7 de garde

Victoire électorale de Trump : La bourgeoisie américaine accélère ses préparatifs de guerre…

Le GIGC, 9 novembre 2024. Source: Victoire électorale de Trump : La bourgeoisie américaine va accélèrer ses (…) – Révolution ou Guerre

L’élection massive de Trump à la présidence américaine n’est pas un accident. Ni le résultat d’une crise ou d’une division profonde, encore moins d’un quelconque chaos, au sein de la bourgeoisie américaine et de son système politique et étatique. Ni d’une quelconque folie des électeurs ou encore d’une irrationalité s’emparant de la première puissance impérialiste mondiale. Sa large victoire montre au contraire la maîtrise de l’appareil d’État américain sur son jeu électoral et son système politique. Et si doute il pouvait éventuellement avoir, la reconnaissance immédiate par les démocrates et Kamala Harris elle-même de sa défaite et l’assurance de favoriser au mieux la transition présidentielle suffirait à les enlever définitivement.

L’élection – la ré-élection – de l’outrancier et vulgaire Trump n’est que l’expression de l’acuité atteinte par l’impasse économique et historique du capitalisme et des pressions qu’elle exerce vers la guerre impérialiste généralisée. Quinze ans après la crise financière de 2008, le niveau des contradictions économiques contraint à une concurrence toujours plus exacerbée, à une lutte à mort pour la survie de chaque capital national, ne pouvant à son tour que provoquer et aggraver les rivalités et la polarisation impérialistes.

L’élection de Trump indique que la course vers la guerre généralisée s’accentue et que la bourgeoisie américaine s’y engage avec détermination. Que les principales fractions de la bourgeoisie américaine estiment que le temps presse maintenant. Qu’elles se sont accordées sur l’urgence à accélérer l’adaptation de tout l’appareil militaro-industriel américain aux exigences des guerres « de haute intensité ». Qu’elles se sont accordées sur la nécessité d’accentuer encore plus les pressions sur la Chine, d’exercer un « containment » accru sur celle-ci et, en passant, sur les pays de l’Union européenne, par un redoublement de la guerre commerciale et du protectionnisme. Le temps presse pour la bourgeoisie américaine et il lui faut brusquer tant la société américaine elle-même que les « relations internationales », c’est-à-dire les relations impérialistes.

Vu le rythme pris par la spirale dans laquelle les contradictions économiques et les rivalités impérialistes projettent le monde capitaliste, il fallait, il faut, aller encore plus vite et de manière plus déterminée encore. La victoire électorale de Trump n’annonce donc pas de rupture fondamentale avec la politique démocrate menée depuis 2020. Ni une remise en cause de la politique économique d’ordre protectionniste visant, en particulier, à rapatrier sur le sol américain une grande partie de l’appareil de production des biens dits essentiels – « essentiels » à la guerre. Encore moins celle de la politique impérialiste américaine menée par les démocrates et Biden. De même que les Bidenomics et la politique impérialiste menée par Biden n’avaient pas remis en cause les mesures protectionnistes lancées par Trump lors de sa première présidence de 2016 à 2020 et sa focalisation impérialiste sur la Chine, les politiques économiques et impérialistes que va mener le nouveau gouvernement Trump ne vont pas rompre fondamentalement avec celles des années Biden. Il n’y a pas, il n’y aura pas, rupture. Il y a continuité, il y aura continuité autour des axes centraux de la politique impérialiste du capital américain. Par contre, et c’est là la raison du choix de Trump et non de Kamala Harris, la nouvelle présidence Trump annonce une accélération violente et brutale, assumée et décidée par l’impérialisme américain, de la guerre commerciale et des pressions impérialistes – et surtout militaire – d’une part ; et une accélération de la réorganisation de tout l’appareil de production industriel – déjà en marche avec les Bidenomics – et tout spécialement militaro-industriel. Cette « accélération » doit, paradoxalement, passer par un gain de temps pour pouvoir rehausser la production militaire au besoin de la guerre de « haute intensité », dont Trump et « l’isolationniste » parti républicain se sont faits les expressions.

