7 au Front

Les luttes ouvrières en France et les syndicats

Titre original: La lutte contre la réforme des retraites

Série d’articles publiée par le GIGC dans la revue Révolution ou Guerre, no 24, mai 2023, sur (www.igcl.org)

La revue Révolution ou Guerre, no 24, mai 2023 est disponible ici en format PDF:
fr_rg24

Cet article est disponible en anglais, en italien et en espagnol ici:
Articles du 24 mai[28990]

Partie 1

Débat au sein du camp prolétarien en France et en Grande Bretagne

Les luttes ouvrières et les interventions des révolutionnaires a montré que les réactions ouvrières au niveau international est la réponse, de facto, du prolétariat international à la crise et à la dynamique vers la guerre impérialiste généralisée – la Troisième guerre mondiale – que le capitalisme nous annonce.

Elle est une véritable expression des confrontations massives entre les classes. La crise économique et sociale et la guerre, la première faisant de la dynamique vers la seconde le facteur central de la situation historique, obligent chaque classe dominante capitaliste nationale à redoubler ses attaques contre son propre prolétariat national.

Un des enjeux du drame historique qui vient sera celui de la capacité des minorités révolutionnaires communistes et du parti une fois constitué de se hisser au premier rang de l’affrontement de classe et d’en assurer la direction politique.

Il y a donc toute une expérience d’analyses et de compréhension des dynamiques du phénomène de la grève de masse qu’il appartient aux groupes communistes de développer et, en partie, de se réapproprier – surtout pour les jeunes générations de révolutionnaires.

De ce point de vue, les mobilisations prolétariennes massives au Royaume Uni et en France et l’intervention des groupes de la Gauche communiste – nous nous limiterons à ceux-ci –, bien qu’il soient ultra-minoritaires, nous fournit une expérience qui doit être partagée au niveau international par l’ensemble des groupes révolutionnaires et communistes, ce que nous appelons le camp prolétarien.

Les groupes de la Gauche communiste qui, à notre connaissance, sont intervenus dans la lutte en France par voie de tract et d’articles furent la TCI, le PCI-Le Prolétaire, le CCI et nous-mêmes, auxquels nous pouvons rajouter le noyau en France d’un autre PCI qui publie Il Partito Comunista. Globalement, à l’exception de ce dernier qui appelle à de «vrais syndicats de classe», tous ont défendu les mêmes orientations générales : dénonciation de la tactique syndicale des journées d’action ; mise en avant de la nécessité de l’extension et de l’unité des grèves et des manifestations.

Tous, sans exception, y compris le CCI – malgré sa position de congrès excluant tout risque de guerre impérialiste généralisée – surent faire le lien entre les attaques contre le prolétariat, retraite et baisse des salaires, et la préparation de la guerre généralisée par le développement de l’économie de guerre et la production d’armement.

La seule critique que nous porterons ici, non liée à la question syndicale en soi, s’adressera à la tendance d’ordre conseilliste du CCI à tomber dans le fétichisme de l’auto-organisation. Elle fait des assemblées générales «le seul endroit pour organiser la réponse à la répression et à la défense de nos moyens de lutte». Et, en pleine lutte et en pleine confrontation avec l’État et ses syndicats, elle se conclut une fois de plus par un appel abstrait, extérieur à la bataille immédiate, sans objet pour les prolétaires confrontés aux sabotages syndicaux, sans perspective concrète de combat, à… discuter et débattre : «nous devons nous réunir, débattre, tirer les leçons des luttes passées, pour développer nos luttes actuelles et préparer les combats à venir. » (tract du 27 mars contre la répression).

Plus sérieux et fondamental, la correspondance qui suit entre le groupe de la TCI en France, Bilan et Perspectives (B&P) et le GIGC porte essentiellement à la fois sur la compréhension des dynamiques des mobilisations prolétariennes en France et au Royaume Uni et sur l’intervention des révolutionnaires.

La divergence porte sur le fait que la TCI défend que les syndicats sont aussi des organes de médiation entre le capital et le travail ce que nous rejetons. Si cette différence ne nous a pas empêché d’adopter les mêmes orientations et mots d’ordre lors de la mobilisation contre les retraites en France, au point d’intervenir ensemble, il n’en fut pas ainsi lors des grèves et de la mobilisation prolétariennes au Royaume Uni. Nous abordons ce point dans la dernière partie de notre lettre du 30 mars (ci-dessous). Nous proposons et ouvrons ce débat aux lecteurs et à l’ensemble du camp prolétarien (2).

Partie 2

Le tract de Bilan et Perspectives (TCI) de février 2023

 Ni les pétitions, ni les manifestations processions ne feront reculer le gouvernement ! Organisons-nous à la base pour pouvoir lutter réellement! Les manifestations massives des 19 et 31 janvier contre la réforme des retraites, les plus importantes depuis des années, ont montré l’ampleur de la colère des travailleurs face à cette nouvelle attaque de la bourgeoisie.

Les discours de cette dernière et de ses larbins, journalistes et experts, n’ont trompé personne, tout le monde a bien compris que l’objectif était de faire des économies sur notre dos en diminuant les pensions.

MAIS CETTE COLÈRE DÉPASSE LA QUESTION DES RETRAITES, ELLE CONCERNE LA DÉGRADATION DE NOS CONDITIONS DE VIE ET DE TRAVAIL EN GÉNÉRAL : L’INFLATION, LA RÉFORME DE L’ASSURANCE-CHÔMAGE, LES CADENCES, LA SURCHARGE DE TRAVAIL …

La bourgeoisie, partout dans le monde, multiplie les attaques contre les prolétaires pour sauver ses profits, face à la crise économique et les conséquences directes et indirectes de la guerre en Ukraine. En France, après avoir réduit l’assurance chômage, et alors que les salaires réels ne cessent de diminuer depuis des mois, le gouvernement exige qu’on fasse de nouveaux sacrifices pour remédier au supposé futur déficit du système retraite. Dans le même temps, il augmente d’un tiers les dépenses militaires pour la période 2024-2030, portant ce montant à 413 milliards d’euros. Quel avenir radieux nous réserve-t-il ! Après avoir donné notre sueur, devrons-nous verser notre sang pour leurs profits !

LES MANIFESTATIONS, AUSSI IMPORTANTES SOIENT-ELLES, NE SUFFIRONT PAS.

La stratégie décidée par les directions syndicales nous mène à l’échec, l’expérience l’a déjà montré maintes fois. Le scénario semble écrit à l’avance et les rôles sont bien répartis : les syndicats réformistes patientent pour accepter des aménagements de la réforme ; les syndicats dit radicaux se préparent déjà à crier à la trahison, en attendant ils organisent différentes actions symboliques et des blocages pour les plus déterminés qui se retrouveront ainsi isolés dans leur entreprise. Quant aux organisations de gauche, elles cherchent à pousser le mouvement en espérant tirer les marrons du feu. On devine facilement qu’à travers la proposition d’une réforme alternative à celle du gouvernement, elles espèrent canaliser la colère des exploités vers les prochaines élections. Un terrain sur lequel nous seront toujours désarmés, livrés aux manœuvres des diverses écuries bourgeoises. Pour l’heure, elles s’alignent encore derrière l’unité syndicale dont l’histoire montre qu’elle prépare encore et toujours… des lendemains qui déchantent.

L’UNITÉ DE CES FORCES N’A JAMAIS FAIT DÉFAUT POUR ENCADRER LE PROLÉTARIAT ET CONTENIR SA COLÈRE ! NE COMPTONS QUE SUR NOUS-MÊMES.

Tant que les directions syndicales auront la mainmise sur notre mouvement, nous n’arriverons à rien. Il est illusoire de vouloir les pousser à lutter réellement, ce sont des organes de médiation entre le capital et le travail, leur rôle est de négocier le prix de notre force de travail avec les patrons et l’État. Nous n’avons rien à négocier avec ceux qui nous attaquent mais à établir un rapport de forces. Nos intérêts sont inconciliables.

  • PRENONS NOS LUTTES EN MAIN. ORGANISONS-NOUS À LA BASE. DISCUTONS ET DÉCIDONS ENSEMBLE DANS DES ASSEMBLÉES GÉNÉRALES OU DES COMITÉS DE LUTTE DES SUITES À DONNER À NOTRE MOUVEMENT.
  • CE N’EST QU’EN LUTTANT INDÉPENDAMMENT DE TOUS LES FORCES D’ENCADREMENT ET EN DÉFENDANT DE MANIÈRE RÉSOLUE NOS INTÉRÊTS DE CLASSE QUE NOUS POURRONS FAIRE RECULER LE GOUVERNEMENT.

 

Partie 3

Le GIGC écrit à Bilan et Perspectives (TCI) (mars 2023)

Chers camarades, dans le mail accompagnant votre envoi du 7 février du bulletin en français à l’occasion des manifestations de rue en France, vous indiquez à vos correspondants être «intéressés de connaître vos critiques et commentaires.» Nous nous permettons de répondre rapidement à cet appel en espérant préciser et clarifier accords et désaccords, qui sont d’ordre tout à fait secondaire pour ces derniers.

Le bulletin comporte trois textes :

– le tract intitulé : Ni les pétitions, ni les manifestations processions ne feront reculer le gouvernement ! Organisons-nous à la base pour pouvoir lutter réellement! ;

– le texte La bourgeoisie mondiale sur le sentier de la guerre ;

– et un appel à rejoindre les comités NWBCW Alors, que pouvons-nous faire?

Nous exprimons notre accord et soutien aux deux derniers textes. Les éventuelles observations ne porteraient que sur telle ou telle insistance, voire seraient d’ordre rédactionnel uniquement, et n’exprimeraient aucune divergence, ni même nuance politique significative. Le tract par contre nous pose un certain nombre de problèmes du point de vue politique.

