Contre toutes les religions
Contre toutes les religions
« Les institutions mises au pilori », gravure parue dans Le Père Peinard en 1898 Références https://www.marxists.org/archive/bordiga/index.htm
L’actualité spectaculaire se focalise régulièrement sur des questions que le marxisme révolutionnaire a résolues depuis longtemps. C’est le cas de la religion, dont l’abolition doit demeurer un objectif politique. Les religions figurent en effet parmi les principales idéologies qui expriment de manière déformée et voilée les intérêts des classes dominantes et légitiment par là même l’ordre social capitaliste1. Elles contribuent à rendre acceptable l’exploitation et à consoler les prolétaires de leurs malheurs en leur promettant un monde meilleur dans l’au-delà : ce faisant, elles les dépossèdent de leur volonté révolutionnaire. La critique indispensable de toutes les religions ne doit donc pas se limiter à dénoncer les mensonges et les illusions religieuses mais doit aller jusqu’à l’anéantissement en théorie et en pratique du monde capitaliste dont elles sont le reflet.
«(…) la critique de la religion est la condition première de toute critique. (…)Le fondement de la critique irréligieuse est celui-ci : l’homme fait la religion, ce n’est pas la religion qui fait l’homme. La religion est en réalité la conscience et le sentiment propre de l’homme qui, ou bien ne s’est pas encore trouvé, ou bien s’est déjà reperdu. Mais l’homme n’est pas un être abstrait, extérieur au monde réel. L’homme, c’est le monde de l’homme, l’État, la société. Cet État, cette société produisent la religion, une conscience erronée du monde, parce qu’ils constituent eux-mêmes un monde faux. La religion est la théorie générale de ce monde, son compendium encyclopédique, sa logique sous une forme populaire, son point d’honneur spiritualiste, son enthousiasme, sa sanction morale, son complément solennel, sa raison générale de consolation et de justification. C’est la réalisation fantastique de l’essence humaine, parce que l’essence humaine n’a pas de réalité véritable. La lutte contre la religion est donc par ricochet la lutte contre ce monde, dont la religion est l’arôme spirituel. » K. Marx, Contribution à la Critique de la philosophie du droit de Hegel, 18432. 2
Il ne suffit en effet pas de dévoiler la mystification religieuse pour qu’elle disparaisse. Bien au contraire, dans un monde de plus en plus anxiogène et schizophrénique, la religiosité a plutôt tendance à se renforcer et à se démultiplier. Ainsi, aux religions traditionnelles (juive, chrétienne, musulmane, bouddhiste…) et à leurs multiples schismes, il faut aujourd’hui ajouter de nouvelles variantes postmodernes : philosophie new-Age, scientologie, anthroposophie, moonisme, mouvement raëlien, Falun Gong… Accompagnant bien souvent ces nouvelles formes de « spiritualité », les approches complotistes (mouvances antivax, QAnon…) traduisent substantiellement la même logique sectaire et illuminée que les religions établies de longue date.
« Exiger qu’il soit renoncé aux illusions concernant notre propre situation, c’est exiger qu’il soit renoncé à une situation qui a besoin d’illusions. La critique de la religion est donc, en germe, la critique de cette vallée de larmes, dont la religion est l’auréole. La critique a effeuillé les fleurs imaginaires qui couvraient la chaîne, non pas pour que l’homme porte la chaîne prosaïque et désolante, mais pour qu’il secoue la chaîne et cueille la fleur vivante. La critique de la religion désillusionne l’homme, pour qu’il pense, agisse, forme sa réalité comme un homme désillusionné, devenu raisonnable, pour qu’il se meuve autour de lui et par suite autour de son véritable soleil. La religion n’est que le soleil illusoire qui se meut autour de l’homme, tant qu’il ne se meut pas autour de lui-même. » K. Marx, Contribution à la Critique de la philosophie du droit de Hegel, 1843.
Plus prosaïquement, les religions agissent aussi en tant que force matérielle au service de la contre-révolution. Dernièrement (septembre 2023), on a assisté à un front particulièrement significatif entre les courants de l’islam politique et les catholiques intégristes de « Civitas » liés aux milieux antivax. Ceux-ci protestaient contre la généralisation de cours d’éducation à la vie relationnelle affective et sexuelle (Evras), protestations accompagnées du saccage de huit écoles en Wallonie.
