Les nouvelles doctrines nucléaires des États-Unis et de la Russie… En marche vers la guerre nucléaire (Scott Ritter)
Par Scott Ritter, sur On the Brink. Traduction : c.l. pour Les Grosses Orchades
Elle décolle de n’importe où à la verticale, et vole à plus de dix fois la vitesse du son (mach 10 +)
Au bord du gouffre
On the Brink – Scott Ritter – 24.11.2024
Un vieil adage dit : « Qui fait le con finit par récolter ce qu’il a semé ». Le 19 novembre, l’Ukraine a tiré six missiles de fabrication US sur une cible située en territoire russe. Le 20 novembre, l’Ukraine a tiré jusqu’à une douzaine de missiles de croisière Storm Shadow de fabrication britannique contre une cible située sur le sol russe. Le 21 novembre, la Russie a tiré un nouveau missile de portée intermédiaire contre une cible située sur le sol ukrainien.
L’Ukraine et ses alliés américains et britanniques ont fait les cons.
Et voilà ce qu’ils ont récolté : si vous attaquez Mère Russie, il vous faudra payer le prix fort.
Au petit matin du 21 novembre, la Russie a lancé un missile qui a frappé l’usine Yuzmash dans la ville ukrainienne de Dnipropetrovsk. Quelques heures après que ce missile, tiré depuis le polygone de tir russe de Kapustin Yar, ait atteint sa cible, le président russe Vladimir Poutine est apparu à la télévision russe, où il a annoncé que le missile tiré par la Russie – que les médias et les services de renseignement occidentaux avaient classé comme une modification expérimentale du missile RS-26 mis en sommeil par la Russie en 2017 – était en fait une arme entièrement nouvelle connue sous le nom d’« Oreshnik », ce qui signifie « noisette » en russe. Poutine a noté que le missile était encore en phase d’essai et que le lancement de combat contre l’Ukraine faisait partie du test, qui a été, selon lui, « réussi ».
Le président russe V. Poutine annonce le lancement du missile Oreshnik au cours d’une allocution télévisée en direct.
Poutine a déclaré que le missile, qui a atteint sa cible à plus de dix fois la vitesse du son, était invincible. « Les systèmes modernes de défense aérienne qui existent dans le monde et les défenses antimissiles créées par les Américains en Europe ne peuvent pas intercepter de tels missiles », a déclaré M. Poutine
Poutine a dit que l’Oreshnik avait été développé en réponse au déploiement prévu par les États-Unis du missile hypersonique Dark Eagle, qui est lui-même un missile de portée intermédiaire. L’Oreshnik a été conçu pour « refléter » (mirror) les capacités des États-Unis et de l’OTAN.
Le lendemain, 22 novembre, Poutine a rencontré le commandant en chef des forces de missiles stratégiques, Sergey Karakayev, qui a annoncé que le missile Oreshnik allait entrer immédiatement dans la production en série. Selon le général Karakayev, l’Oreshnik, une fois déployé, pourrait frapper n’importe quelle cible en Europe sans crainte d’être intercepté. Toujours selon Karakayev, le système de missiles Oreshnik a élargi les capacités de combat des forces russes de missiles stratégiques pour détruire divers types de cibles conformément aux tâches qui leur ont été assignées, qu’il s’agisse d’ogives nucléaires ou non nucléaires. Le haut niveau de disponibilité opérationnelle du système, a ajouté Karakayev, permet de recibler et de détruire toute cible désignée dans les plus brefs délais.
Scott will discuss this article and answer audience questions on Ep. 215 of Ask The Inspector. “Missiles will speak for themselves”
Les circonstances qui ont conduit la Russie à tirer, sur l’Ukraine, ce qui ne peut être décrit que comme un système d’armement stratégique, se sont déroulées au cours des trois derniers mois. Le 6 septembre, le secrétaire à la défense US, Lloyd Austin, s’est rendu à Ramstein, en Allemagne, où il a rencontré le président ukrainien, Volodymyr Zelensky, qui a insisté auprès de Lloyd sur l’importance pour les USA d’autoriser l’Ukraine à utiliser le système de missiles tactiques de fabrication US (ATACMS) sur des cibles situées à l’intérieur des frontières de la Russie d’avant 2014 (ces armes avaient déjà été utilisées par l’Ukraine contre des territoires revendiqués par la Russie, mais qui sont considérés comme faisant l’objet d’un litige – Crimée, Kherson, Zaporizhia, Donetsk, et Lougansk). M. Zelensky a également plaidé en faveur de l’accord des USA pour que des autorisations similaires soient accordées au missile de croisière Storm Shadow de fabrication britannique.
Le secrétaire à la Défense US Lloyd Austin (à gauche) et le président ukrainien Volodymyr Zelensky (à droite)
L’Ukraine était en possession de ces armes et les avait utilisées contre les territoires russes en litige. Mis à part quelques gros titres dans les medias, ces armes n’ont eu pratiquement aucun impact perceptible sur le champ de bataille, où les forces russes l’emportaient sur des défenseurs ukrainiens obstinés.
Le secrétaire Austin a écouté Zelensky plaider pour obtenir le feu vert à l’utilisation d’ATACMS et de Storm Shadow contre des cibles russes. « Il nous faut cette capacité à longue portée, non seulement sur le territoire qui a été détaché de l’Ukraine, mais aussi sur le territoire russe, pour que la Russie ait un motif de rechercher la paix », a plaidé Zelensky, en ajoutant qu’« il nous faut obliger les villes russes et même les soldats russes à réfléchir à ce dont ils ont besoin : la paix ou Poutine ».
Austin a rejeté la demande du président ukrainien, en lui faisant remarquer qu’aucune arme militaire ne serait décisive dans les combats en cours entre l’Ukraine et la Russie, et en ajoutant qu’au contraire, l’utilisation d’armes US et britanniques pour attaquer des cibles à l’intérieur de la Russie ne ferait qu’augmenter les risques d’escalade du conflit, amenant une Russie dotée de l’arme nucléaire à entrer directement en guerre contre les forces de l’OTAN.
Le 11 septembre, le secrétaire d’État US Antony Blinken, accompagné du ministre britannique des Affaires étrangères David Lammy, s’est rendu à Kiev, la capitale ukrainienne, où Zelensky a de nouveau fait pression sur les deux hommes pour obtenir l’autorisation d’utiliser des ATACMS et des Storm Shadow sur des cibles situées à l’intérieur de la Russie. Les deux hommes ont refusé, renvoyant la question à une réunion prévue entre le président US Joe Biden et le Premier ministre britannique Kier Starmer, le vendredi 13 septembre.
