L’entente sino-russie et les pays du Sud global = la multipolarité (Korybko)

Par Andrew Korybko.  Sur  Vers la tri-multipolarité : le milliard d’or, l’entente sino-russo et les pays du Sud (substack.com)

L’évolution imminente de la transition systémique mondiale vers la tri-multipolarité pourrait voir le milliard d’or de l’Occident dirigé par les États-Unis, l’Entente sino-russo et le Sud global dirigé de facto par l’Inde devenir les pôles les plus importants des relations internationales, en dessous desquels se trouveraient les puissances montantes et les groupes régionaux. Tous les acteurs s’équilibreraient les uns les autres en s’alignant à l’intérieur et entre leurs niveaux respectifs, ce qui pourrait avoir pour résultat de stabiliser les affaires mondiales beaucoup plus que ne l’ont fait les ordres unipolaires et bipolaires précédents.

Les relations internationales se dirigent vers la tripolarité à un rythme stupéfiant à la suite des événements dramatiques qui se sont déroulés au cours de l’année écoulée et en particulier du mois dernier. Les lecteurs qui n’ont pas suivi de près cette mégatendance pourraient être décontenancés par cette évaluation, d’où la nécessité pour eux de revoir les analyses suivantes qui placeront tout dans son contexte approprié. Après les avoir énumérés, ils seront ensuite résumés pour plus de commodité avant d’expliquer ce qui pourrait bientôt arriver ensuite :

Séances d’information

* 7 octobre 2021 : « Vers la bi-multipolarité »

* 16 décembre 2021 : « Le Néo-NAM : de la vision à la réalité »

* 15 mars 2022 : « Pourquoi les États-Unis ont-ils donné la priorité à l’endiguement de la Russie plutôt qu’à la Chine ? »

* 26 mars 2022 : « La Russie mène une lutte existentielle pour la défense de son indépendance et de sa souveraineté »

* 22 mai 2022 : « La Russie, l’Iran et l’Inde créent un troisième pôle d’influence dans les relations internationales »

* 6 juin 2022 : « L’Inde est la force d’équilibre irremplaçable dans la transition systémique mondiale »

* 20 juin 2022 : « Vers la double tripolarité : une grande stratégie indienne pour l’ère de la complexité »

* 5 août 2022 : « Le ministère russe des Affaires étrangères a expliqué de manière exhaustive la transition systémique mondiale »

* 1er octobre 2022 : « Le conflit ukrainien a peut-être déjà fait dérailler la trajectoire de superpuissance chinoise »

* 29 octobre 2022 : « L’importance de bien encadrer la nouvelle guerre froide »

* 19 novembre 2022 : « Analyse de l’interaction entre les États-Unis, la Chine, la Russie et l’Inde dans la transition systémique mondiale »

* 29 novembre 2022 : « L’évolution des perceptions des principaux acteurs au cours du conflit ukrainien »

* 14 décembre 2022 : « La neutralité de principe de l’Inde récolte de grands dividendes stratégiques »

* 28 décembre 2022 : « Les cinq façons dont les États-Unis ont réussi à réaffirmer leur hégémonie sur l’Europe en 2022 »

* 1er janvier 2023 : « Le New York Times a tenté de jeter de l’ombre sur l’essor mondial de l’Inde »

* 7 janvier 2023 : « Le sommet du Sud de l’Inde est l’événement multilatéral le plus important depuis des décennies »

* 11 janvier 2023 : « Exposer l’agenda narratif des médias occidentaux dans la mise en place de la nouvelle détente sino-américaine »

* 4 février 2023 : « L’incident du ballon chinois pourrait changer de manière décisive la dynamique de l’État profond de la Chine et des États-Unis »

* 14 février 2023 : « La ‘course à la logistique’ autoproclamée de l’OTAN confirme la crise militaro-industrielle du bloc »

* 26 février 2023 : « La Chine semble de manière convaincante recalibrer son approche de la guerre par procuration entre l’OTAN et la Russie »