« Cela n’a pas empêché quelque 1 500 personnes de se rassembler dans le centre de Bruxelles, dimanche, avec un mot d’ordre : « Touchez pas à nos enfants ! » Dans une ambiance tendue, Radya Oulebsir, une militante musulmane, organisatrice autoproclamée de la protestation, et Alain Escada, un dirigeant de l’association catholique traditionaliste Civitas, ont exigé l’abandon du cours. Sur plusieurs des établissements vandalisés, des slogans hostiles comme « No Evras, sinon les prochains, c’est vous » avaient été tagués par les incendiaires. (…) Parmi ceux qui dénoncent le nouveau cours, on retrouve également des activistes anti-vaccins qui s’étaient manifestés durant la pandémie de Covid-19, des adeptes de théories conspirationnistes, des climato sceptiques, et même des personnalités, qui affirment qu’une tentative de criminalisation des parents est à l’oeuvre, orchestrée par des politiques qui auraient organisé les incendies.
Cette alliance qui pourrait sembler paradoxale est en fait particulièrement significative des tendances proto fascistes et « populistes » actuelles. Parallèlement, celles-ci polarisent à « gauche » le développement d’une certaine « islamophilie » par le biais du vecteur historique de l’antisémitisme (parfois qualifié de « nouvel antisémitisme »).
Guerre à « l’opium du peuple »
Par essence irréligieux et antireligieux, le mouvement communiste a pu prendre à certaines périodes des « masques religieux » (Engels) via différentes formes schismatiques pieuses et 3 millénaristes (Anabaptistes, Bogomiles, Dolciniens4…) inscrites dans la longue tradition du communisme en tant que mouvement de mécréance. C’est par ailleurs ce que condense le titre du journal de Blanqui en 1880, devenu une devise célèbre : « Ni dieu, ni maitre ». Mais cette lutte implacable doit également tenir compte du fait que la religion exprime à la fois la souffrance et la protestation contre cette souffrance ; à la fois la misère et l’espérance en un monde meilleur (que les anabaptistes voulaient à l’inverse réaliser ici et maintenant).
« La misère religieuse est, d’une part, l’expression de la misère réelle, et, d’autre part, la protestation contre la misère réelle. La religion est le soupir de la créature accablée par le malheur, l’âme d’un monde sans coeur, de même qu’elle est l’esprit d’une époque sans esprit. C’est l’opium du peuple. » K. Marx, Contribution à la Critique de la philosophie du droit de Hegel, 1843.
Comme d’autres drogues, l’opium apaise, soulage et fait oublier tout en annihilant en même temps les velléités de révolte et de lutte dans la réalité terrestre. Ce n’est pas par hasard que cet opium à largement servi aux colonisateurs anglais à domestiquer le prolétariat chinois et à lui inculquer une dépendance docile.
« La critique de la religion aboutit à cette doctrine, que l’homme est, pour l’homme, l’être suprême. Elle aboutit donc à l’impératif catégorique de renverser toutes les conditions sociales où l’homme est un être abaissé, asservi, abandonné, méprisable, qu’on ne peut mieux dépeindre qu’en leur appliquant la boutade d’un Français à l’occasion de l’établissement projeté d’une taxe sur les chiens » Pauvres chiens ! On veut vous traiter comme des hommes ! » » K. Marx, Contribution à la Critique de la philosophie du droit de Hegel, 1843.
Mais la critique marxiste des religions doit également se distinguer de l’anticléricalisme bourgeois et de son « sacro-saint » libre examen (conçu comme choix individuel et individualiste) qui n’est que l’adaptation laïque du libre arbitre catholique. Comme pour l’antifascisme libéral et démocratique, Bordiga a toujours insisté pour se séparer de ces milieux « laïcards » qui conspuent les curés pour mieux défendre les intérêts particuliers de leur faction laïque (et parfois franc-maçonne). Cette critique partielle et bornée ne les empêche pas d’ailleurs pas de participer quand cela leur convient, aux fronts interclassistes et autres alliances opportunistes avec les représentants des religions.
« Mais dans le même temps, la critique marxiste démarque et dénonce les illusions selon lesquelles le « libre examen » serait une conquête suffisante pour éliminer du sein de la société les rapports d’exploitation et d’oppression de classe. » A. Bordiga, « Anticléricalisme et socialisme », Battaglia Comunista, N°35, 1949.5.