Le tract du 18 janvier et la situation en France.

Rappelons au préalable que nous avions fait nôtre le tract de Bilan et Perspectives du 18 janvier dernier, au point de le distribuer – en collaboration avec vos militants à Paris – dans les manifestations, massives, organisées par les syndicats à l’occasion de la mobilisation contre la énième réforme des retraites en France. Ses deux mots d’ordre «dès demain, reconduisons la grève [et] organisons des délégations afin d’étendre la lutte aux autres entreprises et administrations proches» constituaient la réponse – l’alternative – que les communistes devaient avancer à ce moment-là face aux journées d’action syndicale.

Nous reviendrons sur celui, plus confus selon nous, de «Organisons-nous à la base»

De notre point de vue alors, l’absence de dynamique autonome ou encore d’initiative ouvrière particulière, telle que les grèves sauvages du printemps et de l’été 2022 en Grande-Bretagne avaient pu l’exprimer par exemple, nous incitait à penser que la bourgeoisie(25) gardait tout contrôle sur la situation et sur le mécontentement et la combativité relative, mais réelle, des prolétaires en France. En particulier, la planification de journées d’action syndicale, une fois de plus, permettait aux syndicats d’occuper. C’est-à-dire l’ensemble de son appareil d’État dont les syndicats sont une composante politique et anti-ouvrière essentielle occupant tout l’espace ou champ que pouvait prendre une réaction ouvrière conséquente, jusqu’aux terrains les plus « radicaux ». Nous ne développons pas ici, d’autant qu’il nous semble que nous sommes d’accord sur ce point particulier.

En ce sens, les mots d’ordre de reconduction de la grève après la journée d’action et d’envoyer des délégations afin d’étendre, restaient les seuls qu’il convenait d’avancer alors – même si nous pouvions envisager qu’ils étaient déjà hors de portée immédiate, pour ce moment-là, des prolétaires en lutte, du fait du rapport de forces existant alors et établi par :

– l’absence d’initiative ouvrière particulière

– ni grève sauvage, ni lutte particulière sur un lieu de travail pouvant servir de foyer de référence, voire d’unification, pour la lutte,

– ni constitution (à notre connaissance) de comité de lutte sous une forme ou une autre telles des assemblées inter-pro… ;

– l’occupation du terrain par les syndicats, journées d’action nationale et annonces par les syndicats les plus à gauche (CGT-SUD) d’actions radicales, de blocage de l’économie, voire de grèves reconductibles… à des dates ultérieures et par secteur avec, en parallèle, le jeu politique gouvernement-opposition de gauche et le débat parlementaire, visant à focaliser l’attention des prolétaires sur le terrain bourgeois. Il nous semble que les mots d’ordre du 18 janvier restaient encore valables pour la journée du 24 au point que nous avons continué à le diffuser.

Cette journée et l’absence de reconduction de la grève le lendemain, ou encore de toute initiative ouvrière particulière, ont définitivement enterré la peu probable possibilité – pour ce moment ou cet épisode de la mobilisation – d’un dépassement de la tactique des journées d’action et de poussée ouvrière réelle. Ce faisant, les deux mots d’ordre perdaient de leur actualité et ne correspondaient plus à la situation immédiate, du point de vue agitationnel et de direction politique. Nous avons cessé la diffusion du tract – tout comme vous, semble-t-il – et nous nous sommes concentrés sur la diffusion de notre communiqué, de fait un tract plus de propagande – sur la guerre en particulier – que d’agitation immédiate.

À ce jour, 15 février, à la veille de la 5e journée d’action syndicale, nous pouvons considérer que rien n’a changé dans la dynamique de la mobilisation ouvrière en cours et qu’aucune nouvelle perspective, encore moins d’orientation et mot d’ordre particuliers, ne se dégage du point de vue prolétarien.

Partie 4

Suite des commentaires du GIGC sur le tract de Bilan et Perspectives (TCI) de février

Les critiques – répétons-le : mineures – que nous allons émettre sur le tract de février, du bulletin, sont d’un autre type et ne concernent pas l’analyse et la compréhension de la dynamique même de la lutte. Elles sont essentiellement de deux ordres, la première étant nettement moins importante que la seconde.

Le texte fait bien le lien entre les attaques subies par les prolétaires et la guerre impérialiste : «la bourgeoisie, partout dans le monde, multiplie les attaques contre les prolétaires pour sauver ses profits, face à la crise économique et les conséquences directes et indirectes de la guerre en Ukraine.»

Tout comme est clairement opposé d’un côté les attaques anti-ouvrières et l’explosion des dépenses militaires de l’autre. À notre connaissance, la TCI et le GIGC sont les principales, sinon les seules, organisations communistes à clairement faire ce lien et axer leur intervention sur celui-ci. Néanmoins, la guerre impérialiste est présentée dans votre tract comme un élément au même titre que la crise. Certes, il n’y a aucun doute sur le fait que la crise est à l’origine de la guerre impérialiste et que les deux s’alimentent l’une l’autre. Pour autant, la guerre impérialiste, matérialisée par la guerre en Ukraine et la marche à la guerre généralisée, est devenue – ou de manière plus nuancé : devient – le facteur premier, certes non unique, dictant les attaques économiques, politiques, idéologiques et répressives de chaque bourgeoisie nationale. Et c’est cela qu’il faut mettre en avant selon nous. En effet, dans les circonstances actuelles, «la tendance inéluctable du capitalisme à se diriger vers la guerre se matérialise aujourd’hui par l’attaque généralisée contre les conditions de vie et de travail du prolétariat.»(26)

Il en résulte que «pour les prolétaires qui, sans être directement appelés aux armes, appartiennent, avec leur bourgeoisie, à un front impérialiste qui a des intérêts directs, immédiats ou seulement futurs dans la guerre, le discours change, mais seulement pour les conditions immédiates dans lesquels ils sont appelés à se mouvoir.» (TCI, La route difficile de l’impérialiste européen(27).

Les syndicats

Comme vous pouvez le voir, la divergence est mineure et ne change rien au positionnement de classe et… d’avant-garde politique effective de votre prise de position. La seconde critique du tract renvoie à une question politique plus importante. Elle porte sur le caractère et la fonction que nous attribuons aux syndicats et, en passant, aux forces de gauche de l’appareil d’État.

«Ne comptons que sur nous-mêmes. Tant que les directions syndicales auront la mainmise sur notre mouvement, nous n’arriverons à rien. Il est illusoire de vouloir les pousser à lutter réellement, ce sont des organes de médiation entre le capital et le travail, leur rôle est de négocier le prix de notre force de travail avec les patrons et l’État.» Et «quant aux organisations de gauche, elles cherchent à pousser le mouvement en espérant tirer les marrons du feu» (nous soulignons).

Au lieu de considérer les syndicats comme des organes à part entière de l’État capitaliste, à vocation et fonction politiques anti-ouvrières et contre-révolutionnaires, la formule organe de médiation entre le capital et le travail ouvre la porte à l’idée qu’ils ne seraient pas complètement bourgeois et qu’ils pourraient encore représenter, du moins en partie, les intérêts immédiats de la classe prolétarienne puisque se situant entre les classes, comme intermédiaires ou arbitres entre capital et travail.

Il en va de même d’une certaine manière avec les forces de gauche qui chercheraient à pousser le mouvement. Or tant les syndicats que les forces de gauche du capital ne cherchent pas à pousser le mouvement mais à l’encadrer, le contrôler, le saboter quand existe un danger, voire une véritable dynamique, d’extension et d’unification, et par l’éteindre, afin qu’il se termine par un échec économique et politique de cette bataille particulière de la lutte entre les classes. Et cela pour le capital et contre le travail.

Dans ce sens, nous nous baserions plutôt pour notre part sur la plateforme du PCint de 1952 qui est politiquement beaucoup plus claire sur la question syndicale :

«le parti affirme catégoriquement que dans la phase actuelle de la domination totalitaire de l’impérialisme, les organisations syndicales sont indispensables à l’exercice de cette domination dans la mesure où elles poursuivent des buts qui correspondent aux exigences de conservation et de guerre de la classe bourgeoise.» (nous soulignons)

Implications politiques de la position sur les syndicats compris comme médiateurs.

Cette critique peut sembler sans réel enjeu militant, un simple pinaillage d’ordre politique, voire théorique. D’autant que votre tract de février se situe clairement du côté prolétarien de la barricade de classe du moment.

Cependant, la position sur les syndicats médiateurs peut avoir des implications et des conséquences politiques quant à l’intervention immédiate, les orientations et les mots d’ordre que le parti doit mettre en avant dans toute mobilisation ouvrière. En effet, elle risque fort de ne pas voir ou sous-estimer la dimension politique directement anti-ouvrière et contre-révolutionnaire des syndicats – et des forces de la gauche capitaliste, gauchistes compris(28).

Ce faisant, on ne comprend pas toujours bien à quoi, à quels enjeux concrets et immédiats, leur politique et mots d’ordre successifs essaient de s’opposer au cours même des luttes, selon les moments et les lieux.

Évidemment, il conviendrait de prendre chaque mobilisation prolétarienne particulière pour illustrer notre propos ; pour saisir quels sont les enjeux immédiats lors de telle ou telle bataille de classe particulière ; et pour comprendre la signification politique immédiate des différents mots d’ordre des syndicats, officiels et ceux dits de base ou radicaux. En particulier, lorsqu’ils en arrivent, surtout les seconds, à appeler eux-mêmes à des grèves reconductibles, des assemblées, des coordinations, voire même à… l’auto-organisation ; ou encore en certaines occasions à l’extension elle-même.(29)

En général et pour faire simple ici – sans doute aurons-nous l’occasion d’y revenir –, ils visent non pas à s’appuyer sur telle ou telle dynamique ouvrière pour négocier le prix de la force de travail mais pour au contraire l’étouffer, la saboter et l’éteindre. Et c’est bien à cela qu’il convient que l’avant-garde communiste assumant son rôle de direction politique puisse répondre en offrant des orientations alternatives aux différents moments des sabotages et manœuvres syndicales.

