Au travail, la femme tyrannise la femme. Alors, bon… haro sur le féminisme? Non: haro sur le capitalisme…
YSENGRIMUS — Une des correspondantes américaines d’Ysengrimus, Claudia [nom fictif], une femme affirmée, moderne, n’ayant pas froid aux yeux, professionnelle dans un organisme gouvernemental chez nos voisins du sud, m’écrit ceci, en une diatribe de colère contre sa petite cheffe. Connaissant ma vive sensibilité féministe, elle prend un minimum de précautions, mais bon, vous allez voir que c’est assez raide quand même (publié et traduit avec l’autorisation de l’auteure):
Ysengrim, I know that you will consider this terrible, but I would so prefer to work for a man than a woman. I so prefer to make a man look good than a woman, to work to enhance his image. I enjoy being servile to men. Women are petty imbeciles who deserve shit. They are tyrants always having to go over the fucking top to « prove » themselves. There was a story in the New York Times about executive women wearing CATHETERS because they are determined to not let their elimination requirements get in the way of work. Women have only made the working environment worse, more oppressive. They were better stuck in the home serving their men. I would love to be a retro wife, working all day to make everything comfortable for my husband, greeting him at the door in an apron and heels and kneeling to receive his cock. I am old fashioned that way…
[Ysengrim, je sais que ce que je vais te dire va sonner affreux à ton oreille, mais j’aimerais tellement plus travailler pour un homme que pour une femme. J’aime tellement plus cela, faire bien paraître un homme, oeuvrer à améliorer son image. J’adore être servile envers les hommes. Les femmes sont des sottes mesquines qui méritent bien qu’on les emmerde. Elles sont des tyrans qui doivent toujours en rajouter et en rajouter, putain, pour «faire leurs preuves». Il y avait ce reportage dans le New York Times à propos de femmes cadres portant des CATHÉTHERS, déterminées qu’elles sont de ne pas laisser leurs besoins d’évacuation des eaux troubles interférer avec le travail. Les femmes n’ont fait que détériorer le milieu du travail, le rendant pire qu’il était, plus opprimant. Elles étaient bien mieux, piégées à la maison, au service de leurs hommes. J’adorerais être une épouse rétro, me consacrant toute la journée au confort domestique de mon mari, l’accueillant à la porte en tablier et talons aiguilles et m’agenouillant pour recevoir sa bite. Je suis vieux jeu, dans ce genre…]
Pas question de remettre en question mon féminisme face à ce commentaire choc, légitime expression de colères et de frustrations diverses, venant d’une femme contemporaine n’ayant vraiment pas grand-chose de si vieux jeu que cela… Analysons un peu les vues cruciales de Claudia, femme professionnelle critiquant vertement les femmes professionnelles. Bon, les femmes petites cheffes sont tyranniques, intrusives et condescendantes, surtout envers les autres femmes, sur lesquelles elles assouvissent leurs compulsions compétitives en toute impunité «professionnelle». Je ne vais pas nier cela. Des tas de travailleuses me le rapportent avec une ferme et tonitruante constance. Les hommes petits chefs sont baveux aussi, hein, ne nous y trompons pas. Ce ne sont tout simplement pas exactement les mêmes travers qui jaillissent, dans le feu quotidien de l’action. Le fait est que c’est, en fait, la position de petit(e) chef(fe) même qui est en cause. Véritable cancer social méconnu, le petit patron, le contremaître, le supérieur hiérarchique immédiat, le micromanager, le garde-chiourme ancillocrate, le chef de service, retors ou abstru, carotte ou bâton, mielleux ou fielleux, est souvent la cause de bien des démissions. On ne quitte pas une grande fonction, on quitte un petit patron, est un aphorisme qui a pris corps longtemps avant que les femmes ne se consolident dans le milieu de travail. Le drame est donc, tout simplement, que, désormais, la portion féminine de l’humanité occupe aussi cette position archie-honnie et purulente de soumission aussi cruelle que paradoxale du cadre. La femme assume en toute simplicité sa position de cadre, ne l’améliore pas, ne la transforme pas, ne la réforme pas, ne la bonifie pas et la poisse des ses propres défauts. Il y a certainement, pourquoi pas, un style condescendant, intrusif ou tyrannique typiquement femme et nul doute que la position de petite cheffe ne manque pas, les mois et les années aidant, de mettre ces caractéristiques en saillie, comme l’eau du ruisseau annonce les cailloux. Triste mais vrai. Quoi de plus efficace, en effet, que la culture intime des femmes pour tyranniser des femmes?