Cette remarque de Bordiga s’inscrit dans la critique générale de la démocratie au sein de laquelle l’athéisme comme l’anticléricalisme ne sont pas des positionnements suffisamment clivants hors de l’affirmation intégrale du programme communiste. C’est pourquoi une partie de la bourgeoisie lettrée et de l’intelligentsia peut défendre un athéisme compatible avec le M.P.C. et à son droit (droit au blasphème). La lutte anti religieuse implique non seulement le dévoilement des mensonges et illusions portées par toutes les religions mais en même temps requiert la lutte de classe pour la suppression de l’exploitation et l’émancipation humaine.
Existe-t-il une religion des opprimés ?
Il revient à F. Engels6, dans sa dernière contribution théorique inachevée, en 1894, d’avoir comparé le communisme au christianisme primitif :
« L’histoire du Christianisme primitif offre des points de contact remarquables avec le mouvement ouvrier moderne. Comme celui-ci le christianisme était à l’origine le mouvement des opprimés, il apparaissait tout d’abord comme religion des esclaves et des affranchis, des pauvres et des hommes privés de droits, des peuples subjugués ou dispersés par Rome. Tous les deux, le christianisme de même que le socialisme ouvrier, prêchent une délivrance prochaine de la servitude et de la misère ; le christianisme transporte cette délivrance dans l’au-delà, dans une vie après la mort, dans le ciel ; le socialisme la place dans ce monde, dans une transformation de la société. »7
De là, à généraliser abusivement cette analyse à d’autres conditions ne tient pas compte du fait que cette comparaison s’arrête strictement au moment où le christianisme va devenir religion d’État. « Trois siècles après sa naissance, le christianisme est reconnu comme la religion d’État de l’empire mondial de Rome » (Engels). Depuis la conversion de l’empereur Constantin en 312-325, le christianisme et tous ses embranchements ultérieurs, vont s’adapter aux nécessités de la succession des modes de production et à leurs classes dominantes pour devenir un pilier structurel et légitimant de l’esclavagisme, de la féodalité et du capitalisme. Sa nature primitive de « religion des opprimés » va irrévocablement devenir religion (et églises) des oppresseurs et des exploiteurs. Le christianisme va ainsi totalement s’adapter aux exigences de la logique capitaliste pour devenir sous sa forme « protestante », l’idéologisation la plus adéquate de ses lois immanentes. C’est ce que développera, en 1904/1905, Max Weber dans son célèbre ouvrage « L’Éthique protestante et l’Esprit du capitalisme ». Mais il revient à Marx d’avoir préalablement souligné cette réalité :
« Le monde religieux n’est que le reflet du monde réel. Une société où le produit du travail prend généralement la forme de marchandises et où, par conséquent, le rapport le plus général entre les producteurs consiste à comparer les valeurs de leurs produits et, sous cette enveloppe des choses, à comparer les uns aux autres leurs travaux privés à titre de travail humain égal, une telle société trouve dans le christianisme avec son culte de l’homme abstrait, et surtout dans ses types bourgeois, protestantisme, déisme, etc., le complément religieux le plus convenable. » K. Marx, Le Capital.8
Et, c’est toujours dans cet ouvrage primordial que Marx développera le caractère fétiche de la marchandise en tant que la « religion du quotidien ».
« C’est seulement un rapport social déterminé des hommes entre eux qui revêt ici pour eux la forme fantastique d’un rapport des choses entre elles. Pour trouver une analogie à ce phénomène, il faut la chercher dans la région nuageuse du monde religieux. Là les produits du cerveau humain ont l’aspect d’êtres indépendants, doués de corps particuliers, en communication avec les hommes et entre eux. Il en est de même des produits de la main de l’homme dans le monde marchand. C’est ce qu’on peut nommer le fétichisme attaché aux produits du travail, dès qu’ils se présentent comme des marchandises, fétichisme inséparable de ce mode de production. » K. Marx, Le Capital.