Le jour suivant, 12 septembre, le président russe Vladimir Poutine s’est adressé à la presse à Saint-Pétersbourg, Russie, et a abordé la question de a possible utilisation par l’Ukraine d’armes fabriquées aux USA et au Royaume-Uni. « Cela voudra dire que les pays de l’OTAN – les États-Unis et les pays européens – sont en guerre avec la Russie », a précisé Poutine. « Et dans ce cas, conscients du fait que l’essence du conflit a changé, nous prendrons les décisions qui s’imposent, en réponse aux menaces qui pèseront sur nous. »
Le président Biden a tenu compte des propos du président russe et, malgré les pressions exercées par le Premier ministre Starmer pour autoriser l’Ukraine à utiliser ATACMS et Storm Shadow, il a choisi de poursuivre la politique US d’interdiction d’actions de ce genre.
Et les choses en sont restées là jusqu’au 18 novembre, date à laquelle le président Biden, réagissant aux informations selon lesquelles la Corée du Nord avait envoyé des milliers de soldats en Russie pour se joindre aux combats contre les forces ukrainiennes, a fait volte-face, autorisant la conversion des renseignements fournis par les services d’espionnage US en données à communiquer aux Ukrainiens pour guider les missiles ATACMS et Storm Shadow jusqu’à leurs cibles. Ces cibles avaient été indiquées par Zelensky aux USA au mois de septembre, quand il avait rendu visite à Biden à la Maison Blanche. Zelensky avait fait de l’attaque de ces cibles par les missiles ATACMS et Storm Shadow un élément clé de son prétendu « plan de victoire ».
Aussitôt reçu le feu vert des USA, Zelensky s’est adressé à la presse. « Aujourd’hui, les médias parlent beaucoup de la permission que nous avons reçue pour nos actions respectives », a-t-il dit. « Les frappes ne se font pas avec des mots. Ces choses-là n’ont pas besoin d’être annoncées. Les missiles parleront d’eux-mêmes. »
Le jour suivant, 19 novembre, l’Ukraine a tiré six missiles ATACMS contre des cibles situées près de la ville russe de Briansk. Le lendemain, 20 novembre, l’Ukraine a tiré des missiles Storm Shadow contre un poste de commandement russe dans la province de Koursk.
Les missiles ukrainiens avaient parlé.
La réponse russe
Peu après que les attaques Storm Shadow sur Koursk se soient produites, les médias sociaux ukrainiens ont commencé à rapporter que les services secrets ukrainiens avaient découvert que les Russes préparaient un missile RS-26 Rubezh pour le lancer contre l’Ukraine. Ces rapports sous-entendaient que les renseignements provenaient d’avertissements fournis par les USA, en ce compris des images et des interceptions de communications radio, en provenance du centre d’essai de missiles de Kapustin Yar, situé à l’est de la ville russe d’Astrakha.
Lancement-test d’un missile RS-26
Le RS-26 est un missile qui, selon la configuration de sa charge utile, peut être classé comme missile balistique intercontinental (ICBM, c’est-à-dire qu’il peut atteindre une cible située à plus de 5.500 kilomètres) ou comme missile à portée intermédiaire (IRBM, c’est-à-dire qu’il peut voler entre 1.000 et 3.000 kilomètres). Étant donné que le missile a été développé et testé entre 2012 et 2016, cela signifiait que le RS-26 serait déclaré soit comme un ICBM et serait alors pris en compte dans le cadre du traité « Nouveau départ », soit comme un IRBM, et, du coup, interdit par le traité sur les forces nucléaires intermédiaires (FNI). Le traité FNI, en vigueur depuis juillet 1988, avait réussi à imposer l’élimination d’une catégorie entière d’armes nucléaires considérées comme les plus déstabilisantes au monde.
En 2017, le gouvernement russe avait décidé d’interrompre le développement du RS-26 en raison de la complexité des restrictions concurrentes en matière de contrôle des armements.
En 2019, le président Donald Trump a retiré les USA du traité FNI. Les USA ont immédiatement commencé à tester des missiles de croisière à portée intermédiaire et annoncé leur intention de développer une nouvelle famille de missiles hypersoniques à portée intermédiaire connus sous le nom de Dark Eagle (Aigle noir)
Malgré cette provocation, le gouvernement russe a annoncé un moratoire unilatéral sur la production et le déploiement d’IRBM, déclarant que ce moratoire resterait en place jusqu’à ce que les USA ou l’OTAN déploient un IRBM sur le sol européen.
En septembre 2023, les USA ont déployé au Danemark, dans le cadre d’un exercice d’entraînement de l’OTAN, un nouveau système de lancement de missiles conteneurisé capable de tirer le missile de croisière Tomahawk. Les USA ont retiré le lanceur du Danemark à la fin de l’entraînement.
Fin juin 2024, le président russe Vladimir Poutine a annoncé que la Russie reprendrait la production de missiles de portée intermédiaire, invoquant le déploiement par les États-Unis de missiles de portée intermédiaire au Danemark. « Nous devons lancer la production de ces systèmes de frappe et ensuite, en fonction de la situation réelle, décidder où les placer, si cela s’avère nécessaire pour assurer notre sécurité », a dit Poutine.
À cette époque, les médias occidentaux ont spéculé sur la remise en production du RS-26 auparavant mis au placard.
Quand l’Ukraine a annoncé qu’elle avait détecté un RS-26 préparé pour lancement le 20 novembre, beaucoup d’observateurs (moi y compris) ont accepté cette possibilité, compte tenu de l’annonce faite en juin par le président Poutine et des spéculations qui en avaient découlé. Si bien que, dans la nuit du 21 novembre, quand les Ukrainiens ont annoncé qu’un missile RS-26 avait été lancé depuis Kapustin Yar contre une installation de production de missiles dans la ville de Dnipropetrovsk, ces rapports ont paru rendre effectivement compte de la réalité.
Il s’est avéré que nous nous trompions tous.
Les services de renseignement ukrainiens, ayant examiné les débris du missile après l’attaque, semblent confirmer cette affirmation. Alors que le RS-26 était un dérivé de l’ICBM SS-27M, dont il utilisait les premier et deuxième étages, l’Orezhnik, selon eux, utilise les premier et deuxième étages du nouvel ICBM « Kedr » (Cèdre), qui en est aux premiers stades de développement. En outre, le système de lancement de l’arme semble être inspiré du Yars-M nouvellement mis au point, qui utilise des véhicules indépendants à postcombustion (IPBV), connus en russe sous le nom de blok individualnogo razvedeniya (BIR), au lieu des traditionnels véhicules de rentrée multiples à cibles indépendantes (MIRV).