Donc, souffrir pour souffrir, sous le faix d’un petit chef ayant axiomatiquement (car c’est l’axiome de la hiérarchie du travail capitaliste qui ne bouge pas ici) ses défauts de petits chefs, Claudia (croit qu’elle) préfère un homme. Il semble bien que la douceur riche et onctueuse de ses fantasmes socialement régressants atténue(rait) l’inévitable douleur de se faire, de toute façon, traiter comme un chien sur le lieu de travail. Chez les autres femmes dudit lieu de travail, Claudia ne trouve que compétition forcenée, jalousie mesquine, et une amplification professionnelle des vieilles chicanes et arguties de prérogatives féminines. Leur arrivisme est accentué par l’exemple drolatique du port de cathéters au travail, dans un environnement où les pauses-pipi sont d’évidence encore conçues au rythme de vessies plus amples. Détermination, résistance physique, sens du devoir, débrouillardise, tous ces traits féminins de bonne futaie sont distordus et gauchis par l’entreprise qui se les approprie et les asservit, en fabriquant de toutes pièces la docilité des travailleuses et la tyrannie des petites cheffes et, surtout, en se perpétuant derechef en elles.
Ma sorcière bien aimée attendant son époux devant son fourneau devient alors (pour Claudia, qui ne cuisine pas et est célibataire) une sorte de vision abstraite de nostalgie idyllique. Le bon sauvage de Rousseau, en quelque sorte, attendu, naturellement, que Rousseau ne s’était pas trop promené pieds nus dans les bois au moment de la formulation d’un tel modèle social illusoirement régressant. Bon sauvage de Rousseau dont Marx disait qu’il était le bourgeois contemporain fallacieusement isolé de ses contraintes sociales immédiates et transposé dans une forêt immémoriale de toc. Les femmes n’ont fait que détériorer le milieu du travail, le rendant pire qu’il était, plus opprimant. Naturellement, les femmes sont férocement méthodiques, terriblement efficaces et, conséquemment, l’atelier tertiaire capitaliste ne va pas se transformer en communauté sociale civilisée et progressiste simplement parce qu’on en gave les structures de personnes méthodiques et efficaces… Si l’atelier tertiaire décline, tourne en rond, gaspille ses ressources et entretient des tâches absurdes pour protéger les parasites qui s’y nichent, remplacer l’homme qui fait tourner ce genre de rouage par une femme compétitive qui vaut aller jusqu’au bout pour «faire ses preuves», ne rendra l’atelier tertiaire que plus «performant»… justement, dans sa logique propre, qui est celle de son pensum délirant et de son fonctionnement socialement fautif.
La preuve est faite. Claudia peut en témoigner. La présence de femmes dans la structure d’exploitation capitaliste ne change pas fondamentalement le caractère inique de ladite exploitation capitaliste. Pourquoi le ferait-elle? La femme n’est pas la démiurge de la société entière. La femme n’est pas plus libre que l’homme du mode de production dans lequel elle évolue. Elle est l’égale de l’homme ici aussi… Les divers féminismes, comme les divers environnementalismes, ne peuvent pas (ou plus) cultiver la croyance globalisante voulant que la solution historique à une discrimination circonscrite réformera la société. Le réformisme est une faillite. Il est fautif d’accuser des femmes (ou des hommes) de ne pas avoir révolutionné des structures que justement, elles endossent au point d’y devenir des intervenantes d’avant-garde. La nouvelle Ministre de la Santé iranienne, une femme, est fermement ayatolliste et islamiste… Ne vous y trompez pas. Elle réforme plus par ce qu’elle est que par ce qu’elle fait ou pense. Il est naturellement aussi fautif de rêver de renvoyer la femme dans sa cuisine. Le commentaire caustique de Claudia, du haut de son célibat, le montre bien: il est plus aisé de fantasmer le soi-disant paradis perdu quand une robinsonnade idyllique ne nous en fait voir que le côté faussement sexy. Régresser à la campagne pour fuir l’industrialisation, est une vieille lune illusoire, digne du Charlie Chaplin de Modern Times.