Bien avant cela Marx avait déjà largement critiqué les principes sociaux du christianisme pour y opposer la force révolutionnaire du prolétariat :
« Les principes sociaux du christianisme ont eu maintenant dix-huit siècles pour se développer et n’ont pas besoin d’un supplément de développement par des conseillers au consistoire prussiens. Les principes sociaux du christianisme ont justifié l’esclavage antique, magnifié le servage médiéval et s’entendent également, au besoin, à défendre l’oppression du prolétariat, même s’ils le font avec de petits airs navrés. Les principes sociaux du christianisme prêchent la nécessité d’une classe dominante et d’une classe opprimée et n’ont à offrir à celle-ci que le voeu pieux que la première veuille bien se montrer charitable. Les principes sociaux du christianisme placent dans le ciel ce dédommagement de toutes les infamies dont parle notre conseiller, justifiant par là leur permanence sur cette terre. Les principes sociaux du christianisme déclarent que toutes les vilenies des oppresseurs envers les opprimés sont, ou bien le juste châtiment du péché originel et des autres péchés, ou bien les épreuves que le Seigneur, dans sa sagesse infinie, inflige à ceux qu’il a rachetés. Les principes sociaux du christianisme prêchent la lâcheté, le mépris de soi, l’avilissement, la servilité, l’humilité, bref toutes les qualités de la canaille ; le prolétariat, qui ne veut pas se laisser traiter en canaille, a besoin de son courage, du sentiment de sa dignité, de sa fierté et de son esprit d’indépendance beaucoup plus encore que de son pain. Les principes sociaux du christianisme sont des principes de cafards et le prolétariat est révolutionnaire. » K. Marx, Le communisme de « L’observateur rhénan », Marx-Engels, Sur la religion, p.82/83, éditions sociales, Paris, 1972.
Bien entendu, cette virulente critique peut s’appliquer tant aux principes sociaux du christianisme qu’à ceux du judaïsme, de l’islamisme ou du bouddhisme… qui comme toutes les autres religions se sont particulièrement bien théologiquement adaptées à l’esprit et à la modernité capitaliste (que l’on pense par exemple aux astuces de l’Islam pour se rendre compatible aux nécessités du crédit (prêt avec intérêts) qu’il est pourtant censé condamner sur le plan théologique). En ce sens, il n’y a pas et il ne peut pas y avoir de religion et à fortiori d’églises qui se positionnerait du côté des opprimés.
Ce qu’il y a actuellement, c’est une instrumentalisation concertée des classes dominantes afin de faire passer, surtout en Europe, l’islam comme l’expression des gémissements de toutes les victimes du capitalisme « occidental » et, grâce à l’appui des « idiots utiles » de la gauche du capital, renforcer la remontée idéologique de cette religion en dissimulant surtout les États, les intérêts économiques colossaux et le bellicisme quelle représente en réalité. Ainsi, le mythe d’un islam des pauvres, pastiche contemporain pâlichon de la théologie de la libération9, contribue à justifier son renouveau récent par une pirouette qui ferait oublier la dictature fasciste des mollahs en Iran, celle des talibans en Afghanistan, les monarchies « post » féodales du Golfe (Arabie Saoudite, Bahreïn, Koweït, Qatar, Oman, Émirats Arabes Unis), le Koweït, le Maroc, l’Algérie, l’Égypte, la Turquie, l’Indonésie ou encore la semi dictature militaire islamiste du Pakistan… autant de modèles incidemment vantés par les décérébrés du tiers-mondisme.
La conséquence la plus visible de ce retour des religions réside dans le caractère propagandiste et virulent de plusieurs d’entre elles. Ainsi, les témoins de Jéhovah, les mormons, les évangéliques, les adeptes du bahaïsme ou encore l’Opus Dei développent leurs sphères d’influences. C’est dans le cadre de ce retour du mysticisme que doit être replacé le propagandisme islamique. Cette propagande, passant notamment par la mise en avant d’éléments vestimentaires identitaires, a été clairement élaborée comme arme d’affirmation. Elle s’appuie à gauche sur la nouvelle doxa de « l’islamophobie », assimilant toute critique anti islamique à du « racisme », assignant par là même tous les membres d’une communauté donnée à une religion spécifique.
L’Islamophobie, outil privilégié de la propagande politique de l’islam
C’est principalement le régime des mollahs iraniens après 1979, qui popularisera à des fins de propagande, la nouvelle acception du terme « islamophobie », bien qu’il n’existe pas d’équivalent persan à ce néologisme et que le terme lui-même ait été inventé au début du XXe siècle par des ethnologues français étudiant les pratiques religieuses d’Afrique de l’Ouest.
Pour Gilles Kepel, politologue et professeur d’université, « [L’islamophobie] est un concept récent qui repose sur une ambiguïté dans la mesure où il se présente comme le symétrique de l’antisémitisme. Alors que la lutte contre l’antisémitisme criminalise ceux qui s’attaquent aux juifs sans empêcher pour autant la libre critique des textes sacrés, le combat contre l’islamophobie fait de toute réflexion critique sur l’islam un interdit absolu. L’ambiguïté entretenue par le CCIF et certaines associations antiracistes qui tendent à confondre antisémitisme et islamophobie est donc une imposture. »10
De fait l’islamophobie dans sa nouvelle signification a servi de couverture idéologique réactive aux vagues d’attentats islamiques qui se sont démultipliés dans le monde entier (de New-York à Madrid, de Bruxelles au Nigéria, du Liban à l’Inde).