Dans la configuration d’armement classique d’un missile russe moderne, l’étage final du missile, également connu sous le nom de véhicule post-boost (PBV), contient toutes les MIRV. Une fois que le missile est sorti de l’atmosphère terrestre, le PBV se détache du corps du missile, puis manœuvre indépendamment, libérant chaque ogive à l’endroit voulu pour qu’elle atteigne sa cible. Comme les MIRV sont tous attachés au même PBV, les ogives sont larguées sur des cibles qui suivent une trajectoire relativement linéaire, ce qui limite la zone susceptible d’être ciblée.
Un missile utilisant une configuration IPBV peut toutefois libérer chaque véhicule de rentrée en même temps, ce qui permet à chaque ogive de suivre une trajectoire indépendante jusqu’à sa cible. Cela permet une plus grande flexibilité et une plus grande précision.
L’Oreshnik a été conçu pour transporter entre quatre et six IPBV. Celui qui a été utilisé contre Dnipropetrovsk était un système à six IPBV. Chaque ogive contenait à son tour six sous-munitions distinctes, constituées de « limaces » métalliques forgées à partir d’alliages exotiques qui leur permettaient de conserver leur forme pendant la chaleur extrême générée par les vitesses de rentrée hypersoniques. Ces balles ne sont pas explosives ; elles utilisent les effets combinés de l’impact cinétique à grande vitesse et de la chaleur extrême absorbée par l’alliage exotique pour détruire leur cible au moment de l’impact.
Impact du missile Oreshnik sur le complexe militaro-industriel de Dnipropetrovsk
La cible militaro-industrielle frappée par l’Oreshnik a été touchée par six ogives indépendantes, chacune contenant six sous-munitions. Au total, l’installation de Dnipropetrovsk a été frappée par 36 munitions distinctes, infligeant des dommages dévastateurs, notamment aux installations de production souterraines utilisées par l’Ukraine et ses alliés de l’OTAN pour produire des missiles à courte et moyenne portée.
Ces installations ont été détruites.
Les Russes avaient parlé aussi.
Retour vers le futur
Si l’histoire doit en être le juge, l’Oreshnik reflétera probablement, en termes de concept opérationnel, un missile de l’ère soviétique, le Skorost, qui a été développé à partir de 1982 pour contrer le déploiement prévu par les USA en Allemagne de l’Ouest du missile balistique à portée intermédiaire Pershing II. Le Skorost était, comme l’Oreshnik, un amalgame de technologies provenant de missiles en cours de développement à l’époque, notamment une version avancée de l’IRBM SS-20, l’ICBM SS-25 qui n’avait pas encore été déployé et le SS-27 qui était encore en cours de développement. Le résultat était un missile mobile sur route à deux étages, pouvant transporter une charge utile conventionnelle ou nucléaire, qui utilisait un transporteur-érecteur-lanceur à six essieux, ou TEL (le RS-26 et l’Oreshnik utilisent également un TEL à six essieux).
En 1984, alors que le Skorost était presque terminé, les forces soviétiques de missiles stratégiques ont mené des exercices au cours desquels les unités SS-20 ont pratiqué les tactiques qui seraient utilisées par les forces équipées du Skorost. Il était prévu de former trois régiments de missiles Skorost, comprenant au total 36 lanceurs et plus de 100 missiles. Les bases de ces unités ont été construites en 1985.
Le missile et lanceur Skorost
Le Skorost n’a jamais été déployé ; la production s’est arrêtée en mars 1987 alors que l’Union soviétique se préparait aux réalités du traité FNI, qui aurait interdit le système Skorost.
L’histoire du Skorost est importante car les exigences opérationnelles du système – refléter « en miroir » les missiles Pershing II et les frapper rapidement en temps de guerre – sont les mêmes que celles du missile Oreshnik, le Dark Eagle remplaçant le Pershing II.
Mais l’Oreshnik peut également frapper d’autres cibles, notamment des installations logistiques, des installations de commandement et de contrôle, des installations de défense aérienne (les Russes viennent d’ailleurs d’inscrire sur la liste des cibles de l’Oreshnik, la nouvelle installation de défense antimissile balistique Mk. 41 Aegis Ashore qui a été activée sur le sol polonais).
En bref, l’Oreshnik change la donne à tous les points de vue. Dans ses remarques du 21 novembre, Poutine a fait remarquer aux États-Unis leur inconséquence, notant à quel point la décision prise par le président Trump en 2019 de se retirer du traité FNI était peu sensée, étant donné surtout que le déploiement du missile Oreshnik, qui aurait été interdit en vertu du traité, était désormais possible.
Le 22 novembre, Poutine a annoncé que l’Oreshnik allait être produit en série. Il a également indiqué que les Russes disposaient déjà d’un stock important de missiles Oreshnik qui permettraient à la Russie de répondre à toute nouvelle provocation de l’Ukraine et de ses alliés occidentaux, réfutant ainsi les évaluations des services de renseignement occidentaux selon lesquelles le système étant expérimental, les Russes n’avaient pas la capacité de répéter des attaques telles que celle qui a eu lieu le 21 novembre.
En tant qu’arme conventionnelle, l’Oreshnik donne à la Russie le moyen de frapper des cibles stratégiques sans recourir aux armes nucléaires. Cela signifie que si la Russie décidait de frapper des cibles de l’OTAN en raison d’une future provocation ukrainienne (ou d’une provocation directe de l’OTAN), elle pourrait le faire sans avoir recours à des armes nucléaires.
Prêts pour un échange nucléaire
Pour compliquer une situation déjà complexe, alors que les USA et l’OTAN s’efforcent de lutter contre la réapparition d’une menace russe de missiles à portée intermédiaire qui rappelle celle du SS-20, dont l’apparition dans les années 1970 avait semé la panique chez les Américains et leurs alliés européens, la Russie, en réponse aux actions mêmes qui ont provoqué la réapparition des armes INF en Europe, a publié une nouvelle doctrine nucléaire qui abaisse le seuil d’utilisation d’armes nucléaires par la Russie.
La doctrine initiale de dissuasion nucléaire a été publiée par la Russie en 2020. En septembre 2024, réagissant au débat en cours aux USA et à l’OTAN sur l’opportunité d’autoriser l’Ukraine à utiliser des missiles US et britanniques pour s’attaquer à des cibles situées sur le sol russe, le président Poutine a chargé son conseil national de sécurité de proposer des révisions de la doctrine de 2020 en se fondant sur ces réalités nouvelles.