Dans la mobilisation ouvrière massive actuelle, qui s’apparente jusqu’à maintenant aux précédentes des années 2003, 2010, 2013, 2016 et 2019, l’objectif prioritaire des syndicats est d’empêcher le surgissement et le développement de toute dynamique de réelle extension de la lutte à différents secteurs, en particulier au moyen de la grève reconductible ; c’est-à-dire à toute dynamique de grève de masse. C’est donc à l’aune de cet enjeu et selon les conditions concrètes et successives dans lesquels il se pose, que nous devons comprendre l’action des syndicats, les différents moments et terrains de l’affrontement politique et avancer orientations et mots d’ordre immédiats en conséquence.

En ce sens, faire de l’auto-organisation en soi un mot d’ordre d’action, «prenons nos luttes en main», «organisons-nous à la base»(30), ne permet pas de fournir une véritable alternative, sauf exception et situation concrète particulière, à la main-mise politique des syndicats sur les luttes. Pire même, bien souvent et si risques d’extension généralisée il y a, ce sont les syndicats et les forces de gauche du capital qui peuvent se faire les chantres les plus décidés de l’auto-organisation pour mieux renfermer les ouvriers sur leur lieu de travail ou leur corporation(31).

N’est-ce pas une pratique syndicale usuelle à laquelle le prolétariat et les communistes sont régulièrement confrontés tout particulièrement à l’occasion de chaque mobilisation ouvrière en France ? N’est-ce pas là l’objet de la plupart des assemblées interpro que les gauchistes et syndicalistes radicaux n’ont de cesse de mettre en place de façon préventive face à l’éventualité de tout débordement des syndicats ?

En ce sens, plutôt que d’appeler à s’organiser à la base, formule pour le moins abstraite dans les faits, il convient d’appeler à tel ou tel mot d’ordre, y compris un mot d’ordre d’organisation ou de prise en main, en fonction et en vue des besoins immédiats, locaux et du moment, de chaque lutte ; besoins que nous pouvons résumer ici comme ceux menant à l’extension, la généralisation et l’unité du combat afin de viser à établir le meilleur rapport de force possible à la bourgeoisie et rendre ainsi aussi efficace que possible la lutte immédiate elle-même, en termes de revendications et d’expérience prolétarienne ; besoins dont la déclinaison selon les moments et lieux détermine les mots d’ordre et actions immédiats. Il s’agit donc surtout, lorsque cela se pose concrètement, d’appeler les prolétaires à tenir une assemblée générale pour, par exemple, se mettre en grève, ou pour organiser des délégations massives (ou autres) pour étendre la grève ou la lutte, à constituer un comité de grève pour telle ou telle tâche, etc. N’est-ce pas là aussi ce que nous enseigne l’expérience historique, celle-là même des bolcheviques entre février et octobre 1917 ?

Lorsque le parti sut avancer, puis se retirer, adapter – en s’appuyant sur les comités d’usine, et non les conseils, de juillet à septembre 1917 – et reprendre avec un autre contenu politique concret – l’insurrection – le mot d’ordre de tout le pouvoir aux conseils ouvriers ? Il y a donc un lien entre la compréhension aujourd’hui des syndicats comme organes politiques à part entière de l’État capitaliste et leur parti-pris entier et complet de classe, anti-ouvrier et totalement bourgeois – non entre les deux classes –, qui nous permet de saisir le sens véritable de chacune de leur action et mots d’ordre et les besoins de chaque lutte ouvrière.

Ne pas saisir le caractère politique bourgeois des syndicats limite, quand elle n’interdit pas, la reconnaissance des différents affrontements ou batailles particulières qui s’imposent aux prolétaires. Elle ouvre ainsi la porte à des mots d’ordre abstraits, telle l’auto-organisation, qui risque, in fine, de rendre l’intervention des révolutionnaires en retard sur les événements, voire sur le terrain et timing de la bourgeoisie. Voilà chers camarades, les commentaires et observations critiques que nous voulions vous apporter, en espérant qu’elles soient positives, tout en sachant qu’elles sont sans doute loin, très loin, de clore ce débat.

Fraternellement, le GIGC, le 16 février 2023.

Partie 5

LA TCI répond au GIGC le 20 mars 2023

Chers camarades, Nous vous répondons tardivement du fait de nos obligations dans cette période de lutte.

Nous vous demandons de bien vouloir nous en excuser. Bien sûr, nous sommes «intéressés de connaître vos critiques et commentaires» sur nos interventions au cours du mouvement social contre la contre-réforme des retraites. Nous saluons encore votre volonté d’intervenir en commun et de pointer nos accords et divergences ; ce sont des appuis très précieux pour la défense et la diffusion des positions qui nous sont communes. Pour en venir au contenu de votre correspondance, vous nous faites deux critiques essentielles par rapport à nos tracts dans cette période.

La première porte sur le fait que la « guerre impérialiste est présentée dans votre tract comme un élément au même titre que la crise», écrivez-vous. Et justement nous soulignons et confirmons notre position, contrairement au GIGC.

Les situations politiques ne sont jamais blanches ou noires, mais multicolores. Il y a effectivement des phénomènes plus déterminants que d’autres mais ils ne sont jamais uniques ni exclusifs dans les situations. Il y a des faisceaux de causes. Par conséquent, nous estimons que la crise est aussi à prendre en compte dans la situation présente. L’on aurait pu également souligner que c’est la crise économique qui précipite les États capitalistes vers la guerre. Mais laissons là cet aspect de la question. Les effets majeurs de la crise du système, illustrée récemment par la débâcle de la Silicon Valley Bank et ses répercutions dans le système financier, ne vont pas cesser loin s’en faut. Si cette débâcle s’approfondit, l’on va voir d’autres conséquences rejaillir d’abord sur le terrain de l’économie de guerre et ensuite dans les affrontements géostratégiques. Nous vous engageons par conséquent à ne pas simplifier l’analyse politique et argumenter celle-ci sur la base des faits. Comme vous le signalez, «la divergence est mineure et ne change rien au positionnement de classe et… d’avant-garde politique effective de votre prise de position».

Pour autant, nous ne comprenons pas en quoi la guerre en Ukraine serait un «facteur premier, certes non unique, dictant les attaques économiques, politiques, idéologiques et répressives de chaque bourgeoisie nationale», par rapport au capitalisme dont la crise de reproduction semble se généraliser dans toutes ses dimensions (sans exclure, par exemple, la question de l’environnement).

La deuxième critique porte sur la question syndicale. On peut lire à ce sujet dans la plate-forme de la TCI :

«Les syndicats sont des organes de médiation entre le capital et le travail. Ils sont apparus dans l’histoire comme des organes de négociation du prix de la force de travail. Ils n’ont jamais été ni ne sauraient donc être des instruments permettant de renverser l’État bourgeois. À l’époque impérialiste, les syndicats – quelle que soit leur composition sociale respective – sont des organisations qui travaillent à la préservation du capitalisme, tout particulièrement dans les moments cruciaux où celui-ci est menacé»(32) . On peut également lire dans la brochure Pour le Communisme le point de vue suivant :

«Les syndicats ne trahissent rien ni personne et encore moins eux-mêmes. Lorsque qu’ils sabotent les luttes, nous mènent en bateau, et se rendent ainsi indispensables au capital en tant que facteur de négociation et de l’ordre, ils ne font qu’agir logiquement et de façon cohérente avec leur objectif initial, c’est-à-dire négocier les conditions de vente de la force de travail avec les capitalistes et au même titre que ceux-ci (…) Nous n’incitons pas à la construction de nouveaux et meilleurs syndicats qui, tôt ou tard, aboutiront aux mêmes politiques de représentation que les anciens. Les organisations économiques permanentes de la classe ouvrière ont pour rôle d’entamer des négociations avec les capitalistes en acceptant par ce fait-même les règles et les lois du système d’exploitation. Au mieux, ce genre d’expérience ‘’syndicaliste’’ ne fait que répéter l’histoire des 200 dernières années en accéléré. L’objectif principal est de comprendre une fois pour toutes que toute action syndicale est réglementée et fixée par l’État, cette entité est aliénante ; elle subordonne en permanence la résistance et la combativité ouvrières au droit et à l’ordre bourgeois»(33) .

Aussi reconnaissons-nous pleinement, comme vous, que les syndicats sont des organes de la bourgeoisie au sein de la classe ouvrière. Comme vous, nous «considérons) les syndicats comme des organes à part entière de l’État capitaliste, à vocation et fonction politiques anti-ouvrières et contre-révolutionnaires.» Pour autant cela n’exclut pas, et même cela implique d’après nous, qu’ils soient capables de jouer en milieu ouvrier un rôle de médiation. Comment pourraient-ils sinon conserver leur influence et finalement encadrer le prolétariat, sinon en tenant avec un minimum de succès ce rôle ?

Par là, nous vous suggérons d’aller plus loin que la simple affirmation correcte selon laquelle les syndicats sont un pilier de l’État bourgeois, pour identifier les conditions qui fondent leur pouvoir dans la classe. C’est bien cela le cœur de la question. Et c’est bien parce qu’ils tentent de faire croire qu’ils peuvent la défendre et lui apporter des améliorations dans ses conditions de vie qu’ils ont encore le moyen de la tromper et de la mystifier.