« Même les tueurs djihadistes bénéficient à leur yeux de circonstances atténuantes : ils ne feraient que réagir à l’islamophobie. Il y a là une preuve du succès de l’entreprise d’endoctrinement lancée par les Frères musulmans, visant à faire croire que les musulmans sont des victimes, quoi qu’ils puissent faire. L’idéologie victimaire a réponse à tout et justifie le pire. » P-A Taguieff, Liaisons Dangereuses : islamo-nazisme, islamo-gauchisme, Hermann Éditeurs, p.106, Paris, 2021.
Par ailleurs, le débat sur les interprétations du concept d’islamophobie se trouve également au centre de la campagne islamophile visant à présenter l’islam comme la religion des opprimés et des victimes non seulement des mécréants mais aussi d’autres religions présentées comme uniformément « colonialistes » (judaïsme et christianisme).
« Le concept d’islamophobie est un concept non seulement discutable, mais à critiquer de manière définitive car il contient une portée communautariste et défensive à mon sens négative par plusieurs aspects. D’abord, elle n’est qu’un discours creux et victimaire vocable d’une inculture intellectuelle et historique profonde. (…) Le concept d’islamophobie est un concept politiquement correct, qui dédouane la pensée à bon compte au nom d’une lutte métaphysique entre les dominés et les dominants, à défaut de penser les problématiques les effets et les enjeux de la mondialisation, de l’immigration, des rapports entres les élites et les politiques d’intégrations. Ce concept est devenu une sorte de « mot valise » susceptible de garantir une rente de situation à tous nos victimaires institutionnels. Les promoteurs du concept d’islamophobie traduisent souvent de manière explicite une méconnaissance béate de l’histoire de l’Europe, en oubliant par incompétence ou volonté déclarée, les siècles de persécutions des autres minorités religieuses ou culturelles. » Nasser Suleiman Gabryel11
Il s’agit de la même mécanique que celle déployée par le binôme fascisme/antifascisme, l’islamophobie comme l’antifascisme démocratique servant de barrage et de bouclier à la critique du capitalisme dans sa totalité. Empêchant une critique globale et systémique, cette mécanique permet symétriquement de ne pas lutter contre le capitalisme et de se donner une bonne conscience supposée combattre certaines conséquences du capitalisme vues comme particulièrement atroces. C’est le propre de la lutte parcellaire et de la croyance réformiste en une transformation graduelle du système capitaliste. À l’inverse, la mécréance communiste critique toutes les religions même celles qui se présenteraient sous des oripeaux libertaires ou laïques.
Décembre 2023 : Fj, Pb & Mm.
NOTES
1 Sur cette question nous renvoyons le lecteur à notre texte « Idéologies et fausses conscience » paru dans notre revue Matériaux Critiques N°7 et disponible sur notre site web https://materiauxcritiques.wixsite.com/monsite/textes
2 https://www.marxists.org/francais/marx/works/1843/00/km18430000.pdf
3 https://www.lemonde.fr/international/article/2023/09/18/en-belgique-pl…
4 Les Dolciniens étaient un mouvement religieux chrétien considéré comme une hérésie par l’Église catholique du début du XIV siècle. Prosélytes itinérants, ils prônaient la pauvreté absolue et développaient un projet collectiviste digne d’un mouvement révolutionnaire moderne, économique, politique et social abolissant tant la propriété que le mariage. Fra Dolcino à la tête de 4.000 partisans entama une campagne de guérilla qui gagna tout le nord de l’Italie pour résister au clergé. Il fut battu et brûlé en 1307. Ses disciples, eux aussi reconnus comme hérétiques, furent destinés au bûcher. Pour une plus ample analyse des nombreux mouvements de ce type nous conseillons l’excellent ouvrage de R. Vaneigem, La résistance au christianisme, p.314/317, Fayard, Paris, 1993 ainsi que celui de Kenneth Rexroth, Le communalisme, L’insomniaque, 2019.
5 Ni patrie, ni frontières, Mai 2010, « Religion et Politiques », p.175.
6 Il est à noter que sur la critique de la religion, Engels a souvent été plus tranchant que Marx, ayant subi dans son enfance le rigorisme du piétisme luthérien, alors que Marx provenait, lui, d’un milieu « naturellement athée » influencé par le rationalisme des lumières.