Le document remanié a été promulgué par Poutine le 19 novembre, le jour même où l’Ukraine a tiré six missiles ATACMS de fabricationUS contre des cibles situées sur le sol russe.
Après l’annonce de l’adoption de la nouvelle doctrine nucléaire, les journalistes ont demandé au porte-parole du Kremlin, Dmitri Peskov, si une attaque ukrainienne contre la Russie à l’aide de missiles ATACMS pourrait éventuellement déclencher une riposte nucléaire. M. Peskov leur a fait remarquer que la disposition de la doctrine autorise l’utilisation d’armes nucléaires en réponse à une frappe conventionnelle faisant peser des menaces critiques sur la souveraineté et l’intégrité territoriale de la Russie. Peskov a également indiqué que la nouvelle formulation de la doctrine stipule qu’une attaque par tout pays soutenu par une puissance nucléaire constituerait une agression conjointe contre la Russie qui déclencherait l’utilisation d’armes nucléaires par la Russie en guise de réponse.
Peu après la publication de la nouvelle doctrine russe, l’Ukraine a attaqué le territoire de la Russie en utilisant des missiles ATACMS.
Le jour suivant, l’Ukraine a attaqué le territoire russe avec des missiles Storm Shadow.
Selon la nouvelle doctrine nucléaire russe, ces attaques pourraient déclencher une réponse nucléaire russe.
La nouvelle doctrine nucléaire russe souligne que les armes nucléaires sont « un moyen de dissuasion » et que leur utilisation par la Russie ne serait qu’une « mesure extrême et obligatoire ». La Russie, précise la doctrine, « fait tous les efforts nécessaires pour réduire la menace nucléaire et prévenir l’aggravation des relations interétatiques susceptibles de déclencher des conflits militaires, y compris nucléaires ».
La dissuasion nucléaire, déclare la doctrine, vise à sauvegarder « la souveraineté et l’intégrité territoriale de l’État », à dissuader un agresseur potentiel ou, « en cas de conflit militaire, à empêcher une escalade des hostilités et à les arrêter dans des conditions acceptables pour la Fédération de Russie ».
La Russie a décidé de ne pas invoquer sa doctrine nucléaire à ce stade, choisissant plutôt dintroduire l’utilisation opérationnelle du nouveau missile Oreshnik, comme mesure de dissuasion non nucléaire intermédiaire.
La question qui se pose aujourd’hui est de savoir si les USA et leurs alliés sont conscients du danger que leurs actions précipitées autorisant les attaques ukrainiennes sur le sol russe, ont provoqué.
La réponse, malheureusement, semble être « probablement pas ».
Le contre-amiral Thomas Buchanan
Première pièce à conviction : les commentaires du contre-amiral Thomas Buchanan, directeur des plans et de la politique au J5 (stratégie, plans et politique) du commandement stratégique US, commandant de combat unifié chargé de dissuader les attaques stratégiques (c’est-à-dire la guerre nucléaire) par une capacité de combat globale sûre, efficace et crédible et, le cas échéant, prêt à l’emporter en cas de conflit, constituent une preuve irréfutable. Le 20 novembre, l’amiral Buchanan a été l’orateur principal de la conférence du Project on Nuclear Issues du Center for Strategic and International Studies à Washington, DC, où il a fait part de son expérience en tant que personne chargée de transformer les orientations présidentielles en préparation et en exécution des plans de guerre nucléaire des États-Unis.
Le maître de cérémonie de l’événement s’est appuyé sur le curriculum vitae de l’amiral Buchanan lorsqu’il l’a présenté à l’assistance, geste qui, à première vue, a pu donner l’impression d’une certaine confiance dans la capacité des États-Unis à mener une guerre nucléaire. L’animateur a également fait remarquer qu’il était fortuit que l’amiral Thomas prenne justement la parole le lendemain du jour où la Russie avait annoncé sa nouvelle doctrine nucléaire.
Mais lorsque l’amiral Buchanan a commencé à parler, ces perceptions ont été rapidement balayées par la réalité, à savoir que les personnes responsables de la planification et de la mise en œuvre de la doctrine de guerre nucléaire des États-Unis ne savaient absolument pas ce qu’on leur demandait de faire.
S’exprimant sur les plans américains en cas de guerre nucléaire, l’amiral Buchanan a déclaré que « nos plans sont suffisants en ce qui concerne les actions susceptibles de tenir l’adversaire en respect, et nous sommes en train d’en étudier la suffisance », notant que « le programme actuel est suffisant aujourd’hui mais pourrait ne pas l’être à l’avenir ». Il a poursuivi en disant que cette étude « est actuellement en cours et se poursuivra sous la prochaine administration, et nous sommes impatients de poursuivre ce travail et d’expliquer comment le futur programme pourrait aider à fournir au président des options supplémentaires s’il en avait besoin ».
En bref, les plans de guerre nucléaire des États-Unis sont insensés, ce qui va de soi, étant donné la nature insensée d’une guerre nucléaire.
Les remarques de l’amiral Buchanan sont façonnées par sa vision du monde qui, dans le cas de la Russie, est influencée par une interprétation Otano-centrique des actions et des intentions russes déconnectée de toute réalité. « Le président Poutine », a déclaré l’amiral Buchanan, « a fait preuve d’une volonté croissante de recourir à la rhétorique nucléaire pour contraindre les États-Unis et nos alliés de l’OTAN à accepter sa tentative de modifier les frontières et de réécrire l’histoire. Cette semaine, nous venons encore d’assister à un de ces efforts ».
« Poutine », a poursuivi Buchanan, « a validé et mis à jour sa doctrine de telle sorte que la Russie la révise pour y inclure une disposition selon laquelle des représailles nucléaires contre des États non nucléaires seraient envisagées si l’État engagé dans la guerre était soutenu par un État nucléaire. Ceci entraîne de sérieuses implications pour l’Ukraine et nos alliés de l’OTAN ».
Il n’a pas dit que la crise actuelle en Ukraine était liée à une stratégie de l’OTAN visant à étendre ses frontières jusqu’à celles de la Russie, malgré les assurances données et redonnées que l’OTAN ne s’étendrait pas « d’un pouce vers l’est ». De même, Buchanan est resté muet sur l’objectif déclaré de l’administration du président Biden d’utiliser le conflit en Ukraine comme une guerre par procuration destinée à infliger « une défaite stratégique » à la Russie.
Vue sous cet angle, la doctrine nucléaire russe n’est plus un outil d’intimidation, comme le soutient l’amiral Buchanan, mais un outil de dissuasion, reproduisant l’intention déclarée de la posture nucléaire américaine, mais avec beaucoup plus de clarté et de détermination.