La montée des femmes dans les structures hiérarchiques capitalistes ne démontre qu’une chose. Le problème n’est pas avec les femmes… les femmes, que voulez-vous, le temps historique venu, quand on ne les entrave plus, elles grimpent dans ces structures, y «réussissent» et y deviennent des louves pour la femme (et l’homme)) aussi efficacement que les hommes sont des loups pour l’homme (et la femme). Le problème est avec ces structures mêmes. Ni hommes, ni femmes, ni enfants, ni petits personnages verts de contes anciens ou de science-fiction moderne ne pourraient les réformer. Elles poursuivent leur développement aveugle qui est celui d’une mutation et d’une crise. La frustration régressante de Claudia impose une analyse progressiste: haro sur le féminisme? Non: sur le capitalisme… Le féminisme (même le féminisme de droite, celui que nous impose la simili-militante médiatique), et surtout, la montée en force du pouvoir des femmes, est un des nombreux révélateurs du fait que le capitalisme ne peut pas servir l’harmonie sociale et que des changement sociaux plus profonds sont encore à venir. Ce n’est donc pas que les femmes font pire… c’est que le capitalisme continue sur sa lancée de faire pire (selon sa tangente spécifique) malgré l’apport des femmes. La distinction homme/femme continue de s’estomper à mesure que les emmerdements des deux dignes représentants de l’humanité s’accentuent et convergent dans l’entreprise. La femme petite cheffe n’a en rien fermé le cycle des changements sociaux fondamentaux auxquels nous nous devons tous.
Et ces changements sociaux fondamentaux viendront bien plus vite que Claudia ne retournera dans sa cuisine (sa cuisine réelle, de femme soumise d’autrefois. Sa cuisine de fantasmes, celle là, elle fait ce qu’elle veut avec).
Totalement d’accord avec le titre de cette chronique – HARO sur le capitalisme – ce mode de production – et ces rapports de production qui dévoient la femme petite gérante – camarade de peine de l’esclave salariée – elle-même esclave salariée aux chaînes dorées (parfois).
Mais je note simplement – que le féminisme petit-bourgeois est une composante – un instrument – utilisé par les courroies de transmission – les chiennes de garde et les chiens de garde de la bourgeoisie pour dévoyer le mouvement de résistance spontané des femmes salariées de ses objectifs anti-capitalistes – afin de l’orienter en faveur de réformettes ridicules comme de féminiser la parole lors d’assemblée militante, de compter les tours de paroles sexistes – bref d’amuser la galerie avec du rififi nihiliste anti-ouvriers-ouvrières (:-))
ProlétairEs de tous les pays, unissez-vous contre les petits-bourgeoises – et les petits-bourgeois «militants-militantEs de la go-gauche pervertiE»
Ceci dit, ces « réformettes » existent. Les houspiller n’est pas les décrire. Quand on ne les encadre pas théoriquement, elles nous dominent. La société bourgeoise sait se donner des tampons réformateurs limitant la volonté révolutionnaire. Se les masquer n’est pas jouer.
Analyse concrète de la situation concrète, mon Bobby…
@Paul Laurendeau
Je viens de consulter votre article, cher Paul, et j’avoue qu’il me trouble, non pas tant parce qu’il révèle une réalité que je ne connaissais pas mais surtout parce que je constate que les stéréotypes n’évoluent pas. Est-ce la seule faute du capitalisme si les femmes-hommes au pouvoir agissent elles aussi comme des loups ? Changeons le système et nous retrouverons les mêmes personnes en train d’ajuster leurs pulsions intérieures et désir de contrôle au nouveau système. Les mots changeront, les appellations feront croire à du neuf. Il est vrai que les mots ont un grand pouvoir et peuvent avoir un impact sur le comportement. Parfois.