Une nouvelle fois, nous vous engageons, camarades, à ne pas simplifier les questions. Quand on a compris une chose, le rôle des syndicats, il faut encore voir comment ils agissent et surtout ce qu’il faut dénoncer dans leurs agissements à un moment donné. Il y a le rôle d’«assistante sociale» d’une part, et dans la lutte, le rôle de diviseur pour entraîner la lutte dans des impasses, d’autre part. Il est plus facile de dénoncer le rôle de diviseur dans les luttes car tous les travailleurs peuvent le constater de visu. Il est plus difficile de dénoncer leur rôle d’«assistante sociale» au niveau individuel ou collectif dans les conventions ou accords collectifs de travail. C’est là où ils tentent de conserver encore quelques forces.

Force nous est de constater que le crédit des syndicats auprès du prolétariat est certes entamé, mais pas nul pour autant. Leur capacité de direction dans le mouvement actuel nous le rappelle. Nous posons alors la question : si les syndicats n’étaient que des organes purement extérieurs à la classe, pourquoi celle-ci leur accorderait-elle encore en partie sa confiance ? Cette vision ne peut conduire qu’à une compréhension idéaliste de la question, où les tromperies et mystifications sont le facteur dominant ; du même coup, la classe ouvrière apparaîtrait bien stupide de lier son sort à des organes dont toute l’expérience la conduit à la défaite. Sur ces deux points, nous souhaitons au contraire vous amener à réfléchir sur la solidité de vos analyses et de votre argumentation, qui ne peuvent conduire de notre point de vue à des conclusions politiques réellement fondées.

Elles rappellent pour tout dire les analyses simplificatrices et limitées de la décadence ou la décomposition (qui reste encore plus incompréhensible). Nous ne nions pas la décadence du capitalisme, mais elle est insuffisante pour comprendre l’évolution du capitalisme, sous peine d’idéalisme.

Il faut donc prendre en compte tout un panel d’événements sous d’autres angles, paramètres, etc. Vous disiez que vos critiques n’étaient que des «observations critiques» secondaires. Pour notre part nous pensons que des différences de méthodes existent dont nous pouvons débattre. Elles soulèveraient de véritables divergences, si vous n’y prenez garde. Bien fraternellement, Bilan et Perspectives, TCI, 20 mars 2023

Partie 6

La réponse du GIGC à Bilan et Perspectives (TCI) le 30 mars 2023

Notre réponse du 30 mars 2023 : Les syndicats ont-ils un « rôle social » vis-à-vis du prolétariat ? Quelle fut l’action politique effective des syndicats dans la vague de grève au Royaume Uni ? Le GIGC répond à Bilan et Perspectives.

Chers camarades, nous vous remercions pour votre réponse qui permet «de pointer nos accords et divergences ; (…) appuis très précieux pour la défense et la diffusion des positions qui nous sont communes», comme vous le dîtes, ô combien, à raison. Nous rajouterons que nos débats et nos échanges doivent être compris comme des moments du processus menant à ce que le parti de demain puisse adopter le programme le plus clair possible ; et qu’il puisse bénéficier au maximum des expériences antérieures afin de développer aussi rapidement que possible ses capacités d’intervention et de direction politique dans la lutte des classes et la tourmente historique qui vient.

Répétons-le, pour nous, les points de divergences que nous abordons dans notre correspondance sont d’ordre secondaire. Au point que certains pourraient, et sans doute en est-il ainsi à un degré ou à un autre, traverser chacune de nos deux organisations.

À la vérité, nous ne sommes même pas sûrs que le premier point – celui touchant sur la guerre impérialiste devenue ou non le facteur déterminant de la situation historique – marque une véritable différence entre la TCI et le GIGC. Voilà pourquoi nous avons cité dans notre courrier un extrait de la plateforme de la TCI et d’un article de Battaglia comunista que nous reprenons à notre compte. Les deux, nous semble-t-il, soulignent à raison que l’affirmation croissante de la dynamique vers la guerre impérialiste généralisée – et non la guerre en Ukraine en soi comme vous l’avez repris et compris à tort – «se matérialise par l’attaque généralisée contre les conditions de vie et de travail du prolétariat.» Pour notre part, nous disons qu’elle tend chaque fois plus à «déterminer» les attaques menées par la bourgeoisie contre le prolétariat selon les moments et les pays. Nous pouvons dire qu’au moins jusqu’à la crise du Covid, les attaques de chaque bourgeoisie contre le prolétariat étaient – globalement et sans exclure qu’il ait pu y avoir d’autres facteurs intervenant selon les situations – déterminées ou dictées en premier lieu par la défense du capital national face aux rivaux d’abord et avant tout, non uniquement, au plan de la concurrence économique.

Depuis, et encore plus depuis la guerre en Ukraine, chaque capital national tend (et seulement tend) à définir ses politiques «économiques» et ses attaques contre le prolétariat, non plus simplement et uniquement pour la défense de la compétitivité du capital national face à ses rivaux, mais pour les besoins de la dynamique vers la guerre impérialiste généralisée au moyen du développement d’économies de guerre comme l’a dit le président français Macron.

Par exemple, cela requiert des politiques de relocalisation des biens dits essentiels afin de ne plus dépendre des rivaux impérialistes, quitte à payer plus cher dans l’immédiat la force de travail. Il convient donc de saisir ces bouleversements d’ordre économique aussi bien que politique, comme ceux des années 1930 avec le New Deal et le Front Populaire, dans toute leur ampleur et leurs implications afin de développer au mieux notre intervention dans la classe et ses luttes.

La question syndicale marque une divergence entre la TCI et le GIGC.

Elle n’est ni de principe, ni fondamentale. Néanmoins, elle peut impliquer des différences d’analyse du développement de la lutte des classes et donc aussi dans l’intervention immédiate, comme nous allons le souligner par après. «Les syndicats sont des organes de médiation entre le capital et le travail», dit la plateforme de la TCI. Nous rejetons cette position sur les syndicats médiateurs. Pour notre part, notre plateforme et nos positions de base défendent que :

«Les syndicats comme un tout, direction comme sections de base, sont des organes à part entière de l’État bourgeois en milieu ouvrier. Ils visent à maintenir l’ordre capitaliste dans ses rangs, à encadrer la classe ouvrière et à prévenir, contrer et saboter toute lutte prolétarienne, en particulier toute extension, généralisation et centralisation des combats prolétaires.» (Positions de base du GIGC) 34.

Cette différence ne nous a pas empêché de développer les mêmes orientations et mots d’ordre lors de la mobilisation ouvrière en France de ce début 2023. Par contre, il n’en fut pas ainsi cet été lors du début de la vague de grève au Royaume Uni face à l’inflation.

Les syndicats et l’assistanat social ?

Mais avant d’aborder directement ce point, relevons rapidement la distinction faite dans votre lettre entre les syndicats «organes à part entière de l’État capitaliste» – position en soi que vous partagez avec nous – et leur «rôle d’assistance sociale»35.

Ce point tout particulier vaut la peine d’être abordé, même si nous le considérons comme totalement secondaire, en particulier à destination des pays à système syndical type closedshop, souvent anglo-saxon, où il faut être syndiqué pour être embauché ou encore où les syndicats gèrent les systèmes de santé ou d’assurance sociale.

Le rôle médiateur des syndicats.

Ce rôle expliquerait pourquoi « la classe (…) leur accorderait (…) encore en partie sa confiance. » Acceptons un moment votre terrain, celui de l’assistanat social accompli à l’occasion par les syndicats «au niveau individuel ou collectif dans les conventions ou accords collectifs de travail.» Au niveau individuel, que tel ou tel syndicat ou délégué syndical joue le rôle d’assistant social, aide ou défende un travailleur individuel en telle ou telle occasion, n’a qu’un effet tout limité, insignifiant, dans le « crédit des syndicats auprès du prolétariat. » Tant mieux pour lui ou elle si le délégué syndical, ou encore l’assistante sociale, voire le RH, résout son problème particulier. Mais, le car de police amenant en urgence un blessé de la route à l’hôpital change-t-il le degré de confiance du prolétariat, comme force collective, dans la police bourgeoise ? De plus, l’argument nous semble politiquement confus. En effet, il fait du travailleur individuel et atomisé, ayant un problème personnel, un élément, voire une expression, du rapport de force entre les classes.36

Or le rapport classe-syndicats, ou plus largement classe-État, est défini et doit être compris comme celui du prolétariat corps collectif, y compris dans les cas les plus isolés ; à savoir qu’il doit inclure ce même travailleur individuel dans le collectif en lutte, ou potentiellement en lutte, de son lieu de travail. Et, par expérience individuelle et militante, nous pouvons vous assurer que même le travailleur, souvent parmi les plus démunis et souffrant particulièrement de l’atomisation sociale, ayant dû faire appel à une aide sociale quelconque, se retrouve tout «différent», y compris dans son rapport à l’assistance sociale ou au délégué syndical qui l’ont aidé, lorsque son lieu de travail se retrouve dans une lutte collective dans laquelle il peut lui même participer et dont il peut se sentir partie-prenante – ne serait-ce que parce qu’elle brise, ou tend à briser, son atomisation sociale quotidienne.

Le deuxième argument, au niveau collectif, laisse à entendre que les syndicats garderaient leur crédit auprès des travailleurs par ce qui serait obtenu dans les accords collectifs d’entreprise. «Comment pourraient-ils sinon conserver leur influence et finalement encadrer le prolétariat, sinon en tenant avec un minimum de succès ce rôle [de médiation] ?» Et à l’appui, vous citez une brochure de la TCI, Pour le communisme. Mais précisément, un autre passage de cette brochure affirme que les syndicats ne sont plus des outils efficaces, même a minima, pour la défense des intérêts immédiats, de base dit la brochure, des prolétaires :

«aujourd’hui, nous ne pouvons plus que constater la faillite absolue des syndicats à défendre ne serait-ce que les intérêts de base des travailleurs et des travailleuses.» (nous soulignons).