L’amiral Buchanan a formulé ses commentaires en déclarant d’emblée que, lorsqu’il s’agit d’une guerre nucléaire, « il n’y a pas de victoire possible. Personne ne gagne. Vous savez, les États-Unis ont signé ce texte. La guerre nucléaire ne peut pas être gagnée, ne doit jamais être menée, etcetera. »
La première bombe à hydrogène testée par les États-Unis, 1952
Interrogé sur le concept de « victoire » d’une guerre nucléaire, Buchanan a répondu que « c’est certainement complexe, parce que nous empruntons beaucoup de voies différentes pour parler de la condition des États-Unis dans un environnement post-échange nucléaire. Et c’est une situation que nous aimerions éviter, pas vrai ? Ainsi, quand nous parlons de capacités nucléaires et non nucléaires, nous ne voulons certainement pas d’un échange, vrai ou pas ?
Vrai.
Il aurait mieux valu qu’il s’arrête là. Mais l’amiral Buchanan a continué.
« Je pense que tout le monde serait d’accord pour dire que si nous devons en venir à un échange, alors, nous voulons le faire dans les conditions les plus acceptables pour les États-Unis. Ce sont les conditions les plus acceptables pour les États-Unis qui nous permettent de continuer à diriger le monde, pas vrai ? Ainsi, nous sommes largement considérés comme le leader mondial. Or, sommes-nous à la tête du monde dans un domaine où nous envisageons de perdre ? La réponse est non, n’est-ce pas ? Nous devrions donc maintenir une capacité suffisante – nous devrions avoir une capacité suffisante. Nous devrions disposer d’une capacité de réserve. Vous ne dépenseriez pas toutes vos ressources pour gagner, n’est-ce pas ? Parce qu’arrivés à ce point-là, vous n’auriez plus rien pour dissuader ».
Deux choses ressortent de cette déclaration. D’abord, l’idée que les États-Unis pensent pouvoir combattre et gagner un « échange » nucléaire avec la Russie.
Deuxièmement, l’idée que les États-Unis peuvent gagner une guerre nucléaire avec la Russie tout en conservant une capacité nucléaire stratégique suffisante pour dissuader le reste du monde de s’engager dans une guerre nucléaire après la fin de la guerre nucléaire avec la Russie.
« Gagner » une guerre nucléaire avec la Russie implique que les États-Unis disposent d’un plan de guerre victorieuse.
L’amiral Buchanan est la personne chargée de préparer ces plans. Il a déclaré que ces plans « sont suffisants en termes des actions qu’ils cherchent à imposer à l’adversaire », mais ce n’est manifestement pas le cas : les États-Unis n’ont pas réussi à dissuader la Russie de publier une nouvelle doctrine de guerre nucléaire et d’utiliser au combat, pour la première fois dans l’histoire, un missile balistique stratégique à capacité nucléaire.
Ses plans ont échoué.
Et il admet que « le programme actuel est suffisant aujourd’hui mais pourrait ne pas l’être à l’avenir ».
Ce qui veut dire que nous n’avons pas de plan adéquat pour l’avenir.
Mais nous avons un plan.
Un plan qui vise à produire une « victoire » dans une guerre nucléaire dont Buchanan admet qu’elle ne peut pas être gagnée et qu’elle ne devrait jamais être menée.
Un plan qui permettrait aux États-Unis de conserver suffisamment d’armes nucléaires dans leur arsenal pour continuer à « être un leader mondial » en maintenant leur doctrine de dissuasion nucléaire.
Une doctrine qui, si les États-Unis s’engagent un jour dans un « échange nucléaire » avec la Russie, aura échoué.
Il n’y a qu’un seul scénario dans lequel les États-Unis pourraient imaginer un « échange » nucléaire avec la Russie leur permettant de conserver un arsenal d’armes nucléaires significatif capable de maintenir la dissuasion.
Ce scénario implique une attaque nucléaire préventive contre les forces nucléaires stratégiques de la Russie, qui réussirait à éliminer la plupart des armes nucléaires russes.
Une telle attaque ne pourrait être tentée que par les missiles Trident, embarqués à bord des sous-marins de classe Ohio de la marine américaine.
Gardez cette idée en tête.
On se rappelle que la Russie a déclaré que l’utilisation de missiles ATACMS et Storm Shadow par l’Ukraine sur des cibles situées à l’intérieur de la Russie peut suffire à déclencher l’utilisation d’armes nucléaires en représailles, conformément à sa nouvelle doctrine nucléaire.
À l’heure où j’écris ces lignes, les États-Unis et la Grande-Bretagne discutent avec l’Ukraine de la possibilité d’autoriser de nouvelles attaques contre la Russie à l’aide des missiles ATACMS et Storm Shadow.
La France vient d’autoriser l’Ukraine à utiliser le missile SCALP de fabrication française (un cousin du Storm Shadow) contre des cibles à l’intérieur de la Russie.
Selon certaines informations, la marine américaine vient d’annoncer qu’elle augmentait l’état de préparation opérationnelle de ses sous-marins déployés de la classe Ohio.
Il est grand temps que chacun, quelle que soit la voie qu’il a choisie dans son existence, comprenne bien sur quel chemin nous sommes actuellement engagés. Si rien n’est fait, les événements nous propulseront sur une autoroute infernale qui ne mène qu’à une seule et unique destination: un Armageddon nucléaire dont tout le monde est d’accord pour dire qu’il ne peut pas être gagné, et pourtant les États-Unis se préparent, en ce moment même, à le « gagner ».
Un « échange » nucléaire avec la Russie, en supposant même les États-Unis capables d’effectuer une frappe nucléaire préventive surprise, entraînerait néanmoins la destruction de dizaines de villes américaines et la mort de plus de cent millions d’Américains.
Et cela, si nous « gagnons ».
Et nous savons que nous ne pouvons pas « gagner » une guerre nucléaire.
Et pourtant, nous nous préparons activement à en combattre une.
Il faut que cette insanité s’arrête !
Aujourd’hui.
Les États-Unis viennent de participer à une élection où le candidat gagnant, le président élu Donald Trump, a fait campagne sur un programme visant à mettre fin à la guerre en Ukraine et à éviter une guerre nucléaire avec la Russie.
Pourtant, l’administration du président Joe Biden s’est engagée dans une orientation politique qui cherche à étendre le conflit en Ukraine et amène les États-Unis au bord d’une guerre nucléaire avec la Russie.
C’est un affront direct à la notion de démocratie américaine.
Ignorer la volonté déclarée du peuple des États-Unis, telle qu’elle s’est manifestée par son vote lors d’une élection où la question même de la guerre et de la paix était au centre de la campagne, est une insulte à la démocratie.
