Macron et Poutine se positionnent cyniquement comme des anti-impérialistes (sic)

Par Khider Mesloub.

Par Claudio Buttinelli cet article est disponible  en anglais, en italien et en espagnole ici:
Articles du 24 Aout 2023

Jamais dans l’histoire contemporaine les pays n’ont été gouvernés par des dirigeants aussi irresponsables que dangereux, aussi incapables qu’inutiles, aussi ridicules qu’insignifiants, aussi incultes qu’immatures, aussi idéologues que fabulateurs, aussi cyniques que psychopathes, aussi bellicistes que génocidaires. Jamais ils n’ont sabordé leur pays avec tant de cynisme, précipité leurs populations dans la paupérisation et la détresse psychologique, au nom de l’économie capitaliste irrationnelle, activant principalement au démantèlement de tous les services sociaux et la destruction des moyens de production, exception faite des capitaux financiers des dirigeants en constante augmentation.

Macron, président d’un pays impérialiste séculaire

« Les cons, ça ose tout ! C’est même à ça qu’on les reconnaît. » En l’espace de quelques jours, deux présidents de deux grandes puissances impérialistes auront osé prononcer des discours anticolonialistes.

Le premier, le président Macron, après son voyage en Nouvelle-Calédonie, colonie française depuis presque deux siècles, a fustigé depuis l’île de Vanuatu les « nouveaux impérialismes qui apparaissent et une logique de puissance qui vient menacer la souveraineté ».

Macron, président d’un pays impérialiste séculaire colonisant la Nouvelle-Calédonie, s’est positionné en défenseur de l’indépendance et de l’autonomie des États du Pacifique. Avec des mots aux accents anticolonialistes Macron a déclaré, avec culot : « L’Indo-Pacifique tout particulièrement, et peut-être l’Océanie plus encore en son sein, a une souveraineté et une indépendance qui est bousculée par le monde contemporain. D’abord, la prédation des grandes puissances. Notre stratégie indo-pacifique consiste d’abord et avant tout à défendre, par ses partenariats, l’indépendance et la souveraineté de tous les États de la région qui sont prêts à travailler avec nous. »

Pour rappel, tout comme la Nouvelle-Calédonie, le Vanuatu est une ancienne colonie française. Aujourd’hui, ce petit pays indépendant, qui compte 300 000 habitants, est l’un des plus pauvres du monde. Autrement dit, quoique colonie française jusqu’à 1980, cette île ne fut jamais développée par l’occupant, c’est-à-dire la France. Tout comme Mayotte, département aujourd’hui le plus pauvre de France. Pareillement pour les îles colonisées par la France (les DOM-TOM).

Auparavant, au cours de sa visite en Nouvelle-Calédonie, Macron s’en était pris aux indépendantistes calédoniens, accusés « de choisir demain d’avoir une base chinoise » sur l’ile. Macron a considéré qu’une indépendance de la Nouvelle-Calédonie livrerait l’archipel du Pacifique aux ambitions grandissantes de la Chine dans la région. En colonisateur décomplexé, Macron a rappelé que « la Nouvelle-Calédonie est française ». Les indépendantistes calédoniens ont reproché à Macron d’« instrumentaliser » la Nouvelle-Calédonie pour « servir sa stratégie » en Asie-Pacifique « d’équilibre entre la Chine et les Etats-Unis ». Pour la France, la dimension stratégique de cette région, qui va de l’île de la Réunion jusqu’à la Nouvelle-Calédonie, est primordiale. Par sa position géographique, son statut de puissance régionale, la France se défend par tous les moyens pour tenir son rang impérialiste contre les appétits chinois.

La Nouvelle-Calédonie est une colonie qui aura connu le même sort que l’Algérie à l’époque coloniale. En 1853, elle est proclamée colonie française. Jusqu’à la fin de la Première Guerre mondiale, le peuple kanak se rebelle régulièrement contre le pouvoir colonial français. Devant cette résistance du peuple kanak les autorités coloniales  incendient leurs villages, détruisent leurs plantations, encouragent l’émigration pour affaiblir démographiquement les Kanaks en vue de mieux les déposséder, procèdent à de nombreux massacres. Les Kanaks sont ainsi fréquemment victimes de répressions et de déportations. Dans les années 1960-1970, la France coloniale applique une politique d’incitation à une immigration massive de Français de métropole et d’Outre-mer et d’Européens vers la Nouvelle-Calédonie afin de rendre les Kanaks minoritaires sur leur terre natale. Ce qui va effectivement arriver.