Nous partageons totalement cette position de la TCI. Au mieux, il peut en être une expression toute particulière et limitée, mais nullement un facteur en tant que tel en particulier dans les pays anglo-saxons où les accords d’entreprise sont institutionnalisés. Lorsqu’ils sont combatifs, les travailleurs rejettent les accords négociés par les syndicats. Ainsi, loin d’être facteur de crédibilité des syndicats, ces négociations sont bien souvent facteur de décrédibilisation et de dénonciation des syndicats.

Et c’est bien ce que les communistes doivent souligner. Les dangers de la position sur le rôle de médiation des syndicats Abordons maintenant la divergence de fond avec la TCI, pas uniquement B&P, qu’il convient de confronter et de clarifier au mieux en l’exposant et la discutant. Nous nous doutons bien que nous ne convaincrons pas ici la TCI, ni les camarades de B&P en particulier, du caractère erroné de cette position et nous partageons son souci de ne pas entrer dans «des polémiques vaines», danger dont il faut toujours se garder. Pour autant, cela ne nous interdit pas d’en débattre, en particulier en relevant les implications politiques de nos positions. Ce n’est qu’ainsi que nous pouvons, chacun à partir de nos positions respectives, clarifier et préciser celles-ci et nos propres interventions.

Si nous avons partagé l’analyse et les mêmes orientations d’intervention au point d’intervenir ensemble dans la mobilisation prolétarienne en France, il n’en va pas de même pour la compréhension de la dynamique de luttes ouvrières au Royaume Uni depuis l’été dernier. Dès le mois d’août, nous pensions qu’il fallait intervenir directement et sans attendre en appelant les prolétaires du pays à rejoindre les grèves en cours37, en particulièrement les grèves sauvages, et à les reconduire sans attendre les journées d’action planifiées par les syndicats. Les camarades de la CWO pensaient au contraire qu’il convenait d’attendre que la situation mûrisse et, donc dans les faits, l’automne chaud que les syndicats britanniques annonçaient.38

Une des raisons de cette différence d’appréciation, outre peut-être des expériences pratiques différentes d’intervention en tant qu’avant-garde et direction politiques de parti, est due à nos positions respectives sur la question syndicale et à la compréhension, ou analyse, des luttes ouvrières qui peut en découler. Voilà comment les Notes sur la vague de grèves au Royaume Uni39 rédigées par la TCI nous présentent la dynamique des luttes ouvrières de l’été dernier : «Sans aucun doute, la principale force motrice immédiate [de la vague de grève au Royaume Uni] fut la hausse du coût de la vie associée à la stagnation des salaires. (…) De plus, la pénurie de main d’œuvre post-pandémique devait faire pencher la balance sur le marché du travail en faveur des demandeurs d’emploi.

Un marché du travail plus serré signifie généralement plus de pouvoir de négociation pour les travailleurs. La direction syndicale a ressenti cette opportunité et en a profité pour envoyer des bulletins de grève [en fait des préavis légaux de grève après son vote par les adhérents] dans différents secteurs, en grande partie sur les salaires. Cela a touché à la fois le secteur public et le secteur privé, mais aussi principalement les lieux de travail où la densité syndicale est la plus élevée (…). Dans certaines occasions, les travailleurs ont même pris l’initiative eux-mêmes et n’ont pas attendu que le syndicat active le processus officiel.» (nous soulignons).

Or, selon nous, la réalité, réalité politique, de la dynamique de cette vague de luttes fut tout le contraire de celle décrite ici. En fait, les syndicats britanniques n’ont pas organisé des journées d’action pour saisir l’opportunité prétendument favorable du marché du travail pour négocier sur les salaires. Non, ils les ont organisé, en plein été, pour faire face à la combativité croissante prolétarienne et au surgissement de grèves sauvages. Il s’agissait pour eux, organes politiques de l’État bourgeois, de contrer cette dynamique, de la chevaucher, puis de la contrôler et de l’éteindre. Ce qui fut premier ici, politiquement, ne furent pas les appels syndicaux suivi des grèves sauvages, mais les grèves sauvages en tant qu’expressions du mécontentement et de la combativité croissante du prolétariat en Grande Bretagne. Du point de vue du prolétariat, de ses intérêts, y compris de base, et de son combat, l’appel des syndicats à des journées d’action fut une contre-offensive, ou un contre-feu si l’on préfère, face au danger – qu’il fut peu probable ou hautement probable ne change rien à l’affaire – d’une généralisation du combat de classe dans le pays.

Les camarades en concluaient qu’il fallait attendre que la situation mûrisse alors que nous pensions qu’il fallait s’appuyer sans attendre sur la volonté immédiate de lutte précisément parce que les syndicats organisaient le contre-feu des journées d’action. Penser que les syndicats puissent être aujourd’hui des médiateurs entre le capital et le travail laisse la porte ouverte à l’idée qu’ils puissent se saisir et profiter d’opportunité – comme le disent les notes – pour négocier au mieux, ici, sur les salaires. Alors, leur positionnement, leurs mots d’ordre et leur tactique d’organisation des grèves, journées d’action, leur timing, ne peuvent pas être compris, ni dénoncés et combattus, concrètement, sur le terrain même des luttes, soit comme un moment du sabotage direct, ou indirect, de celles-ci, soit comme des moments à part entière de l’offensive ou contre-offensive bourgeoise et étatique contre le prolétariat au cours même de la lutte et des grèves.

Cela ne permet pas de comprendre la véritable dynamique et les véritables lieux et moments des différentes batailles en cours dans une mobilisation particulière car ce sont précisément les syndicats qui sont les vecteurs des principales batailles et enjeux concrets imposés par la bourgeoisie lors des mobilisations ouvrières.

Voilà pourquoi, avant que la contre-offensive bourgeoisie, portée principalement – pas uniquement – par les syndicats soit pleinement développée et effective, il convenait d’appeler sans attendre le prolétariat à entrer en lutte ouverte et en grève quand c’était possible ; dans le cas britannique en août (peut-être même était ce tardif).

Ce faisant, l’intervention des groupes communistes, demain du parti, se serait porté au premier rang du combat et ils auraient assumé leur rôle historique et, à la fois, concret-immédiat de direction politique du prolétariat. Ce faisant, le parti et le prolétariat peuvent disputer à la bourgeoisie le timing et le terrain qu’elle choisit pour attaquer ou contre-attaquer, avant tout politiquement, au cours des luttes. Ce faisant, et de manière immédiate, en reprenant les mots d’ordre avancés par les groupes communistes, le prolétariat aurait pu alors réellement profiter de l’opportunité pour développer et imposer un rapport de force qui lui soit plus favorable et, ainsi, faire que les grèves et la lutte soient plus efficaces au point d’obtenir des augmentations de salaire généralisées et un arrêt, bien sûr momentané, à la détérioration de ses conditions de vie et de travail.

Car seules les méthodes et objectifs de lutte mis en avant par les communistes peuvent permettre la défense des « intérêts de base des travailleurs et des travailleuses. » Voilà, chers camarades, ce que nous voulions partager avec vous. Nous espérons ne pas être entrés à vos yeux dans une polémique vaine ou inutile. En tout cas, ce n’est pas notre objet, ni notre intention. Ces questions et la situation historique nous obligent d’avancer au maximum dans la voie du parti de demain. Définir au mieux le rôle du parti dans les luttes de masse qui viennent et qui vont précéder-préparer les confrontations massives à venir entre les classes est de notre responsabilité. Évidemment, les pages de notre revue sont ouvertes pour toute réponse, voire correction ou précision, que vous jugeriez utile d’apporter. Fraternellement, le GIGC, le 30 mars 2023.

Partie 7

Communiqué sur la mobilisation prolétarienne contre l’attaque des systèmes de retraite en France

Pour autant, le mouvement a continué jusqu’à aujourd’hui avec des manifestations massives à l’occasion du 1er mai. Mais, et malgré la combativité qui perdure, l’issue de cette bataille de classe ne fait plus guère de doute depuis deux mois : la bourgeoisie réussit à faire passer l’âge de la retraite de 62 à 64 ans et la classe ouvrière subit une nouvelle défaite. Le sort en était fixé dès la fin mars tant l’ensemble de l’appareil d’État, gouvernement, opposition de gauche comme de droite, syndicats et gauchistes, a réussi à garder le contrôle politique sur cette mobilisation.

À aucun moment, sauf pour les imbéciles qui s’enthousiasment à la vue des feux de poubelles dans les rues, la classe ouvrière n’a remis en question – ne serait-ce qu’envisager de le faire – la maîtrise et la direction de ce combat aux syndicats et à leur tactique de journée d’action.

S’il est prématuré d’en tirer des conclusions définitives, il n’en reste pas moins qu’il faudra s’interroger sur l’incapacité chronique du prolétariat en France à s’opposer aux tactiques syndicales menant régulièrement à l’impuissance à chaque nouvelle mobilisation de masse, souvent sur la question des retraites, depuis 2003.

Partie 8

Communiqué du 23 janvier 2023 sur les luttes ouvrières en France

Le communiqué qui suit est en fait constitué de deux tracts. Le premier fut écrit par nous et le second par Bilan et Perspectives, le groupe de la Tendance Communiste Internationaliste en France. Dans la mesure où ils avançaient la même orientation de combat et les mêmes mots d’ordre, nous avons jugé préférable de reprendre à notre compte le tract de B&P et de le diffuser dans les manifestations et partout où nous le pouvions.