7 https://www.marxists.org/francais/marx/94-chris.htm
8 https://www.marxists.org/francais/marx/works/1867/Capital-I/kmcapI-I-4.htm
9 La « théologie de la libération » est une tendance issue du christianisme, apparue en Amérique latine dans les années soixante (conférence de Medellin) qui se positionna politiquement et puis militairement du côté des indigène pauvres et opprimés. Cette tendance s’opposa ainsi à la hiérarchie cléricale qui soutenait activement les nombreuses dictatures militaires de cette époque. En Colombie, plusieurs prêtres s’engagent dans les guérillas paysannes. Parmi eux, Camillo Torres, qui meurt au combat en 1966. Mal vue par l’église, cette tendance se verra condamnée (Jean-Paul II) et perdra progressivement son influence.
10 Gilles Kepel, « Nous sommes face à un processus de guerre civile », Le Figaro Magazine, semaine du 4 novembre 2016, p. 40-44
11 https://www.lemonde.fr/idees/article/2012/07/04/critique-du-concept-d-islamophobie_1728053_3232.html
Bibliographie
Ouvrages :
– MARX, Karl et ENGELS, Friedrich, Sur la religion, éditions sociales, Paris, 1972.
– MARX, Karl, Le Capital, livre Premier, 1867, [en ligne], https://www.marxists.org/francais/marx/works/1867/Capital-I/kmcapI-I-4.htm
– LENOIR, Norbert, Marx et la double structure de la religion, éditions nouvelles Cécile Defaut, Nantes, 2014.
– TAGUIEFF, Pierre-André, Liaisons Dangereuses : islamo-nazisme, islamo-gauchisme, Hermann Éditeurs, Paris, 2021.
– VANEIGEM, Raoul, La résistance au christianisme, Fayard, Paris, 1993.
Revues :
– COLEMAN, Yves, « Religion et Politiques », Ni patrie, ni frontières, Mai 2010.
– COLEMAN, Yves, « Islam, islamisme, islamophobie », Ni patrie, ni frontières, Mars 2008.
Articles :
– MARX, Karl, Contribution à la critique de la philosophie du droit de Hegel, 1843, [en ligne], https://www.marxists.org/francais/marx/works/1843/00/km18430000.pdf
– ASAL, Houda, « Islamophobie : la fabrique d’un nouveau concept. État des lieux de la recherche », Sociologie, Volume 5, 2014, [en ligne], https://www.cairn.info/revue-sociologie-2014-1-page-13.htm
– SULEIMAN GABRYEL, Nasser, « Critique du concept d’islamophobie », Le Monde, 2012.
Versão em Língua Portuguesa:
https://queonossosilencionaomateinocentes.blogspot.com/2024/04/contra-todas-as-religioes.html
Billet intéressant !
Sur le fond je ne peux qu’approuver et être d’accord… mais la réalité hélas est beaucoup plus complexe…et nuancée…
la religiosité a été individualisée en occident afin d’être plus acceptable, et donc même si les églises sont vides, les gens n’ont pas abandonné la religion pour autant… ni les gouvernements dits les plus laics et les plus progressistes, l’occident en réalité continue d’agiter des »néo-croisades » des temps modernes, et les evangélistes américains sont les champions toutes catégorie de cette guerre religieuse qui cible exclusivement l’islam…. comme je l’ai souvent mentionné ici, les réseaux évangélistes ont quasiment été a la base de la grosse vague athée dans le monde musulman avec des millions de jeunes issus de pays mususlamns qui ont abandonné l’islam…. seuls quelques brebis égarées encore se convertissent de l’Islam vers le christianisme… comme les réseaux de Joyce Meyer qui finance Al Hayat TV, TV satellite arabophone, et qui possède ses plateformes web hyper actives sur youtube et les réseaux sociaux et animés par un Marocain converti au christianisme, qui passe sa vie a attaquer les sheikhs salafistes et discréfiter l’islam (faites un tour sur youtube et tapez frere Rachid, ou la chaine youtube TBN.fr ou encore brother Rachid TV… :))) ce type, a lui seul, qui carbure au fric de l’évangéliste américaine Joyce Meyer, a sévu depuis 15 ans dans le monde arabe, avec radios, TVs, et plateformes spécialisées … et ceci n’est qu’un exemple, des dizaines et centaines de Brother Rachid sont aujourd’hui actifs avec des Syriens, des Palestiniens, des Jordaniens, des Saoudiens etc… qui prêchent la même chose et invitent sur leur plateaux des pseudo specialistes »historiens’, pour valider le charabia de la bible et invalider le charabia du Coran ! :)))