Plus proche de nous, on se souvient comment la France coloniale avait mené son opération sanglante contre la grotte d’Ouvéa le 5 mai 1988. Ce jour-là, sur l’île d’Ouvéa en Nouvelle-Calédonie, des forces spéciales françaises et le GIGN prennent d’assaut la grotte dans laquelle des indépendantistes kanaks détiennent des gendarmes. Bilan : dix-neuf ravisseurs kanaks indépendantistes et deux militaires sont tués. À propos des kanaks, Chirac parlera de « la barbarie de ces hommes, si l’on peut les appeler ainsi ».

Quant au projet indépendantiste porté par les Kanaks, on sait comment la France coloniale s’y prend pour torpiller cette perspective émancipatrice nationale. Depuis plus 170 ans, la classe dirigeante unanimement colonialiste, de gauche comme droite, a toujours validé par la répression sanglante ou par le maquignonnage référendaire la négation du peuple kanak.

Poutine est présenté comme le prophète du nouvel ordre multipolaire, le Che Guevara  de l’anticolonialisme

 Quant à Poutine, dont le pays est connu pour avoir toujours été une prison des peuples selon la formule de Lénine, une « prison » impériale composée d’une mosaïque de nations victimes de la politique d’oppression et de russification forcée, il s’est présenté comme le défenseur des nations opprimées lors du sommet russo-africain organisée à Saint-Pétersbourg.

Le président russe Vladimir Poutine a affirmé le 28 juillet 2023, au dernier jour du sommet Russie-Afrique, que Moscou et les pays du continent s’étaient engagés à promouvoir un « ordre mondial multipolaire » et à lutter contre le « néocolonialisme »

Comme le disait Goebbels, chef de la propagande nazie : « Un mensonge énorme porte avec lui une force qui éloigne le doute ».

Poutine ose se positionner en anti-impérialiste au moment où il mène depuis le 24 février 2022 une guerre de conquête coloniale contre l’Ukraine. Poutine ne manque pas de toupet ! L’invasion de l’Ukraine est qualifiée, de manière euphémistique, « d’opération militaire spéciale ». Bien que des centaines de villes soient, en quelques mois, réduites en décombres, des centaines de milliers de civils ukrainiens massacrés, des millions acculés à l’exil ou déportés, selon la terminologie polémologique cauteleuse du Kremlin il s’agirait d’une routinière « opération militaire spéciale ». C’est vrai qu’il s’agit d’un peuple frère à libérer. Même au prix de son extermination. De la dévastation totale de son pays.

À écouter Poutine, ce partisan du néoslavisme, contre ce peuple frère slave, il ne mène pas une guerre impérialiste, mais une « opération militaire spéciale ». À l’exemple de l’État colonial et impérialiste français qui avait, plusieurs décennies durant, usé d’une terminologie cauteleuse pour qualifier la guerre d’Algérie (1954/1962). En effet, les autorités françaises avaient longtemps parlé honteusement d’« événements » d’Algérie avant de reconnaître tardivement qu’il s’agissait, en vérité, d’une véritable guerre menée contre le peuple algérien en lutte pour l’obtention de son indépendance. Et à l’exemple des multiples interventions militaires impérialistes étasuniennes exécutées, selon la formule propagandiste polémologique consacrée, comme des opérations chirurgicales, autrement dit sans victimes, ni dommages collatéraux, notamment en Irak, en Afghanistan, en Syrie, en Libye, en Serbie.

La guerre actuelle menée par la Russie contre l’Ukraine est une guerre coloniale, drapée dans des justifications anachroniques staliniennes : « dénazification », « démilitarisation ». En tout cas, drôle de manière de démilitariser et de dénazifier l’Ukraine : par une guerre meurtrière opérée avec des méthodes barbares, à observer l’ampleur des destructions des infrastructures et des massacres de centaines de milliers d’Ukrainiens.

Sans conteste, la guerre en Ukraine illustre l’irrationalité de toute guerre impérialiste à l’ère de la décadence du capitalisme. En effet, l’actuelle guerre menée par la Russie est dénuée de toute fonction économique et intérêt stratégique (au vrai la région ukrainienne occupée par la Russie, le Donbass, recèle des richesses agricoles et fossiles exceptionnelles). Pour preuve. Pour justifier et légitimer le déclenchement de la guerre contre l’Ukraine, baptisée par euphémisme « opération militaire spéciale », la Russie a argué défendre les russophones ukrainiens. Or, elle massacre des centaines de milliers de civils dans les régions habitées essentiellement par des russophones. Elle détruit des infrastructures et des immeubles situés principalement dans les zones russophones (toute la partie ouest contrôlée par le régime bourgeois de Kiev est curieusement épargnée). En effet, en l’espace de quelques mois de guerre, des villes entières ont été dévastées ; des millions de civils ont dû abandonner précipitamment leur domicile pour fuir les bombes ; des dizaines de milliers de soldats ont été tués, autant de civils massacrés ou blessés, traumatisés à vie ; d’autres subissent quotidiennement exactions et viols. Des milliers d’immeubles éventrés, des ponts détruits, des entreprises démolies, des usines chimiques bombardées, des centrales nucléaires gravement endommagées, mettant en danger la vie de millions d’Ukrainiens en cas d’accident du type de Tchernobyl.