En France comme ailleurs le capitalisme prépare la guerre en imposant toujours plus de sacrifices aux prolétaires eux faits : Jeudi 19, deux millions de manifestants et de grévistes défilent dans les rues des villes françaises contre une énième réforme des retraites, qui repousse l’âge de départ au mieux à 64 ans – et cela au nom d’un supposé déficit du système de retraite annoncé pour les années à venir.

Vendredi 20, le président Macron annonce une augmentation d’un tiers des dépenses militaires pour la période 2024-2030.

Deux chiffres : 413 milliards et dix-sept milliards d’euros. Le premier est le montant décrété des dépenses militaires de la France – une augmentation d’un tiers ! L’autre serait le déficit supposé, et tout à fait hypothétique par ailleurs, du système de retraite en France qui oscillerait « entre 7,9 et 17,2 milliards d’euros » en 2025. 17

Deux chiffres qui sont appelés à évoluer. Le premier, n’en doutons-pas, augmentera. Le deuxième est beaucoup moins certain, car il s’agit d’une vague hypothèse de travail du Conseil d’Orientation pour les Retraites (COR), organisme de l’État français et, cela, après deux années de solde positif à 900 millions, puis 3,2 milliards.

Deux chiffres et deux faits que l’ensemble de l’appareil d’État, gouvernement, partis politiques, syndicats, media et autres propagandistes zélés et grassement appointés se gardent bien de rapprocher. Deux chiffres et deux faits qui illustrent et résument à la fois vers où nous mène le capital: toujours plus de sacrifices pour la préparation à la guerre impérialiste, seule issue capitaliste à son impasse et crise économiques. Quelle qu’en soit la conscience de chacun des deux millions de manifestants et grévistes du jeudi 19, leur volonté de refuser et de lutter contre la nouvelle attaque sur les retraites s’élève et s’oppose, de fait, contre les sacrifices croissants que le capital cherche à imposer à l’ensemble du prolétariat mondial, c’est-à-dire des travailleurs salariés qui produisent l’essentiel de la richesse sociale.

Et cela pour les besoins de la défense de chaque capital national et de la marche à la guerre généralisée. Quelle que soit aussi la conscience individuelle des millions de travailleurs de Grande Bretagne qui essaient de lutter pour l’augmentation de leur salaire en ce moment même, ils tendent eux-aussi, objectivement, à s’élever et freiner la marche à la guerre généralisée : la baisse réelle et universelle des salaires du fait de l’inflation n’est-elle pas elle-même due à la crise économique du capital et démultipliée par les conséquences directes et indirectes de la guerre impérialiste en Ukraine?

Pour les prolétaires du monde entier, particulièrement en Europe où la guerre impérialiste fait maintenant rage touchant au cœur les pays historiques du capitalisme, les combats pour se défendre contre l’exploitation capitaliste s’élargissent et englobent maintenant l’opposition et le freinage de la dynamique guerrière généralisée. Alors que faire ?

Résister à toutes les attaques sur nos salaires et nos conditions de vie, y compris les attaques contre la retraite et autres indemnités sociales. Quelle que soit les déficits et autres raisons financières avancés, ce n’est pas aux travailleurs de payer pour la crise et, encore moins, pour la guerre et sa préparation. Résister par les manifestations, les grèves, les délégations aux autres entreprises, par les assemblées générales, etc. ; bref par tout moyen exprimant et réalisant l’unité de nos conditions de vie et de notre combat.

Le capital et la bourgeoisie de chaque pays attaque toute la classe ouvrière, quelle que soit la corporation ou le statut, fonctionnaire, salarié du privé, contrat fixe ou précaire (CDI ou CDD), retraité ou encore étudiant destiné à l’exploitation capitaliste. Donc, résister en étendant et unifiant nos combats contre le capital et les forces de l’appareil d’État qui le soutiennent et le défendent. Comment étendre et unifier le combat ? En ne restant pas bloqués et enfermés dans la logique des journées d’action syndicale, les unes après les autres, et en ne laissant pas l’initiative et l’organisation de la lutte aux syndicats.

Accepter leur direction, c’est accepter à l’avance un nouvel échec après ceux de 2003, 2010, 2013 et 2019. En se regroupant, pour ceux d’entre nous qui en sommes déjà convaincus et désireux de devenir des militants de cette mobilisation, en comités de lutte ou autres pour intervenir ensemble dans les assemblées, les grèves, les coordinations et les manifestations afin que d’ouvrir la voie à la grève et aux manifestations généralisées et unies. C’est la seule voie pour imposer un rapport de force au gouvernement, représentant de la classe capitaliste, et son outil privilégié, l’État, qui les contraignent à reculer. Ce faisant, outre ce recul, l’ensemble des travailleurs tendront à affaiblir la mise en place de l’économie de guerre que Macron, comme tous les gouvernements, appellent à mettre à relancer, et ainsi ralentir la marche à la guerre généralisée.

Face à la catastrophe qui vient, il n’est pas d’autre voie que celle de la lutte contre le capital.

Partie 9

Le 23 janvier 2023 Tract de la Tendance Communiste Internationaliste

Inflation, retraites, spirale guerrière : Seule la lutte ouverte et massive pourra stopper la descente aux enfers promise par le capitalisme lors que depuis des mois, les prolétaires voient leur salaire réel diminuer du fait de l’inflation et après une réforme de l’assurance chômage qui en restreint considérablement l’accès, réduit le montant et la durée des indemnisations, le gouvernement s’attaque une nouvelle fois à nos conditions de vie et de travail en reculant l’âge de départ à la retraite à 64 ans et en allongeant la durée de cotisation. Leur objectif est clair : diminuer les pensions!

Cette attaque intervient dans un contexte de crise économique d’ampleur, aggravée par les conséquences directes et indirectes de la guerre en Ukraine. En conséquence, partout dans le monde, la bourgeoisie cherche à pressurer davantage les prolétaires et à leur faire payer le prix de la crise pour sauvegarder ses profits. Avec cette contre-réforme, la bourgeoisie veut non seulement faire des économies mais aussi porter un coup au prolétariat, briser ses velléités de révolte et le réduire à l’état de travailleur-citoyen s’identifiant aux intérêts du capital national et prêt à se sacrifier pour lui.

Camarades, prolétaires, Nous n’avons pas à démontrer pourquoi il est impératif de rejeter cette nouvelle attaque, ni à proposer une réforme plus juste. L’équilibre des comptes de l’État bourgeois, la santé des entreprises ou celle de l’économie nationale ne sont pas notre affaire ! Les concessions, droits ou avantages obtenus dans l’intérêt des travailleurs sont déterminés par la lutte, le rapport de forces entre le prolétariat et la bourgeoisie dont les intérêts sont radicalement opposés. Rien n’est acquis, tant que le capitalisme durera, il cherchera à reprendre ce qu’il a été contraint de céder. Réfléchissons plutôt à organiser notre riposte ! Ne comptons que sur nous-mêmes. Les expériences des luttes passées ont montré qu’il n’y avait rien à attendre des directions syndicales et de leur pratique de collaboration de classe. Elles sabotent les luttes en les isolant et en organisant des journées d’action inoffensives, pendant qu’elles négocient en notre nom avec notre ennemi de classe.

  • Dès demain, reconduisons la grève. Organisons-nous à la base, constituons des comités de lutte et décidons des suites à donner à notre mouvement.
  • Organisons des délégations afin d’étendre la lutte aux autres entreprises et administrations proches.
  • Regroupons-nous, prenons contact et poussons en avant la discussion. Affirmons qu’au-delà de cette importante étape de lutte, seule une perspective communiste pourra assurer la survie de l’humanité et de la vie sur Terre face au chaos du capitalisme.

Seule une lutte massive unissant toutes les catégories, en rupture avec les pratiques syndicales, et défendant uniquement nos intérêts de classe, peut faire reculer la bourgeoisie et marquer le départ d’une lutte offensive contre le capitalisme.

Partie 10

Communiqué du GIGC sur la situation en France – 19 mars 2023

Avertissement : ce communiqué fut rédigé les 18 et 19 mars pour la discussion interne du GIGC et pour préciser ses orientations d’intervention dans la situation de luttes ouvrières en France. Il fut donc écrit avant le rejet de la motion de censure du lundi 20 mars par le Parlement français. Le résultat du vote, il n’a manqué que 9 voix pour que le gouvernement soit renversé, ne change fondamentalement pas l’analyse et la dynamique de lutte qui est en cours. Il n’a fait qu’exacerber encore un peu plus la colère et la combativité d’une part et affaiblir le gouvernement lui-même.

Pour autant, le contrôle global de la colère et de la lutte ouvrière par l’ensemble de l’appareil d’État bourgeois, en premier lieu, les syndicats, direction comme base radicale, reste entier pour l’heure et nous ne voyons pas d’indice matériel nous permettant d’entrevoir une rupture dans la dynamique présente. (21 mars 2023)

7 mars : « La France est en proie à des grèves et à des manifestations. » (The Guardian) « Les violentes manifestations qui ont eu lieu pendant la nuit dans tout le pays ont fait craindre que les opposants à la réforme des retraites ne se tournent vers des tactiques plus radicales. » (New York Times) « Un pays en feu. » ( El Confidencial d’Espagne).

C’est ainsi que la presse internationale bourgeoise présente le nouveau développement de la mobilisation de la classe ouvrière en France contre la réforme des retraites. C’est assez proche de ce qu’en disent les forces bourgeoises gauchistes en ce 17 mars.