Il y avait donc un véritable enjeu, ou « débat », sur les axes et priorités de la politique impérialiste américaine que cette élection présidentielle devait trancher. Fallait-il poursuivre la politique dite « internationaliste » des démocrates, à savoir mener de front la confrontation avec la Russie en Ukraine, avec l’Iran au Moyen-Orient et avec la Chine en Asie et mer de Chine ? Ou bien, adopter la politique dite « isolationniste » des républicains, à savoir se recentrer en priorité sur la question chinoise, laisser Israël mener ses guerres au Moyen-orient, l’Iran comme cible, et éventuellement laisser à Poutine le bénéfice de ses gains territoriaux en Ukraine ? Le débat n’était pas guerre ou paix, mais quelle priorité et quel rythme pour se préparer à la guerre.

Pour brusquer et provoquer, pour engager toute la sociète américaine dans la préparation décidée et dans la marche à la guerre, il faut un personnage disruptif, provocateur, outrancier, brutal et même vulgaire. Un personnage, aussi ridicule soit-il, qui incarne un pouvoir fort et qui n’hésite pas à se libérer des règles – comprises comme des entraves – démocratiques classiques. Pour la bourgeoisie américaine, le temps presse et il faut forcer le destin et les rivaux. Harris ne pouvait incarner ce personnage. Trump oui. N’a-t-il pas fait ses preuves dans ce registre il y a quatre ans ? La préparation de la guerre généralisée exige des personnels politiques adaptés et en capacité de se libérer des entraves et de la bienséance démocratiques et diplomatiques. « Parler de ses ennemis comme de l’« ennemi intérieur », utiliser l’expression vermin ou sang empoisonné sont des termes directement tirés des années 1930. » (Anne Applebaum, The Atlantic, November 7, 2024)

Le résultat des élections semble donc avoir tranché sur la stratégie à employer pour réaffirmer avec force et violence la suprématie américaine. La réélection de Trump correspond au choix à la fois d’une accélération de la préparation interne à la guerre et d’une accentuation de l’offensive de « containment » contre les rivaux impérialistes. Cette adaptation accélérée pourrait – nous employons le conditionnel, il ne s’agit là que d’hypothèses – passer pour l’impérialisme américain par :

- prendre acte de l’impuissance de l’Ukraine face à l’armée russe et stopper le soutien massif à la première ;

- laisser, autrement dit encourager, Israël étendre sa guerre régionale jusqu’à l’Iran.

Et certainement passera-t-elle par :

- imposer une guerre commerciale accrue à la Chine – et en passant à l’Europe déjà fortement affaiblie – par un protectionnisme brandi comme un étendard ;

- forcer les pays européens à assumer les frais du maintien de l’Otan, et en passant d’acheter des armements américains, au risque sinon d’un désengagement et de la fin du parapluie nucléaire américain.

La hausse des droits de douane, le protectionnisme affiché, ne peut que relancer la guerre commerciale mondiale. Elle ne peut qu’aggraver les difficultés économiques actuelles de la Chine et son sentiment d’être prise dans l’étau des politiques américaines ce qui, à son tour, ne peut que provoquer de sa part des réactions de plus en plus agressives, voire militaires – les pressions navales et aériennes chinoises ne cessent d’augmenter sur Taïwan. Tout comme elle effraie les bourgeoisies européennes, à commencer par l’Allemagne.

« La réélection de Trump (…) change également la donne pour les alliés de l’Amérique. » (Financial Times, nov. 6) La victoire de Trump a déjà provoqué, du moins accéléré, l’éclatement de la coalition gouvernementale en Allemagne. Et cela alors que la France est elle-même entrée dans une période d’instabilité gouvernementale. Dès son annonce, la victoire de Trump exacerbe les contradictions et polarise les positionnements des uns et des autres. Les enjeux se clarifient. Et les bourgeoisies européennes semblent avoir été saisies d’une véritable panique face à ce qu’annonce, pour le capital et l’impérialisme des européens, le deuxième mandat de Trump : la poursuite de l’affaiblissement historique, risquant de devenir définitif.

La véritable interrogation historique a trait au prolétariat américain et international et au niveau d’adhésion des grandes masses aux thèses nationalistes, racistes, xénophobes, etc. portées par Trump. Il en va de même, évidemment, quant à ces masses prolétariennes qui suivent les partis d’extrême-droite en Europe et ailleurs. Y a-t-il une dynamique particulière – et qui serait inquiétante – d’adhésion généralisée au nationalisme et à la guerre dans les grandes masses prolétariennes ?