le problème encore avec l’Islamophobie aujourd’hui est que le terme englobe un racisme occidental culturel et racial aussi…. et c’est de la que l’islamophobie tire sa puissance…. et ceci nous renvoie un peu a l’histoire de l’Empreur d’Éthiopie Haile Selassié, qui pourtant chrétien et considéré même comme une icône de la chrétienté, son pays n’échappera pas aux attaques colonialistes occientales et italienne en particulier (sous le régime fasciste de mussolini)… et lui de s’insurger que la league des nations dont il fut le premier membre Africain, ne bougea pas le petit doigt pour dissuader Mussolini de massacrer de l’Ethiopien chrétien comme des mouches depuis son offensive de 1935 jusqu’a la fin de la deuxième guerre… ou l’empreur Éthiopien a du fuir le pays et s’exiler en occident a Paris et londres surtout, et ne pouvoir retourner qu’au lendemain de la guerre dans son pays… Bref, Bougnoul c’est bougnoul, basané c’est basané, que tu sois chrétien, musulman ou athée c’est kif kif… et l’islamophobie est un recpetacle de tous ceux-la et leur voix en quelques sortes ! … il faut donc se méfier des analyses a deux sous de plateformes comme riposte laique et autres sites similaires, qui eux sont en effet plus animés par un racisme primaire et tentent d’alarmer les occidentaux ou leur fauire peur avec un referentiel salafiste qui n’a plus cour auf chez daech…
l’Islam aujourd’hui qui subsiste est politique, comme religion des opprimés et religion des affamés, des laissé pour compte, et c’est en cela qu’il est redoutable et que toute les moVarchies et régimes ou juVtes militires du monde arabe le craignent comme terrifiant…. de même que la pratique du Ramadan et des rites mususlmans est tout aussi politique, que ce soit chez le diaspora misulmanes en occident ou chez eux au bled… bref, le discours religieux jusqu’a date réussit mieux a fédérer les populations et a viser plusieurs objectifs en même temps è; A la fois les régimes sur place, que la domination »judéo-chrétienne » ou »athée » ou »incroyants » de l’occident !
et comme je l’ai mentionné plusieurs fois, les moeurs des pays musulmans restent parmis les plus ouverts et le plus libertaires, la religion ne constitue que le visage masqué, et l’hypocrisie sociale qui preserve l’ordre politique des dirigeants et l’ordre social aussi… en absence de renouveaux ou de mouvements sociaux acceptables alternatifs sur fond de misère et d’exploitation capitaliste par les elites ! la vague athéiste elle par contre, comme une deferlante, se traduit ou s’explique elle, beaucoup plus par l’individualisme et les valeurs matérialistes qui ont conquis l’occident et pas vraiment pas une quête de la vérité ou autre…
Merci pour le billet !
Merci de corriger, il fallait lire a la fin »valeurs matérialistes qui ont conquis l’ORIENT (ET PAS L’OCCIDENT) et vraiment pas une quête de la vérité ou autre… »
Merci
Ce sacrè brother Rachid pour être exact, il a commencé sa croisade anti-islamique et Pro chrétienne, il y a 25ans je crois…:)) peut-être un peu moins, mais moi je le suspecte de faire partie des convertis de l’époque des années 80, qui le faisaient pour le Visa américain….:))) A l’époque, pas possible d’avoir le moindre visa européen, et encore moins le visa tourisme Yankee, ou visa etudiant etc… a moins d’être riche comme cresus, et que les comptes bancaires et l’occupation au bled peut justifier un visa vacances, … bref a cette époque, quelques jeunes de la classe moyenne et pauvre de ma ville, désoeuvré, et désespéré pour trouver du boulot, et même un gosse de riche, qui navait pas résussi a obtenir le visa américain, nous avaient mi au parfum : ils contactaient une église Presbyteérienne évangéliste bourrée de fric et avec beaucoup de pouvoir politique au congrès et chez les républcains aux USA, qui leur demandait des références comme un ami ou proche converti…comme guarantie…et préférait s’assurer de les garder 9 mois ou un an au bled, en leur envoyant des bibles, et des pamphlets, et beaucoup de documentations et livrets etc… et au bout de quelques mois, leur faiait passer un test au téléphone, puis un autre, puis un autre, et a la fin, envoyait leur coordonnées a l’ambassade US, véritable ville dans la ville, et château fort bourré de marines, afin de leur garantir le via via