Pour le site trotskiste américain World Socialist Web Site, « la colère explose dans la classe ouvrière, qui entre dans une confrontation directe et d’une portée révolutionnaire avec le gouvernement Macron. » 18

Le groupe trotskiste le plus actif en France dans la mobilisation actuelle, Révolution Permanente, très présent dans le syndicat radical SUD, déclare que « le 49.319 a permis à la lutte des masses de déployer des potentialités jusque là contenues par l’intersyndicale. Nous entrons dans un moment pré-révolutionnaire. » 20.

Alors, que se passe-t-il en France depuis le 16 mars ? Le refus du gouvernement Macron de soumettre la réforme des retraites au vote du Parlement a-t-il changé toute la dynamique de la mobilisation prolétarienne en France, qui dure depuis janvier?

Les réactions immédiates dites spontanées, notamment à travers les manifestations de rue dans de nombreuses villes depuis jeudi et qui se poursuivent ce dimanche, se terminant.

L’article 49.3 de la Constitution française permet à tout gouvernement de forcer l’adoption de toute nouvelle loi sans demander le vote du Parlement. En fait, le recours à cette règle constitutionnelle est nécessaire lorsqu’un gouvernement n’est pas sûr de sa majorité au Parlement, au risque que l’adoption de la loi soit refusée. Macron y a eu recours pour l’adoption de la réforme des retraites. Dans ce cas, seule une motion de censure adoptée à la majorité par le Parlement peut empêcher l’adoption de la loi.

Mais cela signifie que le gouvernement doit démissionner. D’où la montée de la colère parce que Macron n’a pas respecté la démocratie… souvent par des affrontements avec la police, présentent-elles une dynamique de débordement prolétarien du contrôle de la situation par l’appareil d’État ?

Une remise en cause ouverte des syndicats et de leurs tactiques de journée d’action ? L’extension relative, en nombre, des grèves reconductibles, notamment dans les entreprises de transport et d’énergie, parfois même officiellement sans préavis syndical légal, est-elle une première expression d’un processus ouvert de grève de masse que les syndicats auraient des difficultés à prévenir et même à gérer ? Faut-il donc changer notre orientation fondamentale d’intervention dans la situation actuelle et adopter de nouveaux slogans ?

Nous limiterons ici notre analyse à la dynamique de la mobilisation de la classe ouvrière. Nous renvoyons les camarades à notre précédent communiqué du 23 janvier21 et à notre analyse sur laquelle se fondent les présents commentaires.

Rappelons-la brièvement : la dynamique en cours est restée la même jusqu’à ce dernier jeudi et se caractérise par un contrôle total de la situation par les syndicats, sans qu’aucune tentative de remise en cause de leurs tactiques, encore moins de débordement, ne se soit exprimée à ce jour. De même, il est important de dire que nous ne traiterons pas des difficultés politiques ou des tactiques des partis bourgeois au Parlement et en relation avec le gouvernement. De nombreux journalistes et propagandistes bourgeois présentent la situation comme une crise politique. Si la motion de censure était adoptée lundi prochain, nous devrions alors réfléchir à la signification de la nouvelle situation qu’un tel événement représenterait réellement et signifierait politiquement pour l’appareil et le jeu politiques de l’État. Jusqu’à l’utilisation du 49.3 et l’absence de vote sur la loi jeudi 16 mars dernier, les 7ème et 8ème journées d’action syndicales, samedi et mercredi derniers, ont rassemblé moins de manifestants que les précédentes même si leur nombre était encore impressionnant. Le nombre de grévistes tendait à se réduire significativement et le scénario le plus probable était de voir des grèves minoritaires et sectorielles de blocage de l’économie, essentiellement dans les transports et l’énergie (électricité et raffineries), durer et épuiser la partie la plus combative du prolétariat, sans aucune possibilité de changer la dynamique défavorable du rapport de forces immédiat.

Le passage en force du gouvernement avec le 49.3 a évidemment exacerbé la colère et relancé la combativité : c’était une question, disons d’orgueil, que de réagir face à une politique aussi arrogante et provocatrice. Ensuite, il ne faisait aucun doute qu’une fois le 49.3 connu publiquement, cela provoquerait des luttes spontanées de la partie la plus combative du prolétariat.

  • Les manifestations de rue Immédiatement après l’utilisation du 49.3, vers 15 heures, des manifestants ont commencé à se rassembler non seulement dans les plus grandes villes du pays mais aussi dans les plus petites. Présentons seulement ce qui s’est passé à Paris, place de la Concorde. Depuis 11 heures, le syndicat radical SUD – et surtout des militants trotskistes radicaux, notamment de Révolution permanente, en particulier de la SNCF et de la Poste – avaient appelé à un rassemblement autorisé par la police. Les forces gauchistes étaient donc déjà sur place en avance. Puis une manifestation étudiante dans un autre quartier de Paris – on a de sérieuses raisons de penser que les trotskistes l’organisaient aussi – a décidé de rejoindre la place de la Concorde. C’est la plus grande place de Paris. Ce n’est pas un lieu habituel des manifestations. C’est très rare qu’il en soit ainsi parce qu’elle est séparée de l’Assemblée nationale, le Parlement, par un pont sur la Seine, qui a été fermé par la police antiémeute. De l’autre côté de la place, il y a les Champs Élysées, l’ambassade des États-Unis et le palais de l’Élysée, où sont logés les présidents français. Ces avenues ont également été fermées à l’avance par la police. Ensuite, aux informations télévisées en continu, ils ont commencé à filmer le rassemblement et le discours radical des syndicalistes gauchistes et ont même encouragé les gens à le rejoindre : « pour l’instant, il n’y a que 6000 personnes, mais il y en a de plus en plus et il y en aura beaucoup plus dans les heures à venir. Le rassemblement est pacifique…» Et effectivement, beaucoup rejoignirent la place. Petit à petit, sans rien d’autre à faire, les manifestants commencèrent à s’agglutiner et à faire pression sur le barrage policier du pont. Petit à petit, certains ont commencé à rassembler des briques ou pavés et à ériger des barrières de travaux publics, barricades ridicules, contre le barrage de la police. Vers 19h30/20h, les camionnettes et les ballons syndicaux de SUD et de la CGT, qui s’étaient joints aux manifestations, quittèrent les lieux.
    .
  • C’était le signe que la police les avait appelés – nous savons que syndicats et police sont en contact permanent dans ces manifestations « autorisées » – et les avait prévenus qu’elle allait charger et évacuer les lieux. Quelques minutes plus tard, la police chargeait et commençait à évacuer les lieux. Puis, refluant et se dispersant dans les rues, les manifestants ont mis le feu aux poubelles, notamment à celles, nombreuses, dues à la grève des éboueurs. C’est ce que la presse bourgeoise internationale appelle Paris en feu. La même chose s’est produite dans les autres grandes villes du pays cette nuit-là, la suivante et hier samedi.
    .
  • Ainsi, la radicalité gauchiste et anarchiste des manifestations doit être, en elle-même, fortement relativisée, et n’a pour réelle signification prolétarienne que l’impuissance immédiate, face à l’absence de perspectives politiques concrètes. De ces faits, nous pouvons conclure que, pour l’instant, la classe dominante contrôle politiquement et même maîtrise le développement des manifestations de rue.
    .
  • Les nouvelles grèves et la 9e journée d’action de jeudi 23 mars Face au sentiment général de colère et au relatif regain de combativité des prolétaires, l’ensemble des syndicats ont immédiatement appelé à une 9e journée d’action… une semaine plus tard. Certes, l’ensemble des groupes gauchistes a critiqué les syndicats pour cette date tardive, alors que la colère s’est largement étendue avec le 49.3.
    .
  • Pour nous, il s’agit de la tactique habituelle des journées d’action et de la division du travail entre les syndicats officiels et le syndicalisme de base et le gauchisme radical. Déjà en cours, les grèves dans les raffineries ont été reconduites et le blocage physique des approvisionnement en essence au moyen de piquets de grève s’est systématisé. Les ports tendent à être bloqués du fait de la grève des dockers, en général par des journées d’action et non une grève illimitée, différents centres et dépôts ferroviaires sont en grève, pas tous et pas toujours en majorité. Il y a eu une grève dite sauvage par les syndicalistes SUD locaux dans le technicentre de maintenance de Châtillon pour les lignes ouest des trains à grande vitesse. Les services d’enlèvement des ordures des principales villes sont en partie en grève – à Paris par exemple – depuis maintenant plus d’une semaine, etc. Jusqu’à présent, et sous la direction des syndicats de base gauchistes, toutes ces grèves sont orientées pour faire du 23 mars un succès syndical. Elles s’inscrivent dans ce calendrier. Ainsi, les différentes grèves dispersées sont toujours sous le contrôle de l’ensemble des syndicats, grâce au syndicalisme radical de base.
    .
  • Or, ces grèves, ainsi que les manifestations à partir du 16 mars, expriment une colère et une combativité prolétarienne renouvelées et radicalisées. Ainsi, si l’on peut dire qu’il était hautement improbable que la dynamique antérieure de la mobilisation puisse être remise en question par les travailleurs jusqu’à l’utilisation du 49.3, en l’utilisant, la classe dirigeante prend le risque de rouvrir un peu cette possibilité, en la transformant en un enjeu politique concret et immédiat entre les classes. Par exemple, il y a eu des signes de mécontentement ouvert et de luttes potentielles, à propos de l’augmentation des salaires, chez Amazon ou dans l’entreprise automobile PSA (Peugeot, Citroën, Audi), dont la mobilisation générale actuelle peut favoriser l’expression ouverte.
    .
  • Depuis le 16 mars et pour une courte période, on ne peut donc plus exclure totalement qu’un nouveau facteur vienne rompre la dynamique actuelle de la mobilisation contre la réforme des retraites et son contrôle par les syndicats, même si c’est peu probable. C’est ainsi qu’il faut comprendre l’initiative de Révolution permanente de mettre en place des comités d’action afin de créer et développer un réseau pour la grève générale permettant ainsi au gauchisme d’anticiper sur tout débordement prolétarien. En fait, nous pouvons dire que ces comités, s’ils devaient devenir une réalité, remplaceront certainement les anciennes assemblées interpro des précédentes mobilisations massives de 2010, 2013, 2016 et 2019. 3)

Adapter notre orientation et notre intervention ?