Où est l’amour et le respect de la « Russophonie » ? Des régions russophones ? Quand toutes les régions russophones sont transformées en champs de ruines, en charniers.

Sans nul doute, avec sa politique belliciste, sa stratégie de la « terre brûlée », dépourvue de bénéfices économiques et intérêts stratégiques manifestes, la Russie colonialiste de Poutine illustre de manière éclatante l’irrationalité de toute guerre menée à l’ère du capitalisme impérialiste décadent.

Dans cette ère du vide politique, caractérisée par l’effritement de la pensée révolutionnaire, l’étiolement du projet émancipateur, Macron comme Poutine osent se présenter en anti-impérialistes, sans soulever ni protestation ni indignation. Comme dit l’adage : « L’hypocrisie est un hommage que le vice rend à la vertu ». Ces vicieux du colonialisme se parent de vertus anti-impérialistes.

Au pays des aveuglements politiques, les éborgneurs démagogues et belliqueux trônent comme des Saints souverains au sommet du pouvoir. Poutine est, dans cette période de vide révolutionnaire, présenté comme le prophète du nouvel ordre multipolaire qu’il imposerait au monde, non par la force de sa puissance économique anémique, mais par la robustesse de son armée haillonneuse.

Les peuples opprimés et le prolétariat mondial doivent recouvrer rapidement leur lumineuse vison politique pour mieux discerner leurs ennemis déguisés en amis.

Pour conclure, une mise au point.

Tous les idéologues algériens qui soutiennent l’invasion coloniale de l’Ukraine par la Russie sont définitivement disqualifiés pour appartenir au camp anticolonialiste et anti-impérialiste. Car ils ne peuvent pas dénoncer l’occupation coloniale de la Palestine par les sionistes, l’occupation coloniale du Polisario par le Maroc, et soutenir l’invasion coloniale de l’Ukraine par la Russie. D’aucuns nient l’existence de l’Ukraine. D’autres justifient son occupation par des arguties.

En somme, ils emploient les mêmes arguments spécieux et scélérats que les sionistes et les Marocains pour justifier leur respective occupation coloniale.

 

Khider MESLOUB

 

Robert Bibeau

Auteur et éditeur

11 réflexions sur “Macron et Poutine se positionnent cyniquement comme des anti-impérialistes (sic)

  • 24 août 2023 à 0 h 57 min
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    Khider Mesloub me déçoit beaucoup. Autant ce qu’il a écrit sur Macron est vrai (il y a tant à dire qu’il suffit de se servir), autant sa charge contre Poutine est à nuancer, car l’affaire de l’Ukraine est la faute assumée quasi-unique de la CIA depuis avant 2014. On sait ce que valent les consultations électorales, mais vu de multiples témoignages concordants, les Républiques à l’Est de ce pays sont peuplées de Russes voulant rester Russes. Y compris et surtout la Crimée. Les tortionnaires bandéristes et leurs « amis » washingtoniens n’y changeront rien.

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  • 24 août 2023 à 5 h 20 min
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    Il faut tenir compte que le Poutine d’aujourd’hui n’est pas celui d’hier. Il a compris que la vraie menace vient d’un petit groupe de milliardaires qui contrôle la planète par la corruption. Sa vision d’un monde multilatéral est juste et la Russie ne cherche pas à coloniser les pays libérés. Il faut rester lucide mais pour le moment il va bien dans le bonne direction.