« Nous, le peuple » des États-Unis, ne devons pas permettre que cette course folle à la guerre se poursuive.
Nous devons faire savoir à l’administration Biden que nous sommes opposés à toute extension du conflit en Ukraine, qui comporte la possibilité d’une escalade menant à une guerre nucléaire avec la Russie.
Et nous devons implorer la future administration Trump de s’opposer à cette course folle vers l’anéantissement nucléaire, en réaffirmant publiquement sa position sur la guerre en Ukraine et sur la guerre nucléaire avec la Russie : en redisant que la guerre doit cesser maintenant, et qu’il ne peut y avoir de guerre nucléaire avec la Russie déclenchée par la guerre en Ukraine.
Nous devons dire « non » à la guerre nucléaire.
Je travaille avec d’autres personnes qui partagent ces idées, pour organiser un rassemblement à Washington, DC le week-end des 7 et 8 décembre, afin d’aller y dire non à la guerre nucléaire.
J’encourage les Américains de tous les horizons, de tous les bords politiques, de toutes les classes sociales, à se joindre à nous et à prêter leur voix à cette cause.
Gardez l’œil sur ce site pour plus d’informations sur ce rassemblement.
Toutes nos vies en dépendent.
Source : https://scottritter.substack.com/p/on-the-brink
Thunderbolt from the Skies: l’arme de l’apocalypse de Poutine met l’OTAN en dernière note https://simplicius76.substack.com/p/thunderbolt-from-the-skies-putins
Par Simplicius
Une VIDEO de 20 minutes en anglais « ORESHNIK » enforcing peace Harvest Time🔥Hiroshima 1945 – Dnipro 2024☢️Cold Silence Of The West💥 Military Summary For 2024.11.22
A Sceptic Newsletter – 23.11.2024
https://www.youtube.com/watch?v=2NYNvFKtOPM
Et les appels de Scott Ritter à combattre toute velléité de guerre nucléaire ne s’adressent pas qu’aux Américains.
Nous sommes tous concernés.
Ceux qui ont des enfants… ceux qui ont des bêtes… et ceux qui n’en ont pas.
Dans son tout dernier article, Simplicius cite une interview de Lindsay Graham, qui laisse peu d’espoir sur une fin de la guerre d’Ukraine « grâce à Trump » :
Enfin, un autre rappel très opportun de ce pour quoi l’Ukraine se bat. Lindsey Graham nous livre un aveu d’une franchise choquante sur la guerre, qu’il faut absolument voir :
https://x.com/AuldM/status/1860665952964141309
[ « Nous pouvons gagner de l’argent et avoir une relation économique avec l’Ukraine qui nous serait très bénéfique en cas de paix. Donald Trump va donc conclure un accord pour récupérer notre argent et nous enrichir avec des minéraux de terres rares... » ]
Aucune démonstration plus nue et plus rapace des véritables intentions des crétins de l’establishment US ne pourrait nous être plus hideusement transmise.
Et nous, nous avons vu passer quelque part l’idée d’enlever d’Ukraine toutes les troupes qui lui restent, et de les répandre dans les pays d’Europe, pour continuer, de là, le combat contre la Russie. Juste au cas où quelqu’un n’aurait pas compris les petites manigances de Nazursula et du Micron.
Diffusé par Les Grosses Orchades, le 26 novembre 2024.
Un plan secret décrit l’impensable. La doctrine nucléaire de l’Amérique après le 11 septembre. « Incorporation de la capacité nucléaire dans les systèmes conventionnels»
Note liminaire
Cet article incisif de William Arkin résume les éléments clés de la doctrine nucléaire américaine, formulée à la fois avant et immédiatement après le 11 septembre 2001.
L’article a été initialement publié par le Los Angeles Times le 10 mars 2002, quelques mois avant la sortie officielle de la tristement célèbre Nuclear Posture Review (NPR) de 2001.
La doctrine de la destruction mutuelle assurée (MAD) de l’époque de la guerre froide a été abandonnée pour une durée indéterminée.
La NPR 2001 confirme la position de la politique étrangère américaine :
l’utilisation préventive d’armes nucléaires comme moyen d’« autodéfense » contre les États nucléaires et non nucléaires.
Des armes nucléaires sont également prévues pour être utilisées sur le théâtre de guerre conventionnel.
Doctrine nucléaire de l’après-guerre froide. NPR 2001 (rédigé il y a 23 ans) prépare le terrain
Ne nous faisons pas d’illusions.
Aujourd’hui, la guerre nucléaire est sur la planche à dessin du Pentagone.
Le NPR 2001 (document complet) publié (officiellement) en juillet 2002 est de la plus haute importance. Il détermine la doctrine nucléaire de l’Amérique. Cela a une incidence directe sur notre compréhension de la guerre en Ukraine et du danger d’un scénario de troisième guerre mondiale. Pour plus de détails, voir aussi NPR 2001 (extraits par FAS).
La géopolitique de la doctrine nucléaire américaine (NPR 2001) est esquissée : la Russie et « l’Axe du Mal », la Chine et le statut de Taïwan, Israël, l’Iran et le Moyen-Orient, la Corée du Nord.
Les modalités consistent à intégrer une nouvelle catégorie d’armes nucléaires (prétendument sans danger pour la population civile environnante) dans l’arsenal de guerre conventionnel.
Minimiser les dommages collatéraux tout en « faisant exploser la planète »
Voici quelques-uns des points saillants décrits dans l’article de William Arkin, dont la plupart sont en cours de mise en œuvre :
- “. .. l’utilisation d’armes nucléaires contre au moins sept pays… citant non seulement la Russie et « l’axe du mal » – l’Irak, l’Iran et la Corée du Nord – mais aussi la Chine, la Libye et la Syrie.
- « Des armes nucléaires pourraient être nécessaires dans une future crise israélo-arabe. »
- “… l’utilisation d’armes nucléaires en représailles contre des attaques chimiques ou biologiques.
- « La NPR cite une confrontation militaire sur le statut de Taïwan comme l’un des scénarios qui pourraient conduire Washington à utiliser des armes nucléaires. »
- « La stratégie nucléaire … vu à travers le prisme du 11 septembre. la foi dans la dissuasion à l’ancienne a disparu »
- « développer des choses telles que des briseurs de bunker nucléaires et des « ogives chirurgicales qui réduisent les dommages collatéraux »,
- « La cyberguerre et d’autres capacités militaires non nucléaires seraient intégrées dans les forces de frappe nucléaire »
- L’intégration de « nouvelles capacités stratégiques non nucléaires » dans les plans de guerre nucléaire.