Globalement, nous ne proposons pas de changer notre orientation générale. Par exemple, que nous revenions sur une intervention d’agitation directe et massive appelant l’ensemble du prolétariat à faire grève, à l’étendre et à l’unir – par le biais d’un tract par exemple – comme au tout début de la mobilisation en janvier (cf. le tract de B&P-TCI23 que nous avions repris à notre compte).

Tout le « terrain » est encore occupé par l’ensemble des appareils syndicaux et en particulier les appareils de base et gauchistes. Ainsi, nos mots d’ordre ne peuvent être que, formellement, les mêmes que ceux des gauchistes Et donc ils deviennent inutiles dans la situation actuelle, voire pourraient jouer objectivement en faveur du sabotage général de toute riposte par les syndicats. Ainsi, le groupe en tant que tel, et le parti, devraient… attendre – en cette occasion, oui ! – les prochains jours pour voir si la faible probabilité de briser le contrôle des syndicats et la dynamique actuelle.

Ce n’est pas parce que notre mot d’ordre pourrait être le même que celui des syndicats ou des gauchistes qu’ils seraient inutiles. Mais parce que c’est le moment, le moment présent. Par exemple, nous pouvons appeler à la grève et à son extension comme le font les gauchistes au début d’une mobilisation. Nous ne sommes pas « anti-syndicalistes » en soi… mais par rapport aux objectifs directs de toute lutte et en fonction des différentes batailles et barricades… concrétise ou non.

Nous pourrons alors voir si la dynamique impulsée et maîtrisée par les syndicats est confirmée ou remise en cause et adapter notre intervention en conséquence. Nous appelons les prolétaires les plus combatifs à participer activement aux grèves ou même à en prendre l’initiative lorsque leur lieu de travail n’est pas encore en grève lorsque c’est possible. Il faut également surveiller de près tout rassemblement de comités de lutte potentiels, même lorsqu’ils sont mis en place par le gauchisme et le syndicalisme, comme le comité d’action de Révolution permanente. Dans ces comités, même s’il n’y a pas d’espace réel ou de porte ouverte pour présenter une alternative réelle de manière immédiate, les groupes communistes doivent intervenir et défendre non seulement les besoins généraux d’extension de toute lutte – tous les participants de ces comités seront formellement d’accord – mais aussi dénoncer les syndicats et surtout appeler à leur disputer ouvertement la direction de la mobilisation et des initiatives.

Spécifiquement et concrètement, d’aujourd’hui à jeudi prochain, nous appelons ces organismes à organiser des cortèges spécifiques au sein de la manifestation du 23 mars, avec leurs propres mots d’ordre. Autrement dit, nous avançons et défendons l’orientation consistant à transformer la journée d’action syndicale en une journée d’extension des grèves et de centralisation du mouvement autour du ou des comités, qu’ils s’appellent comités d’action ou assemblées interpro, ou autre, ainsi qu’à étendre le champs des mots d’ordre et des objectifs à l’augmentation des salaires.

Nous arrêtons ici ce communiqué, qui était initialement destiné à notre discussion interne. En le publiant, notre premier souci est de partager cette nouvelle expérience avec tous les camarades. En particulier, il est important que la nouvelle génération internationale de révolutionnaires fasse l’expérience du degré de radicalisation que les syndicats de base peuvent développer et de la façon dont ils peuvent occuper tout le terrain pour empêcher le mouvement prolétarien autonome de se développer.

Si cette génération, celle qui créera et dirigera le parti communiste mondial de demain, veut être à la hauteur de ses tâches, elle doit développer son expérience politique et sa capacité à exercer une véritable direction politique de l’ensemble du prolétariat dans le drame historique qui s’annonce. Le GIGC, 19 mars 2023.

 


NOTES

 

  1. https://www.retraite.com/dossier-retraite/le-deficit-dusysteme-de-retraite-francais.html
  2. Révolution ou Guerre # 24 – Groupe International de la Gauche Communiste (www.igcl.org)
  3. https://www.wsws.org/fr/articles/2023/03/17/tmit-m17.html

20 . Editorial du 19 mars. https://www.revolutionpermanente.fr/Bataille-des-retraitesDu-moment-Berger-au-moment-pre-revolutionnaire

  1. cf. le communiqué précédent, page 7, ou encore notre site: http://www.igcl.org/Communique-du-23-janvier-2023-sur Révolution ou Guerre # 24 – Groupe International de la Gauche Communiste (www.igcl.org)

22 . https://www.revolutionpermanente.fr/Reunion-du-Reseaupour-la-greve-generale-ce-mardi-18h30-organisons-nous-a-labase-face-au-49-3

23 . cf. le tract intégré dans notre communiqué de janvier (page 8).

  1. Plateforme de 2020 de la TCI.

27 . Nous avons traduit cet article de Battaglia comunista en français et en anglais. Sa version italienne se trouve sur https://www.leftcom.org/it/articles/2022-11-20/la-difficilestrada-dell-imperialismo-europeo-un-aggiornamento .

28 . cf. l’article ou lettre critique qui suit dans ce numéro et sur la prise de position de la CWO-TCI à propos des grèves au Royaume Uni (Note de la rédaction).

29 . Pour ne citer qu’un exemple, ce fut le cas en janvier 1987 à la fin de la grève sauvage, sans préavis syndical et surtout contre les syndicats qui s’y opposaient, la CGT en premier lieu, des cheminots de décembre 1986-janvier 1987. Il est d’autres exemples de radicalisation subite et extrême des syndicats et des forces de gauche auxquelles le prolétariat sera inévitablement amené à se confronter dans le futur, en particulier dans les périodes pré-révolutionnaires et même révolutionnaire. L’Allemagne de novembre 1918 nous en fournit l’exemple historique le plus tragique.

30 . Sans revenir ici sur le danger conseilliste du fétichisme de l’auto-organisation dont le CCI s’est fait le champion depuis deux décennies et que nous ne pouvons pas aborder ici.

31 . L’auto-organisation peut aussi servir à justifier l’interdiction faite aux avant-gardes politiques, au parti, d’intervenir comme nous l’a montré l’impossibilité pour Rosa Luxemburg de s’adresser au congrès des conseils en 1918 car elle n’était pas ouvrière et seuls « ceux qui figurent sur les listes des personnes travaillant dans les entreprises ou sur les effectifs militaires » pouvaient être délégués au congrès. (La Révolution allemande, Pierre Broué, 1971).

32 . https://leftcom.org/files/2020-10-01-plateforme-tci.pdf , p. 9.

33 .https://www.leftcom.org/fr/articles/2021-10-22/pour-lecommunisme

37 . Nous vous renvoyons à notre tract du 20 août 2022 : http://igcl.org/Dynamique-de-greves-sauvages-au

38 . Nous vous renvoyons à Révolution ou guerre #23 : http://igcl.org/Luttes-ouvrieres-et-intervention et http://igcl.org/Communique-du-9-septembre-2022-Le

39 . http://www.leftcom.org/fr/articles/2023-01-14/notes-sur-lavague-de-gr%C3%A8ves-au-royaume-uni

 

 

Robert Bibeau

Auteur et éditeur

3 réflexions sur “Les luttes ouvrières en France et les syndicats

  • L’objectif prioritaire des patrons comme des syndicats est d’empêcher le surgissement et le développement de toute dynamique de réelle extension de la lutte à différents secteurs, en particulier au moyen de la grève reconductible ; c’est-à-dire à toute dynamique de grève de masse.

    Les patrons ont accordés courant du 2e semestre de 2022 , des augmentations de salaires , de primes; de manière préventive ; sans luttes des salariés mais présentés comme des victoires syndicales. Ce fut décisif pour couper l’herbe sous les pieds des militants syndicaux combattifs en 2023 pour tenter d’élargir les luttes sur le terrain des salaires, a partir de la fin mars.

    Seule l’extraordinaire poussée d’inflation spéculative de mars avril 2023 ne fut pas anticipée…… mais fut sans réponse immédiate; l’attentisme / effroi imposa sa loi .

    La poussée inflationniste incontrôlable présente comme future, contient en soi le potentiel d’un nouvel élan à une date indéterminée…; à moins que l’Etat ne promulgue une forme d’échelle mobile des salaires comme nouvelle mesure préventive….;

    Le bilan anticipation, devient urgent , une brique de plus :

    .;; Dans nos tracts2 nous avons répété à l’envi que la retraite n’est autre que du salaire, c’est à dire une partie du prix global que le capital doit payer pour s’assurer l’emploi de la force de travail, dont le versement est repoussé à la sortie légale du marché du travail. C’est pourquoi les combats pour les retraites doivent être inscrits dans ceux pour les salaires…;

    https://mouvement-communiste.com/documents/MC/Letters/LTMC2351%20FRvF.pdf

    Répondre
  • L’égoïsme systémique
    La corruption vole les droits des citoyens.
    Des politiciens véreux installent l’injustice, la misère et la violence.
    Les gouvernements policiers protègent les intérêts des salopards.

    Répondre

Laisser un commentaire

Votre adresse e-mail ne sera pas publiée. Les champs obligatoires sont indiqués avec *

En savoir plus sur les 7 du quebec

Abonnez-vous pour poursuivre la lecture et avoir accès à l’ensemble des archives.

Poursuivre la lecture