Relevons qu’il n’y a pas eu de gain en nombre d’électeurs ayant voté pour Trump en 2024 par rapport à 2020. [1] Plus largement, et de tous temps depuis l’après-guerre, des fractions significatives de la classe ouvrière ont voté pour les partis de droite – de l’ordre de 30 % tant aux États-Unis qu’en Europe occidentale. En soi, le vote ouvrier pro-Trump ne donne donc aucune indication d’une nouvelle dynamique particulière d’adhésion à une véritable marche à la guerre qui romprait avec les années antérieures. De même, et dans l’autre sens, aucune indication significative peut-on tirer des expressions récentes de combativité prolétarienne. Rompant avec une atonie vieille d’une bonne décennie, cette combativité, même si toujours bien encadrée par les syndicats, s’est exprimée et développée depuis deux ou trois ans de manière significative aux États-Unis. Y compris au cours même de la campagne électorale, chez les dockers et à Boeing par exemple.

Là est la véritable interrogation. Là se situe la véritable équation. Surgira-t-il une fraction du prolétariat américain, ou bien encore international, en capacité d’offrir une alternative de classe, c’est-à-dire de lutte, et une perspective révolutionnaire, au terrain bourgeois de la démocratie et du nationalisme répugnant ? Et d’entraîner le reste de la classe ouvrière sur le terrain de la défense de ses conditions de vie et de l’internationalisme ; l’obligeant ainsi à s’éloigner de l’abrutissement et de l’ivresse du nationalisme, parfois haineux et raciste, et de l’ivresse collective des gueulantes USA ! USA !… ?

Accélération de la préparation à la guerre, avons-nous qualifié le sens de la victoire électorale de Trump. Dans l’équation de la bourgeoisie américaine, l’imposition au prolétariat des sacrifices nécessaires à la guerre commerciale et à la préparation à la guerre ne requiert-elle pas aussi une accélération, de gagner de vitesse toute velléité de réponse prolétarienne ?

Que ce soit vis-à-vis des rivaux impérialistes et du prolétariat, la victoire électorale de Trump signifie que la bourgeoisie américaine veut accélérer le tempo et gagner tout le monde de vitesse. Kamala Harris avait raison sur un point : ’we are not going back’ [Nous ne reviendrons pas en arrière].

Le GIGC, 9 novembre 2024

Robert Bibeau

Auteur et éditeur

5 réflexions sur “Victoire électorale de Trump : La bourgeoisie américaine accélère ses préparatifs de guerre…

