Actualite économique

L’ endettement international et l’échappatoire de la planche à billet (Gerard Bad)

Cet article est paru dans le n°144   d’Échanges.

La presse économique et journalistique ne cesse de se gargariser d’un langage civilisateur au travers de considérations visant à regrouper des pays selon l’importance de leur développement industriel, en réalité de leur dépendance financière et industrielle. Tout un panel d’appellations les plus diverses sera utilisé afin de laisser entendre que la misère prolétarienne correspond à un manque de développement… Si nous reprenons certaines de ces appellations, comme « tiers monde » « quart monde » « pays en développement », « pays les moins avancés », « nouveaux pays industrialisés » etc., ce n’est que pour montrer toutes les variantes « développementistes » visant à masquer l’exploitation tant humaine que de la nature d’un si généreux humanisme. En Europe nous avons eu les PIGS (1) (Portugal, Irlande,Grèce, Espagne) pour se moquer des pays en cessation de paiement.

Quand par exemple on parle des pays en développement (PED), il faudrait plutôt dire pays en voie de dépendance financière (PVDF) – de même pour les nouveaux pays industrialisés (NPI) ou les économies émergentes.

Retour sur l’endettement international

La dette du tiers monde (2) ou des pays en voie de développement (PVD) est récurrente. Dès 1820, le système capitaliste pénètre dans les pays fraîchement indépendants d’Amérique latine. Les guerres d’indépendances politiques ouvriront la voie à la dépendance financière ; entreront dans le tourbillon de l’endettement la Colombie, le Chili, le Pérou, l’Argentine, le Mexique et le Guatemala : tous vont emprunter sur le marché de Londres. Ce qui est caractéristique, c’est de voir que régulièrement des pays entiers sont sinistrés et ne peuvent plus rembourser leur dette qu’en paupérisant leur population. A ce moment-là les capitaux refluent vers d’autres « eldorados » et reviennent quand la situation commence à s’assainir. Ni les risques souverains, ni les cessations de paiement n’entravent l’expansion du capital qui semble même ainsi se régénérer de crise en crise. Rosa Luxemburg à son époque avait très bien compris comment fonctionnait le système :

« Entre 1870 et 1875, écrit-elle, les emprunts furent contractés à Londres pour une valeur de 260 millions de livres sterling, ce qui entraîna immédiatement une croissance rapide des exportations de marchandises anglaises dans les pays d’outre-mer. Bien que ces pays fissent périodiquement faillite, le capital continua à y affluer en masse. A la fin des années 1870, certains pays avaient partiellement ou complètement suspendu le paiement des intérêts : la Turquie, l’Egypte, la Grèce, la Bolivie, le Costa-Rica, l’Equateur, le Honduras, le Mexique, le Paraguay, Saint-Domingue, le Pérou, l’Uruguay, le Venezuela. Cependant, dès la fin des années 1880, la fièvre des prêts aux Etats d’outre-mer reprenait… »

(L’Accumulation du capital, éd. Maspero, p. 95 ; voir aussi page 72.)

La dette du tiers monde : 1970-1990

A la fin des années 1960, il était visible qu’un processus de modification de la dette du tiers monde allait s’engager. En effet de plus en plus de prêts bancaires privés inonderont le tiers monde. Selon l’OCDE, entre 1970 et 1977, l’endettement extérieur des PED est passé de 72,2 à 244 milliards de dollars. La Conférence des Nations Unies pour le Commerce et le Développement (CNUCED) (3) indiquera que 72 % des emprunts bancaires provenaient de crédits privés alors que ceux-ci ne représentaient que 51 % de ces emprunts en 1967. Il s’agissait alors de relancer la croissance pour contrer la plus grande dépression d’après la seconde guerre mondiale. En effet le système de financement international, gorgé de capitaux en jachère, ne trouvait plus de débouchés rentables dans les pays dits industrialisés. Dès les années 1970 il y aura une saturation progressive des capacités productives mondiales (4).

La dette et le remodelage de la division internationale du travail

Une nouvelle tentative de reproduction élargie par l’explosion de prêts internationaux va s’opérer. La fièvre de l’exportation des capitaux s’empare des places financières de Panama, Bahrein, Abu Dabi, Hong Kong, Singapour… dans le même sillage que celui décrit par Rosa Luxemburg, mais à un niveau supérieur de développement des forces productives. Les intermédiaires financiers exportent leurs capitaux pour que les PED et les PMA s’industrialisent en achetant du matériel produit dans les pays du centre, et deviennent dépendants de cette industrialisation exportée et de son mode de consommation. Leur décollage va se faire avec des machines et matériels dernier cri, ce qui relativise beaucoup l’idée que les délocalisations sont essentiellement motivées par le coût du travail.

L’industrialisation des PED se limite toujours en grande partie à l’industrie manufacturière, le transfert de technologie sera lent, son principal objectif visera le remboursement des dettes :

« La Banque mondiale signale en outre qu’au cours des dernières années, la Malaisie, la Colombie, la Turquie et la Thaïlande ont considérablement augmenté leurs exportations de produits manufacturés. Or si l’on compare le tableau des nations auxquelles revient une part importante de la dette envers des sources de financement privées, au tableau des pays qui produisent et exportent des produits manufacturés, on constate qu’il s’agit, sauf exception, des mêmes pays. On peut donc en déduire qu’il existe une relation essentielle entre la dette extérieure et la nouvelle division du travail souhaitée par les grandes banques. »

(Samuel Lichtensztejn et José M. Quijano, La Dette des pays sous-développés et le rôle des banques privées internationales, éd. Publisud, 1982)

La dette du tiers monde a révélé qu’il n’était plus possible pour les banques d’accorder des prêts avec comme seul objectif que le tiers monde consomme les productions industrielles de l’OCDE. Le terme de l’échange étant inégal et le coût du matériel importé toujours croissant il était devenu patent que de nombreux pays ne pouvaient plus honorer leur dette, on parla même d’annuler (5) la dette du tiers monde.