le consulat US…. et hop, c’Était dans la poche, avec l’avantage que beaucoup au début étaient aussi pris en charge surtout s’ils le faiaient en famille entière qui avaient priorité, mais les célibataires aussi, et donc arrivé au consulat US en pensant qu’il allaient obtenir le via pour 3 mois ou 6 mois, on leur tamponait un via de 10 ans ! :)))…. la majorité, tenu tout de même de prouver leur conversion sur place une fois arrivé aux states, faisient semblant, prenaient les jobs et les bourses et aides qu’on leur offrait a gogo, et disparaissaient dans la nature après… il y a jusqu’a ce jour, une grosse part de gens qui soient parti comme ça, même si la lotterie de l’immigration américaine continue d’occupper la première place ! …. donc ce frère Rachid…. tête de turc…qui ressemble a l’un de mes cousins…:))) qui nous faisait rire lorsqu’on était gosses, et s’habillait d’un drap comme un fantôme pour nous faire peur….et ûrement un de ceux-la ! :)))
Que voulez-vous ?! la mauvaise foi ne peut trouver face a elle que de la mauvaise foi dans ces histoires de religion ! Aujourd’hui, les conversions par milliers et millions se font encore vers le christianisme ou vers l’islam, et pour les plus riches vers le judaisme ! nous avons aussi notre lot de juifs converti, ou comme Madonna s’est convertie a la cabbale juive pour son business et son image aussi …:)))
tout ceci n’est que business et intérêts sonnants et trébuchants…. si je vous montre les barraques que se font construire certains de nos barbus, qui soient sur le point de terrasser nos bourgois laics et anti-religieux historiques en termes de fortunes, vous n’en reviendrez pas… ils ont des goûts douteux de Maisons modernes spectaculaires comme dans les films porno de la vallée de san Fernando de los angeles, et autres beverly hills, des barraques de 5000 m2 autour de piscines et tout en baies vitrées et en dorrures aussi, mobilier hyper moderne et frime a gogo… il manque plus que Rocco Siffredi l’acteur porno italien et quelques bonnes partouzes, sauf qu’au lieu de tout ça, leurs murs sont flanquées de versets du coran dorés et argentés extravaguants et encadrés et parfois monumentaux…. car la libido chez eux se déclenche on dirait avec les calligraphies arabes, et se sont souvent leurs femmes voilées et qui roulent en bolides de luxe, qui soient derrière ces architectures et deco…
Tenez, en voici un exemple qui m’a tué de rire …a vendre a 5 million de dollars US ou 5 million d’euro…. (ici une ferme de 10 hectares qui ne produit rien de particulier mais ferme d’agrement et de villégiature… avec surtout sa villa privative qui immite les grands plans d’architectes en L, et remarquez les caligraphies de coran sur les murs… la vidéo et en arabe et l’agent immobilier et aussi vulgaire que bledard que le proprio de ce truc)… bref, ceci n’est qu’un maigre exemple …. dans un pays ou plus de 80% de la population est passée depuis deux ans au seuil de pauvreté ou sous celui-ci !
https://www.youtube.com/watch?v=p-lM1i3v3jo
Et encore, ceci n’est qu’un exemple de pays arabe pauvre comme mon bled, allez voir ce qui se construit en arabie saoudite et aux émirates par ces mêmes allumés plein aux as aujourd’hui ! nous sommes a une époque ou la religion en vérité constitue le coeur du business pour une zone comme le moyen-orient ou l’afrique… car sans religion, pas de business…, pas de Ramadan, pas de Business, pas de Pélerinage a la Mecque pas de business, déja qu’on ne produit rien a la base dans le monde arabe, la véritable ossature de l’Économie c’est la religion, les importations et le commerce, et encore, même si tout le monde ne fait qu’utiliser ou intrumentaliser cette religion et passe son temps a fricoter a gauche comme a droite ! :))
Yallah bye !
J’ai revu la vidéo, c’est 6.5 million d’euro le prix de vente et pas 5, et ça c’est sûrement juste un inconnu total, un quidam quelconque, religieux et avide comme un ogre… sûrement un revendeur de matériaux de construction de Casablanca ou un multiple boutiquier doublé de proprio foncier ou immobilier qui vaut rien sur le marché qui a fait tout ça ! le capitalisme a la brésilienne du Bled c’est ça… et sans pitié pour les pauvres ! :))