par les deux institutions pour retenir leurs agents. Un phénomène qui va en s’amplifiant depuis 2020, alors que police et gendarmerie peinent à recruter.

    https://www.lemonde.fr/societe/article/2023/04/20/la-police-et-la-gendarmerie-confrontees-a-des-departs-massifs_6170372_3224.html?random=497498277

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  • Défaite.

    Il faut radicalement changer de mode de contestation.
    1) parce les salariés ne pourront suivre tous les moments de contestation (à cause des crédits. Chaque jour de manif et/ou de grève, c’est 50€)
    2) les syndicats le savent et savent que le pouvoir le sait.
    3) Il n’y a que les sympathisants qui semblent ne pas le savoir
    4 Qu’en plus de la pénalisation financière, il y a la violence de ceux en face (sur ordre du pouvoir, très certainement)

    Il faut donc trouver autre chose. Faire croire que l’on va gagner la bataille des retraites, en continuant de la sorte, c’est manipuler les gens, qui au bout de « x » manifs réaliseront leur échec.
    0 une utopie qui a prouvé sa valeur de nullité, je préfère une utopie neuve, n’ayant jamais été appliquée et donc on ne peut en juger. Mais ce serait aller à l’encontre des syndicats qui tiennent à leur pouvoir.
    Quand nous aurons testé cette nouveauté, alors là, on pourra en parler en connaissance de cause et sur du concret (même si ce n’est pas 100% du résultat escompté).

    https://wp.me/p4Im0Q-5Sq – JDG N° 81 – (Jr + 423) – Non un président n’a pas le pouvoir d’imposer ce qu’il veut au Peuple. A moins d’être un diktat-tueur

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  • Bravo Robert pour votre analyse. Il faut revenir au contexte. Nous sommes arrivés à la fin d’un cycle économique, politique et social apparu dans les années 80, avec le triste mitterrand. Grâce à la mondialisation sauvage, la délocalisation des usines, le chômage et la pauvreté de masse (15 millions de pauvres en France selon mes calculs), le Capital a pris un nouvel essor, obtenu une jeunesse nouvelle. A partir de la mort sociale de millions de femmes et d’hommes, il s’est fait des c. en or, à nul autre pareil.

    Aujourd’hui, ce même capital agonise sur le bord du chemin, baisse du taux de profit oblige. Comme dirait Brassens : « Avec le feu qui en reste, à peine y pourrait-on rôtir 4 châtaignes » (« Le 22 septembre »).

    Sur le plan international, la guerre en Ukraine montre à tous les français, y compris les plus ignorants en géopolitique, comment l’Occident (EU + Union Européenne) a pris un sérieux coup dans l’aile. La victoire de la Russie sur l’OTAN/EU/UE est à la fois certaine et proche dans la durée : l’été 2023 au plus tard.

    Les conséquences sur le plan intérieur français sont incalculables. Jamais, notre programme politique en 41 propositions du « Rassemblement Pouvoir au Peuple » n’a été autant d’actualité. Nous avons une fenêtre de tir comme jamais. Il faut nous tenir prêts.

    Répondre
  • Ping : Quand les Bobos perdent leurs illusions et goutent à la paupérisation (E. Todd) – les 7 du quebec

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