La période où les prêts servaient à subventionner les importations commençait à toucher le fond. Le financement du développement du tiers monde va se muter en financement des déficits. C’est à ce moment qu’un remodelage du paiement de la dette fut basé sur l’exploitation pure et simple des forces de travail du tiers monde. Les banques et multinationales y voyaient leurs intérêts, les bourgeoisies compradores aussi en faisant entrer des devises pour payer le service de la dette. L’époque des délocalisations du centre vers la périphérie avait commencé :

« D’après les banquiers les plus importants, les pays du centre conserveraient dans l’avenir leur monopole sur les industries de haut rendement qui exigent des technologies sophistiquées tandis que les pays du tiers monde les plus avancés se lanceraient dans les industries ou les usines de montages qui requièrent beaucoup de main-d’œuvre. L’axe nord-sud des circuits commerciaux ne serait plus consacré uniquement à l’échange de produits manufacturés contre matières premières ; le commerce de marchandises diversifiées prendrait la première place. »

(Samuel Lichtensztejn et José M. Quijano, op. cit.)

Aussi dès l’an 2000 les PED produisaient près du quart de la production manufacturière mondiale. Alors qu’en 1970 les quatre cinquièmes de la production manufacturière mondiale étaient encore concentrés dans les pays du centre (Europe occidentale, Amérique du nord, Océanie et Japon).

L’impact des chocs pétroliers sur les pays en développement et les pays les moins avancés

1194964108402   On accorde généralement trop peu d’attention à ce que furent véritablement les chocs pétroliers et leurs conséquences. Nous allons donc résumer la situation en mettant l’accent sur ce qui nous semble essentiel. Pour les PED et PMA, l’impact de l’augmentation du prix du brut (+ 400 %) fut dévastatrice, ces pays sans ressources pétrolières significatives ne disposant pas des devises suffisantes pour acheter les produits dérivés du pétrole (engrais, produits chimiques…). Le concept de « quart monde » comme nouveau classement hiérarchique du capital était né. Le bonheur des uns venait de faire le malheur des autres. Les pays de l’OPEP vont bénéficier, entre 1974 et 1980, d’un excédent de 330 milliards de dollars ; alors que le déficit commercial des pays non pétroliers, le quart monde, sera de l’ordre de 300 milliards (6) .

Après le choc pétrolier de 1973, le déficit des pays importateurs du tiers monde passe de 36,8 % à 72,7 % en 1977. L’Inde, le Bangladesh et certains pays d’Afrique noire sont dans des situations dramatiques. C’est au final l’OPEP qui servira de bailleur de fonds pour amortir la douloureuse augmentation du prix du brut. Il faut souligner que c’est par le truchement du FMI et de capitaux saoudiens que l’opération « facilité pétrolière » va se faire. Elle est censée aider les pays les plus pauvres. Mais le gros des pétrodollars, 120 milliards, sera recyclé par les banques américaines, européennes et japonaises.

Quelques années après, changement de programme : les Etats-Unis décident la déréglementation de leur marché domestique et développe le concept de « grande bassine » (7) où tous peuvent s’approvisionner en pétrole selon le cours de celui-ci.

« Le premier Executive Order signé par Ronald Reagan, en janvier 1981 déréglementait entièrement le marché pétrolier intérieur. L’idée directrice n’était plus la quête de l’indépendance énergétique mais la minimisation du coût de l’approvisionnement. L’évolution de la dépendance pétrolière serait déterminée par le libre fonctionnement du marché, c’est-à-dire par la libre concurrence entre pétrole domestique et pétrole importé. »(Ramses, éd. Dunod, 2005, p.146)

Nous savons tous ce qu’il en est advenu, une instabilité en dents de scie, mais à la hausse, du prix du pétrole. Si durant la période 2000-2003 le prix du baril se stabilise entre 22 et 28 dollars, suite à un effondrement en 1998 à 10 dollars, la période 2004-2008 sera celle de l’explosion de la demande ; les prix vont atteindre 100 dollars le baril avec un pic de 145 en 2008. Le baril est actuellement (juillet 2013) à 106,61 dollars.

1994 : la dette des pays en développement explose de nouveau

A la fin de l’année 1994, la dette des PED explose de nouveau, elle passe de 840 milliards de dollars en 1982 à 1 900 milliards de dollars. Ceci correspond à un nouvel afflux de capitaux privés qui se sont investis en Argentine, Chine, Corée du Sud, Indonésie, Malaisie, Mexique, Thaïlande. Tous sauf la Chine vont entrer en crise : 1994, troisième crise mexicaine ; 1997-1998, crise dite asiatique, qui touchera l’Indonésie, la Corée du Sud, la Thaïlande, la Malaisie ; 2001-2002, crise en Argentine.

La crise de la dette des PED n’est au final que celle du capital total et va se manifester par toute une série de dévalorisations financières (8), dont la crise argentine de 2002 mettra en exergue le risque de la dette souveraine. Ces événements seront à la base du revirement de la politique monétaire américaine et son spectaculaire gonflement du déficit. Les Etats-Unis venaient remplacer les PED ou économie émergente comme pôle débiteur des marchés financier mondiaux. L’Allemagne de l’Ouest et le Japon prenant la place de l’OPEP comme pourvoyeurs de fonds.