* 28 février 2023 : « À quel point le monde changerait-il radicalement si la Chine armait la Russie ? »

* 1er mars 2023 : « Les forums mondiaux comme l’ONU et le G20 perdent progressivement de leur importance »

* 1er mars 2023 : « L’Allemagne ment : les livraisons d’armes chinoises à la Russie ne violeraient pas le droit international »

La « nouvelle détente »

Pour simplifier à l’excès la confluence de ces tendances complexes, les États-Unis ont donné la priorité à l’endiguement de la Russie afin de faciliter son endiguement de la Chine, d’où la dernière phase du conflit ukrainien qu’ils ont provoquée via l’opération spéciale en cours de Moscou là-bas. Tout au long de la guerre par procuration entre l’OTAN et la Russie qui a suivi, les États-Unis ont réussi à réaffirmer leur hégémonie unipolaire sur l’UE tout en déstabilisant le système mondialisé dont dépend la grande stratégie de la Chine, leur donnant ainsi un avantage sur Pékin.

Cela a incité le président Xi à lancer une tentative de « nouvelle détente » lors du sommet du G20 à Bali à la mi-novembre, au cours duquel il espérait que la Chine et les États-Unis pourraient finalement parvenir à une série de compromis mutuels visant à établir une « nouvelle normalité » dans leurs relations. Le but était de retarder la fin de l’ordre mondial bipolaire au sein duquel ces deux superpuissances exerçaient le plus d’influence sur les relations internationales, qui a été remis en question par la montée en puissance de l’Inde au cours de l’année écoulée.

L’influence de l’Inde qui change la donne

Cet État d’Asie du Sud est devenu une grande puissance d’importance mondiale à cette époque en raison de son magistral numéro d’équilibriste entre le milliard d’or de l’Occident dirigé par les États-Unis et les BRICS et l’OCSdont il fait partie. Son rôle de faiseur de rois dans la nouvelle guerre froide entre eux sur la direction de la transition systémique mondiale a permis au reste du Sud global de s’élever dans le sillage de l’Inde, révolutionnant ainsi les relations internationales en accélérant l’émergence de la tri-multipolarité.

The aforementioned sequence of events imbued the Sino-American “New Détente” with a sense of urgency since both superpowers had self-interested reasons for regaining joint control of these processes, though their attempted rapprochement was unexpectedly derailed by the balloon incident. The resultantly renewed influence of hardline factions over policymaking that occurred in the aftermath of that incident abruptly ended their incipient talks and placed them on the trajectory of intense rivalry.

China’s Grand Strategic Recalculations

Parallèlement à ce qui précède, l’OTAN a déclaré qu’elle était dans une soi-disant « course à la logistique »/« guerre d’usure » avec la Russie, ce qui impliquait qu’elle redoublerait son soutien militaire à Kiev, même au détriment de la satisfaction des besoins minimaux de sécurité nationale de ses propres membres. Si ce bloc réussissait à faire une percée le long de la ligne de contrôle, il pourrait catalyser le pire scénario de la « balkanisation » de la Russie si ces dynamiques militaro-stratégiques désavantageuses échappaient à tout contrôle.

Le président Poutine et son prédécesseur Medvedev ont récemment mis en garde contre cette possibilité, qui reste peu probable pour l’instant mais ne peut toujours pas être écartée, contribuant ainsi au recalibrage progressif de l’approche de la Chine face à la guerre par procuration OTAN-Russie lorsqu’elle est couplée à la fin de la « nouvelle détente ». Cela a directement conduit la République populaire à envisager sérieusement l’envoi d’une aide létale à son partenaire stratégique afin de compenser ce pire scénario, suscitant ainsi des menaces de sanctions de la part de l’Occident.