- « élargir l’étendue et la flexibilité des capacités nucléaires des États-Unis.
- « Ce qui a évolué depuis les attaques terroristes de l’année dernière [le 11 septembre 2001], c’est une doctrine de planification intégrée et considérablement élargie pour les guerres nucléaires. »
Michel Chossudovsky, Global Research, 10 septembre 2022, 4 août 2024
Un plan secret esquisse l’impensable
L’administration Bush, dans le cadre d’un examen secret de sa politique achevé au début de l’année, a ordonné au Pentagone d’élaborer des plans d’urgence pour l’utilisation d’armes nucléaires contre au moins sept pays, nommant non seulement la Russie et « l’axe du mal » – l’Irak, l’Iran et la Corée du Nord – mais aussi la Chine, la Libye et la Syrie.
En outre, le département de la Défense des États-Unis a reçu l’ordre de se préparer à la possibilité que des armes nucléaires soient nécessaires dans une future crise israélo-arabe. Et il s’agit d’élaborer des plans d’utilisation d’armes nucléaires pour riposter à des attaques chimiques ou biologiques, ainsi qu’à des « développements militaires surprenants » de nature non spécifiée.
Ces directives et une foule d’autres, y compris des appels à développer des mini-bombes nucléaires anti-bunker et des armes nucléaires qui réduisent les dommages collatéraux, sont contenues dans un document encore classifié appelé Nuclear Posture Review (NPR), qui a été remis au Congrès le 8 janvier.
Comme tous les documents de ce type depuis l’aube de l’ère atomique il y a plus d’un demi-siècle, ce NPR offre un aperçu effrayant du monde des planificateurs de guerre nucléaire : avec un génie étrangelovien, ils couvrent toutes les circonstances imaginables dans lesquelles un président pourrait souhaiter utiliser des armes nucléaires – planifiant dans les moindres détails une guerre qu’ils espèrent ne jamais mener.
Dans ce domaine top secret, il y a toujours eu une incohérence entre les objectifs diplomatiques de l’Amérique de réduire les arsenaux nucléaires et d’empêcher la prolifération des armes de destruction massive, d’une part, et l’impératif militaire de se préparer à l’impensable, d’autre part.
Néanmoins, le plan de l’administration Bush renverse une tendance vieille de près de deux décennies qui consiste à reléguer les armes nucléaires dans la catégorie des armes de dernier recours. Il redéfinit également les exigences nucléaires dans l’après-septembre. 11 termes.
De ces manières et d’autres, le document encore secret offre un aperçu de l’évolution des points de vue des stratèges nucléaires au sein du ministère de la Défense du secrétaire Donald H. Rumsfeld.
Tout en minimisant la menace de la Russie et en soulignant publiquement leur engagement à réduire le nombre d’armes nucléaires à longue portée, les stratèges du ministère de la Défense promeuvent des capacités nucléaires tactiques et dites « adaptatives » pour faire face aux éventualités où de grands arsenaux nucléaires ne sont pas exigés.
Ils recherchent une foule de nouvelles armes et de nouveaux systèmes de soutien, y compris des capacités militaires conventionnelles et de cyberguerre intégrées à la guerre nucléaire. Le produit final est un modèle post-Afghanistan désormais familier, avec une capacité nucléaire ajoutée. Il combine des armes de précision, des frappes à longue portée et des opérations spéciales et secrètes.
Mais l’appel de NPR au développement de nouvelles armes nucléaires qui réduisent les « dommages collatéraux » ignore de manière myope les implications politiques, morales et militaires – à court et à long terme – du franchissement du seuil nucléaire.
Dans quelles circonstances les armes nucléaires pourraient-elles être utilisées dans le cadre de la nouvelle posture ? La NPR dit qu’ils « pourraient être utilisés contre des cibles capables de résister à une attaque non nucléaire », ou en représailles à l’utilisation d’armes nucléaires, biologiques ou chimiques, ou « en cas de développements militaires surprenants ».
La planification des capacités de frappe nucléaire, dit-il, implique la reconnaissance des éventualités « immédiates, potentielles ou inattendues ». Montrez-moi pourquoi. « Tous ont une hostilité de longue date envers les États-Unis et leurs partenaires en matière de sécurité. Tous parrainent ou abritent des terroristes, et ont des programmes actifs d’armes de destruction massive et de missiles.
La Chine, en raison de ses forces nucléaires et de ses « objectifs stratégiques en développement », est répertoriée comme « un pays qui pourrait être impliqué dans une éventualité immédiate ou potentielle ». Plus précisément, la NPR cite une confrontation militaire sur le statut de Taïwan comme l’un des scénarios qui pourraient conduire Washington à utiliser des armes nucléaires.
D’autres scénarios de conflit nucléaire sont une attaque nord-coréenne contre la Corée du Sud et un assaut irakien contre Israël ou ses voisins.
La deuxième information importante que NPR offre sur la pensée du Pentagone sur la politique nucléaire est à quel point les planificateurs stratégiques de l’administration Bush ont été ébranlés par les attaques terroristes de septembre dernier contre le World Trade Center et le Pentagone. Bien que le Congrès ait ordonné à la nouvelle administration de « procéder à un examen complet des forces nucléaires américaines » avant les événements du 11 septembre, l’étude finale est frappante par sa réaction résolue à ces tragédies.
Jusqu’à présent, la stratégie nucléaire avait tendance à exister en dehors des défis ordinaires de la politique étrangère et des affaires militaires. Les armes nucléaires n’étaient pas seulement l’option de dernier recours, elles étaient l’option réservée aux époques où la survie nationale était en jeu – une confrontation apocalyptique avec l’Union soviétique, par exemple.
Aujourd’hui, la stratégie nucléaire semble être vue à travers le prisme du 11 septembre. D’une part, la foi de l’administration Bush dans la dissuasion à l’ancienne a disparu. Il n’est plus nécessaire d’être une superpuissance pour représenter une grave menace pour les Américains.
« Les terroristes qui nous ont frappés le 11 septembre n’ont clairement pas été dissuadés par l’énorme arsenal nucléaire américain », a déclaré Rumsfeld à un auditoire à l’Université de la Défense nationale à la fin du mois de janvier.
De même, le sous-secrétaire d’État américain John R. Bolton a déclaré dans une récente interview : « Nous ferions tout ce qui est nécessaire pour défendre la population civile innocente de l’Amérique… L’idée que les bonnes théories de la dissuasion jouent contre tout le monde… vient d’être réfutée par le 11 septembre.