Depuis, la crise dite des subprimes (2007-2008) a éclaté aux Etats-Unis, centre du capitalisme mondial, et s’est étendue à l’échelle mondiale. Six années se sont écoulées et malgré des mesures en tout genre la crise est toujours là, et rien ne permet de relancer la machine. Pire encore, les peuples constatent que le sauvetage des banques par les Etats (2007-2009) a engendré la dégradation des finances publiques débouchant sur une crise de dettes souveraines dont ils sont les victimes. Nous voyons des Etats comme le Portugal, l’Irlande, l’Espagne, l’Italie prendre le chemin du défaut de paiement de la Grèce.

Les gouvernements de gauche comme de droite ne sont en place que pour faire payer leur crise aux peuples. Les plans d’austérité tombent en cascade malgré les autocritiques intéressées du FMI et du G7. Début mai, le Premier ministre portugais annonçait qu’il allait faire de sévères coupes dans les dépenses publiques (9) afin de respecter les engagements budgétaires. Pedro Passos Coelho a annoncé le report de l’âge du départ à la retraite, l’allongement du temps de travail et la réduction du nombre des fonctionnaires. L’Union européenne a aussi ses mingong (mot chinois désignant les migrants de l’intérieur) ; dans des pays comme la Grèce, l’Espagne, le Portugal de nombreux sans emplois sont contraints à l’émigration : selon une organisation patronale espagnole, plus de 300 000 Espagnols ont quitté le pays depuis 2008. La crise grecque est une aubaine pour l’Allemagne qui a besoin chaque année d’un flux migratoire de 200 000 immigrés ; 30 000 Grecs ont rejoint l’Allemagne entre juin 2011 et juin 2012 et 25 000 Espagnols tous les ans.

Dans un monde de suraccumulation de capitaux et de surcapacité industrielle, il devient quasiment impossible de poursuivre les rythmes de croissance à la hausse, c’est-à-dire d’être en mesure de poursuivre une accumulation élargie. Les mesures d’austérité qui ont balayé la planète, ont bien entendu rétréci le champ d’activité de la demande mondiale au détriment de tel ou tel bloc économique ou de certaines filières industrielles, les surcapacités du secteur automobile le démontrent chaque jour (10). La dernière réunion du G7 (10 et 11 mai 2013 à Londres) a mis en relief certaines contradictions au sein de la finance mondiale. Alors que le FMI et le G20 commencent à faire leur autocritique sur les mesure d’austérité, la convocation d’un G7, par le Royaume-Uni qui en a la présidence, visait à affirmer qu’il fallait maintenir le cap de l’austérité et compter sur les banques centrales pour la relance. Autrement dit, la réunion du G7 avait pour but de contrer l’autocritique du FMI sur les dommages infligés à l’économie par la rigueur trop sévère. Pour les Britanniques la solution réside dans la création monétaire par les banques centrales, c’est-à-dire faire fonctionner la planche à billets et monétiser la dette.

Jouer sur la masse monétaire c’est la base du monétarisme, mais en arriver à créer de la monnaie de singe c’est une échappatoire qui aura des conséquences catastrophiques, comme les dévaluations compétitives l’ont montré. Le participant canadien au G7, Jim Flaherty, pourtant partisan de l’austérité, s’est tout de même interrogé sur les conséquences d’une explosion des masses monétaires : « Je comprend l’intérêt mais c’est censé rester une mesure temporaire et ne pas devenir un levier permanent sous peine d’en devoir payer les conséquences. » Cependant la boîte de Pandore est de nouveau amplement ouverte au pays du Soleil Levant. Le Japon veut doubler sa masse monétaire d’ici fin 2014, ce qui a fait chuter le yen à son plus bas niveau depuis quatre ans. De son côté, aux Etats-Unis, la Fed poursuit ses injections de monnaie dans les circuits monétaires à la cadence de 85 milliards de dollars par mois.

La guerre des monnaies revient sur le devant de la scène comme mesure protectionniste. Tous vont finir par dévaluer leur monnaie pour récupérer des parts de marché au détriment des autres. Par exemple la dévaluation de la monnaie japonaise va redonner un coup de fouet à l’exportation de Toyota, Nissan (11), Honda… au détriment des industries automobiles chinoises, allemandes et coréennes ; mais il ne faudra pas attendre beaucoup de temps pour que les lésés baissent à leur tour la valeur de leur monnaie. Chaque coup de boutoir de ce genre entraîne des restructurations et des licenciements massifs ainsi que l’augmentation de la productivité… L’Allemagne, dont la croissance se fait à l’export, a immédiatement réagi et considère qu’il y a triche ; les Américains vont dans le même sens que les Allemands et pensent qu’il est déloyal d’être concurrencé par un simple effet de change.

« On glisse de la guerre commerciale à la guerre des monnaies, qui peut être alimentée par une surenchère sans fin », déplorent-ils. De fait, si tout le monde se met à faire marcher la planche à billets, le vrai danger devient global, on redoute la formation de nouvelles bulles financières au-dessus de ces masses de capitaux flottants.

En conclusion

La doctrine Monroe, du nom du président des Etats-Unis (4 mars 1817-4 mars 1825) célèbre pour son « l’Amérique aux Américains » suivi de la reconnaissance des nouvelles républiques latino-américaines, ne fut qu’une entreprise visant pour l’Amérique du Nord à chasser l’occupant espagnol. Le wilsonnisme et son droit des peuples à disposer d’eux-même poursuivra dans le même sens, les indépendances nationales n’étant que le prélude à la pénétration du capital financier.

L’emprunt international est à ce niveau l’expression du capital total, ce capital qui déjà commence à sortir des cadres nationaux sous la forme de l’impérialisme (capital financier). Ce qui est caractéristique c’est que le système semble complètement imperméable aux crises de la dette, au risque Etat… Comme une vague, le capital financier vient sans cesse se heurter sur la falaise de l’endettement qui s’effondre, puis reprend de l’ardeur. La question qui se pose alors est de savoir pourquoi et jusqu’où un tel système peut tenir.