« La Grande Trifurcation »

Dans le cas où la Chine se sentirait forcée par l’OTAN d’aider la Russie de cette manière et que le milliard d’or lui imposerait des sanctions en réponse, on s’attend à ce qu’un « découplage » sino-européen initié par les États-Unis sur le modèle du précédent russo-européen initié par les États-Unis puisse potentiellement suivre. Le rapport exclusif de Reuters mercredi, citant quatre responsables américains anonymes et d’autres sources, a donné du crédit au scénario précédent en révélant que le milliard d’or discute effectivement de sanctions multilatérales.

Si ces deux développements se produisaient – la Chine armant la Russie et étant ensuite sanctionnée par le milliard d’or d’une manière qui provoque leur « découplage » (progressif ou instantané) – alors les relations internationales entreraient dans une période de tri-multipolarité caractérisée par la prédominance de trois pôles qui exercent le plus d’influence sur les affaires mondiales, mais dont l’influence ne serait cependant pas absolue puisqu’elle serait contenue dans une certaine mesure par les puissances émergentes et les groupes régionaux.

L’ordre mondial tripolaire

Les trois pôles attendus sont le milliard d’or de l’Occident dirigé par les États-Unis, l’entente sino-russe et le Sud global dirigé par l’Inde de facto qui continuera probablement à se rassembler de manière informelle en un nouveau mouvement des non-alignés (« néo-NAM »). Parmi ces dernières se trouveront des puissances montantes comme le Brésill’Iranl’Afrique du Sud et la Turquie, entre autres, aux côtés de groupes régionaux comme l’Union africaine (UA), l’ASEAN et la Communauté des États d’Amérique latine et des Caraïbes (CELAC).

Chacune de ces trois catégories d’acteurs – les trois pôles ainsi que les puissances émergentes et les groupes régionaux qui se situent en dessous des premiers dans cette hiérarchie internationale informelle – sont censées s’équilibrer en s’alignant de manière multiple au sein de leurs niveaux respectifs et entre eux. Le rôle de l’Inde sera le plus important de tous, car elle est prête à faciliter le commerce entre le milliard d’or et l’entente sino-russe dans le cas où leur « découplage » potentiel serait poussé à l’extrême, ce qui ne peut être exclu.

Le rôle de faiseur de rois de l’Inde

En outre, l’accueil virtuel du sommet Voice Of Global South par l’Inde a positionné cet État-civilisation comme le centre de gravité de ses pairs en développement, ce qui renforce la probabilité que le Néo-Mouvement des non-alignés continue à se rassembler de manière informelle autour de lui. À partir de là, l’Inde peut promouvoir ses propres plateformes financières, technologiques et autres afin de fournir aux États du Sud un troisième choix neutre entre le milliard d’or et l’entente sino-russe dans la nouvelle guerre froide.

Les puissances montantes et les groupes régionaux qui participent au Neo-NAM officieusement dirigé par l’Inde pourraient également développer leurs propres plates-formes, mais celle de l’Inde pourrait devenir la norme pour faciliter l’engagement entre eux à leurs débuts. En parallèle, les forums mondiaux comme l’ONU et le G20 n’auront plus beaucoup d’importance, si ce n’est qu’ils fonctionnent comme des clubs de discussion, tandis que les groupes régionaux et motivés par des intérêts remplaceront leur rôle antérieur dans la promotion d’une coopération tangible entre les pays.

Réflexions finales

L’évolution imminente de la transition systémique mondiale vers la tri-multipolarité pourrait voir le milliard d’or de l’Occident dirigé par les États-Unis, l’Entente sino-russo et le Sud global dirigé de facto par l’Inde devenir les pôles les plus importants des relations internationales, en dessous desquels se trouveraient les puissances montantes et les groupes régionaux. Tous les acteurs s’équilibreraient les uns les autres en s’alignant à l’intérieur et entre leurs niveaux respectifs, ce qui pourrait avoir pour résultat de stabiliser les affaires mondiales beaucoup plus que ne l’ont fait les ordres unipolaires et bipolaires précédents.

Robert Bibeau

Auteur et éditeur

2 réflexions sur “L’entente sino-russie et les pays du Sud global = la multipolarité (Korybko)

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