L’être humain a créé les systèmes et non l’inverse. Donc, il est primordial que l’être humain élargisse sa vision et se comporte selon des critères intérieurs d’éthique et d’épanouissement plutôt que d’obéir à des modes d’action rigides qui servent de modèles de comportements pour réussir et se valoriser aux dépens des autres.
Votre article met en scène une cruciale réalité. Revenir en arrière, non jamais. Aller plus loin, oui, mais je souhaiterais qu’on mette l’accent dans le futur sur moins de hiérarchie et une plus grande vision du travail d’équipe. Après tout, une chaîne est constituée de plusieurs maillons et chacun joue son rôle.
Je suis femme avec une femme responsable de service, laquelle a « les dents qui rayent le parquet » au point de faire en sorte que je ne ne puisse pas faire évoluer mes compétences et ce, depuis le début, où elle m’a signifié que si je devais réussir le même concours qu’elle, je cite: « il faudrait que je dégage ».
Facile, dans la fonction publique, de se prévaloir de son grade pour manquer de respect et écraser les collaborateurs puisqu’il n’y a que celui-ci qui compte quoi qu’il arrive. Et ce sont les « hauts gradés » qui en sont les premiers responsables. On conseille d’avoir le courage de dire les choses mais c’est toujours le moins gradé qui a tort. Ou bien, il passe pour un emmerdeur qui tôt ou tard est laissé de côté. Et lorsque l’on rencontre un compréhensif, un qui veut bien nous écouter, il finit par nous dire qu’il n’y a rien à faire, que c’est comme cela alors que c’est une responsabilité qui lui incombe.
Dès que le directeur me confie une mission qui pourrait me permettre de progresser, d’être valorisée, elle s’arroge le droit de me prendre le travail, sans autre forme de procès, ou de s’immiscer dans le dossier, en me mettant sur le fait accompli ou pire en me « squizzant », en écrivant un courrier aux élus, histoire de se faire mousser, sans faire passer le courrier au chrono et sans l’enregistrer suivant le règlement en cours. Évidemment, je ne figure jamais dans la rubrique « affaire suivie par » et ne reçois pas de copie dans mon casier. Dans chaque projet, je ne suis là que pour m’occuper des choses qu’elle ne souhaite pas faire, donc les moins intéressantes.
Je précise que je suis plus diplômée et possède plus d’expérience professionnelle dans notre domaine d’intervention et son attitude en dit long sur le manque de confiance en elle, ce qui l’amène à jouer le tyran. Depuis trois ans, je fais les mêmes choses et je végète. Je m’ennuie à mourir. Trois années où j’ai tenté de communiquer à tous les échelons de ce problème, de mon mal être devant ce gâchis de compétences, de formation inexploitées, etc… En vain.
Cela n’est pas acceptable. Cela revient à nier les compétences de l’autre, à nier ce qu’il représente donc à nier une grande partie de son être. Aujourd’hui j’ai dit non à ses demandes, je refuse désormais de faire le sale boulot pendant qu’elle passe son temps à faire de la veille documentaire, en réunion afin de cultiver sa carrière. C’est une façon de me respecter et je ne reviendrai pas la dessus. C’est terminé.
C’est une grave erreur de management de mettre à des postes à responsabilités des personnes très jeunes, sans expérience professionnelle et surtout qui ne sont pas formées pour diriger des équipes.
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Non mais sans blague, qui peut croire en ce « témoignage » on dirait un vieux concentré de tous les clichés féministes de ces 50 dernières années.
Non « ysengrim » vous n’êtes pas « féministe », vous vous haïssez (si vous êtes un homme) et tout ce qui se rapproche de près ou de loin aux hommes et à l’idée que vous vous faites du masculin.
C’est quoi le masculin? Dis m’en un mot. Tu m’intrigues…
les juristes et politiciens zuniens ne savent même plus définir ce qu’est une femme ! alors un mec ….