Dans cet article nous avons essayé de montrer comment le capital financier va de crise en crise par un mouvement en spirale, que l’exportation des capitaux n’a rien de progressiste ou d’humaniste mais ne vise que la reproduction du capital, son élargissement. Quand le profit baisse, le capital fait ses valises et cherche d’autres opportunités. La dette du tiers monde montre bien les diverses étapes ayant au final menées à la crise mondiale. Les chocs pétroliers avaient pour fonction de sauver la monnaie universelle en péril, représentée par le dollar. La stratégie américaine était que leurs rivaux européens et japonais ainsi que le tiers monde contribuent à supporter une partie de leur crise monétaire et commerciale afin d’éviter l’éclatement du système. Le cartel pétrolier anglo-américain allait utiliser les chocs pétroliers à ces fins.

Les Etats-Unis furent dans un premier temps bénéficiaires de la crise pétrolière qu’ils avaient déclenchée. Ils payent le pétrole un peu plus cher, mais l’Europe et le Japon encore plus ; quant au tiers monde, il n’existe déjà plus, et on parle de quart monde ; un quart monde principalement endetté auprès de banques américaines. Fin 1975, les deux tiers des prêts octroyés venaient de banques américaines.

Les Américains pensaient qu’ils avaient finalement sauvé le monde d’une catastrophe financière en mettant l’Europe et le Japon à contribution, en procédant à deux dévaluations du dollar pour amortir les chocs pétroliers, faisant ainsi payer les pays de l’OPEP qui devront ensuite essuyer la dette du quart monde, c’est-à-dire les créances américaines sur lui.

Les Etats Unis avaient réussi à améliorer provisoirement leur position concurrentielle sur le marché des produit manufacturés, revalorisé le brut américain (et celui de l’Alaska) tout en remettant le dollar en selle sur le marché des changes. Le cartel des sept sœurs empochait les bénéfices. Cependant l’Europe, le Japon et d’autres pays vont réagir, les uns en créant des sociétés nationales comme l’ENI italienne, les autres, de l’OPEP, cherchant à amortir la facture des dévaluations du dollar.

Cette redistribution, à coup de chocs pétroliers et de dévaluations du dollar, va transformer l’OPEP en bailleur de fonds du tiers monde et permettre ainsi aux banques privées de se retirer provisoirement d’un secteur qui ne donne plus le jus espéré (12). C’est la manne financière de l’OPEP qui va hériter des déboires des PED dont la croissance se trouve interrompue du fait de la hausse du prix du pétrole et de la chute du prix des produits primaires agricoles et miniers.

Le retournement monétariste de 1979 et la vague libérale qui va suivre vont permettre aux marchés financiers internationaux de submerger tous les systèmes de contrôle et notamment ceux des Etats sur l’économie. Ce qui veut dire que le capital financier, qui a le marché mondial comme terrain de jeu, poursuit son émancipation des carcans étatiques, via la globalisation financière. La Bourse au grand dam de feu Lénine (13) revient en force et va faire plier les rigidités du capitalisme monopoliste d’Etat tant a l’Ouest qu’à l’Est. Les capitaux sans rendement suffisant se sont tournés vers les marchés boursiers émergents à haut rendement. Dès 1980 il y aura une accélération des Investissements directs internationaux (IDI). Au début des années 1990, le développement de ce qui fut appelé « la régionalisation boursière », est passé en dix ans de 1 000 milliards de dollars de capitalisation à 2 000 milliards. En 1994 la dette des économies émergentes explosera et va être le signal d’une crise de l’endettement international notamment centré sur l’Amérique latine, chasse gardée des banques américaines.

La dette latino-américaine est vite apparue comme pouvant faire exploser le système financier international, prouvant ainsi que cette dette était celle du capital total. Tout un système de colmatage, de plan Brady et autres ne feront que reculer les échéances : la Citicorp (14) est contrainte de provisionner pour créance douteuse ce que d’autres banques ne peuvent pas faire. Le système financier international entrera finalement dans la tourmente avec la crise des subprimes et mijote depuis dans les bassines de l’Union européenne confrontée elle aussi non seulement à la dette publique, mais encore au risque Etat. Actuellement les spéculateurs misent sur le pétrole, espérant une reprise de l’économie mondiale en 2014, comme ils espéraient auparavant une poussée indéfinie des cours de l’or.

Rien de tout cela ne sera au rendez-vous ; même le FMI en doute. Par contre les surcapacités, les dépenses publiques vont se poursuivre et l’inflation va commencer à s’étendre.

Gérard Bad fin juin 2013


Au sujet de l’ inflation voir sur ce blog

Bibliographie : Ramses, éd. Dunod, 2005 ; Jean-Marie Chevalier, Le Nouvel Enjeu pétrolier, éd. Calmann-Lévy, 1973 ; Samuel Lichtensztejn et José M. Quijano, La Dette des pays sous-développés et le rôle des banques privées internationales, éd. Publisud, 1982 ; Pascal Arnaud, La Dette du tiers monde, éd. La Découverte, 1984 ; Jacques Adda, La Mondialisation de l’économie, éd. La Découverte, 2012.


NOTES

(1) En anglais PIGS correspond au français porc, et le S à Spain (Espagne).

(2) L’expression « tiers monde » date du 14 août 1952, sous la plume d’Alfred Sauvy dans L’Observateur politique économique et littéraire, en référence aux deux blocs d’alors, mais aussi au Tiers Etat de la révolution française : « Car enfin ce tiers monde ignoré, exploité, méprisé comme le tiers état, veut lui aussi, être quelque chose ».

