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👁‍🗹 Le mythe sioniste de la conquĂȘte de Gaza, la rĂ©sistante

Par Ramzy Baroud, le 25 avril 2025. Sur 👁‍🗹 Le mythe de la conquĂȘte – by Spirit’s FreeSpeech


ConquĂ©rir un territoire, c’est avant tout soumettre sa population. Il faut bien distinguer cette notion de celle d’“occupation”, un terme juridique spĂ©cifique qui rĂ©git les relations entre une “puissance occupanteâ€Â Ă©trangĂšre et la nation occupĂ©e en vertu du droit international, en particulier la quatriĂšme Convention de GenĂšve.

Lorsque les forces israéliennes ont finalement été contraintes de se retirer de la bande de Gaza en 2005, conséquence directe de la résistance obstinée de la population palestinienne, les Nations unies ont fermement insisté sur le fait que la bande de Gaza restait un territoire occupé au regard du droit international.

Cette position Ă©tait en contradiction flagrante avec celle d’IsraĂ«l, qui a commodĂ©ment Ă©laborĂ© ses propres textes juridiques dĂ©signant Gaza comme une “entitĂ© hostile” et non comme un territoire occupĂ©.

Evitons de nous laisser tromper par cette logique apparemment confuse :

IsraĂ«l s’est rĂ©vĂ©lĂ© incapable de maintenir sa domination militaire sur Gaza, dĂ©butĂ©e en juin 1967. La raison principale de son retrait a Ă©tĂ© la rĂ©sistance palestinienne, qui a mis Ă  mal ses tentatives de normalisation et surtout de rentabilisation de l’occupation, contrairement Ă  ce qu’il a fait Ă  l’est de JĂ©rusalem et en Cisjordanie.

Entre 1967 et le dĂ©but des annĂ©es 1970, lorsque IsraĂ«l a commencĂ© à investir dans la construction de colonies illĂ©gales dans la bande de Gaza, l’armĂ©e israĂ©lienne, sous le commandement d’Ariel Sharon, a menĂ© une rĂ©pression implacable contre les Palestiniens. Il a recouru Ă  une violence extrĂȘme, Ă  la destruction massive et aux tactiques de nettoyage ethnique pour soumettre la bande de Gaza.

Pourtant, Ă  aucun moment il n’a atteint son objectif ultime et global, Ă  savoir la soumission totale.

Il a ensuite investi dans son plan tristement cĂ©lĂšbre, mais infructueux, des “cinq doigts”. À l’Ă©poque, Sharon, alors chef du commandement sud de l’armĂ©e israĂ©lienne, qui incluait Gaza, croyait dur comme fer que la seule maniĂšre de vaincre les Gazaouis Ă©tait de rompre l’unitĂ© de la bande de Gaza, et donc de faire obstacle Ă  toute rĂ©sistance organisĂ©e.

Pour atteindre cet objectif, il a cherchĂ© Ă  diviser Gaza en zones dites “de sĂ©curitĂ©â€, oĂč seraient implantĂ©es la plupart des colonies juives israĂ©liennes, sĂ©curisĂ©es par un dispositif militaire massif. À cela se serait ajoutĂ© le contrĂŽle militaire israĂ©lien des routes clĂ©s et le blocage de la plupart des accĂšs cĂŽtiers.

Cependant, ce plan ne s’est jamais pleinement concrĂ©tisĂ©, car la crĂ©ation de ces “doigts” exigeait que les Palestiniens des deux cĂŽtĂ©s des “zones de sĂ©curitĂ©â€Â soient quelque peu pacifiĂ©s, une condition jamais remplie dans la rĂ©alitĂ© sur le terrain.

C’est finalement la construction de zones de colonies isolĂ©es qui a Ă©tĂ© mise en Ɠuvre : la plus grande se trouvait au sud-ouest de la bande de Gaza, prĂšs de la frontiĂšre avec l’Égypte, connue sous le nom de Gush Katif, suivie par les colonies du nord et enfin par la colonie centrale de Netzarim.

Abritant quelques milliers de colons et nĂ©cessitant souvent la prĂ©sence d’un nombre bien plus important de soldats chargĂ©s de les protĂ©ger, ces soi-disant colonies Ă©taient essentiellement des villes militaires fortifiĂ©es. En raison de la gĂ©ographie limitĂ©e de Gaza (365 kilomĂštres carrĂ©s) et de la forte rĂ©sistance, les colonies disposaient d’un espace d’expansion restreint, demeurant ainsi une entreprise coloniale coĂ»teuse.

Lorsque l’armĂ©e israĂ©lienne est venue vider la derniĂšre colonie illĂ©gale de Gaza en 2005, les soldats se sont enfuis de la bande de Gaza au milieu de la nuit. Ils Ă©taient poursuivis par des milliers de Gazaouis qui les ont chassĂ©s jusqu’Ă  ce que le dernier d’entre eux ait quittĂ© les lieux.

Cet Ă©pisode singulier et marquant suffit Ă  lui seul Ă  affirmer avec une certitude inĂ©branlable que Gaza n’a jamais Ă©tĂ© vĂ©ritablement conquise par IsraĂ«l.

Bien qu’IsraĂ«l ait levĂ© sa prĂ©sence militaire permanente dans les principaux centres urbains de la bande de Gaza, il a continuĂ© Ă  opĂ©rer dans des zones dites “tampons”, souvent constituĂ©es de profondes incursions en territoire palestinien, bien au-delĂ  de la ligne d’armistice. Il a Ă©galement imposĂ© un blocus total sur Gaza, ce qui explique pourquoi la majoritĂ© des Gazaouis n’ont jamais mis les pieds hors de l’enclave.