  • Normand Bibeau

    En analysant l’élection de Trump et des républicains du seul point de vue «des préparatifs pour la guerre mondiale», le GIGC commet l’erreur tactique de l’analyser que du point de vue de la bourgeoisie, ignorant la perspective du prolétariat et des masses laborieuses à qui aucun choix véritable n’était offert et qui en fut réduit à devoir choisir ce qui lui a semblé être le moindre mal entre 2 fléaux: la face «gauche» ou «droite» de la dictature de la bourgeoisie.
    Ainsi, cette analyse occulte le fait que lorsque l’électorat américain vote pour «MAKE AMERICA GREAT AGAIN», il croit voter pour la réindustrialisation de l’économie, la création d’emploi payant, d’être soulagé de la pauvreté qui l’accable, de sa paupérisation par l’inflation, le chômage, l’itinérance et des guerres déclenchées par les «démocrates wokes de la gauche caviar», en somme, de tous les malheurs dont l’opprime la bourgeoisie pour s’enrichir.
    Plus encore, conscient que Killer Jos, le génocidaire grabataire et Kamala, la hyène ricaneuse idiote ont impliqué les U$A dans des guerres au 4 coins du monde, poussant l’ignominie et l’horreur jusqu’à provoquer une guerre en Ukraine et un génocide en Palestine, provoquant des coups d’État au Pakistan, en Indonésie, en Géorgie, en Moldavie, encourageant leurs fantoches taïwanais à provoquer une guerre avec la Chine et un nombre incalculable de conflits de part le monde, dès lors, lorsque Trump a «promis» d’en finir avec ces guerres comment reprocher à l’électorat U$ d’avoir voté pour lui et mépriser leurs bons jugements?
    Comme l’enseignait le président Mao, il faut combattre le négatif en développant le positif et saluer la volonté pacifiste de l’électorat américain est réellement révolutionnaire.
    Aussi, l’élection de l’«électron libre» Trump et de son marionnettiste Musk révèle la banqueroute et le mépris du prolétariat et des masses laborieuses pour les merdias mainstream de la «gauche caviar», ses journalistes stipendiés corrompus et leurs idéologues au service du capital comme l’a démontré l’humiliation que tous ces zélotes de la dictature «démocratique» de la bourgeoisie viennent de subir aux mains de l’électorat américain malgré leur campagne hystérique.
    Cette défaite électorale de «Killer Jos, le génocidaire grabataire et Kamala, la hyène ricaneuse idiote» aux mains de l’électorat a été son rejet de leur propagande mensongère de promouvoir les intérêts de la «classe moyenne» tout en l’appauvrissant massivement par des dépenses pharaoniques dans le complexe militaro-industriel et la militarisation accélérée de l’économie, des guerres mortifères et génocidaires au 4 coins de la planète et bien que n’étant pas la révolution prolétarienne espérée par le GIGC, cette «défaite» n’en est pas moins une «victoire» pour le prolétariat.
    D’ailleurs, quiconque a suivi les élections récentes survenues de part le monde au cours de la seule année 2024, élections impliquant près de la moitié de la population mondiale, ne peut que constater combien les merdias mainstream des milliardaires, leur propagande démagogique et leurs sondages patentés en faveur des propagandistes de la guerre furent mis en échec par les divers électorats conviés aux mascarades électorales bourgeoises.
    Ainsi, lors de l’élection européenne des 6 au 9 juin 2024, puis celle en Grande-Bretagne du 4 juillet 2024 et maintenant celles des U$A du 5 novembre 2024, les va-t’en-guerre au pouvoir furent tous défait par un électorat massivement opposé aux dépenses militaires et ce n’est qu’en raison de la nature profondément anti-démocratique et renégate des élus bourgeois que ces gouvernements persistent dans la voie d’une militarisation accrue de ces pays.
    Les révolutionnaires prolétariens doivent faire leur «mea culpa» et s’interroger sur les raisons qui font qu’ils sont incapables d’offrir une authentique alternative prolétarienne au prolétariat ce qui le condamne inexorablement à devoir choisir entre «blanc bonnet et bonnet blanc», entre le choléra et la peste, entre la face «gauche» et la face «droite» de la dictature impitoyable, mortifère et génocidaire de la bourgeoisie.

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  • robert bibeau

    Je me permets de aire remarquer que 140 millions d’américains ont voté, ce qui signifie que 190 millions d’américains n’ont pas voté dont 130 millions ayant droit de vote et qui ont CHOISIT de boycotter cette élection bidon ou l’argent des milliardaires était roi (10 milliards de dollars pour l’ensemble des élections à tous les niveaux de l’appareil étatique bourgeois.

    Le premier geste prolétarien de refus de cette dictature du capital sur la société consiste à répudier – dénoncer – démanteler et boycotter cet appareil électoral contre-révolutionnaire.

    Robert Bibeau

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  • keg

    https://wp.me/p4Im0Q-6rd – Quand la sécession fera sa guerre, les stats n’en seront que « meilleurement » partitionnés avec deux vice-présidents faisant chacun leur preuve pour être, enfin, seul en 2028

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  • vlad2

    Musk et ses alliés ont neutralisé le mécanisme de la triche en 2024, d’ou ces résultats :

    « Environ 40 % des Américains inscrits pour voter ne l’ont pas fait. Et le nombre d’Américains qui ne se sont pas inscrits est passé de 12 millions en 2020 à 19 millions. Ainsi, bien que Trump ait obtenu 51 % de ceux qui ont voté, il n’a en réalité obtenu que 28 % du soutien des Américains en âge de voter.

    « Trois Américains sur quatre n’ont pas voté pour Trump. Le véritable vainqueur de l’élection a été (une fois de plus) le parti du « non ». En effet, Trump a recueilli moins de voix en 2024 qu’en 2020. Mais Harris a perdu environ 11 millions de voix par rapport à Biden en 2020. »

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