(3) Créée en 1964, la CNUCED a pour objectif d’intégrer les pays en développement dans l´économie mondiale de façon à favoriser leur essor.

(4) Le taux de chômage commençait son ascension : entre mi-1973 et mi-1975 il passe de 5 % à 9 % aux Etats Unis et de 2,5 % à 5 % dans la CEE.

(5) Quand on parle d’annulation de la dette, il s’agit surtout de réduction des dettes publiques contractées auprès d’Etats et organismes internationaux officiels. Pour la dette privée, pour un pays devenant insolvable, il y a peu de recours de la part des créanciers. D’où un marché gris où ces créances se revendent, au titre de junk bonds (obligations pourries), avec une forte décote (effets de la notation de la dette et de la prime de risque sur les taux d’emprunt).

(6) Pascal Arnaud, La Dette du tiers monde, éd. La Découverte, 1984, p 47.

(7) La formule « one great poll » est de Morris Adelman, professeur au MIT, un des principaux experts du marché pétrolier.

(8) Voir a ce sujet l’article « Crise, la fin des rafistolages » dans Echanges n° 138, p.48.

(9) Pour trouver 4,8 milliards d’euros d’ici à 2015, le gouvernement portugais veut supprimer 30 000 postes de fonctionnaires et porter l’âge du départ à la retraite à 66 ans. Le projet de budget 2013 augmente les impôts sur le revenu de 30 % en moyenne.

(10) La conséquence directe de ce marasme, c’est la sous-utilisation des usines en Europe. Dans le secteur automobile, sur cent sites de production, 58 % perdent de l’argent car ils n’utilisent pas pleinement leurs capacités. « La sous-utilisation des usines européennes a atteint un niveau critique, et les réductions de capacité annoncées à ce jour seront très probablement insuffisantes pour pallier la situation, indique Laurent Petizon, directeur général d’Alix Partner’s. Pour ajuster la production aux faibles volumes de ventes anticipés pour les années à venir, il conviendrait de réduire les capacités de 3 millions d’unités. Ce chiffre équivaut à la fermeture de dix usines de la taille du site PSA de Sochaux (316 700 voitures produites en 2012). L’étude révèle que la sous-utilisation des sites touche particulièrement la France, où 62 % des usines perdent de l’argent. » (L’Usine nouvelle [usinenouvelle.com], rendant compte d’une étude du cabinet de conseil Alix Partner’s, selon laquelle le marché automobile restera durablement déprimé, avec des surcapacités de production toujours plus criantes.)

(11) Carlos Ghosn, notamment, président de Nissan, déplore depuis de nombreux mois la vigueur du yen, « qui entrave la compétitivité des groupes japonais ».

(12) De 1978 à 1982, la dette des pays non pétroliers passe de 336 à 612 milliards de dollars et les banques vont limiter leur prêts. (Pascal Arnaud, op. cit., p73).

(13) Lénine : « En d’autres termes, l’ancien capitalisme, le capitalisme de la libre concurrence, avec ce régulateur absolument indispensable qu’était pour lui la Bourse, disparaît à jamais. Un nouveau capitalisme lui succède, qui comporte des éléments manifestes de transition, une sorte de mélange entre libre concurrence et monopole. » (L’Impérialisme, stade suprême du capitalisme.)

(14) En avril 1998, Citicorp va fusionner avec Traveler Group pour devenir Citigroup.

 

lundi 27 mai 2024

La monnaie russe dans le viseur du capital occidental -(juillet 2022)

 

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La monnaie russe dans le viseur du capital occidental.

Nous avons pu nous rendre compte que la guerre actuelle entre l’occident « démocratique » et le bloc des « dictateurs » est aussi une guerre économique, une guerre offensive des deux côtés pour savoir qui aura le droit de frapper monnaie. L’occident et plus particulièrement les États-Unis ont toujours le privilége d’être les pourvoyeurs de la monnaie universelle. Tant que la création monétaire correspond à une production réelle et à une épargne mondiale fixée dans les organismes financiers,le système achève sans trop de probléme ses méthamorphoses. Rien ne va plus quand la création monétaire dépasse,via l’ endettement international,ses limites et que les monnaies se trouvent dévalorisées à cause de cette création monétaire théorisée par les adeptes de la MMT Théorie monétaire moderne de Stephanie Kelton, 1

Tous les détenteurs de dollars finissent par réaliser qu’ils sont détenteurs de fausse monnaie. La Chine et son stock de dollars se rend compte de l’ usure que lui impose cette détention. La Chine se déleste de plus en plus de ses avoirs en titres du Trésor américain, ceux ci ont chuté de 100 milliards de dollars en six mois.2 Comme d’ autres avant elle, la Chine pense pouvoir voler de ses propres ailes comme centre mondial d’ accumulation de valeur. Depuis le début de la guerre en Ukraine, l’occident s’est attaquè au avoir russe afin de dévaloriser le rouble, en vain et vise maintenant l’or russe, de leur côté le bloc anti-occident organise la riposte.

Revenons maintenant sur les différentes tentatives de déboulonner le dollar

Depuis l’ abandon de l’ étalon or en 19143, jusqu’ aux accords de Bretton Woods4 après la seconde guerre mondiale, la gestion financière de la planète fut l’ objet de nombreuses remises en question. Le Bancor5 proposé comme monnaie internationale fut rapidement mis au rancart par les États-Unis qui imposèrent alors le dollar. Tant que les États-Unis, disposaient dans les coffres de Fort- Knox d’importantes réserves en or, il n’ y avait pas de problème. C’est seulement quand la croissance économique se déplaça des États-Unis vers l’ Europe, que les réserves d’ or des américains s’amenuisèrent et se traduisirent par un déficit de plus en plus important de leur balance des paiements. C’ est à ce moment que les premières remises en cause du dollar comme monnaie universelle commencèrent. En dépit de diverses mesures de « replâtrage » le dollar se maintiendra.