De plus, tout en insistant sur le fait qu’ils ne passeraient au nucléaire que si les autres options semblaient inadéquates, les responsables recherchent des armes nucléaires qui pourraient jouer un rôle dans le genre de défis auxquels les États-Unis sont confrontés avec Al-Qaïda.
En conséquence, la NPR appelle à mettre l’accent sur le développement de choses telles que des anti-bunkers nucléaires et des « ogives chirurgicales qui réduisent les dommages collatéraux », ainsi que des armes qui pourraient être utilisées contre des cibles plus petites et plus circonscrites – « des modifications possibles aux armes existantes pour fournir une flexibilité de rendement supplémentaire », dans le langage riche en jargon de l’examen.
Il propose également de former les opérateurs des forces spéciales américaines pour qu’ils jouent les mêmes rôles de collecte de renseignements et de ciblage pour les armes nucléaires qu’ils jouent actuellement pour les frappes d’armes conventionnelles en Afghanistan. Et la cyberguerre et d’autres capacités militaires non nucléaires seraient intégrées dans les forces de frappe nucléaire pour les rendre plus globales.
En ce qui concerne la Russie, qui était autrefois la principale raison d’avoir une stratégie nucléaire américaine, l’examen indique que si les programmes nucléaires de Moscou restent préoccupants, les « sources idéologiques de conflit » ont été éliminées, ce qui rend une éventualité nucléaire impliquant la Russie « plausible » mais « non attendue ».
« Dans le cas où les relations entre les États-Unis et la Russie se détérioreraient de manière significative à l’avenir », indique l’examen, « les États-Unis pourraient avoir besoin de réviser leurs niveaux de force nucléaire et leur posture ».
Lorsque l’achèvement de la NPR a été annoncé publiquement en janvier [2002], les informateurs du Pentagone ont détourné les questions sur la plupart des détails, affirmant que l’information était classifiée. Les responsables ont souligné que, conformément à une promesse de campagne de Bush, le plan prévoyait de réduire les 6 000 armes nucléaires à longue portée actuelles à un tiers de ce nombre au cours de la prochaine décennie. Rumsfeld, qui a approuvé l’examen à la fin de l’année dernière, a déclaré que l’administration cherchait « une nouvelle approche de la dissuasion stratégique », pour inclure des défenses antimissiles et des améliorations des capacités non nucléaires.
De plus, la Russie ne serait plus officiellement définie comme « un ennemi ».
Au-delà de cela, presque aucun détail n’a été révélé.
Le texte classifié, cependant, est traversé d’une vision du monde transformée par le 11 septembre. La NPR invente l’expression « nouvelle triade », qu’elle décrit comme comprenant la « jambe de frappe offensive » (nos forces nucléaires et conventionnelles) plus les « défenses actives et passives » (nos systèmes antimissiles et autres défenses) et « une infrastructure de défense réactive » (notre capacité à développer et à produire des armes nucléaires et à reprendre les essais nucléaires). Auparavant, la « triade » nucléaire était constituée des bombardiers, des missiles terrestres à longue portée et des missiles lancés par sous-marin qui formaient les trois jambes de l’arsenal stratégique américain.
L’examen met l’accent sur l’intégration de « nouvelles capacités stratégiques non nucléaires » dans les plans de guerre nucléaire. « De nouvelles capacités doivent être développées pour vaincre les menaces émergentes telles que les cibles dures et profondément enfouies (HDBT), pour trouver et attaquer des cibles mobiles et relocalisables, pour vaincre les agents chimiques et biologiques, et pour améliorer la précision et limiter les dommages collatéraux », indique l’étude.
Il appelle à « un nouveau système de frappe » utilisant quatre sous-marins Trident convertis, un véhicule aérien de combat sans pilote et un nouveau missile de croisière lancé depuis l’air comme nouvelles armes potentielles.
Au-delà des nouvelles armes nucléaires, l’examen propose d’établir ce qu’il appelle un programme de « défaite des agents », qui, selon les responsables de la défense, comprend une approche « boutique » pour trouver de nouvelles façons de détruire les agents de guerre chimiques ou biologiques mortels, ainsi que de pénétrer les installations ennemies qui sont autrement difficiles à attaquer. Cela inclut, selon le document, « la neutralisation thermique, chimique ou radiologique de matières chimiques/biologiques dans des installations de production ou de stockage ».
Les responsables de l’administration Bush soulignent que le développement et l’intégration de capacités non nucléaires dans la force nucléaire sont ce qui permet de réduire les armements traditionnels à longue portée. Mais le plan établi dans l’examen élargirait l’étendue et la flexibilité des capacités nucléaires américaines.
Outre les nouveaux systèmes d’armes, l’examen préconise l’incorporation de la « capacité nucléaire » dans de nombreux systèmes conventionnels actuellement en cours de développement. Un missile de croisière conventionnel à longue portée en préparation pour l’armée de l’air américaine « devrait être modifié pour transporter des ogives nucléaires si nécessaire ». De même, le F-35 Joint Strike Fighter devrait être modifié pour transporter des armes nucléaires « à un prix abordable ».
L’examen prévoit que la recherche commencera le mois prochain sur l’installation d’une ogive nucléaire existante dans une nouvelle munition « pénétrant le sol » de 5 000 livres.
Compte tenu des progrès de l’électronique et des technologies de l’information au cours de la dernière décennie, il n’est pas surprenant que le NPR mette également l’accent sur l’amélioration des satellites et du renseignement, des communications et des systèmes de prise de décision à large bande passante plus robustes.
La directive visant à améliorer les capacités des États-Unis dans le domaine des « opérations d’information » ou cyberguerre est particulièrement remarquable.
La communauté du renseignement « manque de données adéquates sur la plupart des réseaux locaux informatiques de l’adversaire et d’autres systèmes de commande et de contrôle », observe l’étude. Il appelle à des améliorations dans la capacité à « exploiter » les réseaux informatiques ennemis, et à l’intégration de la cyberguerre dans la base de données globale de la guerre nucléaire « pour permettre un ciblage, une utilisation de l’armement et une évaluation du combat plus efficaces essentiels à la Nouvelle Triade ».
Au cours des derniers mois, lorsque les responsables de l’administration Bush ont parlé des implications du 11 septembre pour la politique militaire à long terme, ils se sont souvent concentrés sur la « défense du territoire » et la nécessité d’un bouclier antimissile. En vérité, ce qui a évolué depuis les attaques terroristes de l’année dernière, c’est une doctrine de planification intégrée et considérablement élargie pour les guerres nucléaires.
Nos remerciements à William Arkin et au Los Angeles Times. Droits d’auteur Los Angeles Times
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