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  • 24 août 2023 à 8 h 54 min
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    Sam ou Troll comme t’appelle Robert Bibeau, tu es vraiment pourvue d’aucune dignité ! Combien de fois as-tu annoncé, après avoir fustigé le Webmagazine Les 7 du Québec et ses commentateurs, ne plus revenir sur ce site, encore moins revenir pour commenter quelque article, et tu te ne tiens pas parole ! Tel un voleur, tu reviens sur le site pour commettre tes crimes idéologiques occidentalistes et monarchistes ! Cette fois, tu profites de mon billet pour pondre un commentaire en soutien de Macron et surtout de la colonisation du Sahara occidental. Après avoir glissé hypocritement quelques petits mots panégyriques à mon égard, relevant mon courage, tu déverses le reste de ta prose néocoloniale à soutenir la colonisation du Polisario, que tu considères appartenir au giron de ton maître le monarque du Makhzen. Tu profites également pour fustiger le régime algérien. Sache que tu fais partie de ces idéologues bourgeois que je dénonce à la fin de mon article. Toi, tu condamnes la colonisation de l’Ukraine par la Russie, mais tu soutiens la colonisation du Sahara occidental par le Makhzen, tes frères de sang et idéologiques réactionnaires. Pitoyable !

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    • 24 août 2023 à 15 h 26 min
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      @ SAM

      J’ai repiqué des extraits de ce post ou tu déclares : « Khider, Puisque tu le prends ainsi, alors saches que je t’emmerde autant que ton maître Robert bibeau… » tu ajoutes « Tout d’abord, en effet, j’ai deja annoncé que je ne suis pas intéréssé a commenter ou lire ce chiffon, et j’appliques figures toi cette règle a la lettre, convaincu que je suis de la folie de son proprio ! »

      Ces injures personnelles n’ont pas leur place sur un webmagazine de réflexion politique.

      Je vous prie de vous en abstenir

      Merci de votre compréhension.

      Robert Bibeau, producteur et éditeur.

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  • 24 août 2023 à 22 h 09 min
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    Au revoir Sam, n’oublie surtout pas que la source des ennuis est depuis trois siècles au moins la City de Londres et ses banquiers : tout est là.

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  • 25 août 2023 à 0 h 09 min
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    Bon, Sam, nous prenons acte. Je me permets de poser une question, qui n’est sans doute pas anodine. Le problème du Polisario ne serait-il pas le souverain alaouite ? Souverain aussi despote que la dynastie saoudite ? Au moins les Algériens n’ont-ils pas cette tare, depuis que le Dey d’Alger a été déposé (et le Dey n’était pas roi). Comme le disait Churchill, « La démocratie est le pire des systèmes, à l’exclusion de tous les autres. »
    .
    Ceci dit, cet homme d’État certainement controversé s’est-il bien gardé d’ajouter que, bien entendu, la Grande-Bretagne N’EST PAS une démocratie (même si le roi n’a apparemment aucun pouvoir : il s’agit d’une oligarchie depuis l’octroi sous la menace par Jean Sans Terre de la Magna Carta en 1215. Cette oligarchie s’entretient grâce aux pépinières de despotes que sont les Public Schools genre Eton (qui selon la malignité anglaise sont justement des écoles privées).
    .
    En fait, il faut se rendre à l’évidence : seule l’anarchie égalitaire est une vraie démocratie, où chacun détient une part de décision vraie (on ne parle pas des élections bien entendu). Donc « le roi du Maroc » ne saurait prétendre à une souveraineté sur le Sahara de l’ouest, ce qui ne veut pas dire que les habitants de celui-ci ne puissent pas, librement et sans contrainte, rejoindre le Peuple marocain pour décider ensemble de leur avenir. Sans despote (presque) inamovible au sommet.

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  • 25 août 2023 à 0 h 27 min
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    Biern d’accord avec ce fait : l’oligarchie algérienne n’a pas grand-chose à envier à la monarchie marocaine. Ils en sont encore dans un système colonial, où ce sont eux les colonisateurs ! Ceci dit, on peut remarquer qu’en Europe c’est pareil : les [décideurs] sont les colonisateurs de leur propre pays, dont il n’est pas certain qu’ils se rendent compte qu’ils y sont nés. Qu’est macron, si ce n’est un sous-sous-Bujault ?
    .
    Bon vent !

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  • 25 août 2023 à 9 h 13 min
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    Cette guerre est faite contre le colonialisme occidental et l’expansion de l’Otan, l’Occident veut continuer de coloniser toute la planète comme elle le fait depuis des siècles avec son bras armé l’Otan (entre autre), Poutine a dit Niet et il aura été patient, si cette guerre est meurtrière c’est bien à cause de l’Occident qui arme l’Ukraine sans compter car sans cela cette guerre serait terminé depuis longtemps, l’Occident a semé la discorde, elle en récolte le désordre.

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  • 25 août 2023 à 13 h 30 min
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    POUR DU PARTI PRIT C EST UN CHEF D OEUVRE

    ETES VOUS ALLEZ EN UKRAINE ???? COMBIEN DE TEMPS Y AVEZ VOUS PASSE ET QUELLES VILLES AVEZ VOUS VISITE

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