C’est en mars 1968, qu’une nouvelle crise monétaire éclate , qui se soldera par la mise en place d’un double marché de l’ or.6

Depuis que le dollar est devenu l’étalon monétaire de la planète, tous ceux qui ont essayés de le détrôner, n’y sont pas parvenus, En France De gaulle ( 1965), puis Giscard ont essayés, ils ont été évincés. Quand Saddam Hussein voulu payer le pétrole en euro, il avait mis en place une arme de « destruction massive » qui lui vaudra la vie.

Stock d’or, en % des réserves mondiales

Années Etats-Unis Royaume-Uni France Allemagne

1923

44,4

8,6

8,2

1,3

1924

45,7

8,3

7,9

2,0

1925

44,4

7,8

7,9

3,2

1926

44,3

7,9

7,7

4,7

1927

41,6

7,7

10,0

4,7

1928

37,4

7,5

12,5

6,5

1929

37,8

6,9

15,8

5,3

1930

38,7

6,6

19,2

4,8

1931

35,9

5,2

23,9

2,1

Source : Barry Eichengreen, 1996, L’expansion du capital. Une histoire du système monétaire international, L’Harmattan,p.87.

Depuis, la crise financière de 2008 a considérablement réduit la puissance de la City et de Wall street, le dollar n ‘est même plus une monnaie suspecte, il n’ est plus une monnaie ou si l’ on préfère une monnaie hélico7 alimentée par la planche à billet. Alors les détenteurs de dollars s’énervent un peu plus et prennent des initiatives, les monarchies du Golfe (Arabie saoudite, Bahrein, Emirats arabes unis, Koweit, Oman, Qatar), envisageaient, pour 2010 une monnaie unique sur le modèle de l’ euro. Au moment de signer l’ accord il n’ en restait plus que quatre. Puis se fut le tour des détenteurs de matières énergétiques qui ne veulent pas être les dindons de la farce et de passer à l’ offensive. Le Cartel de l’ OPEP et la Russie veulent marcher sur les traces de Saddam Hussein; ils comptent mettre en place une monnaie unique pour honorer les contrats pétroliers. Le Kazakhstan et l’Iran veulent une monnaie régionale, la Chine propose la mise en place d’une monnaie universelle par la mise en place d’un instrument de paiement dont la valeur serait déterminée à partir d’un panier de monnaies, et non plus fixée sur celle du dollar américain. Or cet instrument existe déjà, mais pas pour cet usage : ce sont les DTS. Fin mars, Dominique Strauss-Kahn déclarait « légitimes » les discussion sur une nouvelle monnaie de réserve.

Michael Hudson8, dans son article : Dé-dollarisation: le démantèlement de l’ empire militaire et financier américain (17 juin 2009) va jusqu à dire :

« La ville Russe de Iekaterinbourg, la plus importante à l’est de l’Oural, pourrait désormais être connue comme le lieu où sont morts non seulement les tsars mais aussi l’hégémonie américaine. Non pas uniquement l’endroit où le pilote américain Gary Powers a été abattu en 1960, mais aussi celui où l’ordre financier international dominé par les USA a été mis à bas.

La remise en cause de l’Amérique sera le thème principal des réunions élargies de Iekaterinbourg, en Russie (ex-Sverdlovsk) des 15 et 16 Juin rassemblant le président chinois Hu Jintao, le président russe Dmitri Medvedev et les représentant les six pays de l’ Organisation de Coopération de Shanghai (OCS). Cette alliance regroupe la Russie, la Chine, le Kazakhstan, le Tadjikistan, le Kirghizstan et l’Ouzbékistan. L’Iran, l’Inde, le Pakistan et la Mongolie y ont le statut d’observateurs. Mardi le Brésil s’y joindra pour les discussions commerciales entre les pays du BRIC (Brésil, Russie, Inde et Chine). »

Suite à cette réunion le Président Sarkosy s’ est dit en accord avec l’ esprit de Iekaterinbourg, ceci dans la logique du Gaullisme et lors du G8 qui s’ est tenue à L’ Aquila (Italie) plusieurs chefs d’État et de gouvernement ou leurs représentants ont clairement remis en cause l’ordre monétaire existant depuis les accords de Bretton Woods, ainsi que la prédominance du dollar dans les échanges mondiaux. Nicolas Sarkozy, a appelé à un débat sur la monnaie de réserve. Le représentant chinois a évoqué, pour sa part, « un régime monétaire international de réserve diversifié et rationnel » sur la base des droits de tirage spéciaux (DTS), le panier de monnaies utilisé par le Fonds monétaire international (FMI).

Le ministre allemand des finances Peer Steinbrück a tenu à prendre ses distances en informant la presse que l’ Allemagne restait farouchement favorable au dollar comme monnaie de réserve.

Selon Peer Steinbrück, « le rôle dominant des marchés financiers anglo-saxons » demeure mais il s’est « relativisé » avec la crise financière. le ministre social-démocrate (SPD) dans l’hebdomadaire Manager magazin, indique que « le dollar va certainement garder son rôle particulier », mais selon lui « dans une proportion moins importante ».

La réponse américaine ne s’est pas fait attendre.