Le contrĂŽle exercé par IsraĂ«l sur l’espace aĂ©rien, les eaux territoriales, les ressources naturelles (principalement les gisements de gaz en MĂ©diterranĂ©e) et bien d’autres choses encore a rapidement amenĂ© l’ONU Ă  conclure que Gaza demeure un territoire occupĂ©.

Sans surprise, IsraĂ«l s’est opposĂ© avec vĂ©hĂ©mence Ă  cette rĂ©alitĂ©. Le vĂ©ritable dĂ©sir de Tel-Aviv est le contrĂŽle absolu de Gaza, associĂ© Ă  la dĂ©signation opportuniste et intĂ©ressĂ©e du territoire comme Ă©tant perpĂ©tuellement hostile. Cette logique perverse fournirait Ă  l’armĂ©e israĂ©lienne un prĂ©texte exploitable Ă  l’infini pour dĂ©clencher des guerres dĂ©vastatrices contre la bande de Gaza dĂ©jĂ  assiĂ©gĂ©e et appauvrie, chaque fois qu’elle le jugerait opportun.

Cette pratique brutale et cynique porte le nom effrayant de “tondre le gazon” dans le jargon militaire israĂ©lien, un euphĂ©misme dĂ©shumanisant qui dĂ©signe la dĂ©gradation systĂ©matique et dĂ©libĂ©rĂ©e des capacitĂ©s militaires de la RĂ©sistance palestinienne afin d’empĂȘcher Gaza de pouvoir un jour dĂ©fier efficacement ses geĂŽliers israĂ©liens ou s’Ă©chapper de sa prison Ă  ciel ouvert.

De la fumĂ©e s’Ă©lĂšve aprĂšs des frappes aĂ©riennes israĂ©liennes sur plusieurs sites de la bande de Gaza, le 9 octobre 2023.

Le 7 octobre 2023 a mis fin à ce mythe, lorsque l’opĂ©ration Al-Aqsa Flood a remis en cause la doctrine militaire israĂ©lienne de longue date. La rĂ©gion dite “de l’enveloppe de Gaza”, oĂč Ă©tait basĂ© le commandement sud de feu Sharon, a Ă©tĂ© entiĂšrement prise par les jeunes de Gaza, qui se sont organisĂ©s dans des conditions Ă©conomiques et militaires extrĂȘmement difficiles pour, contre toute attente, vaincre IsraĂ«l.

Tout en reconnaissant la dĂ©signation de Gaza comme territoire occupĂ© par l’ONU, les Palestiniens parlent et commĂ©morent, Ă  juste titre, sa “libĂ©ration” en 2005. Leur logique est claire : le redĂ©ploiement de l’armĂ©e israĂ©lienne dans la rĂ©gion frontaliĂšre a Ă©tĂ© la consĂ©quence directe de leur rĂ©sistance.

Les tentatives actuelles d’IsraĂ«l pour vaincre les Palestiniens Ă  Gaza Ă©chouent pour une raison historique fondamentale. Lorsque les forces israĂ©liennes se sont retirĂ©es furtivement de la bande de Gaza il y a deux dĂ©cennies, Ă  la faveur de la nuit, les combattants de la rĂ©sistance palestinienne ne disposaient que d’un armement rudimentaire, plus proche des jeux pyrotechniques que du matĂ©riel militaire efficace. Le paysage de la rĂ©sistance a fondamentalement Ă©voluĂ© depuis cette Ă©poque.

Cette rĂ©alitĂ© de longue date a Ă©tĂ© bouleversĂ©e ces derniers mois. Toutes les estimations israĂ©liennes suggĂšrent que des dizaines de milliers de soldats ont Ă©tĂ© tuĂ©s, blessĂ©s ou psychologiquement affectĂ©s depuis le dĂ©but de la guerre Ă  Gaza. Puisqu’IsraĂ«l n’a pas rĂ©ussi Ă  soumettre les Gazaouis au cours de deux dĂ©cennies d’attaques incessantes, il est non seulement improbable, mais carrĂ©ment absurde d’espĂ©rer qu’il parvienne aujourd’hui Ă  soumettre et Ă  conquĂ©rir Gaza.

IsraĂ«l est lui-mĂȘme parfaitement conscient de ce paradoxe inhĂ©rent, d’oĂč son choix brutal et prĂ©cipitĂ© : perpĂ©trer un gĂ©nocide, un acte horrible destinĂ© Ă  ouvrir la voie au nettoyage ethnique des survivants. Le premier a Ă©tĂ© exĂ©cutĂ© avec une efficacitĂ© dĂ©vastatrice, une tache sur la conscience d’un monde restĂ© pour l’essentiel silencieux. Le second, cependant, n’est qu’un fantasme irrĂ©alisable, fondĂ© sur l’idĂ©e dĂ©lirante que les Gazaouis choisiraient volontairement d’abandonner leur terre ancestrale.

Gaza n’a jamais Ă©tĂ© conquise et ne le sera jamais. En vertu des principes immuables du droit international, elle reste un territoire occupĂ©, mĂȘme si l’armĂ©e israĂ©lienne finit par se retirer Ă  la frontiĂšre, un retrait que la guerre destructrice et vaine menĂ©e par Netanyahu ne pourra repousser indĂ©finiment. Lorsque ce redĂ©ploiement inĂ©vitable aura lieu, les relations entre Gaza et IsraĂ«l seront irrĂ©vocablement transformĂ©es, tĂ©moignant ainsi de la rĂ©silience et de l’esprit indomptable du peuple palestinien.

Traduit par Spirit of Free Speech


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Robert Bibeau

Auteur et éditeur

3 rĂ©flexions sur “👁‍🗹 Le mythe sioniste de la conquĂȘte de Gaza, la rĂ©sistante

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