Le président Obama a défendu le dollar : “En ce qui concerne la confiance dans l’économie américaine ou dans le dollar, je ferais remarquer que le dollar est extraordinairement fort en ce moment. Et la raison pour laquelle le dollar est fort en ce moment, c’est parce que les investisseurs considèrent que les États-Unis ont l’économie la plus forte du monde, avec le système politique le plus stable du monde. Je ne crois pas à la nécessité d’une monnaie mondiale.»

Il apparaît donc, que la question du dollar comme monnaie universelle est au centre des contradictions du monde capitaliste, au centre de leurs rivalités. Comme l’ histoire de l’ argent nous l’ enseigne, il arrive toujours un moment ou il faut passer sous les fourches caudines du « paiement comptant », ce moment semble arrivé..

Les sanctions boomerang contre les peuples

Lors du sommet du Davos russe, Poutine a voulu démontrer aux peuples que les sanctions occidentales allaient comme c’ est souvent le cas se retourner contre leurs auteurs et particulièrement contre le capital européen.

« J’ai déjà dit que la guerre économique éclair contre la Russie n’avait aucune chance de succès dès le ‘départ. En même temps, l’arme des sanctions est, comme vous le savez, et la pratique de ces dernières années le montre bien, une arme à double tranchant. Elle inflige des dommages comparables, voire plus importants, aux idéologues et aux concepteurs eux-mêmes. »

« les politiciens européens ont déjà porté un coup sérieux à leur économie – ils l’ont fait eux-mêmes, de leurs propres mains. Nous pouvons voir comment les problèmes sociaux et économiques se sont aggravés en Europe et aux États-Unis également, comment le coût des marchandises, de la nourriture, de l’électricité et du carburant pour les voitures augmente, comment la qualité de vie des Européens diminue et comment les entreprises perdent leur compétitivité.

Les experts estiment que les pertes directes, “calculables” de l’UE, venant de la fièvre des sanctions, pourraient à elles seules dépasser 400 milliards de dollars au cours de l’année à venir. C’est le coût des décisions qui sont coupées de la réalité et prises au mépris du bon sens.

Ces coûts sont directement supportés par les citoyens et les entreprises de l’Union européenne.Dans certains pays de la zone euro, l’inflation a déjà dépassé les 20 %. Je parlais de notre inflation, mais les pays de la zone euro ne mènent pas d’opérations militaires spéciales et l’inflation y a augmenté – jusqu’à 20 % pour certains d’entre eux. Les États-Unis connaissent également une inflation insoutenable, la plus élevée depuis 40 ans. »

Une guerre qui va durer 

Emmanuel Macron a appelé les Français à se « préparer » à ce que la guerre dure, prévoyant que « l’été et le début de l’automne » seront « très durs » en raison de la détermination de la Russie à reprendre le Donbass. Dans ce contexte, le budget des armées ne diminuera pas dans les prochaines années, « au contraire ». La France doit absolument réinvestir dans son matériel militaire, continuer d’embaucher dans l’armée et « continuer d’avoir une armée encore plus forte », a-t-il précisé.

Il a assuré que la France était en train de reconstituer son stock pour être à 100% de ses capacités de stockage à l’automne, et que l’État préparait cet été « un plan de sobriété » énergétique. « On va préparer un plan pour se mettre en situation de consommer moins », a déclaré le chef de l’État. « On va essayer de faire attention collectivement le soir aux éclairages qui sont inutiles, on va faire un plan pour les administrations publiques, on va faire un plan de sobriété dans lequel on va demander à tous nos compatriotes de s’engager, et on va faire un plan de sobriété et de délestage – c’est de gaz et d’électricité dont on parle là –, avec nos entreprises », a-t-il précisé.

La signification de l’ inflation a deux chiffres

Dés lors,que les États Unis allaient reprendre la démentielle création monétaire qu’ils avaient fustigé en adoptant le monétarisme pour conjurer la crise. Les mêmes causes se devaient de produire les mêmes effets dans un contexte aggravé par le manque intrinsèque de création de vraie valeur. Il s’ agit de la plus value extraite du travail humain toujours plus concurrencé par la « machinerie ». Il semblerait qu’ actuellement la baisse tendancielle du taux de profit n’ est plus compensée par la masse de profit, la « machinerie » a définitivement pris les commandes de la planète sans frontières sous la forme de la « machine à gouverner ».

La création monétaire abyssale des États-Unis n’ a pas échappé à Poutine :

« J’ai déjà mentionné le chiffre : au cours des deux dernières années, la masse monétaire aux États-Unis a augmenté de plus de 38 %.Auparavant, il y avait eu une telle augmentation sur des décennies, mais là, 38 % en deux ans, c’est 5,9 billions de dollars.En comparaison, seuls quelques pays dans le monde ont un produit intérieur brut plus important.

La masse monétaire de l’Union européenne, pour sa part, a également fortement augmenté au cours de cette période. Son volumea augmenté d’environ 20 %, soit 2,5 billions d’euros. »(Le Forum Économique International de Saint-Pétersbourg (SPIEF)

« Dans la tempête inflationniste, de nombreux pays en développement se posent une question raisonnable : pourquoi échanger des produits de base contre des dollars et des euros, qui perdent leur valeur sous leurs yeux ? La conclusion est qu’une économie constituée d’entités imaginaires est inévitablement remplacée par une économie de valeurs et d’actifs réels.

Selon le FMI, les réserves de change mondiales s’élèvent actuellement à 7 100 billions de dollars et 2 500 billions d’euros, et cet argent se déprécie à un rythme d’environ 8 % par an. Mais ils peuvent être confisqués et volés à tout moment, si les États-Unis n’apprécient pas la politique de l’un ou l’autre pays. C’est devenu très réaliste pour de nombreux pays qui conservent leurs réserves en devises dans ces monnaies. » (Le Forum Économique International de Saint-Pétersbourg (SPIEF)

Ce que confirme le directeur d’une banque suisse :

« Les experts estiment que dans les prochaines années, c’est une analyse objective, il y aura un processus de conversion des réserves mondiales – il n’y a tout simplement nulle part où les placer face à de telles pénuries – de monnaies qui perdent leur valeur en ressources réelles – d’autres pays le feront, bien sûr, comme la nourriture, l’énergie, d’autres matières Une autre mesure forte est passée relativement inaperçue dans les médias occidentaux: la Banque de Russie a repris ses achats d’or et ce à un prix fixe de 5000 roubles pour 1 gramme entre le 28 mars et le 30 juin. Cette opération permet à la Banque centrale non seulement de lier le rouble à l’or mais aussi de fixer un prix plancher pour le rouble en termes de dollar (puisque l’or se négocie en dollars américains). Le prix plancher est estimé à environ 80 roubles pour un dollar (5000 roubles divisé par 62 dollars par gramme d’or). Cette opération laisse entrevoir la possibilité d’un retour à l’étalon-or et ce pour la première fois depuis plus d’un siècle. De plus, avec le nouveau lien entre l’or et le rouble, une poursuite de la hausse du rouble pourrait se traduire par une hausse du prix de l’or. Rappelons que depuis l’annexion de la Crimée en 2014, la Russie, via sa Banque centrale, a été le pays qui a le plus acheté d’or. Elle possède aujourd’hui le cinquième stock le plus important au monde. Il est évident que ce processus alimentera davantage l’inflation mondiale du dollar. » (Pourquoi le rouble résiste,par Charles-Henry Monchau le 3 mai 2022, )

Ce qui explique en partie l’ embargo de l’ UE sur les exportations d’or de Russie

L’Union européenne a approuvé mercredi 20 juillet 2022 un embargo sur les exportations d’or de Russie et une série de mesures pour compléter les six trains de sanctions adoptés depuis le début de la guerre menée par la Russie en Ukraine

G.Bad juillet 2022

NOTES

1-L’or monétaire ne représentait plus, en 1968, que la moitié des réserves mondiales, contre les deux tiers en 1958. l’ économie mondiale manquait de liquidités, ce qui favorisera le passage de l’ étalon de change-or à l’ étalon dollar

2-En novembre 2002, Bernanke (qui n’était alors qu’un des gouverneurs de la Réserve fédérale) a prononcé un discours célèbre dans lequel il a déclaré qu’au cas où déflation aux Etats-Unis serait semblable à celle du Japon, le gouvernement américain devait imprimer de l’argent à l’infini (faire marcher la planche à billets) et le déverser par hélicoptère. Depuis on le surnomme « helicopter Ben ». Les marchés le soupçonnent d’être un inflationniste.

3-Michael Hudson, brillant économiste jusqu’à récemment tout à fait marginal (pas marxiste, plutôt hudsonien). Son livre Super imperialism (1972) décrivit si bien la stratégie américaine de l’« Imperial Management Through Bankrupcy » (gestion impériale par la faillite) que le gouvernement Nixon s’en servit pour affiner sa stratégie. Il démontra que « l’aide » américaine subventionnait les exportations américaines et rien de plus, ce qui obligea le ministère du Commerce à réviser et même à supprimer les statistiques sur lesquelles Hudson s’appuyait. Super Imperialism a été réédité en 2002 par Pluto Press (Londres) avec une nouvelle préface et un nouveau chapitre final qui remettent l’analyse à jour.

4-The Deficit Myth (Kelton, 2020) en Europe, la Théorie Monétaire Moderne (Modern Monetary Theory – MMT) s’est vue accorder une attention croissante dans les médias et par le public.

5-Ceux ci sont passés de 1 080 milliards de dollars en novembre dernier à 980,8 milliards de dollars en mai 2022. C’est une baisse de près de 100 milliards de dollars, soit 9 %. La dernière fois que la Chine a détenu moins de 1 000 milliards de dollars de titres du Trésor américain, c’était en mai 2010 (843,7 milliards de dollars).

6-Le Japon, le plus grand détenteur étranger de la dette publique américaine, a également récemment réduit ses avoirs. Au cours des six mois de novembre à mai 2022, il a chuté de près de 116 milliards de dollars pour atteindre 1,212 billion de dollars.

7-Le système de l’étalon-or a fonctionné de 1879 à 1914. Issu de l’échec du système bimétallique, il ne survivra pas à la crise économique et financière créée par la première guerre mondiale.

8-Les accords de Bretton Woods, furent conclus à la suite d’ une conférence tenue du 1er au 22 juillet 1944, entre quarante quatre pays membres, afin d’ instituer un nouvel « ordre monétaire » suite à la deuxiéme guerre mondiale. Ces accords sont à l’ origine de la création du fond monétaire international (FMI) et de la Banque internationale pour la Reconstruction et le Développement (BIRD)

Etalon monétaire international dont la création fut proposée par John Maynard Keynes lors de la conférence de Bretton Woods (1944) et qui aurait servi de référence pour déclarer les taux de change.

annexe 1-Sur un an, l’inflation dans l’Union Européenne est de presque 9%

Neuf pays de la zone euro ont enregistré un taux d’inflation à deux chiffres en juin (6 pays de la zone euro avaient enregistré un taux d’inflation à deux chiffres en mai) :
22% – Estonie
20,5% – Lituanie
19% – Lettonie
12,5% – Slovaquie
12% – Grèce
10,8% – Slovénie
10,5% – Belgique
10,3% – Luxembourg
10% – Espagne

Video sur le rouble et l’or

https://youtu.be/sh-4qdnPWP4

Une réflexion sur “L’ endettement international et l’échappatoire de la planche à billet (Gerard Bad)

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